-40%
Le deal à ne pas rater :
Tefal Ingenio Emotion – Batterie de cuisine 10 pièces (induction, ...
59.99 € 99.99 €
Voir le deal

avatar
Invité
Invité

Après la tempête
ft. Valya et Saelerys Riahenor

Rhyos, an 1066, dernier jour du mois 9

Une grimace de douleur s’échoua sur les traits d’Aelys, crispant sa peau de porcelaine. Le vol de Salya se révélait affreusement maladroit, agitant ses ailes pour reprendre de l’altitude à chaque fois qu’elle perdait en énergie. La fatigue cumulée aux blessures de son affrontement contre le Léviathan mettait à mal les dernières ressources qu’elle possédât. Une félicité que sa cavalière pèse si légère sur son dos alors qu’elle tentait d’atteindre la demeure où les Riahenor résidaient au cours des festivités religieuses du Rêve de Caraxès. Son pénible voyage prit fin lorsqu’elle atterrit dans les jardins de la grande villa, s’écrasant à moitié au milieu des buissons et bosquets de houx. La Riahenor étouffa un cri de douleur à ce choc si violent qui mettait à mal l’état de ses côtes douloureuses. L’empreinte vivace de la poigne du tentacule autour de sa taille éprouvait toujours la peau de la noble. Un contact répugnant dont elle risquait de porter les stigmates très bientôt.

Aelys se laissa glisser du dos de son dragon, se réceptionnant autant qu’elle le put sur la terre ferme. Ignorant la douleur, elle tituba jusqu’à la tête de Salya, venant étreindre entre ses bras frêle sa jumelle. « Oh Salya, ma douce Salya… tu m’as sauvée aujourd’hui. » L’agitation derrière elle laissa présager l’arrivée d’une horde de serviteurs. La jeune femme se retourna, constatant cette présence inquiète prête à se jeter sur elle. « De l’aide ! Vite ! Soignez-là ! » s’écria avec flamme la jeune femme. Elle écarta d’un geste impatient les mains qui se tendaient à son secours. Ce n’était point pour elle qu’elle requérait de l’aide, mais bien pour Salya qui s’abandonnait à un sommeil réparateur. Des larmes vinrent poindre aux yeux de la fougueuse Riahenor qui connaissait à sa jumelle un tempérament plus enflammé. Son champ d’action s’arrêtait hélas là et elle ne pouvait laisser Salya qu’à des mains expertes et compétentes.

Les images vinrent cogner dans les contreforts de son esprit. Le Rêve de Caraxès était l’opportunité légendaire pour les Riahenor de briller et de reconstruire une image délitée par quelques actes inconsidérés de leur père. La jeune femme se rappelait encore les espoirs que les siens nourrissaient à cet événement si fédérateur et important. En dépit des dangers que ce Rêve représentait, qui aurait pu prédire un seul instant que le dieu de la mer se retournerait ainsi contre la progéniture d’Arrax ? Qui aurait pu songer que de tels défis se dresseraient sur leur route ? Aelys frissonnait encore de la terrible malédiction qui s’était abattue sur Elaena Teragryon, les frères Bellarys et elle. Au cœur de la tourmente, l’espoir avait menacé de lui manquer lorsque les tentacules gigantesques du kraken avaient jailli des eaux, engloutissant navires et marins, et menaçant le vol des créatures ailées et leurs cavaliers. L’horreur de la scène vibrait dans l’esprit de la jeune femme qui croyait toujours entendre l’éclat déchirant de la foudre à ses oreilles et les hurlements de terreur de ceux qui avaient péri. Elle en venait à ignorer presque les raisons de leur victoire sur l’affreux monstre marin, mais ils étaient ressortis victorieux de cet affrontement. La créature avait reflué des abysses dont elle avait jailli. Un dégoût souverain et une haine farouche ébranlaient l’âme de la Riahenor à l’idée de ne point avoir réussi à occire la terrible bête. La fuite avait été son unique échappatoire au milieu de ce chaos.

Puis tout n’avait plus été que brouillard. Aelys ne se rappelait même plus les acclamations des rescapés et les exclamations de louanges à l’égard des Seigneurs Dragons. Ne lui restait que la gifle cinglante de la tempête sur le visage, le bourdonnement à ses oreilles et une terreur atroce que les siens aient pu subir un sort équivalent, voire plus atroce lors de leur propre épreuve. Si Aelys avait pu cerner les silhouettes de sa mère et de sa sœur dans la foule entremêlée de la célébration, elle attendait des retrouvailles plus intimes pour attester de l’état de Vaelya et Saerelys. L’orgueil et l’honneur lui avaient ordonné de ne point montrer la faiblesse qu’elle affichait à présent qu’elle était à l’abri de leur lieu de résidence. Les désagréables souvenirs à la suite du Grand Effondrement ne cessaient de se rappeler effrontément à sa mémoire. La peur faisait trembler ses os et elle venait à détester cette odeur de sel et de vase sur ses vêtements.

Aelys agrippa brusquement une servante par le bras, réclamant de savoir sa famille était rentrée à la villa. Presque apeurée par le regard fou que la jeune Riahenor dardait sur elle, elle hocha la tête vivement. L’instant d’après, la jeune femme s’élançait déjà vers l’imposante demeure, faisant fi de la douleur qui l’agressait aux côtes. Elle n’accepta de reprendre son souffle que lorsqu’elle arriva au sommet des marches qu’elle grimpa avec difficulté. « Mère ! Saelerys ! » appela-t-elle en cherchant à moduler les tremblements de sa voix. Finalement, en pénétrant dans la demeure, elle trouva celles que son cœur recherchait. « Par la bonté d’Arrax, vous êtes sauves ! » Aelys ne s’embarrassa d’aucune manière et fondit dans les bras de sa mère, non sans gémir de douleur à l’étreinte qui lui fut rendue. Elle appliqua le même traitement à son aînée, furieuse de soulagement de les trouver saines et sauves. « Êtes-vous blessées ? Que vous est-il arrivé ? » s’enquit précipitamment Aelys, ne leur laissant à peine la possibilité de s’exprimer.






avatar
Invité
Invité

Après la tempête.Aelys Riahenor, Vaelya Riahenor et Saerelys Riahenor.

Rhyos & An 1066, toute fin du mois 9.

Saerelys ne parvenait plus à rassembler ses pensées.


Dans son esprit envahit par la brume, des grelots tintaient en tous sens. Gagné. Elle avait gagné avec Hordar et Rhaenys. Un cormoran s’était perché sur sa tête. Puis, la terre ferme. Des acclamations, si elle ne faisait pas erreur. Dieux comme sa tête lui tournaient ! Le tonnerre grondait encore dans son esprit, tout comme le gélif. Où était son équipage, ces loups de mer qui avaient risqué eux aussi leurs vies ? Une main s’était pourtant refermée sur son épaule, dans la foule. Ferme, drapée de voilages constellés de perles opalines. Jaella. Il devait s’agir de Jaella. Sa tante l’avait observée, pour le moins troublée. A moins qu’il n’ait s’agit d’inquiétude ? Sa tante avait parlé. Rhyos. A Rhyos aussi, leur Dynastie était sortie vainqueur. Pour la première fois depuis fort longtemps, la jeune femme avait été heureuse d’apercevoir la mine de la Prêtresse de Gaelithox. Puis, ses souvenirs s’étaient changés en une poignée de flocons.


Ce n’était qu’une poignée d’heures plus tard que Saerelys avait saisi la réalité de sa nouvelle situation. Ramenée auprès des novices et des Mages, ces derniers n’avaient pas manqué de l’entourer, de la presser de questions. Kaerys avait finalement pris les devants, éloignant tout le monde à grands renforts de gestes telle une louve protégeant sa meute. Leur Envoyée de Caraxes pourrait leur parler plus tard. Il lui fallait d’abord se changer et se rendre au Temple du Dieu qui l’avait désignée. Envoyée de Caraxes. L’une des premières Mages depuis des décennies à obtenir un tel titre, si elle ne faisait pas erreur. Jaella était restée à ses côtés, telle une ombre, l’accompagnant même jusqu’au Temple par la suite, alors qu’elle avait revêtit d’autres atours. Un premier banquet avait eu lieu. Le grésil de l’après-midi semblait avoir été oublié. Malgré son épuisement, Saerelys n’avait pas manqué de faire bonne figure.


Elle avait ensuite pris son envol vers Rhyos. Aedar était venu la chercher sur le dos de son dragon, lui expliquant alors la teneur de la situation de leur mère et de leur sœur. Bien que son jumeau ait pris des gants pour lui notifier l’état des deux autres Riahenor, la novice n’avait pas manqué de le presser de questions. ‘’Mère et Aelys vont bien. Aelys est juste extrêmement épuisée. Mais elles t’en parleront mieux que moi.’’ C’était ainsi que Saerelys s’était retrouvée à Rhyos où elle avait enfin pu trouver un peu de repos. Du moins, le pensait-elle. Son âme réclamait à voir ses proches, n’ayant pu les retrouver après son retour sur la terre ferme. Aussi, après une dernière étreinte destinée à Aedar, la jeune femme avait rejoint sa mère qui se trouvait en haut du perron.


« Aelys ! répondit alors Saerelys, entendant une voix qui réclamait sa présence depuis le bas de l’escalier. Nous sommes là, petite sœur ! Nous sommes là ! »


Aelys gravit maladroitement les dernières marches qui les séparaient d’elle. Instinctivement, Saerelys se précipita vers elle, oubliant les douleurs qui lui enserraient les jambes, les cuisses et le crâne, afin de lui éviter une possible chute. Sa sœur cadette resta cependant bien campée sur ses deux jambes, finissant cependant sa course dans les bras de leur mère. Une étreinte à laquelle la novice eut droit également et qu’elle rendit bien volontiers à la jeune Dame Dragon malgré ses propres douleurs. Le regard améthyste de l’aînée des Riahenor se posa alors sur la chair pâle de sa sœur. De légères marques se dessinaient ici et là, de même qu'au niveau de son cou.


« Je te retourne la question, petite sœur. doucement, Saerelys avait relevé le chef de sa cadette, observant les légères marques qui paraient sa chair. Je te soignerai cela, lorsque j’aurai retrouvé mes forces. Je ne peux te laisser ainsi. Le regard améthyste de la novice se posa alors sur sa mère. Pourquoi ne pas rentrer ? Mes jambes flageolent encore de mon dernier séjour en mer. » avoua la jeune femme, penaude.


Enveloppant les hanches de sa sœur de son bras droit et celles de sa mère de son bras gauche, c’est en s’appuyant contre elles que Saerelys pénétra dans la demeure. La bataille navale, le banquet qui en avait découlé puis le voyage aérien jusqu’à Rhyos mettaient ses tendons et ses articulations à rude épreuve. Commandant à une servante qui s’approchait de lui préparer de l’eau chaude afin qu’elle puisse y distiller quelques plantes pour son propre usage, la novice se laissa ensuite tomber sur le siège le plus proche présent dans le petit salon. Fébrile, elle sortit alors un petit bocal en verre de son sac, déterminée à mettre fin à cette migraine persistante, tandis que sa mère et sa sœur s’installaient à leur tour.




(Gif de gif-hunts-for-you.)
avatar
Invité
Invité

Après la tempête.Aelys Riahenor, Vaelya Riahenor et Saerelys Riahenor.

Rhyos & An 1066, toute fin du mois 9.

Tandis que le soleil éclaircissait le ciel, un bourdonnement mêlé à des veines qui battaient avec force contre ses tempes assaillait le crâne de la dynaste qui avait pris le chemin de la demeure occupée par les siens durant les festivités du Rêve de Caraxes à Rhyos. Cela faisait bien longtemps qu’elle ne s’était pas tant laissé aller à profiter d’une soirée telle que celle-ci et si les acclamations, les compliments ainsi que les attentions n’avaient cessé de lui faire arborer un sourire empli de fierté, les conséquences bien des heures plus tard ne s’étaient pas fait attendre. La migraine était forte et ne l’aidait que peu à apaiser un esprit et un corps mis à rude épreuve durant la chasse, et elle venait altérer une vison dont elle avait besoin afin de ne pas avoir à embrasser le sol. La dynaste finit par s’arrêter quelques instant en bas des marches. Pourquoi y en avait-il autant pour gagner le perron ? Il ne devait pas y en avoir plus de six et pourtant malgré tout le chemin parcouru jusqu’à la villa, cela semblait relever d’une mission tout aussi périlleuse que le combat face au léviathan. Se sentant tanguer légèrement comme si elle se trouvait sur un navire, Vaelya pris une grande inspiration avant de prudemment comment à gravir une à une les marches la menant à l’entrée de la demeure, où elle fut bien rapidement accueillie par plusieurs serviteurs.

-Dame Vaelya, permets-moi de t’installer dans le salon et de te préparer quelque chose pour te remettre d’aplomb, déclara Galreon qu’il s’approchait humblement d’elle pour la guider jusqu’au dit salon. Posant sa main sur l’épaule du serviteur libre, la dynaste secoua légèrement la tête et sa prise se raffermi alors que la douleur s’intensifiait.
-Je t’en remercie Galreon et je préfère m’asseoir sur les marches, j’ai besoin d’un peu d’air frais, déclara-t-elle en lui adressant un sourire qu’elle voulait rassurant avant de s’asseoir sur la marche la plus proche, aidée par un Galreon soucieux de ne pas la voir dévaler les marches pour une finalité plus que douloureuse.

Laissée ainsi là à sa demande, Vaelya resta silencieuse, se massant doucement les tempes, le temps que lui soit apporté ce qui lui avait été promis. Le regard perdu sur les plantes et arbustes composant l’entrée principale, elle se laissa emporter par cette relative sérénité, s’attelant à vider son esprit de toute pensée résiduelle pour que seuls les bruits environnements ne restent et ne lui permettent d’apaiser son crâne lancinant. Les minutes s’écoulèrent ainsi jusqu’à ce que les pas de Galreon se fassent entendre et que ce dernier lui tende un gobelet de cuivre. Fronçant les sourcils, elle récupérant le contenant et vint en humer l’odeur qui pouvait se dégager puis elle écarquilla les yeux avant d’observer le serviteur.
-Bois d’une traite ma dame… ce sera préférable, se contenta-t-il de répondre sans décrocher son regard de ses gestes, cherchant à s’assurer qu’elle boirait bien le breuvage et ne chercherait pas à le jeter.

Levant les yeux au ciel, Vaelya prit ensuite son courage à deux mains et porta le gobelet à sa bouche. La première gorgée fut tout bonnement affreuse, diffusant dans sa bouche un goût indescriptible qu’elle voulu recracher sans ménagement lorsque le fin raclement de gorge du serviteur parvint à son oreille. Se forçant à avaler sa première gorgée, la dynaste se força ainsi à boire le reste du contenu d’une traite et tandis immédiatement le gobelet lorsqu’elle eut terminé.
-Je ne veux plus jamais boire ça, tu m’entends ? dit-elle avant de tousser, comme cela allait aider à ôter le goût qui restait sur sa langue. Dis-moi, les filles sont-elles revenues ? Je crois avoir aperçu Aelys en ville mais pas Saerelys.
-Elles ne devraient plus tarder, je vais de ce pas demander à vous faire préparer de quoi vous restaurer. Vous en aurez grandement besoin, répondit Galreon avant de s’incliner légèrement et de disparaître dans la villa.

Vaelya attendit alors que ses filles ne rentrent enfin. Si elle savait qu’Aelys était rentrée indemne de la chasse, épargnée par la tempête et le calamar géant elle avait cru entendre un trophée être mentionné, elle ne savait rien concernant Saerelys et il lui tardait grandement de les voir toutes les deux. Plus le ciel était clair, plus les serviteurs s’affairaient tant dans la villa que dans les extérieurs, permettant ainsi à la dynaste de les observer silencieusement. Ce fut seulement le battement d’ailes d’un dragon qui la tira de son observation pour braquer son regard sur cette forme rouge qu’était le dragon d’Aedar. Un soupire de soulagement s’échappa de la bouche de la dynaste qui se releva prudemment avant de se tenir bien droite sur le perron, attendant que son aîné n’arrive… accompagné de Saerelys. Un fin sourire vint étirer ses lèvres tandis qu’elle observait sa fille enlacer son frère avant de la rejoindre.

-Saerelys.. commença-t-elle avant de, trouvant sa voix un peu rocailleuse, s’éclaircir la gorge. Je suis soulagée de voir que tu vas bien et je suppose que ton épreuve t’a été f… poursuivit-elle avant qu’une voix qu’elle reconnaîtrait entre mille autres n’attire son attention. Béni soit Caraxes.  Aelys était enfin présente et ne se fit pas prier, se précipitant ainsi vers elles.

Une étreinte, forte et emplie d’émotions, rien qu’une seule valait mille mots après ce Rêve de Caraxes qu’elles avaient vécu chacune de leur côté. Malgré la fatigue, Vaelya rendit avec force l’étreinte que lui adressait Aelys, ne se souciant que peu du fait qu’elle pouvait être blessée tant la joie de la sentir contre elle était forte et ce ne fut que lorsque Saerelys eut le droit à son tour à une étreinte de sa sœur, que la dynaste vint déposer un baiser sur le front de chacune d’entre elles. Il était si de bon de les revoir tant elle avait la sensation que des mois s’étaient écoulés. Brusquement Vaelya se figea, son aînée mentionnant des soins à prodiguer. Ses yeux eurent besoin de temps pour observer ses filles à la recherche de marques et de blessures... Son cou ! Par les dieux, que lui était-il arrivé ? Elle senti les battements de son cœur s’accélérer alors qu’elle sentait Saerelys s’appuyer contre elle et les entraîner à l’intérieur. Laissant Saerelys demander se dont elle avait besoin et s’installer sur un des sièges du salon, Vaelya ne quitta pas un instant Aelys, s’empressant d’examiner ses éventuelles blessures lorsque sa cadette se fut assise.

-Que s’est-il passé ? S’en est-on pris à toi ? demanda-t-elle, inquiète, avant de tourner la tête vers son aînée. Et toi comment vas-tu ? As-tu été blessée ?



avatar
Invité
Invité

Après la tempête
ft. Valya et Saelerys Riahenor

Rhyos, an 1066, dernier jour du mois 9

Un frisson terrible ébranla la chair d’Aelys. Nulle froid ne venait pourtant étreinte ses chairs. Un effroi cruel entamait le brouillard de ses pensées. Les hurlements des matelots accrochés à jamais à ses tympans tel un parasite odieux, la terreur et l’agonie sur leurs visages logeant pour toujours sur sa rétine, le cri strident de cette monstrueuse créature envoyée par Caraxes, prête à la hanter dans les confins de sa conscience éternellement. Ecrasée contre l’herbe des jardins du palais, l’enflammée Riahenor peinait à bannir ces affreuses visions de son esprit. Ni les célébrations qui avaient suivi ni les breuvages ingurgités n’étaient parvenus à venir à bout de ces images cauchemardesques. Aelys luttait pour ne point céder à ces assauts d’angoisse qui accablaient ses membres de frissons. Son nom ne pouvait trahir aucune faiblesse. Son courage ne pouvait s’embarrasser de la moindre faiblesse. Honneur. Fierté. Dignité. Plus que jamais, la jeune fille sentait le poids sur ses épaules de ce nom séculaire qui l’avait fait naître Dame-Dragon et qui l’enchaînait à la prestance. Et sans l’emblème du dragon frappé sur son âme, sa chair, son nom, elle n’aurait su réchapper aux offensives cruelles de la mer et ses royaumes. A présent, elle songeait à tous ces corps molestés qui avaient subi la sauvagerie du Kraken, engloutis dans sa gueule béante ou bien noyés dans les vagues traitresses. Son corps fourbu et dolent s’ingénia à se redresser et maintenir un équilibre précaire pour la guider jusqu’à la haute silhouette de la demeure.

La crainte continuait de grignoter son être. Si le soulagement l’avait déjà dévorée en cernant la présence des siens, sains et saufs, lors des festivités, le cœur d’Aelys réclamait le réconfort de leur étreinte. Le cri de la Riahenor trouva son écho dans celle de Saerelys qui lui répondit avec empressement. Humides de joie, ses yeux partirent à la conquête des escaliers d’où son aînée émergea. Au mépris des douleurs qui enserraient son corps, elle gravit tant bien que mal les marches qui la séparaient de la mage et se jeta dans ses bras d’une fougue enfiévrée. Son gémissement s’échappa de ses lèvres à la pression qui s’appliqua sur ses côtes endolories, mais pour rien au monde elle aurait souhaité rompre ce contact. Elle ne s’affranchit de l’étreinte de Saerelys que pour trouver la réconfortante chaleur de sa mère. « Vous voilà saines et sauves. Loué soit Arrax ! » s’anima Aelys avec soulagement. « Laissons ces blessures de côté, ma sœur. Tu dois reprendre des forces. »

N’opposant pas la moindre résistance, Aelys se laissa guider à l’intérieur de la bâtisse et s’appuya sur les épaules encore vigoureuses de sa mère et de sa sœur. Parvenues jusqu’à un salon, l’accueil prodigue d’un fauteuil ne fut point sans arracher un soupir grimaçant à la jeune fille. Ses membres dolents réclamaient ce repos qu’elle n’avait point eu l’occasion de s’accorder jusque-là. L’étude inquiète de sa mère sur les contusions qu’elle portait et les questions qui se bousculèrent la firent se redresser légèrement sur son siège. Essoufflée, hagarde, tremblante… pourtant, un regard brillant d’une fierté immense chatoyait dans le regard d’améthyste pur d’Aelys. « Mes blessures sont la marque d’une grande gloire, mère. Une victoire que nous avons emportée sur une atroce créature jaillissant des flots impétueux et redoutables. Ses tentacules étaient innombrables, si puissants qu’ils parvenaient à écraser les navires des malheureux marins d’une seule pression, et si hauts qu’ils touchaient nos dragons. Sa gueule, béante et immense, engloutissait tout ce qui l’entourait. » décrivit Aelys avec fièvre, fierté et une terreur réprimée. « Ses bras gigantesques sont venus nous enserrer, Salya et moi. » A ce moment-là, des toussotements ébranlèrent sa chair et elle dut réprimer un cri de souffrance à ses côtes hurlantes. Lorsque sa quinte de toux s’interrompit, sa main vint se poser sur sa gorge rougie d’un précédent assaut. Un sourire agrippa ses lèvres pâles et frémissantes. « Riahenys s’est emparé de mon bras et a occis le tentacule vengeur de la créature. Sa force et son courage ont guidé mes assauts pour se défaire de son étreinte terrible. Nous sommes parvenus à faire fuir l’atroce monstre envoyé par Caraxes. » Haletante de son récit et les membres tremblants d’une fébrilité entre excitation et angoisse, les mains d’Aelys agrippèrent fermement celles de Vaelya. Ses pensées tentèrent de s’arracher au destin funeste qu’avait connu les pauvres marins. « Je sens encore la vigueur de Riahenys pulsant dans mes veines. Un trophée m’a été accordé pour cette chasse victorieuse. Mère, es-tu fière ? »







avatar
Invité
Invité

Après la tempête.Aelys Riahenor, Vaelya Riahenor et Saerelys Riahenor.

Rhyos & An 1066, toute fin du mois 9.


Toutes trois étaient dans un bien piteux état. Il leur faudrait plusieurs jours pour retrouver l’entièreté de leurs forces, Saerelys ne s’y trompait pas. Sa tête lui semblait encore lourde. Si lourde. Sans prononcer le moindre mot, la jeune femme remercia d’un mouvement de tête un serviteur qui lui avait apporté un peu d’eau chaude. D’un geste marqué par une fatigue certaine, la novice dosa comme elle le put le contenu du récipient qui se trouvait dans son sac jusque-là. Une odeur de plantes médicinales s’éleva alors du récipient.


S’enfonçant davantage dans son siège, Saerelys leva l’un de ses index, exécutant quelques mouvements circulaires de la pointe de sa phalange. Sans qu’elle ne le touche, l’eau se mêla aux plantes, mélangées par la simple Magie de la novice. L’air quelque peu absent, la jeune femme se saisit de l’une de ses mèches, la portant jusqu’à son nez. Alors, la Riahenor grimaça. Une odeur tenace de cendres et de sel imprégnait sa chevelure. Aedar avait été bien galant de ne pas lui avoir fait remarquer ce détail. Il lui faudrait plus d’un bain pour se défaire de cette odeur étrange ! Retrouvant pieds dans la réalité par la même occasion, le regard améthyste de la jeune femme se posa sur sa mère. Blessée ? Il lui semblait l’avoir été. Quelques Mages s’étaient cependant portés garants de sa santé. Ce n’était pas tous les jours que l’une d’entre eux était titrée Appelée de Caraxes…


« Je… Je me suis déjà portée mieux. avoua Saerelys, sans le moindre détours. Mais je ne pense pas qu’il y ait lieu de s’inquiéter. reprit immédiatement la jeune femme. Avec un peu de repos, il n’y paraîtra plus. D’autres Mages se sont occupés de mes blessures. Elles étaient sans gravité, je te le jure, Mère. Juste quelques plaies bénignes et des écorchures. La bataille navale a été… »


Sans pouvoir ajouter un mot de plus, la jeune femme chassa ses propos précédents d’un mouvement de main. Cette bataille navale avait été éprouvante. Éprouvante et terrible dans tous les sens du terme. La novice ne savait si sa mère et sa cadette avaient entendu parler de cette tempête dont ils avaient été victime. Ou des incendies qui s’étaient déclenchés alors même qu’ils étaient toujours sur les flots. Le plus important était que ses plaies avaient été soignées. Pour ce qui était de la teneur de sa propre épreuve… La Riahenor craignait de ne pas parvenir à en dire davantage pour le moment.


Se perdant à nouveau dans ses pensées, la jeune femme n’en réémergea qu’au moment où Aelys prit la parole à son tour. Après s’être assurée que sa mixture était bien mélangée, Saerelys porta le petit récipient jusqu’à son visage, humant la fine fumée qui s’en échappait. Après avoir prit une profonde inspiration, respirant une plus grande quantité de l’émanation, la novice prit ensuite une gorgée du liquide verdâtre. Son esprit ne tarderait pas à retrouver de sa clarté. Du moins, c’était là le but de ce qu’elle venait de préparer. Petit à petit, le récipient fut vidé de son contenu. Cela ne remplacerait pas plusieurs nuits de sommeil mais suffirait pour le moment.


« Voilà un sacré récit, ma sœur. Saerelys avait esquissé un sourire avec une certaine difficulté. Je ne doute pas que Grand-Mère souhaitera l’inscrire dans nos chroniques ! La jeune femme se massa quelques instants les tempes, maugréant contre son propre empressement. Caraxes t’as fortement éprouvée, ma chère Aelys. Il te faudrait peut-être immortaliser ce moment ? A la manière dont tu parles de ce combat, tu n’auras aucune difficulté à ce sujet. »


Se redressant, Saerelys se retint quelques instants au dossier de son siège. Il lui fallait s’assurer de son équilibre, encore précaire semblait-il. La novice esquissa quelques pas, rapprochant un siège d’Aelys afin que leur mère puisse s’asseoir à son tour tout en restant à côté de son autre fille. Bien que fatigué, son regard avait déjà discerné quelques marques de faiblesse ou des blessures bénignes, ici et là. Elle pourrait s’occuper d’elles, après avoir pu dormir plus d’une heure ou deux. Fière des siens, de sa lignée, la novice l’était. Hélas, la moindre pulsation dans ses muscles restait douloureuse. Aussi ne pouvait-elle l’exprimer comme elle le souhaitait.


« Hélas, je crains de devoir te demander de me narrer à nouveau ces faits d’ici demain. Le sourire de la novice se fit penaud. Si je n’ai guère pris de coup sur la tête pendant la bataille, mon esprit peine à retrouver ses repères. Saerelys s’était à nouveau laissée tomber dans son propre siège, y trouvant là une aide bien secourable. Et toi, Mère ? As-tu un récit dont tu aimerais nous faire part ? Il m’a été raconté que votre chasse a été fructueuse également. »


Sans plus de détails, cependant. Il ne s’agissait-là que des mots d’Aedar à certains de ses questions persistantes. Son jumeau n’avait pas pu faire le voyage sans subir certains de ses assauts. Mère allait-elle bien ? As-tu pu voir Aelys avant ton départ ? Père a-t-il dit quelque chose ? Ces questions s’étaient remises à danser dans son esprit. Alors, la novice serra les dents, tentant de garder contenance en attendant la réponse de sa mère. A croire qu’elle n’avait pas suffisamment dosée sa mixture.





(Gif de gif-hunts-for-you.)
Contenu sponsorisé