Le Deal du moment : -23%
EVGA SuperNOVA 650 G6 – Alimentation PC 100% ...
Voir le deal
77.91 €

avatar
Invité
Invité


Bien que cela lui coûtait fortement de l'avouer, Vastraya devait bien avouer que la Cour Draconique de Valyria faisait son petit effet. Certes les grandioses statues de dragon manquaient encore de cette patine si particulière que seul le temps qui passe savait procurer et qui revêtait d'une aura auguste tout ce qu'elle touchait. Mais à part ça force était de constater que le Sénat n'avait pas grand chose à envier à certains halls parmi les plus luxueux du Palais Impériale de Ghis.

" Ça aurait dû nous mettre la puce à l'oreille. " Grommela l'ambassadrice du Vieil Empire dans sa barbe.

Il y avait clairement eu une sacré négligence de la part des courtiers et diplomates ghiscaris si ce n'était que maintenant que l'Empire découvrait l'étendu de l'influence et du prestige de son nouvel ennemi. Tant d'opportunités manquées... Et la voilà maintenant obligée de ramper devant les Valyriens et leurs drakes pour réparer les pots cassés. Le regard de l'ambassadrice croisa les rubis étincelants tenant lieu d'yeux à une des gigantesque sculptures représentant un dieu qu'elle ne connaissait pas et ne pu s'empêcher de frissonner en son fort intérieur.


Comment avons-nous pu seulement tolérer qu'une nation d'éleveurs de dragon s'épanouisse à nos frontières ?


Peu importe. Elle détourna le regard et s'avança la tête droite à travers le hall interminable. Aujourd'hui était placé sous une conjoncture favorable et c'est tout ce qui comptait. Si Conseil comme Sénat étaient encore très froids à son encontre elle s'était attendu à ce que la faction mercantile fasse rapidement un geste à son encontre. C'était un premier pas. Elle avait aujourd'hui rendez-vous dans ses bureaux avec le sénateur Vaegon Tergaryon. Bien qu'elle se doutât que c'était l'intérêt personnel qui le poussait à la contacter, et elle n'aurait su en aucun cas lui donner tort, tisser un premier contact avec une grande famille pouvait lui ouvrir bien des portes.

Et à propos de porte il était temps qu'on la conduise à la bonne. Vastraya était impeccablement à l'heure mais n'avait pas grande idée d'où se rendre.  Elle savait que les bureaux privés se trouvaient à l'étage supérieur mais doutait d'avoir le droit de s'y rendre seule, pas plus qu'elle n'avait envie de se perdre dans un dédale de couloirs. Elle héla donc un courtier portant les armes du Sénat et lui commanda de transmettre au Sénateur Tergaryon la nouvelle de son arrivée.

En attendant le retour de la commission elle s'éloigna de son scribe et se dirigea seule vers le large bassin immaculé qui trônait au cœur du hall. Inconsciemment son regard remonta le long des vignes du marbre jusqu'à reconnaître ce que la fontaine représentait. Une Harpie défiant un Dragon...

" C'est très à propos... "

Depuis quand cette sculpture était là ? Depuis quand Valyria ambitionnait de défier le Vieil Empire ? Pourtant la harpie n'était pas représentée dans une attitude de soumission ou de défaite : c'était une créature féroce apte à donner du fil à retordre à son adversaire ailé. Un instant figé dans le temps où les deux êtres se jaugeaient, chacun encore capable de prendre l'avantage sur l'autre.

Un égal tout autant qu'un rival ?


Des bruits de pas dans sa direction tirèrent Vastraya de sa rêverie.
Elaena Tergaryon
Elaena Tergaryon
Sénatrice


Ce qui fait tourner ce monde...


Drivo, Cité de Valyria ֍ Début du Troisième Mois de l'An 1066

« Ah te voilà enfin ! »

D’un pas empressé mon père se dirigeait dans ma direction, à peine se trouvait-il à portée de main qu’il s’emparait de mon poignet sans douceur pour me tirer à sa suite. Trottinant avec difficultés à sa suite pour éviter de perdre un bras dans la bataille, je tentais désespérément de l’interrompre pour réclamer le maigre plaisir de marcher à mon propre rythme… Sans grand succès.

« … quand je pense à tout ce qu’il te reste à apprendre ! Et toi tu pars voler ! »

Il ouvrait une porte à la volée, me jetant presque littéralement dans la pièce où se trouvait déjà mon cousin Maegon.

« Tu n’as plus la liberté que tu avais, Elaena. Si ton cousin Maegon ne te l’a pas encore fait comprendre alors sans doute devra-t-il se montrer plus strict. »

Maegon restait silencieux, visiblement agacé par la remontrance sous entendue à son égard.

« Nous recevons la nouvelle ambassadrice de Ghis à la fin de la journée. Tu vas donc consacrer les prochaines heures à apprendre tout ce que tu dois savoir à propos de Ghis et de la guerre qui va prendre fin. Ensuite tu me rejoindras pour la rencontre. »
« L’ambassadrice… je pensais que… »
« … Elle vient d’être envoyée. Vastraya… Amasis, oui c’est cela, Amasis. Elle est originaire d’Astapor. Son père, à priori, un membre reconnu de la cour de l’Empereur. A savoir pourquoi cette femme a été choisie pour nous être envoyée, ses intentions, ses ambitions personnelles… C’est un mystère. »
« Pourquoi la rencontrer au juste ? »
« Si tu dois poser des questions stupides, Elaena, attends au moins que j’ai passé la porte. »
« Peut-être devrais-je ne pas poser de question du tout alors. »

Il s’arrêtait un instant, respirant profondément pour retrouver son calme, visiblement déstabilisé par ma décision de lui répondre et de tenir tête à son emportement injustifié. Durant un court instant j’avais osé relever les yeux vers lui, confrontant sa réaction inhabituelle avec un air aussi froid que le sien était furieux. Les baissant à nouveau, je gardais le silence, profitant du silence retrouvé pour garder en tête toutes les informations qu’il avait fourni à propos de l’ambassadrice que nous devions rencontrer. Il restait un instant à me regarder frotter mon poignet, les yeux fixés sur le sol pour éviter de le provoquer à nouveau par un regard qu’il pourrait estimer mal a propos. Visiblement calmé, il s’approchait finalement pour déposer sa main sur mon épaule d’un geste doux et mesuré.

« Pardonne-moi, ma fille. Cette rencontre est source de tension. Prépare toi au mieux, tu seras excellente j’en suis sûre. »

Un signe de tête en direction de Maegon, et il repartait avec moins de fracas qu’il était arrivé, me laissant, comme à l’habitude, enfermée entre quatre murs avec pour seule présence celle de mon cousin. Il n’était guère nécessaire d’être mage pour déceler l’agacement dans le regard de Maegon. Il était d’une nature imprévisible, plutôt charmant, voire un peu trop à mon goût, au quotidien, il pouvait être cinglant et blessant d’une minute à l’autre. Après plusieurs semaines d’étude régulière à ses côtés, j’étais toujours incapable de définir s’il m’appréciait ou me vouait une haine farouche. Concentrée sur la douleur à mon poignet qui disparaissait petit à petit, je l’entendais à peine s’approcher, ne réalisant sa proximité qu’en apercevant la coupe de vin qu’il me tendait.

« Rien que le vin ne puisse faire oublier. Allons, tu as une ambassadrice à rencontrer. »

***
« Sénateur, l’Ambassadrice de l’Empire de Ghis est arrivée. »
« Mène là à nous. »

Le bureau privé de mon père avait toujours été une source d’admiration pour moi. Ce qui lui servait en bureau, en réalité, était la pièce de réception, lui permettant d’accueillir ses homologues sénateurs ainsi que des invités de marque, comme aujourd’hui. L’immense pièce était ornée de fresques rappelant les beautés d’Oros, réalisées à la demande du prédécesseur de mon père dans ce bureau, un membre de la famille de ma mère, de statues décorées de pierreries et perles précieuses, des meubles richement ornés de tissus précieux provenant de contrées lointaines. Les petites pièces attenantes étaient plus simples, dédiée à l’usage privé du sénateur. C’était d’ailleurs dans l’une de ces pièces qu’il se retirait pour travailler sans être dérangé, ou qu’il recevait ses partenaires d’affaire les plus proches lorsqu’ils étaient de passage à Valyria.

Dans un coin de la grande pièce d’apparat, était installé un petit salon de réception où nous étions installés. Il était coutume d’offrir rafraîchissements et toute sorte de sucreries et fruits aux personnes invitées à rencontrer le sénateur, et nous n’aurions pu être plus généreux, les nombreux plateaux disposés sur les dessertes donnait l’effet d’un banquet sur le point d’être initié. Debout, mon père avait revêtu la toge blanche à liseré rouge traditionnellement portée au sénat. Ce n’était pas la première fois que je l’apercevais dans cette tenue, mais alors que je l’observais dans toute sa splendeur je réalisais que je n’avais jamais vraiment pris la mesure de son influence à Valyria… ni de la lourde tâche qui m’avait été confiée. Je m’étais toujours sentie petite à ses côtés, à cet instant je me sentais non seulement petite, mais insignifiante et incapable. Vêtue d’une robe blanche ceinturée d’or, je me donnais l’impression de ressembler davantage à une vierge offerte au rêve de Meleys qu’à une future sénatrice. Il fallait pourtant bien se rendre à l’évidence, vierge je n’étais plus, mais sénatrice je le deviendrai… Il n’y avait pas de retour en arrière, pour l’un comme pour l’autre.

« Ambassadrice Amasis, bienvenue à Valyria. »

La femme qui entrait n’aurait pas pu être plus différente des valyriens, tant par son apparence que par l’aspect de sa tenue. Elle était aussi brune que j’étais blonde, sa peau aussi foncée que la mienne était claire, sa posture aussi forte que la mienne était délicate. Drivo ignorait peut-être les raisons ayant poussé Ghis à envoyer cette femme, mais il suffit de poser les yeux sur elle pour comprendre qu’elle avait été un bon choix. Elle était de ceux que la vie avait façonnés à coup d’obstacles et de souffrance, créant une cuirasse assez solide pour plonger dans l’antre du dragon quelques jours à peine après la fin d’une guerre terrible.

« C’est un plaisir de vous rencontrer enfin. Voici mon héritière, Elaena Tergaryon.»
« Ambassadrice. »

J’accompagnais mon salut d’un hochement de tête respectueux et d’un sourire poli. Il y avait bien une chose qu’on ne pouvait retirer à Vastraya Amasis, son exotisme était matière à intriguer. A vrai dire, je ne parvenais pas à savoir si c’était bien son exotisme qui m’intriguait, ou bien quelque chose qui marquait son regard et que je ne savais qualifier. Avec quelques paroles chaleureuses, mon père l’invitait à prendre place dans le salon, faisant signe aux esclaves d’apporter les rafraichissements et quelques plateaux de fruits. Il se murmurait que Vastraya Amasis était la fille d’une esclave étant parvenue à ravir le cœur d’un haut dignitaire de l’Empire… Qu’il devait être étrange de se savoir fille d’esclave et d’être servie par ces hommes et ces femmes que Valyria avait ravis au vieil empire.

« Êtes-vous à votre aise à Valyria, Ambassadrice ? Votre palais est-il suffisamment confortable ? »

Je n’ignorais pas les ambitions de mon père quant à cette rencontre, mais il fut très vite clair pour moi que mon rôle avait été défini sans me consulter, et j’avais décidé de l’endosser aussi bien que possible. Sans doute jugée encore trop ignorante pour entrer dans le vif du sujet, il était attendu de moi que je sois la voix courtoise de cette conversation. Ce n’était pas si pénible. N’était-il pas, après tout, essentiel de connaître son interlocuteur avant d’avancer ses pions ?



♜♜♜


____________________________________________________________

Valar imāzissis
Elēni ñuhe jogeltigon sylutis, sepār jevon jogeltigon sylussi. Yn kostosy daor. Jēdar yno toliot. Tegon yno gō. Perzys yno iemnȳ. by anaëlle.
avatar
Invité
Invité


L'inconvénient d'avoir un hall avec une voûte si haute, c'était que les escaliers pour atteindre ne serait-ce que le premier balcon étaient interminables. Certes c'était un problème qui existait également à Ghis mais à la Cour Impériale il était de bon ton de se faire monter par des porteurs. Les escaliers étaient surtout là pour le décorum... Vastraya prit tout son temps pour grimper les marches une à une, quitte à faire piaffer d'impatience le courtier venu la chercher. Tout plutôt que de se répandre en sueur et en gémissement sur le marbre. Au dernier degré du vaste escalier d'apparat succéda un corridor haut de plafond et aux murs recouverts de lourds drapés de velours écarlate. Sans les larges fenêtres dorées qui ouvraient le corridor vers l'extérieur on aurait pu se croire dans les entrailles de quelque bête fabuleuse et s'attendre à tout moment à ce que ces drapés, si semblables à des poumons à vif, se mettent à pulser au rythme d'un cœur de titan. Enfin, après un temps qui lui parut interminable à parcourir ce dédale, ils arrivèrent au bureau du sénateur Tergaryon.

Le contraste entre le décorum du bureau et la pompe des couloirs était saisissant. De vastes fresques ornaient les murs, langoureusement caressé par la lumière qui filtrait à travers les hautes fenêtres. Des statues chargées de pierreries scintillantes s'alignaient entre les meubles en bois précieux, célébrant la gloire de quelque ancêtres estimables.

C'est un peu tape-à-l'oeil...

Disons pas dans ses goûts personnels. Vastraya aimait le luxe mais considérait que l'élégance était dans la sobriété. Il était plus facile et efficace de mettre en valeur une pièce coûteuse lorsque le regard des invités n'était pas constamment saturé. Toutefois elle connaissait à Ghis d'autres nobles qui auraient été vert de jalousie du bureau de Vaegon Tergaryon. Enfin, en supposant qu'ils l'admettent... A défaut d'apprécier l'écrin Vastraya comprenait le message :  les Tergaryon étaient anciens, puissants et fiers d'une longue histoire familiale. Le sénateur lui-même trônait au milieu de son salon en tenu de cérémonie comme s'il était lui-même la pièce d'honneur dans cette composition. A ces côtés une jeune femme blonde que le maître des lieux ne tarda pas à présenter comme son héritière. Intéressant...


" Sénateur Tergaryon, c'est un plaisir d'accepter votre invitation... Mademoiselle... "

Son maintient et son attitude étaient impeccable. Peut-être ses mouvements étaient-ils un peu mécaniques... Nerveuse ? Agacée ? Vaegon ne l'avait certainement pas conviée à cette réunion pour rien. Son propre père, le Premier Né des Amasis, l'avait souvent prise à ses côtés lors de réunions mondaines ou négociations politiques. C'était une bonne méthode pour apprendre les ficelles du métier.


Et bien petit dragon, jusqu'où ont poussé tes crocs ?

Satisfaisant..." Répondit Vastraya en prenant place sur une confortable banquette. Oh ça n'a pas la prestance d'une de ces maisons ancestrales des hauts quartiers mais je suis venu avec mes meubles. Un peu de peinture et de bon goût et je retrouve un peu de chez moi. "


Les maisons bourgeoises valyriennes étaient construites autour d'un atrium central souvent occupé par un plan d'eau. Dès son arrivée l'Ambassadrice s'était attaché à en faire un jardin digne de ce nom avec des plantes de son pays. Elle avait fait abattre une partie du toit pour construire une terrasse ouverte surplombant l'atrium, une manière d'essayer de retrouver les esplanades à niveau d'Astapor. La plupart des murs avaient été peints en rouge avec le même objectif. Plutôt que des fresques la Guivre avait opté pour des frises géométriques ou florales. Oui, c'était un cocon rassurant. Si seulement les dragons volaient moins souvent...

" Je pense organiser une soirée à l'occasion. Enfin lorsque ma présence échauffera moins les esprits... Bref. "

Elle s'empara délicatement d'une coupe en verre ciselée que lui tendit un esclave en baissant bien bas la tête. Provenait-il du butin de la guerre ? C'est fou à quel point Valyria s'était habitué vite à l'esclavage... Peu importe, elle trempa ses lèvres dans le liquide ambrée.

" Et bien justement, puisque j'évoquais le sujet. Comment est l'humeur du Sénat vis à vis du Vieil Empire ? La faction mercantile n'a pas perdu son temps, je suppose que cela fait couler de l'encre..."

Elle reposa sa coupe sur le plateau d'argent et braqua son regard en direction de son interlocuteur et de sa fille, un léger sourire aimable sur les lèvres.
Elaena Tergaryon
Elaena Tergaryon
Sénatrice


Ce qui fait tourner ce monde...


Drivo, Cité de Valyria ֍ Début du Troisième Mois de l'An 1066

Amaya Amasis n’était pas de ceux qui retiennent les coups, et il était aisé de déceler l’air de jugement qui s’était emparé de ses traits lorsqu’elle était entrée dans la pièce. Ne pouvait-on cependant s’attendre à ce que le choc des cultures soit largement prégnant. Et il fallait garder en tête que l’ambassadrice Amasis venait de Ghis, et que qualifier le Vieil Empire de fier et ronflant aurait été bien faible. Depuis des siècles l’empire ghiscari avait regardé de haut son voisin valyrien, le rappelant sans hésiter à ses origines moins nobles que son présent. Pourtant, la grande erreur du Vieil Empire avait été de rester aveuglé par sa fierté et sa prétendue supériorité. Englué dans sa prétendue gloire, il avait été trop fier pour regarder avec lucidité la puissance grandissante de son voisin valyrien.

« Satisfaisant… Oh ça n'a pas la prestance d'une de ces maisons ancestrales des hauts quartiers mais je suis venu avec mes meubles. Un peu de peinture et de bon goût et je retrouve un peu de chez moi. »
«  Oh mais Ambassadrice, vous connaissez sans doute ce que l’on dit, le bon goût est le grand ennemi de l’art. Cependant je ne peux que comprendre la volonté d’emporter avec soi quelque chose de son foyer. »
« Je pense organiser une soirée à l'occasion. Enfin lorsque ma présence échauffera moins les esprits... Bref. »
« Il ne fait aucun doute que nous serons ravis de célébrer votre arrivée en bonne et due forme. Après tout, il doit y avoir une vie après la guerre… Du moins je… »
« Comme le laisse entendre ma fille, Ambassadrice, vous constaterez qu’il n’y a aucune tension qu’une fête valyrienne ne puisse apaiser. »

Resté longuement silencieux, mon père m’avait coupée d’un air chaleureux, pensant sans doute qu’il m’avait laissé suffisamment de liberté d’action pour le reste de l’entretien. Je répondais par un sourire, me saisissant d’une coupe disposée à mon intention pour y tirer une gorgée de courage. N’était-ce pas cela qu’il attendait de moi ? Que je sois divertissante ? Ou bien me fallait-il en prime être idiote et creuse en parlant du beau temps ? Je me rappelais sans peine de l’attitude de ce même père lorsqu’il s’agissait d’Aenar, il l’encourageait à être son propre homme, à affirmer ses idées et se conduire comme s’il était d’ors et déjà devenu sénateur… sorte de répétition générale avant le jour j. Il n’était cependant pas compliqué de comprendre les réticences de ce même père. Il avait consenti à faire de moi son héritière tout en cadenassant l’affaire au maximum. Je n’avais aucune marge de manoeuvre autre que celle de suivre les ordres, les siens, ceux de Maegon et même ceux de Maekar lorsque c’était à propos. Il avait été élevé dans une famille profondément imprégnée de la culture du sud, cette même culture qui rejetait en bloc les femmes au sénat, ou encore les mariages hors de la famille. Cette culture avec laquelle il avait grandi mais qu’il avait du reléguer au second plan en épousant sa nouvelle famille.


« Et bien justement, puisque j'évoquais le sujet. Comment est l'humeur du Sénat vis à vis du Vieil Empire ? La faction mercantile n'a pas perdu son temps, je suppose que cela fait couler de l’encre… »

Si j’avais voulu participer à la conversation, il m’aurait sans doute fallu assommer mon père à l’aide de la coupe que je portais à présent à mes lèvres d’un air concentré.

« Ambassadrice, l’humeur du Sénat est changeante, autant que les circonstances. La période est évidemment troublée, Ambassadrice, les plaies encore… à vif… »

Alors qu’il semblait déterminé et ses pensées tout à fait organisées, le regard de mon père se perdait dans la contemplation d’un point invisible sur sol de la pièce de réception. Cela faisait trois ans maintenant que nous avions perdu Aenar, et il aurait été bien sous-estimé de prétendre que mon père en était encore affecté. Il n’avait jamais vraiment accepté la réalité de la mort de ce fils tant aimé et si prometteur. La fin de la guerre et le retour des hommes du front seraient sans doute à l’origine d’une prise de conscience douloureuse. Peut-être encore se convainquait-il qu’un jour son ainé passerait le pas de la porte, et que tout cela n’avait été qu’un mauvais rêve ? Le silence qui s’instaurait entre nous devenait pesant, l’ambassadrice de Ghis restant elle-même silencieuse face à cette étonnante confession silencieuse. Mon père avait toujours eu une maîtrise parfaite de lui-même, et il était surprenant de le voir baisser la garde à un moment aussi… inopportun.

« … Mais il serait bien imprudent de ne pas préparer l’avenir. Une guerre se termine, nous devons préparer la paix pour la protéger. S’il nous faut faire couler de l’encre aujourd’hui pour empêcher le sang de couler à l’avenir, alors qu’il en soit ainsi. »

Je prenais une gorgée, consciente des regards en coin que me lançait mon père. Je le connaissais suffisamment pour me douter que sa baisse de régime précédente l’avait laissé mortifié. Je n’avais guère trouvé d’autre solution que celle de prendre la relève et tenter de sauver la face devant une femme qui n’était pas là pour compatir à nos malheurs mais bien jauger de ceux qui seraient ses interlocuteurs pour les mois, voire les années, à venir.

« Votre position est loin d’être confortable, Ambassadrice, mais vous devez être à Valyria pour travailler à la paix, au nom de votre Empereur… N’est-ce pas ? Après quatre années de guerre, et une fois les émotions passionnelles de la victoire passées, cet objectif sera celui des valyriens. C’est déjà le nôtre. Préparer l’avenir.

Je buvais une gorgée de vin, sans pour autant lâcher des yeux le regard de l’ambassadrice.

Après tout, l’histoire a su nous démontrer que rester arcbouté sur ses gloires passées mène inexorablement à la défaite.  »

Je ne m’étais pas interrompue, oubliant quelques instants que mon père était à côté et sans doute galvanisée par un silence que j’interprétais comme un assentiment discret. J’avais été directe, mais non moins directe que l’ambassadrice Amasis qui ne s’était pas perdue en élucubrations mondaines vouées à préparer le terrain. Sa détermination à elle, et la faiblesse passagère de mon père, avaient eu pour effet de me donner confiance, et d’aller droit au but. N’était-ce pas ce qui serait attendu de moi lorsque je serai appelée à succéder à mon père ? Il était temps que l’empire ghiscari prenne toute la mesure de la puissance valyrienne et la considère comme un égal. Le Vieil Empire avait gouté à la défaite et Valyria avait gagné une position stratégique sur le continent, la puissance capable de mettre à genou le plus grand empire du monde. Que les morts et les pleurs aient servi à quelque chose, voilà notre objectif, et il était illusoire d’imaginer l’atteindre dans une opposition complète et totale avec Ghis. Nous ne ferions pas la même erreur que Ghis, et nous ferions en sorte de préparer une paix lucide… Sans laisser le Vieil Empire retomber dans ses travers prétentieux pour autant. L'idée était d'ailleurs valable pour ma situation. Mon père voulait que je sois son héritière, alors je le serai, entièrement. Je refusais de jouer l'idiote décorative alors que par ailleurs on exigeait que je consacre mon existence toute entière à cette tâche. Si nous avions fait plier le Vieil Empire alors, avec le temps, je ferais plier Vaegon Tergaryon et lui prouverai ma valeur.



♜♜♜


____________________________________________________________

Valar imāzissis
Elēni ñuhe jogeltigon sylutis, sepār jevon jogeltigon sylussi. Yn kostosy daor. Jēdar yno toliot. Tegon yno gō. Perzys yno iemnȳ. by anaëlle.
avatar
Invité
Invité


Rapidement alors que les mots moururent dans la bouche du sénateur Tergaryon l'attention de Vastraya se reporta vers sa fille. Une façon délicate de laisser le vieil homme à son deuil. Il était à prévoir que son interlocuteur eut perdu quelqu'un de proche pendant la guerre. Cette dernière avait été interminable et particulièrement cruelle pour les deux camps. L'Ambassadrice de Ghys était bien obligée d'admettre que plus que la pompeuse richesse qui s'exhibait devant elle c'était bien la résolution et le sens du devoir du sénateur qui l'impressionnait. Tout le monde n'aurait pas eu la force ou le courage de la rencontrer en de telles circonstances... Ce qui était une faiblesse à exploiter pouvait tout autant être une opportunité plus ouverte. La compassion était une arme que si peu de gens connaissaient.

Alors pendant quelques minutes la conversation se fit avec la jeune Elaena. L'héritière des Tergaryon maîtrisait son sujet. Un étrange ballet se forma entre les deux femmes alors qu'elles buvaient à tour de rôle sans jamais se quitter du regard. Ce n'est que lorsqu'elle eut terminé son laïus, avec dans les yeux une lueur de détermination renouvelée que la Guivre d'Astapor inclina la tête en direction du politicien grisonnant.

" Monsieur le Sénateur, votre pupille a parfaitement retenu ses leçons d'histoire. Votre choix en matière de succession est judicieux. "

Mais puisqu'Elaena avait fait l'effort d'entretenir la conversation pour masquer la gêne la moindre des politesses était de lui répondre et, ce faisant, la désigner comme une interlocutrice valable.

" Oui mademoiselle, vous avez raison. Nous devons travailler pour construire une paix durable. L'inertie et la complaisance sont tout aussi sûrs d'abattre les empires que la guerre ou la pestilence. La victoire de Valyria sur le Vieil Empire en est la parfaite démonstration. "

Comme pour appuyer son propos l'ambassadrice fit un large geste de la main, embrassant la pièce richement décorée autour d'eux.

" Tout ça, le prestige, la valeur des ancêtres, la gloire du nom... Ça n'a au final que peu de valeur sans talent, sans audace, ni clairvoyance. Ce ne sont pas nos vénérables ancêtres qui vont construire le monde de demain. Nous avons perdu parce que nous étions trop sûrs... Trop sûrs de notre grandeur et trop paresseux pour la remettre en question. La Cour n'a pas pris la mesure de Valyria à temps et nous avons stupidement sacrifié nos fières légions sur une perception erronée de la situation... "

Elle acheva sa phrase presque dans un murmure. Il était ironique que cette si violente révélation fût exactement le tremplin politique qu'elle avait saisi pour sa carrière. Était-elle donc un charognard pour se repaître ainsi de la pire humiliation qu'avait connu l'Empire depuis des siècles ?

L'Empire a eu que ce qu’il méritait. A lui de relever la tête ou de disparaître dans l’oubli.

" Mais je suis là pour m'assurer que cette situation ne se répète pas. A l'avantage mutuelle de nos deux nations... Le Triomphe qui s'annonce m'intéresse particulièrement : quel message Valyria va souhaiter transmettre au monde ? "

La question ne s'adressait pas particulièrement à ses interlocuteurs. C'était une interrogation ouverte alors que son regard dériva vers les entrelacs délicats qui parcouraient la voûte.

" Entrons dans le vif du sujet voulez-vous ? La paix entre nos deux nations est bienvenue mais n'est pas sans poser de problème. Par orgueil, ou par pudeur, nous ne nous sommes jamais retrouvés autour de la même table pour négocier. Ce sont des intermédiaires qui ont fait le travail... Et il semblerait qu'ils aient pris l'avantage. "

Vastraya aurait pu énumérer bien des noms. Des grandes familles ghyscari qui tiraient leur gloire et leur grandeur dans le commerce depuis des générations. Pas sûr que cela aurait dit grand-chose à Vaegon Tergaryon ou à sa fille. Mais il y avait un nom valyrien qui, sans aucun doute, faisait déjà écho dans la tête de ses interlocuteurs. La maison Cellaeron... A travers leur réseau tentaculaire les Cellaerons avaient géré l'essentiel des négociations côté valyrien et au passage resserrer terriblement leur emprise sur le commerce entre les deux empires.

Mais leur arracher l’or du gosier était encore faisable pour peu qu’on sache où appuyer.

" Dites-moi donc ce que vous espérez Monsieur le Sénateur. Et peut-être pourrais-je être en mesure de vous aider."
Elaena Tergaryon
Elaena Tergaryon
Sénatrice


Ce qui fait tourner ce monde...


Drivo, Cité de Valyria ֍ Début du Troisième Mois de l'An 1066

« Monsieur le Sénateur, votre pupille a parfaitement retenu ses leçons d'histoire. Votre choix en matière de succession est judicieux. »

J’adressais un sourire poli à l’ambassadrice, loin d’être de son avis. J’avais, d’aussi loin que je puisse me souvenir, toujours été un ornement. Prendre conscience d’une réalité telle n’était jamais flatteur, ni agréable. C’était pourtant une conclusion à laquelle il m’avait fallu arriver. J’avais, au fil des années, revêtu le costume qui avait été taillé pour moi dès ma naissance, et ce sans même m’en rendre compte. J’étais née fille de grande et noble famille, première fille et donc ornement premier d’une famille que l’on construit pour asseoir une puissance. L’amour et la bienveillance de mes parents m’avait amené à ignorer ce fait durant de longues années, mais le retournement de situation récent avait fait éclater au grand jour la terrible vérité. Aenar avait eu une voix dès sa naissance. Maekar avait obtenu une voix propre par ses capacités militaires – sans doute la raison même de son entêtement à accepter le siège offert par le Sénat. On ne m’avait jamais appris à user de ma voix. On ne m’avait jamais donné de voix, à dire vrai. J’étais une image. Une image que l’on voulait belle, douce, souriante, enjouée. En cela j’avais réussi l’exploit de coller parfaitement à des attentes jamais réellement formulées.
A présent, le défi n’était pas seulement celui d’être capable d’endosser les responsabilités qui seraient, un jour, les miennes, mais de briser le carcan silencieux auquel on m’avait contrainte, pour trouver une voix. Pour trouver ma voix.

« Oui mademoiselle, vous avez raison. Nous devons travailler pour construire une paix durable. L'inertie et la complaisance sont tout aussi sûrs d'abattre les empires que la guerre ou la pestilence. La victoire de Valyria sur le Vieil Empire en est la parfaite démonstration. »

Maîtrisant parfaitement le rôle d’image, je dissimulais mon trouble sous un masque serein et poli, mais je n’étais pas taillée pour les discussions politiques. Je n’étais pas préparée aux négociations diplomatiques. Comment aurais-je seulement pu prétendre être à la hauteur de cet homme qui, s’il avait eu un moment de faiblesse, avait déjà retrouvé sa superbe et me dominait tant par la taille que par ses compétences ? C’était une folie. Il n’avait rien dit, s’étant contenté de sourire et de déposer sa main sur la mienne suite à l’appréciation de l’ambassadrice. Sans doute n’avait-il rien dit car il savait que la suite de l’échange méritait de ne pas se laisser distraire même par les mots les plus flatteurs. Ou peut-être n’était-il pas aussi convaincu de son choix. Qui l’en aurait blâmé…

« Tout ça, le prestige, la valeur des ancêtres, la gloire du nom... Ça n'a au final que peu de valeur sans talent, sans audace, ni clairvoyance. Ce ne sont pas nos vénérables ancêtres qui vont construire le monde de demain. Nous avons perdu parce que nous étions trop sûrs... Trop sûrs de notre grandeur et trop paresseux pour la remettre en question. La Cour n'a pas pris la mesure de Valyria à temps et nous avons stupidement sacrifié nos fières légions sur une perception erronée de la situation... Mais je suis là pour m'assurer que cette situation ne se répète pas. A l'avantage mutuelle de nos deux nations... Le Triomphe qui s'annonce m'intéresse particulièrement : quel message Valyria va souhaiter transmettre au monde ? »

« Ambassadrice, Valyria a d’ores et déjà, il nous semble, envoyé le message adéquat au monde. Le Triomphe sera l’occasion de l’illustrer. »

Un sourire aux lèvres, il portait sa coupe à ses lèvres, ayant visiblement laissé derrière lui les souvenirs amers et bouleversants de la perte de son héritier. Connaissant mon père, je savais qu’il se reprochait cet instant de faiblesse, en particulier devant l’ambassadrice de Ghis. Le moment était historique et essentiel. Il l’était tant pour Valyria que pour lui. Sans doute s’imaginait-il que je n’avais pas saisi les raisons de son empressement, mais il ne faisait aucun doute que les mercantilistes et les Tergaryon en tête de fil, cherchaient à rétablir le commerce avec Ghis au plus tôt. Se positionner en interlocuteur privilégié auprès de l’ambassadrice était également l’occasion, pour mon père, de reprendre du terrain face à Baelor Cellaeron et Echya Odenys, qui ne manquaient jamais d’empiéter sur ce que mon père estimait être « son pré carré ».  

« Entrons dans le vif du sujet voulez-vous ? La paix entre nos deux nations est bienvenue mais n'est pas sans poser de problème. Par orgueil, ou par pudeur, nous ne nous sommes jamais retrouvés autour de la même table pour négocier. Ce sont des intermédiaires qui ont fait le travail... Et il semblerait qu'ils aient pris l'avantage. Dites-moi donc ce que vous espérez Monsieur le Sénateur. Et peut-être pourrais-je être en mesure de vous aider »
« Vous l’avez dit vous-même, Ambassadrice, il était temps pour nous de nous défaire de l’influence de nos intermédiaires, et préparer l’avenir… face à face. »

Il restait un long instant silencieux, les yeux fixés sur l’Ambassadrice, un sourire poli aux lèvres. Je ne su trop s’il l’étudiait ou ménageait simplement un effet, mais le silence qui retombait, s’il n’avait rien de lourd ou d’inquiétant, signait la fin des politesses.

« La guerre est terminée. Vous l’avez-vu, elle m’a touchée, comme elle a touché ma fille, mon fils cadet, ma femme, et tant d’autres familles Valyriennes et Ghiscari. La rancœur est un sentiment légitime en des temps comme ceux-ci. Pourtant, je ne veux pas la guerre, Ambassadrice Amasis. Je veux la prospérité pour mon peuple. Je pense qu’en cela nos vues se rejoignent. »

Il se tournait vers moi, un sourire aux lèvres, toujours silencieux.

« L’avenir ! Voilà notre combat, Ambassadrice. Et nous le savons tous deux, la paix s’entretient par la prospérité et les intérêts mutuels. Longtemps, vous l’avez souligné, le Vieil Empire a sous-estimé notre belle République. Cette guerre a démontré les limites de ce mépris. Il serait fâcheux que, galvanisés par notre récente victoire, nous autres Valyriens fassions preuve de la même confiance aveugle. »

Il terminait sa coupe, un air confiant sur le visage, comme quelqu’un qui ne doute jamais, ne tremble jamais, n’hésites jamais lorsqu’il doit prendre position. Jamais je ne pourrais être ainsi.

« Ma faction est évidemment en première ligne pour travailler à une reprise des liens et échanges commerciaux entre l’Empire et la République. Il y a bien sûr nos échanges historiques. Mais il me semble nécessaire également d’aborder le sujet des esclaves. Notre butin de guerre, pardonnez-moi de le rappeler, Ambassadrice, va donner goût aux Valyriens. »

Il s’interrompait, se penchant légèrement en avant.

« Mais avant, Ambassadrice, quelle est la position de votre empereur au sujet de la reprise de nos échanges ? Il ne m’a pas été présenté comme un homme à la défaite facile. Sera-t-il du camp des rancuniers ? »



♜♜♜


____________________________________________________________

Valar imāzissis
Elēni ñuhe jogeltigon sylutis, sepār jevon jogeltigon sylussi. Yn kostosy daor. Jēdar yno toliot. Tegon yno gō. Perzys yno iemnȳ. by anaëlle.
avatar
Invité
Invité


Hmm délicat sujet. L'Empereur était… l'Empereur, voilà tout. La Cour Impériale, et par extension Ghis tout entière, vivait au rythme de ses passions et de ses envies. Plus que la richesse , le sexe ou le luxe c'était l'attention de l'Empereur qui était le premier sujet de convoitise de la Cour. Des carrières pouvaient s'élever ou s'effondrer sur un bon mot glissé aux oreilles les plus augustes. C'était un jeu subtil et très complexe mais surtout très dangereux. L'Empereur avait ses travers, certainement, mais il était suicidaire d'en faire mention. C'était juste une donnée avec laquelle composer, aussi immuable que les cycles de la marée ou le sens de rotation du soleil. Laissez vous porter par le courant ou périssez en essayant de lui résister...

Dans le cas présent, il était hors de question de débiner la personne impériale en présence des Valyriens, des rivaux si ce n'était des ennemis. Dire que l'Empereur était furieux ou rancunier était un euphémisme et le parti de son père avait été obligé de déployer des trésors d'ingéniosité pour apaiser l'Empereur… Et de sacrifier quelques pions au passage. Une grande partie des festivités des derniers mois n'avaient eu que pour but de détourner Son attention, et même ainsi quelques malheureux imbéciles avaient connus un sort aussi déplaisant qu'expéditif pour l'avoir déplu.

"Sa Très Gracieuse Majesté est un être passionné en effet mais c'est également un monarque d'une grande clairvoyance qui sait écouter lorsqu'on lui expose les faits avec précision et impartialité." Avança finalement la Guivre d'Astapor en faisant tourner nonchalamment le liquide dans son verre.  "Il reconnaît  où se trouve l'intérêt de la Nation et diriger son ardeur à bon escient. "

Vastraya jeta un rapide coup d'oeil à la jeune fille qui suivait la conversation aux côtés de son père mais cette dernière ne semblait plus désireuse d'intervenir. Son rôle de représentation était-il terminé ? Reportant son attention vers le sénateur l'ambassadrice enchaîna sans tarder d'une voix lente.

"Actuellement l'Empereur est convaincu que la paix est profitable. Je ne dis pas qu'il n'a aucun ressentiments envers Valyria mais il a su trouver d'autres... expédients pour apaiser sa rancœur. Pour l'instant. Bien entendu, d'autres partis que le mien sont, à la Cour Impériale, favorables à une reprise des hostilités et lui glisse à l'oreille les avantages potentiels qu'aurait une guerre totale. Valyria est souvent présenté par ces gens là comme un chien fou qui, ayant goûté une fois au sang, ne peut qu'attaquer à nouveau…"

En réalité les termes employés sont un peu moins polis mais l'idée générale est là.

"Autrement dit, il est de notre devoir de prouver à sa Majesté  qu'il a fait le bon choix en s'engageant sur la voie de la diplomatie."

La paix ne pouvait être garantie tant que sa Majesté ne voyait pas poindre les premiers fruits de cette entente entre rivaux. Pour l'instant tout ne tenait que sur des promesses, autrement dit pas grand-chose si l'Empereur décidait soudainement de changer d'avis. Enivrés par la victoire les Valyriens n'avaient pas l'air de comprendre à quel point leur position était précaire.

Mais assez parlé de l'Empereur. La situation était posé : des résultats positifs maintiendrait à un niveau raisonnable son degré de satisfaction. Ne restait plus qu'à produire ces dit résultats positifs et le commerce était une ouverture tout à fait satisfaisante pour commencer. Le sénateur Tergaryon semblait vouloir prendre des gants pour évoquer les esclaves ghys qui abondaient désormais en Valyria. Précaution inutile, ni à titre politique ni à titre personnel cela n'affectait l'ambassadrice. Les plus intelligents sauraient tirer leur épingle du jeu. Quant aux autres... Et bien ils méritaient certainement leur sort...

"Les esclaves sont un marché comme un autre : ma ville natale, Astapor, s'en est fait une spécialité.  L'apparition soudaine d'une nouvelle ressource en Valyria ne peut qu'ouvrir des opportunités. Il est vrai que je suis un peu surprise que la République se soit adapté si vite à ce que certains décriaient comme une entrave à la liberté. Si vraiment le sujet fâche ou met mal à l'aise une partie de la population le Sénat peut toujours légiférer sur les pratiques en matière d'échange ou de traitement... "

Il est amusant de voir que la loi et la morale plient quasi systématiquement devant les sirènes du commerce et de la fortune...

"Je m'attend à ce que l'activité commerciale entre Valyria et Ghis soit un peu timide au début, question de fierté ou d'amertume. La vente d'esclave peut aider à réchauffer la situation et ouvrir la porte aux production agricoles ou manufacturées. Si l'affaire est bien jouée tout le monde peut y trouver son compte, esclavagistes ou non."

D'un point de vue plus pragmatique, vendre des esclaves offre aux familles la possibilité de récupérer leurs proches en les rachetant. Éventuellement.

"A titre personnel, en dehors de tout accords officiels que nos nations peuvent signer entre elles, je peux peut-être aider. Les Amasis n'ont pas fait leur nom dans le commerce mais dans la diplomatie. Nous avons des contacts un peu partout dans l'Empire notamment avec des familles marchandes dont les intérêts convergent avec ceux du parti mercantile. Je ne promet pas le succès de ces négociations privées mais parallèlement aux accords commerciaux officiels je serai ravie de vous mettre en contact."

Reste à voir ce que le parti mercantile pouvait proposer en retour...
Contenu sponsorisé