Kasta iksis se perzys ēnka
Thermes, Cité de Valyria ֍ Troisième Mois de l'An 1066
Valyria était en ébullition. La Cité des Dieux s'apprêtait à accueillir ses valeureux guerriers qui avaient triomphé sur la Harpie. Une victoire totale, au prix de quatre longues années du conflit le plus sanglant que le péninsule ait connu. Débutée dans la trahison et l'assassinat, jalonnée de premières défaites qui avaient un instant fait tremblé tous les Dragons, on était finalement arrivé à bout des forces ghiscaries, pourtant supérieures en nombre et fortes de tout un Empire décidé à écraser ces fils de bergers qui, à leurs yeux, s'en référaient beaucoup trop à leurs Dieux. Mais lorsque les feux brûlants de leurs créatures s'étaient abattu sur leur précieuse Baie des Cerfs, ils avaient compris. Compris que cette civilisation au berceau protégé de quatorze volcans n'était pas de celles qui allaient s'éteindre, mais bien de celles qui perduraient jusqu'à la fin des temps. A mesure que les Seigneurs Dragons châtiaient leurs ennemis, les nouvelles des villes qui tombaient à leur merci enflammaient un peu plus la population ; et lorsqu'enfin, Meereen avait été prise, la liesse avait embrasé toute la péninsule. Si le temps du deuil empêcha qu'on se réjouisse pleinement de cet exploit, la paix qui fut définitivement signée sonna du même coup le retour de la joie. On préparait, sans aucune commune mesure à ce qui avait pu être fait par le passé, un triomphe digne de ceux qui s'étaient illustrés par leur bravoure et leur talents, et l'on murmurait que de grandioses festivités irrigueraient la capitale durant plusieurs jours durant.
Envoyés depuis Aquos Dhaen pour préparer comme il se devait les appartements privés de leurs maîtres à Drivo, les serviteurs Arlaeron, composés pour moitié de domestiques de métier et pour moitié des tous nouveaux esclaves qui affluaient à Valyria a mesure que les armées se rapprochaient de la capitale, avait accueilli la famille du Sénateur Lucerys en grande pompe. Comme à leur habitude, ils avaient voyagé à dos de dragon. Aux côtés de sa belle-mère et de ses demi-frères et sœurs, Naerys avait chevauché Selarya, le cœur gonflé d’orgueil et de joie. Depuis le début des conflits, elle n'avait pas revu la capitale. Le Palais d'Argent offrait bien des distractions, mais rien, pas même la somptueuse architecture d'Aquos Dhaen, ne pouvait rivaliser avec l'éclat de la Cité de Valyria. De même, l'intimité que conférait la haute flèche de Drivo lui avait manqué. Enfin, la vie reprenait son cours ! Les festivités annoncées permettraient de nouveau de se retrouver entre pairs, de profiter de musique et de théâtre. Et bien que nombreux seraient ceux qui ne pourraient plus se joindre à eux, il y a avait fort à parier qu'on ne tarisse pas sur les libation en leur mémoire.
Après quelques jours d'acclimatation, Naerys avait décidé de se rendre aux thermes. Elle se languissait des grandes étuves de lait d’aînesse et d'un massage aux huiles que seuls les professionnels des bains transformaient en expérience des sens. Bien que Daerys ait supplié sa mère de la laisser se joindre à elle, Rhaelys avait refusé catégoriquement. Elle allait rendre visite à ses amies de la haute société valyrienne, et souhaitait que sa fille l'y accompagne. Ce serait l'occasion pour la jeune fille de ne pas constamment être accrochée à sa demi-sœur, ce dont l'intéressée ne se plaignait pourtant jamais. De toute évidence, il ne s'agissait là une fois de plus qu'une énième pique dans l'incessante guerre que se menaient les deux femmes, et qui semblait s'être ravivée après quelques semaines d'accalmie. Si Naerys était profondément attristée par l'absence de sa demi-sœur, qu'elle aimait plus que tout au monde et dont il était hors de question que sa belle-mère fane les plus belles années de sa jeunesse, ce fut le cœur presque léger que, flanquée de deux Jurés d'Argent ainsi que de sa toute nouvelle esclave personnelle, Shalya, qu'elle franchit les portes des thermes.
« Je t'attends dehors, Maîtresse ? » Naerys se retourna vivement. « Et puis quoi encore ? Tu viens avec moi. Je ne veux pas qu'on dise que je n'entretiens pas mes serviteurs ! » Elle l'attrapa par la main et se fit remettre pour toutes deux des serviettes. Après quoi elles entrèrent dans le dédale des quelques dizaines de salles de bains, de massages et de repos. Après un premier bain froid et avoir été frictionnées de savon noir, on les mena à un grand bassin de lait d’aînesse. C'était si relaxant que Naerys en poussa un long soupir de plaisir. Shalya, qui n'avait pas souhaité se baigner, fit demander un luth et se mit doucement à jouer. « Tu es une vraie perle ! Continue, c'est très joli... » Acquiesçant, la jeune fille pressa les cordes de son instruments. Alors que Naerys se laissait doucement aller dans le bain, une domestique des thermes s'approcha. « Pardonne mon intrusion, noble Dame. Une nouvelle cliente vient d'arriver. » « Et bien, fais-là entrer, Taryna. Le bain est suffisamment grand pour deux ! »