Sous le regard de Kaerys, Saerelys glissait plusieurs fioles dans un petit coffret, qu’elle fit ensuite disparaître dans sa sacoche. L’air de la novice était grave, presque aussi sombre que les vêtements qu’elle portait. Ses gestes étaient commandés par cette forme d’habitude, presque mécanique. La jeune femme s’assurait de la qualité de ses remèdes, du bon état de ses instruments avant de les ranger à leur juste place. Encore et encore, répétant même ces gestes parfois même pour des objets déjà consultés. Poussant un soupir, ce fut Kaerys qui stoppa cette étonnante routine, se saisissant promptement du bras de son amie.
« Tu as tout ce dont tu as besoin, Sae. Tu le sais aussi bien que moi. Et quand bien même tu oublierais quelque chose, je me ferais un plaisir de te l’amener. Le regard violet de l’autre jeune femme se posa sur le sac qui se trouvait sur le lit. Je doute que tu aies besoin de tout cela, qui plus est. Sinon, je crains que ta patiente ne soit dans un bien mauvais état ! Tu ne veux pas que je demande à un manipulateur mental de venir avec toi ?
- Ce n’est pas ça, Kaerys. Saerelys poussa un soupir, fermant son sac prestement. Ce n’est pas ça…
- Sae, écoute... »
Kaerys prit les mains de son amie, un sourire aux lèvres. Toutes les deux ne pouvaient qu’être conscientes de ces jeux qui se jouaient au-dessus de leurs têtes. Soigner, Saerelys le faisait aisément. En quoi ce cas serait différent ? La personne à aider était la source de bien des inquiétudes. Il s’agissait de l’une des proches de la nouvelle ambassadrice Andale, Dame Helenys Grafton. La mort d’Hugor Arryn avait été imputée au Collège. Dès lors, offrir de l’aide à l’ambassadrice d’Andalos ne se faisait pas sans raison, ni sans réflexion. Au-delà de son statut d’Appelée de Caraxes, elle-même avait été victime du Rêve de Caraxes. Pour toutes ces raisons, l’envoyer au chevet de la malade pouvait s’entendre.
« Tout ira bien, d’accord ? reprit Kaerys. Tu as l’habitude de ce type de cas. Fais ton travail comme tu l’as toujours fait. Le sourire de la jeune femme se fit plus moqueur. Ne me dis pas qu’une Dynaste a peur d’une pauvre Septa ! J’en serais bien déçue ! »
Au mots de son amie, Saerelys esquissa un pauvre sourire, avant de hocher la tête. Attrapant son sac, la novice salua son amie avant de quitter la pièce. Il lui fallait récupérer une dernière chose au Palais avant de se rendre auprès de sa patiente du jour. Fort heureusement, cela se trouvait sur son chemin. Aussi, la Riahenor parvint devant la demeure de l’ambassadrice Andale avec une certaine avance. Mieux valait ne pas froisser la maîtresse des lieux. Il y avait bien des choses en jeu dans ce service que le Collège offrait cependant aux personnes fortunées. Tapant à la porte, un serviteur vint lui ouvrir, la guidant jusqu’à une antichambre le temps d’informer son employeuse de sa présence.
Alors, la novice resta là, observant la pièce dans laquelle elle se trouvait. La jeune femme devait avouer qu’elle n’avait côtoyé que peu d’Andals au cours de son existence. Dans les faits, sans doute avait-elle davantage traité avec des Rhoynars. Quelques minutes s’écoulèrent ainsi, Saerelys observant les larges tapisseries qui décoraient les murs. Des scènes de chasse, des paysages que la jeune femme ne connaissait pas… C’est alors que la porte présente au fond de la pièce se rouvrit. Le moment était venu. Il était temps pour elle de rencontrer l’ambassadrice.
« Bien le bonjour, Dame Helenys. poliment, Saerelys s’inclina. Je suppose qu’une partie de mon identité t’est connue. Permets-moi cependant de la préciser. La jeune femme se redressa. Je suis Saerelys Riahenor, novice du Troisième Cercle, envoyée par le Collège pour te servir et pour m’assurer que ta Septa retrouve la santé. »
De part le sang qui était le sien, Saerelys avait l’habitude de côtoyer des personnes de haut rang. Et pourtant, la présence d’Helenys lui causait un certain émoi. Se concentrer sur sa tâche comme Kaerys le lui avait dit. Cette Septa n’était qu’une patiente de plus, qui plus est avec une pathologie des plus bénignes. Le fait que l’ambassadrice s’inquiète ainsi pour une personne qui lui était inférieure en termes de rang était un bon signe, d’une certaine manière. Reprendre le fil de sa visite. Il fallait qu’elle reprenne le fil.
« Si tu me le permets, et si tu as du temps pour cela, j’aurai quelques questions à te poser avant de me rendre auprès de ma patiente. La jeune femme se tut quelques instants. Bien sûr, si tu souhaites que je ne sois pas seule auprès de ta Septa, je le comprendrai aisément et accepterait volontiers la présence de la personne de ton choix. »
Les Andals avaient la Magie en horreur dans bien des cas. Ce fait ressortait souvent dans les ouvrages que la jeune femme avait pu lire au Collège. Bien des Septons et Septas plus extrémistes auraient souhaité la voir morte plutôt que magicienne. Et pourtant, fort était de constater que pour des maux comme celui dont souffrait cette femme, la Magie était un artifice des plus utiles. Un artifice capable d’effacer la source de la souffrance en elle-même plus efficacement que n’importe quel remède plus conventionnel.
(Gif de lorenzo-clarice.)