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Elaena Tergaryon
Elaena Tergaryon
Sénatrice


For the two of us, home isn't a place. It is a person. And we are finally home.


Quadrant Sud, Cité de Valyria ֍ Troisième Mois de l'An 1066

Le Triomphe avait été grandiose, débauche de richesse et de gloire nécessaire pour mettre un point final à cette guerre qui avait tant duré. L’émotion que j’avais ressentie à la vue de mon frère mis à l’honneur de la sorte avait été sans égal. Le temps était rythmé par un programme très précis. Le Triomphe avait à présent pris fin, et chacun avait été invité à se préparer en vue d’une fête grandiose dans l’un des palais du Quadrant Sud. J’avais espéré arracher un moment seule avec mon frère… en vain. Il me semblait que nous avions été dévorés par un tourbillon incessant de paroles et d’obligations, nous gardant irrémédiablement séparés l’un de l’autre. Je soupçonnais même notre père d’être à l’origine de tout cela. A peine le Triomphe avait-il été clos que déjà notre père attirait Maekar pour le présenter à certains de ses amis sénateurs. Par la suite, chacun s’était pressé auprès de lui et il m’avait fallu rentrer avant lui pour me préparer. S’il avait pu revenir au palais avant de se rendre à la fête, je n’en su rien et il ne me fut pas permis d’échapper une seule seconde aux bavardages de mes cousines bien trop excitées à l’approche de la fête. Cette fête d’ailleurs dont tout le monde parlait depuis des jours. Elle serait le coup d’envoi de quatorze jours de célébration, plus grandioses les uns que les autres. Cette fête devait être un lancement réussi, ainsi l’on annonçait un banquet si abondant que Syrax même s’en trouverait étourdi, des spectacles et des danseuses lascives. Il était coutume que les fêtes de notre belle Valyria n’avait rien des chastes célébrations que pouvait évoquer l’ambassadeur Andal, Hugor Arryn. Nous, Valyriens, aimions la vie et ses plaisirs. Ainsi nos fêtes ne manquaient jamais de nourriture, de boisson et de beauté. Il était coutume que ces fêtes deviennent plus lascives à mesure que les heures s’égrainaient au coeur de la nuit. Cette coutume n’était guère la mienne. Je me trouvais bien idiote de redouter ces fêtes alors même qu’elles constituaient le coeur de la vie sociale Valyrienne. Pourtant, ayant vécu mon rêve de Meleys très peu de temps avant la guerre, et celle-ci ayant mis un terme aux festivités les plus folles, je n’avais guère eu l’occasion d’expérimenter moi-même la sensualité célèbre de mes congénères. Du moins je n’y avais jamais participé.

« Pourras-tu m’excuser auprès de ceux qui demanderont après moi ? Ils ne devraient pas être très nombreux… »

Lorsque je me retournais, Daenyra se tenait dans l’encadrement de la porte de ma chambre.

« Comment fais-tu pour toujours apparaître ainsi ? Serais-tu mage, toi aussi ? »

Je riais et me retournais vers le miroir pour continuer à nouer mes cheveux. Il s’agissait seulement de resserrer les tresses malmenées par les effusions de joie, je préférais profiter de cet instant de paix et de solitude plutôt que de laisser quelqu’un d’autre s’en charger pour moi. Pourtant, rapidement les doigts de Dae se mêlaient aux miens pour finalement les remplacer et continuer le travail.

« Tu sais que tu dois être de la fête, Dae. »
« Je sais. »

Elle répondait d’un air absent, visiblement déjà fatiguée par le Triomphe.

« Tu devrais arrêter de t’inquiéter de la sorte, Elaena, si trois années avaient suffit à dévier le coeur de Maekar de toi alors il ne serait plus Maekar. »

Je relevais le regard, surprise alors que finalement j’aurais du me douter qu’elle saurait lire en moi, comme elle le faisait toujours.

« Ne m’étudies pas trop, ma soeur, tu risquerais d’être choquée. »
« Oh par tes envies de luxures et de débauche ? »

Elle avait pris un faux air d’innocence et il n’en fallait pas plus pour nous provoquer le plus délicieux des fous rires.

« J’imagine que je ne saurais jamais rien de tout cela. »
« Mais enfin que racontes-tu là, tu peux, au même titre que moi, prétendre à toute la luxure dont Valyria voudrait bien te gratifier. »

Elle soupirait en un sourire, soudainement absente. Elle ressemblait à bien des égards davantage à Maekar qu’à moi. Il était connu dans la famille qu’Aenar et moi-même avions des caractères semblables, impulsifs, spontanés, sensuels, sans doute imprudents par là-même. Maekar, Daenyra et Maerion avait hérité du caractère de notre père, bien plus réfléchi, plus introverti sans doute également.

« Elaena, Daenyra, il est temps d’y aller, votre père et vos frères sont déjà partis. »
« Déjà, mais… Nous n’avons pas même pu saluer Maekar depuis son arrivée ! »
« Elaena, tu le salueras lors du banquet, ne fais pas l’enfant. »

Elle sortait dans un tourbillon de soie, visiblement agacée par le retard accumulé par ses filles, l’empêchant de profiter dès maintenant de la fête.

***


La ville était décorée avec goût, et spécialement pour l’occasion. Les invités se pressaient dans les différents espaces pour en découvrir les secrets. Dans le grand hall étaient disposés des banquettes à même le sol, entourées de mets plus délicieux les uns que les autres. Les serviteurs et esclaves se pressaient afin de proposer des boissons aux invités dès que leurs coupes semblaient vides. Nous traversions le hall bien trop lentement à mon goût. Nous n’avions guère le choix, puisqu’il nous fallait saluer tous les visages connus gravitant sur notre chemin. Je croisais le regard de l’ambassadeur de Chroyane, le prince Garin Rosayan, et il fondait sur moi sans attendre une seconde, me proposant une coupe ainsi que quelques grains de raisins. L’homme était charmant, avec un exotisme perturbant je devais l’avouer. Nous avions déjà eu l’occasion de nous fréquenter à l’occasion d’une invitation de mon père à Garin de séjourner quelques temps à Oros. Le commerce avec les Rhoynars était essentiel aux affaires de nos familles. J’avais dès lors déjà pu apprécier son esprit, tranchant mais bien souvent d’un humour irrésistible, et ses élans charnels connus dans tout Valyria. Je n’en avais jamais fait les frais bien sûr, mais sa réputation le précédait largement. Je restais un instant à échanger avec lui, riant malgré moi aux éclats alors qu’il s’amusait à singer les airs de l’ambassadrice de Ghis et des sénateurs durant le Triomphe. Je me laissais tant happer par son esprit que j’en perdais de vue ma mère et ma soeur et me retrouvais seule. Prenant congés de l’homme, il me fallu promettre de lui réserver une danse afin de pouvoir quitter la pièce. La seconde pièce était bien plus calme, réservée aux discussions feutrées et sérieuses, elle était quelque peu enfumée par les vapeurs des pipes. Non loin se trouvait la petite cour où des musiciens jouaient pour des danseuses aux airs exotiques. Leurs danses enchanteresses, la musique entraînante, n’étaient que rendues plus belles par le ciel étoilé, le son du vent dans la verdure ornant la cour ainsi que le clapotis de l’eau de la fontaine centrale.

Je devinais deux pièces où des coussins étaient disposés au sol, ces salles servant au départ à accueillir des petits groupes souhaitant manger dans le calme se transformaient rapidement en écrin pour les orgies les plus sensuelles. Décidant de garder ces pièces pour plus tard, je m’aventurais dans la cour, attrapant au passage une coupe de vin je la traversais lentement, prenant le temps de savourer la douceur de l’air et la beauté de la scène. Je déambulais avec plaisir dans la villa, m’arrêtant régulièrement pour échanger avec des amis rencontrés par hasard, des dignitaires empressés de me féliciter pour mon nouveau rôle d’héritière, ou encore de courageux jeunes hommes désireux de passer quelques minutes  avec moi. Le temps semblait filer à une vitesse surnaturelle. A mesure que je progressais dans la villa, il me semblait que la nuit se faisait plus noir, l’ambiance plus feutrée et électrique. Je retrouvais finalement le hall, encore centre de la fête à cette heure. S’y pressaient de nombreux invités, pour manger bien sûr, boire c’était évident, mais également voir et être vu. J’apercevais d’ailleurs la seule personne qui ne m’avait pas été donné de rencontrer avant cet instant en cette journée de fête.

« Valeureux soldats, pardonnez mon intrusion dans vos discussions d’hommes, mais je ne peux résister à l’envie de vous voler mon héros de frère. »

Les soldats qui entouraient Maekar m’adressaient presque à l’unisson un signe de tête respectueux, certains même osaient un sourire, il fallait dire que la soirée était à la fête ! S’excusant auprès de leur général, les jeunes hommes s’éloignaient et rejoignaient d’autres groupes rieurs et déjà largement alcoolisés.

« Dois-je à présent t’appeler mon général ? Serait-il plus convenable que j’en appelle à l’un de tes hommes pour organiser une audience ? Il semblerait qu’il soit plus difficile de t’approcher ce soir que de côtoyer les Dieux eux-mêmes… »


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Personne n'avait préparé Maekar à une vie de pouvoir et d'influence car il n'avait jamais été supposé en avoir, ou tout du moins il ne l'avait jamais espéré, aussi lorsqu'il avait été nommé général il avait accepté cette promotion avec humilité et autant de dévouement que possible, sans qu'une seule fois le prestige d'un poste tel que celui-ci ne lui monte à la tête. Il avait été éduqué pour être responsable, pour garder la tête froid et ce fut exactement ce qu'il fit durant les 3 dernières années mais, à présent, maintenant qu'il était de retour chez lui, cette nouvelle réalité lui semblait si...étrangère. Dés que le Triomphe fut terminé et que le Tergaryon eut une chance de s'éclipser, ne serait-ce qu'un instant, il retourna au palais et, lorsqu'il pénétra dans la pièce qui fut autrefois sa chambre, il s'immobilisa un instant, balayant la pièce de son regard en laissa un silence presque religieux s'installer.
Cette pièce et chaque objet qui s'y trouvait avaient tous une histoire, un souvenir auquel Maekar n'aurait eu aucun mal à penser en cet instant mais, alors que ses pieds se posaient dans cette pièce, il eut une étrange impression de ne plus se sentir à sa place. Durant quatre ans cette fichue tente et cette couchette bien trop dure furent tout ce que le chevaucheur de dragon put appeler son foyer mais, lorsqu'il posa ses yeux sur cette couchette luxueuse et les bougies aux senteurs printanières disséminées dans sa chambre, Maekar fut tenté de tourner les talons en croyant sincèrement qu'il s'était trompé de chambre. Cela ne pouvait pas être...pourquoi ne reconnaissait-il rien ? Pourquoi rien de tout ceci ne lui semblait agréablement familier ? Il resta là, interdit pendant quelques minutes, jusqu'à ce que l'un des domestiques vienne s'occuper de le débarrasser de son étouffante armure. Il fut tenté de protester car il s'en était occupé tout seul durant les dernières années mais, devant l'insistance et la déférence de ce domestique dont il avait oublié le nom avec le temps et la distance, il se laissa faire jusqu'à ce que d'autres viennent lui apporter des vêtements propres pour la soirée qui s'annonçait...intense.

Les portes de sa chambre fermée, fraîchement sorti d'un bain le jeune homme vint s'asseoir à son bureau, vêtu d'une simple serviette comme protection de ce qui lui restait de pudeur, avant d'attraper une lame pour tailler cette vilaine barbe de dix jours qui lui donnait un aspect bien trop rustre. Il n'y avait rien qu'il détestait plus que ce stupide jeu des apparences, mais il ne pouvait plus se permettre d'être aussi insouciant qu'il le fut par le passé, car il allait désormais évoluer loin de la sphère d'influence de sa famille. Était-il à l'aise avec cette idée ? Pas le moins du monde, encore incapable de dire s'il était digne de ce nouveau poste de sénateur et s'il n'allait pas l’entacher de son incompétence en matière de politique mais, par-dessus tout, ce n'était pas tellement l'éloignement de sa famille mais la peur de perdre sa sœur qui l'avait tenu éveillé, chaque soir, depuis qu'il avait pris sa décision.
Il s'était donc drapé d'une tunique noire au fin liseré d'argent colorant la tenu, avant de se diriger vers la ville où il avait été invité pour poursuivre cette folle soirée, sans trop savoir ce qui l'attendait. Maekar aurait voulu s'adresser à son père en tout premier lieu afin de lui expliquer la situation, afin qu'il ne prenne pas cette décision comme une offense personnelle, mais lorsqu'il aperçut son géniteur à l'entrée de la ville il sut que cette occasion ne se présenterait pas ce soir. Malgré leurs différends, malgré la décision de Maekar de ne pas prendre la place de son père au Sénat et à la tête de la famille, ce dernier avait espéré avoir une véritable discussion mais, lorsque son géniteur le présenta au premier sénateur qui passait, le jeune général sut comment allait se dérouler sa soirée : un enchaînement de poignées de mains,  de récits de ses faits d'armes et d'avis ou idées concernant sa nouvelle fonction de sénateur.

Durant les minutes et heures qui suivirent, le jeune général passa donc de groupe en groupe à porter des toasts et échanger des discours rassurants car c'était ce qu'on attendait de lui, jusqu'à ce qu'enfin il soit abordé par trois officiers venus le féliciter de sa nomination. Voyant cette arrivée comme une porte de sortie amplement méritée et désirée, Maekar s'excusa auprès des deux sénateurs présents autour de lui et se faufila à travers la foule, jouant des coudes jusqu'à arriver au côté du trio d'officiers qui lui tendirent un nouveau verre de vin. Contrairement aux nobles et grandes pontes présents à cette soirée les officiers se fichaient de la renommée de Maekar car il avait évolué à leurs côtés pendant les quatre dernières années, ils étaient des frères pour ainsi dire, aussi la soirée fut nettement plus plaisante jusqu'à ce qu'une voix très familière ne vienne apporter un peu de lumière dans sa vie.

« Excusez-moi, messieurs, le devoir familial m'appelle. À plus tard. »

Bien sûr qu'il plaisantait, cela n'avait jamais été un devoir mais un plaisir d'accorder du temps à sa jeune sœur. Il laissa donc les officiers s'en aller en souriant, avant d'écouter la charmante demoiselle  rire de sa nouvelle renommée récemment acquise. Souriant à l'idée d'être appelé par son titre par sa sœur, Maekar répondit sur un ton tout aussi léger.

« L'idée est tentante, seulement si tu me permet de t'appeler Dame Elaena Tergaryon.  »

Il essayait d'en rire mais en vérité ce n'était pas de gaieté de cœur. Sa décision avait forcé Elaena à plonger dans un monde qui n'était pas le sien, à porter une nouvelle responsabilité à laquelle elle n'avait jamais été préparée. S'en voulait-il ? Bien sûr que oui ais ce n'était guère le moment d'aborder le sujet. Maekar leva la tête et salua de loin un nobliau croisé un peu plus tôt, souriant par pure politesse, avant de baisser la tête pour soupirer.

« Deux semaines comme ceci, je ne sais pas vraiment  comment je vais survivre. On aurait dit que Père avait l'intention de me présenter à tous les sénateurs, en une seule soirée. »

Il savait bien que cette attitude était purement intéressée mais, si Maekar s'était forcé à suivre le pas, c'était pour montrer à son père qu'il pouvait être de bonne volonté en espérant que cela le pousse à officialiser les fiançailles avec sa sœur. Suivre sa propre voie ne voulait pas nécessaire dire que celle-ci serait inadaptée à celle de sa famille, non ? Enfin bon, cela ne servait à rien de penser à tout ceci alors qu'il n'avait pas encore réellement parlé au chef de famille, en tête à tête. En attendant, il se focalisa sur le rayon de soleil qui venait d'arriver devant lui, lui proposant une coupe si elle n'en avait pas déjà une, alors que lui-même levait son verre rempli d'un vin au nectar fruité évident.

« Au moins nous pouvons trinquer à mon retour, à présent.  »

Leurs deux vinrent se rencontrent et, une fois que le jeune homme eut avalé une lampée de ce doux nectar, il posa son verre sur la table à sa gauche, posant ses yeux sur la demoiselle avant de s'avancer vers elle. Cela faisait 3 ans qu'ils n'avaient pas été l'un avec l'autre, trois ans que le quotidien de Maekar n'avait été fait que d'horreur et, en cet instant, face à ce visage angélique, tous ces souvenirs disparurent pour laisser place à une éblouissante clarté. D'instinct, il s'avança et vint entourer cette muse de ses bras, avec une douceur amusante compte tenu de sa puissante carrure avant de la serrer tout contre lui.
Peu importait à quel point cette soirée pouvait être assommante, peu importait ce que les jours à venir lui réservaient, sa sœur était là et c'était tout ce qui comptait. Dans un souffle, son corps toujours collé contre celui de la belle,  il finit par lui murmurer :

« C'est bon de te revoir. »
Elaena Tergaryon
Elaena Tergaryon
Sénatrice



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Quadrant Sud, Cité de Valyria ֍ Troisième Mois de l'An 1066

« Excusez-moi, messieurs, le devoir familial m'appelle. À plus tard. »
« Il fut un temps où le devoir familial provoquait chez toi un enthousiasme bien plus grand, tu as changé Maekar Tergaryon ! »

Je prenais un air faussement outré alors que j’avais perçu sans mal l’ironie de sa voix. Comme j’aimais que nous retrouvions nos habitudes si vite, que nos échanges ne se fassent guère timides ou timorés mais qu’ils explosent dans toute leur beauté. Sans doute était-ce cela qui rendait cette relation si plaisante, nous n’étions pas de ceux qui cessent de se défier, bien au contraire, c’était bien ce goût de défi permanent, de provocation, qui avait pour effet immédiat d’allumer le feu qui nous consumait tous deux. Du moins j’espérais qu’il le consume autant que moi. J’espérais que la guerre n’ai rien changé à ce que nous étions. Qu’il ait changé lui, cela je pouvais le supporter, je l’aimerais autant, peut-être plus encore pour cette fragilité que la guerre aurait pu ouvrir chez lui. Mais je ne pensais pas être en mesure de supporter qu’elle ait pu changer ses sentiments pour moi.

« L'idée est tentante, seulement si tu me permet de t'appeler Dame Elaena Tergaryon. »
« Ah mais oui tu le dois, Sénateur, et peut-être même devrais-tu m’appeler Très Noble Dame Elaena Tergaryon… La Très Noble Dame Elaen Tergaryon et le Téméraire Général Maekar Tergaryon… »

J’avais pris un air faussement suffisant, usant d’une voix plus grave et plus ampoulée pour prononcer ces titres. Si le mien était ridicule, le sien était pourtant bien réel, je n’avais rien d’une très noble dame, mais il avait tout d’un héros téméraire de guerre. Je ne parvenais pas à détacher mon regard de lui, et pourtant je percevais sans peine les regards et les mains levées pour le saluer à mesure que les gens arrivaient à la fête. Il en était le centre, lui et ses camarades revenus en héros, et tous voulaient leur part de ces héros. Autant de petites parts de son attention qui ne me revenaient plus, de fait.

« Deux semaines comme ceci, je ne sais pas vraiment comment je vais survivre. On aurait dit que Père avait l'intention de me présenter à tous les sénateurs, en une seule soirée. Au moins nous pouvons trinquer à mon retour, à présent. »

Je levais ma coupe en même temps qu’il levait la sienne et elles s’entrechoquèrent dans un bruit discret qui évoquait la fête et la bonne chair.

« Trinquons à ta gloire… et aux portes que nous devrons élargir pour permettre à ta tête d’y passer s’ils continuent tous à te couvrir de compliments. »

Beaucoup se seraient vexés, des êtres susceptibles ou incapables de comprendre l’humour si particulier qui existait entre nous. Je n’avais nul doute sur le fait que le rire de Maekar ferait écho au mien, du moins je l’espérais et cela serait sans doute un test bien efficace pour déterminer si notre relation sortait intacte de ces années de séparation. Il riait bien, et s’avançait vers moi, m’étreignant avec douceur et m’attirant vers lui dans un contact que je n’osais plus espérer.

« C'est bon de te revoir. »

Sans doute aurait-il été de bon ton de répondre qu’il m’avait manqué, ou qu’il était divin d’être à nouveau contre lui… Mais j’étais incapable de parler, entièrement à la tâche de me remémorer l’odeur de sa peau, le rythme de son cœur, le bruit discret de sa respiration alors que je déposais ma joue contre son torse, réchauffée par le contact de ses mains dans mon dos. Une étreinte fraternelle aux yeux de tous, le retour d’un feu ardent pour moi. J’en avais le souffle coupé de ressentir à nouveau le naturel avec lequel nos deux corps s’imbriquaient à la perfection, la rapidité de nos cœurs à s’harmoniser pour battre à l’unisson, le réflexe de nos respirations pour se caler sur le rythme de l’autre. A mesure que se prolongeait ce contact, nos deux corps semblaient s’accorder sur un même rythme, comme pour ne faire qu’un. Y avait-il plus belle preuve que nous étions, définitivement, irrémédiablement, terriblement, voués à nous aimer ?

J’en étais troublée, bien plus encore que je ne m’y étais attendue. Je savais que mes sentiments pour lui n’avaient pas changés. Je savais qu’il avait toujours autorité sur mon cœur… Mais je n’avais pas mesuré qu’il en était à ce point le maître. Et que son autorité s’étendait sur chaque parcelle de mon corps qui s’était embrasé à son contact. Je fermais les yeux, réfrénant l’envie de l’embrasser, de lécher sa peau, d’en caresser chaque millimètre… Je m’éloignais d’un bond, comme pour me permettre de résister plus facilement au désir qui me consumait comme jamais. Nous étions en public. Sa présence seule attirait tous les regards. Et nous devions à notre père de conserver le secret de nos fiançailles autant que faire se peut. L’effet inattendu de ce contact avait été de me frustrer terriblement et de plonger mon moral dans les abîmes irrésistibles de l’agacement. Chaque regard que pouvaient lui jeter les femmes alentour, et pire les regards que lui pouvait leur lancer, me rendaient plus furieuse à mesure que les secondes s’égrenaient. Et puisque Syrax aime tant le chaos que l’extase, il ne permettait pas que ma rage ne s’apaise, et envoyait un groupe de personnes pour nous rejoindre. L’ironie de nous envoyer un groupe uniquement féminin m’avait au moins été épargnée. Les trois jeunes femmes qui nous rejoignaient étaient accompagnées de quatre jeunes hommes. Nous avions tous eu l’occasion de nous rencontrer auparavant, dans des temps plus anciens pour certains, plus récemment pour d’autres. Les jeunes hommes avaient été en guerre avec Maekar, bien qu’avec bien moins de succès. Les demoiselles ne manquaient aucune des célébrations auxquelles j’avais pu me rendre dans ma jeunesse ou plus récemment après mon arrivée à Valyria.

La discussion était animée, agréable je devais même l’avouer, et pourtant je ne parvenais jamais à dédier mon attention totale au jeune homme qui s’était engagé dans un récit des plus poignant de son moment de gloire contre les ghiscari. Mes yeux ne parvenaient jamais à se détacher trop longtemps de Maekar qui s’entretenait avec un des jeunes hommes et… toutes les jeunes filles. Je voyais la manière qu’elles avaient de le courtiser, d’effleurer son bras, de jouer avec leurs cheveux… Elles me rendaient folle. Et lui… Sa composition polie, les sourires qu’il leur adressait, les traits d’humour qu’il faisait – ayant comme effet bien sûr de le rendre plus attirant encore à leurs yeux je pouvais l’imaginer -, tout cela ne faisait qu’ajouter à ma frustration. Je tentais de me concentrer sur les deux hommes qui m’entouraient et tenter de me divertir, et il me fallait toute la force du Dragon pour étouffer les pensées sensuelles qui me troublaient. Je voyais ses mains et je les imaginais sur moi. Je voyais ses lèvres, et je les voulais contre ma peau. Je voulais que ses yeux ne voient que moi. Que ce bras ou ce torse qu’elles touchaient en feignant un rire ridicule ne soit jamais touché par elles et uniquement par moi. Moi.

« C’est fascinant. Oh et il t’a sans doute fallu tant de courage pour te lancer ainsi dans la bataille… »

Je prenais le même air admiratif – idiot, si vous voulez mon avis – que les jeunes femmes entourant Maekar, effleurant moi-même le bras du jeune homme à ma droite, riant aux remarques de l’autre à ma gauche… En peu de mots, je me montrais stupide et injuste. Oh je n’avais guère besoin que Maekar ne s’insurge pour remarquer que je me montrais injuste avec lui, car s’il ne pouvait rien aux jeunes femmes qui l’entouraient, j’étais responsable de l’encouragement que j’offrais aux jeunes hommes autour de moi. C’était plus fort que moi. Je le voulais ardent. Je le voulais jaloux. Je voulais qu’il démontre davantage que la joie fraternelle d’un homme retrouvant sa sœur. Par Syrax je voulais du chaos, de la folie, de l’excès ! Et il n’était pas peu dire que Maekar n’était jamais tout cela. C’était moi. Qu’elles aient son corps… j’aurais du pouvoir l’accepter. C’était ainsi chez nous. Dans quelques heures sans doute les corps commenceraient-ils à se dénuer, les esprits s’embrumeraient et plus aucune jalousie n’aurait de place légitime. C’était ainsi à Valyria. Et pourtant, l’incertitude de son retour, notre tête à tête rendu impossible par la présence de tant de nuisibles, le désir que je ressentais pour lui et qui me faisait souffrir tant il était puissant… Tout cela concourrait à me rendre possessive. Agressive. Si peu sûre de moi et du fait qu’il était à moi.

« Mesdemoiselles je comprends aisément votre admiration pour mon cher frère, comment ne pas être éblouies. Voyez, je n’ai pas même pu profiter de lui une simple seconde tant il attire à lui les nobles invités de cette fête ! A peine avons-nous trinqué à son retour. »

J’avais prononcé ces mots avec une légèreté contrastant tant avec le poids sur mon cœur que je ne reconnaissais pas moi-même ma voix. Mon ton, faussement enjoué, mon sourire amusé, et le rire que je laissais échapper en fin de phrase parvenaient pourtant à les convaincre. Le groupe se joignait à moi dans un rire discret et ils levaient leurs coupes, arguant qu’il nous fallait dès lors trinquer à nouveau. Le jeune homme à ma droite, ne me quittant plus des yeux depuis le début de notre conversation, se saisissait de deux coupes proposées sur un plateau par un esclave passant non loin de nous. S’approchant de moi, il chuchotait à mon oreille alors que je me saisissais de la coupe et qu’il ne retirait pas sa main encore.

« Laissons ton frère profiter de sa gloire… Peut-être accepterais-tu de m’accompagner dans la petite cour, la musique y est enchanteresse parait-il ? »

Il était poli, pas encore suggestif mais l’heure avançant je ne doutais pas de ses intentions. Elles ne rejoignaient pas les miennes mais elles avaient pour avantage de me distraire un instant. Je répondais, sans chuchoter mais à voix basse.

« C’est que… mon frère vient tout juste de revenir, tu comprends ? »

« Il me semble avoir déjà beaucoup à faire, tu ne crois pas ? Le héros doit avoir sa récompense ce soir. »

Son sourire, à présent suggestif, me donnait envie de le frapper. Mais il marquait un point. Si c’était cela que cherchait Maekar, n’était-ce pas mieux de le laisser ? Ne pouvais-je pas le comprendre, au fond ? Dépassant ma jalousie, ne pouvais-je pas imaginer qu’après quatre années à défier la mort, à ne côtoyer presque que des hommes dans une ambiance fraternelle, un homme puisse chercher à assouvir des désirs trop longtemps réfrénés ? Et ne pouvais-je pas comprendre que, peut-être, son corps ne réclamait pas le mien et le portait vers la découverte de nouveaux horizons ?

« J’imagine… Allons-y alors. »

Bien malgré moi je quittais le petit groupe, le visage empreint d’une certaine déception de déjà devoir laisser derrière moi cet homme à qui j’avais tant à dire sans en avoir l’occasion. Je ne regardais pas sa réaction face à mon départ, laissant Gaenon s’excuser pour notre départ et m’entraîner vers la petite cour où se produisaient toujours les musiciens. Un peu absente je le laissais me guider, sa main dans mon dos, flirtant avec la naissance de mes reins sans jamais oser s’y aventurer, sa voix me chuchotant à quel point la musique était belle, à quel point le ciel était beau, comme le bruit de l’eau mêlé à celui du vent offrait une dimension enchanteresse à la cour.

« Oh, mais quelle sotte ! J’ai promis à une amie très chère de la rejoindre sous peu… Tu m’en vois navré, essayons de nous revoir plus tard. »

Un sourire poli aux lèvres je me dégageais de son étreinte et filais vers une pièce plus calme, vérifiant tout de même qu’il ne me suivait pas afin d’évaluer la nécessité d’engager une conversation avec la première demoiselle venue. Visiblement décontenancé il ne prit pas le parti de me suivre, peut-être avait-il pris pour argent comptant ma promesse de nous revoir… Erreur de jugement que je pouvais lui pardonner tant j’avais semblé sincère. Alors je déambulais, finissant ma coupe rapidement pour en attraper une autre, saluant mes connaissances, m’arrêtant pour une plaisanterie ou un compliment avant de repartir à la recherche d’un endroit calme. Les pièces du fond n’étaient pas nécessairement l’endroit où je souhaitais me trouver à cet instant, mais elles avaient le mérite d’être délaissées à cette heure et d’être confortables. Ici et là avaient été déposés des fruits et des douceurs, autant de menus plaisirs qui viendraient bientôt en accompagner d’autres. J’attrapais une fraise d’un air distrait, faisant les cent pas dans la plus petite et la plus éloignée des pièces, tentant de me calmer avant de reparaître. S’il me fallait faire semblant, alors je devais chasser de mon esprit les images tentatrices et pensées meurtrières. C’était peine perdue si ma vision ne me trompait pas.

« Général, tes futures conquêtes t’attendent dans le grand hall… Tu ne devrais pas les faire attendre, regarde tous ces duveteux coussins disposés à votre attention. »

Mon ton s’était voulu calme et acerbe… acerbe il l’avait été, calme un peu moins. J’étais irrationnelle et agressive. Sans doute Maekar même ne devait-il pas comprendre ce revirement d’humeur. Peut-être même serait-il agacé ? Vexé ? Il était coutume pour nous deux d’avoir des échanges piquants, voire parfois violents lorsque nos tempéraments l’emportaient sur nos raisons, mais il venait de revenir… Sans doute s’attendait-il à un accueil plus chaleureux… Et peut-être même étais-je entrain de tout gâcher par cette insécurité qui m’étouffait.


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Contrairement à son défunt frère Maekar n'avait jamais été initié à l'art de la politique et les discussions assommantes qui allaient avec, sans doute parce que son père avait noté assez tôt que son caractère trop discret ne s'y prêtait guère et ce n'était pas pour lui déplaire. Dans une famille chacun avait un rôle bien précis à jouer, une contribution bien particulière à apporter pour maintenir le nom d'une famille intact et, si son aîné avait été pressenti pour être la figure de proue des Tergaryon pour cette nouvelle génération, Maekar avait été pressenti pour être le lien qui lierait l'armée et la gloire aux Tergaryons. N'était-ce pas logique que de jouer ses cartes au bon moment ? Le père de famille se devait d'avoir une vision d'ensemble et, malheureusement, cela devait parfois se faire pour le plus grand déplaisir de ses progénitures.
Bien malgré lui le jeune général se trouvait à présent propulsé sur le devant de la scène sans aucune préparation. Il avait appris à manier les mots juste avant une bataille, afin de réaliser des discours à même de motiver ses troupes et chasser toute peur de leur esprit, mais qu'en était-il lorsque son champ de bataille ne comportait nul adversaire ? Il s'y était adapté autant que possible en comptant quelques uns de ses exploits pour satisfaire la curiosité de quelques Sénateur avide d'histoires de ce qu'il s'était passé en dehors de la sécurité des murs de Valyria, mais il avait toujours cette frustrante impression d'être un dragon à qui on aurait coupé ses ailes. Était-ce étrange de se sentir plus à l'aise sur un champ de bataille, là où la mort était Reine, plutôt qu'au milieu de tous ces gens en admiration devant le symbole de gloire qu'il représentait ? Il tenta bien de chasser ces pensées de son esprit jusqu'à ce que, finalement, une lumière vint éclairer les ténèbres saturant son esprit.

Leur relation avait cela de spéciale qu'elle n'était pas basée sur une admiration mutuelle ou une soumission de la femme envers l'homme, comme Maekar avait pu le voir de nombreuses fois, mais bien sur un constant jeu de chaud et de froid à base de regards éminemment évocateurs et de piques lancées çà et là. Oh oui ils avaient leurs doux moments lorsque personne ne regardait, à n'en pas douter, mais leurs joutes verbales avaient toujours été une grande partie de leur attraction mutuelle. Aussi, lorsque la demoiselle annonça son nouveau titre et cela de son frère, le concerné ne put s'empêcher de baisser la tête sous forme d'une révérence discrète, tout en répondant sur un ton plus léger que la situation ne l'exigeait :

« Cela sonne plutôt bien, je trouve, Très Noble Dame. »

Ils étaient de la même famille mais, même au sein de cette organisation, il y avait toujours eu une telle proximité entre les deux qu'aucun titre ou marque de respect n'était nécessaire. En vérité, parmi toutes les personnes qu'il connaissait et y compris les soldats au côté desquels il s'était battu, Maekar pouvait dire avec une certaine assurance que Elaena était la personne qui le connaissait le mieux au monde. Il n'avait pas besoin de filtre ou de faux-semblant avec elle, elle avait été celle à même de le faire sortir de sa coquille jusqu'à ce que cet humour piquant ne cesse et, pour cela, il lui en serait éternellement reconnaissant.

« Je ne sais pas si j'arriverai à m'y faire, un jour. Je vais finir par devenir aussi élargir mon casque, en vue de la prochaine... »

Si Maekar avait laissé un sourire se dessiner sur son visage à l'évocation des flatteries lancées à son encontre toute la soirée, conscient que celles-ci ne feraient que se multiplier au fil des jours et semaines à venir, ce sourire perdit en intensité alors qu'il décida de couper sa dernière phrase avant la fin. En vue de la prochaine guerre, voilà ce qu'il voulut dire mais se força à ne pas le faire par crainte de détruire la bonne humeur de ces retrouvailles bien méritées, bien que cette pensée n'aie pas quitté son esprit depuis son retour à Valyria. Fort heureusement l'arrivée d'un nouveau groupe vint distraire suffisamment le général pour chasser ces pensées et, s'il accueillit ces nouvelles têtes avec bienveillance et une pointe d'amusement, cette joie ne fut que d'assez courte durée.
D'autres auraient trouvé cela plaisant qu'autant de femmes ne cherchent à le mettre dans leur lit ce soir, Maekar n'était pas parti d'ici assez longtemps pour oublier la signification de ces gestes et ces rires supposément innocents mais, même s'il écoutait et souriait parce que c'était ce qu'on attendait de lui, son regard finissait toujours par se tourner vers sa sœur, qu'il le veuille ou non. Durant leur séjour à Meereen bon nombre d'officiers avaient été la cible des charmes de jeunes femmes prête à tout pour sauver leur peau ou pour voir si les valyriens étaient aussi fougueux que leurs dragons et, si beaucoup avaient cédé du fait de l'éloignement de leur famille ou leurs compagnes, Maekar avait été l'un des seuls à rester concentré sur sa tâche et rien d'autre. Mais maintenant qu'il était là, à quelques mètres d'elle à peine, il sentait son corps tout entier lui rappeler que, comme tous les valyriens, il avait un brasier en lui qui ne demandait qu'à s'étendre.

Bientôt l'attention du général fut détourné lorsque sa sœur lui faussa compagnie au bras d'un homme plus entreprenant et avenant que lui et, si Maekar se força à sourire pour les convives qui restaient, son esprit était désormais ailleurs, s'imagine ce que ce jeune parvenu avait en tête de faire au corps et à l'âme de celle qui devait être sienne. Il resta là pendant un instant mais, au bout d'un moment, n'y tenant plus décida de prendre les choses en mains.

« J'espère que vous m'excuserez, mais je dois me dérober à votre compagnie, un instant. Nous nous recroiserons certainement, un peu plus tard. »

Il était plus poli qu'il ne souhaitait l'être en vérité car, si cela n'avait tenu qu'à lui, il serait parti en trombe tout en jouant des coudes pour se frayer un chemin dans la foule. Cependant il n'était pas cet impétueux jeune homme, il avait un statut à présent et il ne put maudire davantage ce constat qu'en cet instant. Rasant les murs, serrant quelques mots et saluant de loin quelques nobliaux à même d'entendre les histoire qu'il avait racontées toute la soirée déjà, Maekar s'enfonça davantage dans la villa pour trouver sa sœur dans une de ces petites pièces à l'utilité plus qu'évidente. Jalouse ? Cela se sentait dans le ton de sa voix et, plutôt que de la rassurer, son frère se posa conter un mur, à côté d'un bol rempli de ces délicieuses fraises, tout en répondant d'un air pensif :

« Tu as sans doute raison, peut-être devrais-je les rejoindre. Elles n'ont pas été très subtiles, quant à leurs intentions. »

Il était un homme avec ses propres besoins, à n'en pas douter, mais sa sœur n'avait aucune idée qu'il avait réussi à les contenir pendant trois longues années, pour une personne très particulière à ses yeux. Prenant une pause, levant les yeux au plafond comme s'il cherchait une réponse quant à l'attitude à adopter pour la suite de la soirée, il se permit de prendre une fraise dans ce bol à côté de lui, tout en reprenant :

« Ou alors je pourrais me concentrer sur la seule qui m'a tapé dans l’œil. Oui, cela pourrait être mieux. »

Passant une main sur son menton d'un air pensif, simulant une réflexion qui n'avait même pas lieu d'être, Maekar tenta de garder son sérieux tout en concluant d'un :

« Par contre, impossible de me rappeler de son prénom. »

Levant sa main pour coincer la fraise entre ses dents, sans l'écraser pour autant, Maekar toujours adossé au mur tourna la tête vers sa chère sœur, avant de lui lancer un sourire en coin teinté d'espièglerie. Son sourire était peut-être moqueur, s'adonnant aux mêmes jeux que d'habitude mais son regard, lui, reflétait un brasier qui ne souffrait aucune ambiguïté.
Elaena Tergaryon
Elaena Tergaryon
Sénatrice



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Il entrait et pour la première fois depuis le début de cette soirée nous étions enfin isolés, presque seuls si l’on faisait abstraction des quelques personnes dans les pièces adjaçantes. Il prenait appui contre le mur et plongeait son regard dans le mien, visiblement amusé par mon agressivité.

« Tu as sans doute raison, peut-être devrais-je les rejoindre. Elles n'ont pas été très subtiles, quant à leurs intentions. »

Il jouait. Je le connaissais suffisamment pour reconnaître l’air de défi qui brillait dans ses yeux. Cela aurait du m’énerver plus encore, mais cela me rassurait, car nous retrouvions sans peine nos habituelles joutes verbales, celles-là mêmes qui nous rendaient si complices. J’avais bien conscience, depuis le début de cette soirée, que l’homme qui se tenait devant ne pourrait pas n’être qu’à moi, ils seraient bien nombreux à demander une part de l’intention du héros, ou la chance d’obtenir son corps ne serait-ce que pour une heure… une nuit. Peut-être que si nous avions pu officialiser nos fiançailles aurais-je été plus à l’aise avec cette idée. Peut-être. Toujours était-il que je naviguais dans les eaux troubles de la jalousie et du désir. Ne laissant rien paraître sur mon visage, je décidais d’entrer dans cette danse qu’il avait lancée. Je me déplaçais vers le buffet le plus proche de moi, attrapant lentement une coupe remplie de nectar alcoolisé et quelques fruits sur une assiette. Ne le quittant pas des yeux pour autant, je déposais l’assiette au sol et m’asseyais sur l’un des grands fauteuils à trois places qui avaient disposés parmi les coussins. M’asseyant délicatement, je repliais les genoux et me tournais vers le côté afin de m’étendre légèrement tout en conservant le lien établi par nos yeux.

« Pourquoi être subtile lorsque l’homme est captif. »

Je ne souriais pas, la colère n’était plus si vive mais je tentais de rester distante autant que possible. Nos retrouvailles ne pouvaient être simples… Cela ne nous ressemblait pas. Buvant une nouvelle gorgée, je laissais échapper un soupir de contentement, lascif, presque provoquant. Nous avions compris à quel jeu nous souhaitions jouer et pour l’un comme pour l’autre il n’y avait pas de marche arrière. Nous venions de nous engager dans un défi duquel nous sortirions probablement tous deux gagnants. L’enjeu, le piment, résidait dans le déroulé qui nous mènerait au dénouement de ce jeu.

« Ou alors je pourrais me concentrer sur la seule qui m'a tapé dans l’œil. Oui, cela pourrait être mieux. Par contre, impossible de me rappeler de son prénom. »

Mes yeux ne pouvaient se détacher de cette fraise, elle passait entre ses mains, s’approchait de son visage pour rejoindre ses lèvres, ses dents, sa langue. Elle restait là, comme en suspens, et je pensais voir sans peine où mon frère cherchait à en venir. Cela aurait pu avoir pour effet de nous rapprocher, peut-être était-ce sa manière de m’exprimer que je lui avais manquée et que son désir était au moins aussi ardent que le mien. Pourtant, il avait lui-même commencé ce jeu, et je n’étais pas prête à le laisser être victorieux. Il connaissait son pouvoir sur moi. Mais je connaissais mon pouvoir sur lui.

« Si son prénom ne te revient pas… peut-être n’est-elle pas si importante. J’y pense, il me faut suivre ton exemple. Tant de prétendants et si peu de temps… Tu auras la bonté d’inviter Gaenon à me rejoindre lorsque tu partiras à la recherche de cette femme sans prénom, autant profiter de cette pièce encore si vide. »

Cette fois, je laissais mon sourire s’exprimer, ricanant presque alors que je laissais ma main libre remettre quelques mèches en place pour ensuite effleurer mon cou, passer rapidement à mon ventre pour rejoindre mes jambes. Arrivée à destination, cette main baladeuse se saisissait du tissu léger de ma robe pour le remonter légèrement. La caresse du tissu quittait bientôt mes chevilles pour visiter la peau de mes mollets avant de rejoindre mes genoux, elle atteignait mes cuisses lorsque je m’arrêtais soudainement.

« Tu manges ces fraises du bout des lèvres, Maekar Tergaryon… Peut-être pourrais-je te laisser déguster les miennes, elles sont sucrées et juteuses à souhait. Il faudrait pour cela que tu t’approches. »

Sa stratégie s’était avérée payante. Ma rage était passée, mon insécurité légèrement battue en brèche, ne restait plus que le désir et la curiosité de voir où cette échange nous mènerait. Il avait entamé ce jeu mais j’en avais toujours été la joueuse la plus téméraire.

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Lorsque les premières rumeurs d'une guerre imminente parvinrent aux oreilles de tous les hommes valyriens en âge de porter les armes, la plupart y virent l'occasion de briller et d'associer gloire et richesses et leurs propres noms, car la guerre semblait pour eux le meilleur moyen de devenir quelqu'un, mais aucun ne pensa à mesurer quelle portion de leur âme serait avalée par ce conflit long de quatre années. Les héros étaient enfin de retour et la population s'était émerveillée à cette annonce, les rues s'étaient ouvertes, les façades s'étaient couvertures des plus belles broderies pour célébrer une victoire gagnée dans le sang et les larmes, mais que restait-il vraiment de ces héros ? Maekar se savait changé et transformé en quelque chose de plus dur sous bien des aspects et, même si elle ne le vocalisait pas, il savait que sa sœur devait déjà se demander à quel point il avait changé, là-bas. Qui ne le ferait pas à sa place ?
D'autres auraient pu s'asseoir à une table et raconter à leur père ou leur future soeur-épouse les horreurs qui avaient été leur quotidien pendant ces quatre années, mais Maekar n'était pas de ces hommes-là, car il ne pensait pas pouvoir ressortir quoi que ce soit de bon de ce carnage. Il avait été tour à tour brisé et porté aux nues par ses hommes et ceux qui n'avaient rien vu de la guerre, mais il ne pouvait décemment pas se permettre de rouvrir cette plaie béante. Pas maintenant, pas ici, pas avec l'objet de son désir juste à côté de lui.

Il n'avait pas été éduqué pour être un beau parleur mais pour être fort et c'était exactement ce qu'il avait intention d'être. Du moins était-ce son idée en tête, jusqu'à ce que la belle à ses côtés ne ressorte l'aspect joueur de sa personnalité, cet aspect enfoui depuis bien trop longtemps et qui, étonnement, revint à la surface avec une facilité déconcertante. Elle n'avait besoin que d'un regard, que d'un murmure pour lui faire comprendre ses intentions et, à cette idée, le général ne put s'empêcher de sourire en l'entendant parler d'hommes captifs de leur propre désir. Était-il de ceux-là ? Définitivement, mais si ce désir était purement physique il aurait pu l'épancher dans les bras de n'importe quelle femme de Meereen. Il ne l'avait pas fait, mais sa sœur n'en savait rien...pour le moment. Curieux de voir jusqu'où ce petit jeu pourrait continuer, l'homme prit un air faussement surpris à l'évocation de l'homme qui avait tenté de subtiliser Elaena à son frère, quelques minutes plus tôt, sans grand succès.

« Gaenon ? Allons, c'est un soldat qui a besoin d'une femme...d'expérience, après tout ce temps passé loin de chez lui. Penses-tu être à la hauteur, ma chère sœur ?  »

Était-il en train de lui faire comprendre ce qui avait pu se passer là-bas, si loin des bras aimant d'une femme chère au cœur de ces soldats ? Bien sûr que oui, mais il ne désira pas se pencher sur sa gestion personnelle de l'éloignement. Préférant jouer avec cette fraise encore un peu, Maekar accepta enfin de la croquer lentement au moment où sa sœur sembla vouloir le tester davantage, par quelques gestes équivoques tout d'abord, teinté de sensualité et de provocation, avant d'inviter l'homme de son cœur à venir goûter aux lèvres dont il avait été si longtemps éloigné. Venant s'asseoir au bord de la couchette, au niveau des pieds de la demoiselle, le guerrier  resta un moment en silence, admirant la beauté de sa muse tout en sentant le brasier gagner en intensité. Un instant, l'espace d'un instant, une craquelure apparut dans son esprit et il se força à fermer les yeux, prenant une profonde inspiration pour résister à l'envie qui gagnait du terrain.
Il était un homme de maintien et de retenue, alors pourquoi ne parvenait-il pas à résister à cette femme, étendue devant lui ? Parce qu'elle n'était pas qu'une femme, justement, mais bien plus que cela. Lorsqu'il rouvrit ses yeux, son visage se fendit d'un sourire teinté d'une pointe d'espièglerie, alors que le bout de ses doigts vint caresser la peau douce des pieds de sa muse.

« Essaierais-tu donc de m'arracher à mes nombreuses prétendantes, ce soir ? Toujours aussi impossible, à ce que je vois.  »

Ce n'était pas la première fois qu'elle le provoquait de la sorte et, malgré sa retenue, il se laissait à chaque fois tomber dans le piège. Parce qu'il savait ce qu'il y avait derrière ce piège et ce petit jeu, aussi dur soit-il pour ses nerfs, en valait largement la peine. À l'évocation des lèvres d'Elaena, l'homme fit courir ses doigts le long des jambes de la demoiselle, ne la perdant pas de son brûlant regard ne serait-ce qu'un instant.

«  Il est possible que j'en aie oublié le goût. Vois-tu, cela fait si longtemps, ma mémoire est quelque peu...floue.  »

Oh non il n'avait pas oublié mais il aimait le faire croire en tout cas, comme s'il avait vraiment une raison de vouloir de nouveau goûter à ces lèvres, et bien plus encore. Sentant qu'il ne pourrait pas se contrôler bien longtemps, il s'en leva donc de la couche, lentement, jusqu'à se pencher finalement vers elle, posant ses deux puissantes mains à gauche et à droite de sa tête, s'approchant toujours plus près, sans pour autant céder. Le sourire éclairant son visage, il s'approcha et, alors que ses lèvres ne firent effleurer un instant celles de sa sœur, il se fit violence une toute dernière fois, reculant de quelques centimètres avant de lui murmurer :

«Me rafraîchiras-tu la mémoire, chère sœur ?   »
Elaena Tergaryon
Elaena Tergaryon
Sénatrice


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Quadrant Sud, Cité de Valyria ֍ Troisième Mois de l'An 1066

« Gaenon ? Allons, c'est un soldat qui a besoin d'une femme...d'expérience, après tout ce temps passé loin de chez lui. Penses-tu être à la hauteur, ma chère sœur ?   »

Il cherchait à me piquer au vif. Cela me coûtait de l’admettre mais sa stratégie fonctionnait à la perfection. Mes sens en éveil me rendaient plus réceptive, plus réactive, et il m’avait fallu toute la détermination disponible en mon esprit troublé pour ne pas réagir violemment comme je l’avais fait plus tôt. Pour toute réponse je laissais échapper un rire moqueur, laissant entendre tant de choses que j’en espérais que son esprit en serait, lui aussi, troublé. Il s’avançait, lentement, d’un pas prudent, réduisant à chaque seconde un peu plus la distance qui nous séparait. Cette distance physique qui semblait presque inopportune tant nos regards étaient connectés, nous rapprochant comme jamais. Je le regardais s’approcher, mon sourire s’élargissant à mesure que son parfum prenait possession de l’air, enivrant mes sens et mon corps tout entier.

Durant un instant fugace, je m’étais imaginée qu’il m’embrasserait immédiatement, ne résistant plus face à ce jeu de nerfs dans lequel nous nous étions lancés. Pourtant, c’est de mes pieds qu’il s’approchait, pas de mes lèvres. Je l’observais prendre place sur la banquette, sa cuisse effleurant l’une de mes chaussures dont je rêvais de me débarrasser pour éliminer tout intermédiaire entre nos peaux. Il fermait les yeux. Alors lui aussi luttait. Cette simple preuve de faiblesse avait pour effet immédiat de me ragaillardir. Cette volonté de fuir le spectacle que je lui offrais était sans doute un ultime effort pour résister à ce qui hantait nos deux esprits. Je profitais de cet instant bref pour détailler plus encore les traits de son visage, les quelques cicatrices encore jeunes ornant sa peau. La guerre l’avait changé physiquement, si je ne l’avais pas vu immédiatement je le reconnaissais à présent. Il fallait un oeil bien expert pour détecter cette différence en lui, mais elle existait. Quelque chose sur son visage avait changé, quelque chose d’imperceptible… un quelque chose qui le rendait plus touchant encore à mes yeux et faisait chavirer mon coeur comme jamais je ne l’aurais imaginé auparavant.

Il touchait mon pied, ma cheville exposée, et déjà je perdais tout contact avec la réalité. Ce fut à mon tour de fermer les yeux, car la tension qui enserrait mes entrailles et mon esprit devenait difficilement supportable. Je fermais les yeux également pour profiter pleinement de ce contact doux, tendre, présageant de retrouvailles débutant seulement. Je souriais, me remémorant cette nuit de rêve de Meleys où tout avait débuté, là aussi, par la caresse de ses doigts sur la peau de mes chevilles.

« Essaierais-tu donc de m'arracher à mes nombreuses prétendantes, ce soir ? Toujours aussi impossible, à ce que je vois. »

Ses doigts qui parcouraient à présent mes jambes m’ôtaient toute capacité à répondre. Oh j’avais bien en tête de nombreuses répliques cinglantes qui auraient eu toute leur place dans cet échange. Pourtant, c’était à peine si ma gorge serrée parvenait à laisser passer l’air, un air de plus en plus nécessaire à mesure que mon souffle s’accélérait. Son regard plongé dans le mien, la caresse sa main remontant le long de mes jambes, atteignant bientôt l’ourlet de ma robe au niveau de mes cuisses… Autant de chose que je n’avais pu oublier et qui déjà me ramenaient aux heures les plus douces de notre relation.  J’avais évoqué mes lèvres, le tentant à regoûter aux plaisirs de cette chair qu’il avait peut être oubliée, mais c’était mon corps entier que je voulais qu’il goûte, qu’il dévore… Qu’il me dévore entière que je le dévore en retour.

« Il est possible que j'en aie oublié le goût. Vois-tu, cela fait si longtemps, ma mémoire est quelque peu…floue. »


Il s’était levé, faisant peser l’ombre de son corps sur le mien, étendu, à sa merci. Son visage s’approchait lentement, si lentement… trop lentement. Je rêvais que ses lèvres épousent les miennes, mais elles n’avaient fait que les effleurer, à peine. J’en aurais hurlé. Le monde autour n’existait plus. Etions-nous toujours seuls dans cette pièce reculée ? Quelle heure était-il ? Y avait-il seulement encore une fête ? Je n’entendais plus. Je ne voyais plus rien. Je ne voulais plus rien. Plus rien d’autre que lui. Que ses lèvres sur les miennes.

« Me rafraîchiras-tu la mémoire, chère sœur ? »

D’un geste réflexe je laissais ma langue parcourir ma lèvre inférieure, comme pour goûter la peau qu’il venait d’effleurer. Il savait s’y prendre, c’était indubitable, et si la guerre avait eu effet cela avait été de le rendre plus audacieux, plus… joueur. Oh ce n’était pas la première fois que nous défions dans ce jeu dangereux, mais c’était bien la première fois qu’il prenait la main. Puisqu’il en était ainsi…

Je levais une de mes mains jusqu’à son visage, quittant ses yeux du regard pour suivre le tracé de mes doigts sur sa peau. Je dessinais ses traits, effleurais les quelques cicatrices, repoussais les quelques mèches de cheveux qui m’empêchaient de l’admirer pleinement. D’un geste soudain et instinctif je me relevais en position assise, les jambes en tailleur, le déstabilisant en le forçant à s’asseoir face à moi. Je reposais ma main contre sa joue, le regard toujours concentré sur ce travail de mémorisation de ses traits dans lequel je m’étais lancée. Il s’était attendu à ce que je l’embrasse, à ce que je cède immédiatement… Moi aussi. Cependant nous méritions mieux. Je voulais le regarder. Je voulais fermer les yeux et garder en tête l’image parfaite du visage de celui qui me hantait. Prenant appui sur ma main libre, je m’avançais légèrement pour être plus proche encore, mes genoux dénués à présent en contact avec le côté de sa cuisse, nos corps presque déjà l’un contre l’autre. Alors, satisfaite du tracé de ma main, je remplaçais mes doigts par mes lèvres. J’embrassais une première cicatrice, une seconde, plus à vif, une troisième presque invisible à présent. Mes mains encadrant son visage je poursuivais en embrassant son nez, son menton, ses paupières qu’il acceptait de fermer un instant. Replongeant finalement mon regard dans le sien, je restais immobile, un sourire de contentement aux lèvres. Je plongeais mon visage dans son cou, caressant sa peau avec mon nez dans un mouvement circulaire lent et maîtrisé, avant de déposer un baiser à peine appuyé dans le creux à la jonction entre son cou et son épaule. Un deuxième baiser alors que déjà ma bouche remontait en direction de son visage, un troisième baiser à la naissance de sa mâchoire précédant un dernier près du lobe de l’oreille que j’embrassais à son tour avant de le mordiller puis de chuchoter :

« S’il fut si facile à oublier, peut-être ne vaut-il pas la peine d’être retrouvé… »

Ma voix était à présent douce, suave, à peine audible si je n’avais pas été si proche de son oreille. Mes mains qui avaient quitté sa tête pour glisser lentement le long de ses épaules et de ses bras faisaient à présent le chemin inverse, venant finalement se loger toutes deux contre la poitrine du général. Je retirais mon visage de son oreille, brisant le contact nos joues qui étaient parvenue à s’effleurer. Je laissais nos nez se caresser alors que j’inclinais la tête portant mes lèvres de l’autre côté de son cou, recommençant à embrasser la base de celui-ci, et à laisser ma langue tracer un chemin timide jusqu’à son oreille, dont j’embrassais aussi le lobe.

« Je sais que tu essaies de me rendre folle… »

Je mordillais son lobe, à nouveau, avec légèrement plus de pression, à peine plus.

« … Et cela fonctionne à merveille, Général. »

Je restais un instant ainsi, ma respiration contre la peau de son cou, l’une de mes mains remontant lentement pour caresser l’autre joue. Puis, sentant que j’étais moi-même au bout, prête à tout pour ce contact, je fermais les yeux et éloignais mon visage du sien.

« … Mais tu ne comptes tout de même pas m’avoir à mon propre jeu. »

Mon sourire malicieux le défiait, je ne m’éloignais pas, ne résistait pas à l’envie d’être aussi proche de lui que possible sans pour autant être celle qui déclarerait forfait. Le regard intense, plein d’un désir que je peinais à contenir, je parvenais à articuler cette dernière phrase alors que déjà mon coeur battait à tout rompre et mon corps se tendait vers lui.

« Ce que ta mémoire cherche à retrouver, elle doit le prendre. »  

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Les soldats étaient des hommes comme les autres avec autant de besoins que leurs congénères n'ayant pas pris les armes pour défendre leur patrie, à ceci près qu'ils avaient assez de courage en eux pour sacrifier leur corps et une grande partie de leur âme pour une cause plus grande qu'eux. Aucun mot dans la langue des valyriens ne pourrait jamais rendre justice à la véritable et horrible nature des événements qui ont pu se passer sous les yeux de chacun de ces soldats. Comment pouvaient-ils donc évoquer ce qui n'avait vraiment aucun sens, ce qui dépassait la compréhension humain ainsi que ce qui pourrait être considéré comme moralement acceptable ? Maekar comme tous les autres avait donc enterré sa conscience pendant quatre longues années, ignorant à quel point il s'était habitué au goût métallique du sang dans sa bouche, oubliant la facilité avec laquelle il ôtait une autre vie aussi simplement qu'il couperait du pain, mais depuis son retour à Valyria tout était remonté à la surface.
Tout, y compris le désir brûlant de ne faire plus qu'un avec la seule qui comptait pour lui, le désir étouffant de posséder entièrement la seule femme au monde capable de faire tomber ses remparts de retenu et de maintien en un seul regard équivoque. Depuis le premier jour où Maekar avait tenu sa sœur dans ses bras, dans le jardin, alors qu'elle n'était encore qu'un nourrisson, le général avait toujours eu l'impression qu'Elaena était capable de lire en lui ce que les autres ne pouvaient voir, de voir en lui la véritable nature de son âme ainsi que les pensées qui traversaient sa tête. Elle avait toujours été capable de voir au-delà de sa posture forte et de son maintien digne, au-delà de sa mâchoire crispée et de son manque d'expression faciale lorsque la situation exigeait et, bien sûr, il en avait toujours été de même en retour.

Ils n'avaient pas le droit d'être ensemble au sens officiel du terme, le chef de famille était le garant de l'avenir d'Elaena et du choix de son futur compagnon, tous les deux le savaient depuis le début et Maekar en avait davantage pris conscience au moment de refuser son héritage familial. Le secret avait été leur arme depuis que l'un avait compris le désir qui l'unissait à l'autre, aussi avaient-ils appris à véhiculer leurs pensées dans le plus grand secret et avec la plus grande  simplicité, au travers d'un regard, d'un son anodin ou d'un geste. La jeune femme devant Maekar était la plus belle et sensuelle créature qui lui fut donné de voir sur cette terre, elle savait se mettre en valeur et surtout elle savait montrer ce qu'elle voulait, et dans le cadre de sa relation avec son frère tout passait par cette joute verbale, par cette séduction n'ayant pour seul but que de tester leurs limites mutuelles.
Ils auraient très bien pu se sauter dessus dés le premier moment où leurs regards s'étaient croisés, se laisser aller à leur passion dévorante en dépit des convenances et du regard des autres, mais ils avaient fini par prendre goût à ce petit jeu. Chaque regard émoussait un peu plus leur patience, chaque geste faisait grandir le brasier qui faisait rage en eux, un peu plus intensément, jusqu'à ce qu'ils ouvrent les portes et laisse la déflagration libérer leur dévorante passion, avec plus de puissance qu'aucune autre.

Tous les deux savaient bien comment tout ceci allait finir, qu'il y ait du monde  ou non dans la pièce à côté et ils n'en avaient que faire. Le Tergaryon s'assit donc près de sa muse et sourit en voyant à quel point une simple caresse du bout des doigts pouvait lui faire perdre ses moyens, confirmation si elle était nécessaire que le désir n'avait pas disparu de chez Elaena. En avait-il douté ? Pas un seul instant, mais il avait toujours gardé l'idée en tête que peut-être...peut-être s'était-elle lassée de devoir l'attendre. Ce n'était apparemment pas le cas, la demoiselle faisant à présent passer sa langue sur ses propres lèvres en un geste provocateur qui n'échappa pas à son frère, avant de tendre les mains pour rejoindre ce dernier. Cette proximité était enivrante, suffocante parfois mais Maekar ne s'en serait détaché pour rien au monde, mais cette fois-ci ce fut à son tour de ne pouvoir aligner deux pensées l'une après l'autre lorsqu'il sentit les doigts de sa sœur caresser son visage, passant sur les traces que la guerre avait laissé sur lui, avant de sentir les lèvres de la belle sur son visage taillé au couteau. Il tenta bien de se contrôler face à cette proximité tentatrice, sentant la douleur qui allait avec la résistait qu'il opposait à ce désir, mais un frisson l'en empêcha lorsqu'il sentit les lèvres de la belle se poser au creux de son cou. Son cœur venait-il de rater un battement, ou était-ce son imagination ? Lorsque la demoiselle rebondit sur la facilité avec laquelle son frère avait pu oublier le goût de ses lèvres, Maekar tenta de regagner sa concentration pour formuler ce qu'il avait en tête.

« Tu crois vraiment que je... »

Que je pourrais t'oublier si facilement ? Que mon désir était une chose si facilement contrôlable ? Que je serais le premier à craquer ? Quelle que soit la phrase prévue, elle ne parvint pas à franchir toute entière le seul de ses dents, mourant dans le fond de la gorge alors que la tentation commençait déjà à briser ce qui lui restait de concentration.

« Que je... »

Il tenta bien de se réessayer à nouveau mais, lorsque la demoiselle vint passer sa langue tout contre cou, Maekar se sentit perdre pied avec la réalité à nouveau. Il avait pu encaisser la mort, la souffrance et le désespoir sans broncher, sans sourciller, sans craquer ne serait-ce qu'un seul instant, mais sentant cette peau tout contre la sienne, sentir ce regard débordant d'envie pointé dans sa direction était sans doute la seule chose au monde capable de lui faire perdre les pédales. Il la laissa donc s'écarter de lui un instant, pendant que cette distance pourrait l'aider à regagner ses esprits mais, finalement, les derniers mots de sa sœur achevèrent de faire abaisser ses défenses.

«Très bien. Tu gagnes, pour cette fois.  »

Ne pouvant plus y tenir, la main gauche de Maekar vint se poser au niveau de la taille de la demoiselle, l'autre main tout contre son dos, avant que le guerrier ne ramène sa sœur tout contre lui, acceptant cette proximité comme une nécessité à laquelle ils ne pouvaient échapper. Ils ne pouvaient plus tenir, le Tergaryon le savait bien et, dans un souffle, le brasier dans ses yeux posé sur la demoiselle il s'approcha d'elle et, l'espace d'un instant, crut avoir la force de ne faire que les effleurer comme précédemment. Mais il n'en fut rien, dans geste désespérément impatient et passionnel à la fois, Maekar arrêta enfin de lutter et céda à une passion réprimée pendant trois longues années, s'approchant suffisamment de la belle Elaena pour que leurs lèvres se rejoignent enfin, passionnément, intensément, laissant le brasier en eux se répandre.

Le temps s'était arrêté pour lui aussi, la raison et la retenue n'avaient plus lieu d'être à présent. Il était avec elle, il était à elle et c'était tout ce qui comptait.
Elaena Tergaryon
Elaena Tergaryon
Sénatrice


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Quadrant Sud, Cité de Valyria ֍ Troisième Mois de l'An 1066

« Tu crois vraiment que je... Que je... »

Il luttait… Oh comme il luttait. Comme il était beau lorsqu’il tentait de garder l’ascendant alors même que tous ses sens, chaque parcelle de son corps, cédaient un par un. Il savait qu’en moi un combat semblable se déroulait, alors que je faisais mon possible pour continuer à résister à l’envie dévorante de laisser tomber les convenances. Ma langue découvrant son cou, mes mains visitant son torse, autant de sensations me rappelant à la première communion de nos corps, à cet instant où tu avais basculé. Ce rêve de Meleys que j’avais tant redouté et pourtant tant attendu. J’avais crains de longues années que Maekar refuse d’être celui qui ferait de moi une femme. Il avait toujours su se montrer convenable, et ainsi il avait fallu de longues années pour parvenir à comprendre que, au fond, mes sentiments étaient partagés. Pourtant, même après cette déclaration, même après ce premier baiser qui avait tant compté pour moi, je n’avais pas la certitude qu’il me désirait. Après tout, ne pouvait-il pas m’aimer sincèrement mais ne pas désirer mon corps ? J’étais plus jeune, je n’avais aucune expérience quand lui connaissait déjà le monde. Qu’aurait-il pu faire d’une enfant incapable de rivaliser avec les dames qu’il avait connu à Valyria ?

Pourtant, à la seconde où ses doigts s’étaient déposés sur le dos de mon pied, en ce jour si spécial, j’avais compris qu’il ne réalisait pas là un simple devoir… Il avait accepté de faire de moi un femme, parce qu’au fond de lui brûlait le même feu que celui qui me consumait. Il me voulait. Je l’avais senti, au tremblement de ses doigts alors qu’il parcourait ma peau. Son souffle, court, emporté, inégal, n’avait fait que confirmer ce que déjà sa peau m’avait avoué. Alors que j’inversais les rôles à ce moment où nous nous redécouvrions, j’invoquais ces moments de désir fou. Je me souviens de son geste si doux, hésitant, pour m’embrasser finalement après de longues minutes tracer sur mon corps des signes dont lui seul avait le secret. J’avais ouvert les yeux, créant enfin la connexion de nos regards qui faisaient basculer le contact physique dans une toute autre dimension. Je lui avais chuchoter de ne pas hésiter, de ne pas craindre de me blesser, car je n’attendais que lui, je ne voulais que lui… Alors qu’en cette soirée glorieuse il luttait contre l’envie de m’embrasser, je répétais la demande que je lui avais faite lors de notre première nuit… celui de prendre ce qu’il voulait prendre. Car tout, tout était à lui.

«Très bien. Tu gagnes, pour cette fois.  »

Le souvenir n’était que trop beau. Il glissait sa l’une de ses mains pour enserrer ma taille avec vigueur, l’autre visitait déjà mon dos, laissé nu par la coupe de ma robe. A nouveau, je perdais le contrôle de mes émotions et de mon corps. Je me cambrais d’instinct, pour coller mon ventre au sien, pour accompagner son geste qui m’attirait à lui et sentir le contact de sa poitrine contre la mienne. Enfin, il déposait les armes, marquant son retour pour de bon, et ce contact dont l’absence me rendait folle m’était enfin rendu. Ses lèvres embrassaient les miennes. Pas d’hésitation cette fois-ci, le rêve de Meleys était bien loin, et il avait compris qu’il n’y avait guère de place pour l’hésitation entre nous. Nous n’aimions que la passion, la dévorante passion qui nous poussait à nous vouloir toujours plus.

J’interrompais le baiser un instant, à bout de souffle, le coeur battant à tout rompre et le corps plongé dans un émoi dont je doutais qu’il pourrait s’en remettre un jour. Je collais mon front au sien, les yeux toujours fermés pour donner le temps à mon corps d’imprimer en son sein le bonheur qui m’envahissait à cet instant.

« Maekar… »

Je susurrais son prénom, croisant mes mains derrière sa tête pour maintenir son front contre le mien, inclinant légèrement ma tête pour que mon nez puisse venir caresser le sien. Son nom avait emporté par un soupir, porté par un souffle jusqu’à ses lèvres auxquelles je retournais sans me faire prier. C’était à moi de céder, et je n’aurais pu être plus heureuse de m’offrir. Serrant mes mains sur ses cheveux, je l’embrassais avec passion, avec violence presque tant je le voulais, tant je cherchais à assouvir tous ces désirs qui m’avaient hantée et étouffée ces dernières années. Je me rapprochais de lui, ignorant même que cela était possible tant nous étions proches, et je quittais ma position en tailleur pour l’accueillir entre mes jambes. Oh je n’avais pas perdu la tête… Si, en réalité cela aurait été mentir que de prétendre que j’avais toute ma tête en cet instant. Pourtant, je n’ignorais pas qu’il nous faudrait observer une certaine… mesure, jusqu’à une certaine heure du moins, mais je voulais être si proche de lui que nous ne ferions qu’un. Alors que d’un geste presque réflexe il s’approchait de moi, profitant de l’espace que libéraient mes jambes précédemment croisées, je les refermais sur ses hanches et croisais mes pieds sur son flanc.

De concert nous rompions le baiser, et je nichais mon visage dans le creux de son cou alors qu’il en faisait de même. Nous restions un long instant ainsi, tentant de reprendre notre souffle en vain, fermant les yeux pour reprendre nos esprits… en vain, ça aussi.

« Être raisonnable, mesures et convenances… N’était-ce pas notre ligne de conduite pour ce soir ? »

J’acceptais de délaisser le creux de son cou pour replonger mes yeux dans les siens, constatant avec délectation que mes lèvres avaient toujours le même effet sur son esprit. Alors je volais encore quelques minutes de secret pour sombrer dans l’inconvenance, mordant sa lèvre inférieure avant de l’embrasser de nouveau. Cette fois, je prenais mon temps, devenant plus sensuelle qu’empressée, prenant le temps de laisser monter le désir que chaque caresse de nos lèvres et de nos langues venait amplifier. Et alors que ce désir semblait prêt à nouveau faire chavirer, je m’écartais de Maekar, d’un geste brusque, m’arrachant presque à lui pour me lever. Je courrais presque vers la carafe de vin pour me retenir de retourner au creux de ses bras. Je pouvais sentir mes joues empourprées, mes jambes flageolantes, mon ventre serré d’un désir trop longtemps insatisfait… Je pouvais voir mes mains trembler alors que je remplissais une coupe disponible et que je la portais à mes lèvres pour la vider presque entièrement. L’esprit encore moins clair mais la gorge dénouée, je me retournais vers Maekar.

« Si peu de temps à attendre, et pourtant cela ressemble à l’éternité… »

Je remplissais ma coupe à nouveau, puis en remplissait une deuxième, renversant quelques gouttes a vouloir trop la remplir.

« Oh… Ne vas pas croire que je cherche à te rendre saoul. »

Je riais, amusée de me voir ainsi si… hésitante. Je m’approchais de lui, tendant la coupe qu’il attrapait, je buvais la mienne avec plus de mesure que la précédente. La musique nous parvenait légèrement, comme étouffée par la distance qui nous séparait du reste de la maison. La La musique était d’ailleurs devenue plus douce, plus enveloppante, comme préparant progressivement les invités à honorer les dieux de la meilleure manière qui soit. Je buvais une gorgée et souriais, émoustillée par le simple rythme de la mélodie lointaine. Je regardais cet homme, ce héros, ce glorieux héros que toutes cherchaient à obtenir, à posséder. Peut-être même le cherchaient-elles à cet instant. Pourtant, il était là. Avec moi. Il était toujours assis sur cette banquette, les deux pieds ancrés dans le sol et me faisant face. Il était si beau. Se pouvait-il qu’il soit encore plus beau avec les années ? Etait-ce une réalité ou mon amour grandissant chaque jour le rendait-il toujours plus désirable ?

« Tu parlais de rejoindre tes prétendantes, Général Tergaryon… »

Je m’approchais, lentement, déposant un pied devant l’autre avec prudence, avançant comme un chat, m’arrêtant quelques secondes de temps en temps pour boire une gorgée de plus. Arrivée à lui, la coupe était vide, et je la lançais plus loin. Elle atterrissait sans bruit… Sans doute un des nombreux coussins avait-il suffit à amortir sa chute. Il était bien rare que je toise de haut Maekar Tergaryon, mais alors qu’il était assis et que je me tenais debout devant lui, je le dominais de ma faible hauteur. Dérivant son regard de ma poitrine qui lui faisait face, j’attrapais son menton pour le relever et prendre possession de son regard.

« … Il va falloir reprogrammer. »

Je déposais un baiser sur ses lèvres comme la caresse d’une plume sur le marbre. Je riais de me voir si entreprenante, si directive, amusée de constater que l’alcool avait pour effet de m’enhardir. Et cette musique, toujours cette musique qui nous parvenait plus fortement à mesure que les secondes s’égrenaient, peut-être emportée dans le sillage des quelques personnes qui commençaient à peupler les pièces voisines. Je libérais son menton avant de me pencher, lui donnant par la une vue imprenable sur ce qu’il ne parvenait pas à lâcher du regard auparavant. Dirigeant mes lèvres à son oreilles, je décidais de suivre mon instinct et ce nouvel aspect de ma personnalité qui je découvrais avec délectation.

« Ce soir, tu es à moi. »

Je m’éloignais de lui sans lui laisser l’occasion de répliquer, sans pourtant briser le lien que nos yeux avaient noué. Puis, un sourire aux lèvres, je fermais les yeux, happée par la musique qui à présent ne pouvait plus être ignorée. Les musiciens semblaient avoir quitté l’atrium pour rejoindre une des pièces voisines, lointaine car elle était toujours quelque peu étouffées par la distance, mais assez proche pour me bercer et faire onduler mon corps sur ses rythmes lascifs. J’avais toujours aimé la danse, il ne se passait guère une soirée à Oros sans que je ne me laisse aller aux rythmes entrainants ou plus doux des mélodies. Après un instant bien à moi, j’ouvrais les yeux, n’arrêtant pas pour autant de danser mais le faisant à présent pour lui et non plus pour moi. Je tournais sur moi-même, faisant voleter toujours plus haut les pans de mon jupon, puis j’ondulais des hanches, riant moi-même de cette scène que je n’aurais imaginé se produire. L’espace d’une seconde j’imaginais qu’il me trouve ridicule. Il aurait pu. Peut-être n’étais-je pas aussi sensuelle que je l’imaginais ? Peut-être au fond se retenait-il de rire ?

… L’avantage de l’alcool et des fêtes étaient de chasser aisément ce genre de pensées des esprits les plus tourmentés. Je me sentais plus sensuelle que jamais, rassérénée par ce désir qu’il avait exprimé, galvanisée par mon propre désir. Alors j’invitais Maekar à me rejoindre, me rapprochant sans cesser de bouger mes hanches, tendant la main vers lui, sachant qu’il ne serait peut-être pas excité à l’idée de danser, mais que j’avais quelques arguments pour susciter une toute autre excitation.

« Et je suis entièrement à toi. »  

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Tous les hommes qui étaient revenus de la guerre avaient été irrémédiablement transformés, certains se levaient encore au beau milieu de la nuit, en hurlant, le goût du sang dans la bouche et les cris de leurs camarades agonisant plein la tête. Certains disaient que c'était l'expérience la plus horrible de toute leur vie et qu'ils ne reprendraient les armes pour rien au monde, certains en avaient perdu la raison, mais les officiers comme Maekar avaient sans doute été les plus touchés par les innombrables pertes. Ils avaient été relégués au second plan, à voir un champ de bataille comme un amas de chiffres et de données tactiques à perdre en compte, établissant des plans pour les batailles à venir en sachant bien que les pertes seraient lourdes, mais se faisant violence pour prendre les décisions les plus difficiles de leur vie, malgré tout. La plupart étaient bien contents de ne faire que guider la stratégie et laisser leurs armes faire le reste, laisser leurs frères, leurs cousins, leurs voisins verser leur propre sang alors qu'ils étaient relégués au rang de spectateur, mais Maekar n'avait jamais été de ces gens-là.
Il se rappelait de ses prédécesseurs le noyant de conseils sur ce que devait être un bon officier, sur le calcul des risques et les décisions à prendre dans le cœur de la bataille, mais le Tergaryon avait toujours rejeté ces conseils en bloc pour se faire son propre avis sur le sujet. Il avait décidé d'être de ces officiers de première ligne malgré son rang de général, car il ne serait pas attendu à ce que quiconque décide de le suivre s'il n'était pas à même de montrer l'exemple et, sur un plan personnel, il n'avait jamais souhaité demander à quiconque de faire ce dont il serait lui-même incapable. Mais en vérité, maintenant qu'il était de retour auprès des siens et dans les bras de la seule personne qui comptait pour lui, maintenant que la fatigue commençait à prendre son dû, un horrible constat venait le frapper.

La guerre avait tué le sommeil.

Cela faisait quatre années qu'il  été réveillé en sueur au milieu de la nuit, par l'annonce d'une attaque imminente ou par ses démons venus le hanter de nouveau, quatre ans qu'il n'avait pas ressenti la paix dans son esprit. Mais à présent qu'il était réuni avec sa sœur, à présent qu'il laissait échapper trois ans de passion et de désir réprimés, ces années de souffrance et de torture mentale semblaient disparaître comme autant de feuilles au vent. Il n'avait jamais été du genre à se laisser aller à ses propres sentiments, jamais du genre à s'exprimer beaucoup sur le sujet, mais il avait suffisamment fait d'introspection pour savoir que elle seule parvenait réellement à l'apaiser. Il avait pendant longtemps lutté contre ce sentiment parce qu'il ne pensait pas mériter une telle passion, pas aussi longtemps que rien ne serait officiel et approuvé par son père, en tout cas, mais quelques années plus tôt, la veille du rêve de Meleys. Il était resté debout toute la nuit à essayer de chasser ces pensées, à se faire une raison, convaincu qu'il n'aurait jamais sa sœur mais, dans un moment de clarté, il avait accepté d'être égoïste le temps d'un soir, de rejeter ce que la coutume voulait de lui, puis le prochain souvenir qui lui vint en tête fut celui de son entrée dans la grotte. Pour la première fois de sa vie il avait décidé de s'écouter et, l'un comme l'autre, aucun ne pourrait jamais oublié ce qu'il s'était passé dans cette grotte.

Peut-être avait-il cru que cette passion n'était que le fait de la nouveauté, d'une évidence mise au silence pendant trop longtemps mais, alors que leurs lèvres se joignaient, Maekar comprenait à quel point il s'était fourvoyé. Il ne la désirait pas parce qu'il n'avait pas pu l'avoir avant, pas parce qu'il ne pensait pas être fait pour elle, mais bien parce que leurs corps et âmes étaient connectés par un lien créé dans le plus vif des brasiers. Elle lui faisait perdre la tête, le seul goût de ses lèvres suffisait à faire s'abaisser les barrières qu'il avait mis une décennie à ériger mais il n'en avait que faire, il voulait s'abandonner à elle, ici et maintenant/. Mais la belle ne semblait pas avoir perdu la nature de leur petit jeu en tête, rompant le contact dans le but de reprendre son souffle, à n'en pas douter, mais cela ne fit que frustrer davantage le jeune Tergaryon. Seul le contact de son front contre celui de sa sa sœur, son nez contre le sien parvint à installer un semblant de calme aussi fragile qu'un fin fil de soie. Ce contact était plus doux que le précédent, comme si cette proximité pourrait permettre de connecter leurs esprits, mais déjà Maekar perdit de nouveau la raison lorsque ses lèvres joignirent de nouveau celles de sa cadette. Il ne s'était pas rendu compte à quel point le contact avec ces douces lèvres sucrées lui avait manqué jusqu'à ce qu'il les retrouve et, en cet instant, il ne voulait rien d'autre qu'elle.

« Cette ligne de conduite a été jetée aux orties, au moment où tu as essayé...de me rendre jaloux. »

Passant ses mains autour de la demoiselle pour maintenir le contact, son parfum enivrant continuant de détruire la conscience du soldat, morceau par morceau, l'homme sourit en repensant aux mots sortis de sa bouche, un instant plus tôt. Au-delà de l'aspect amusant de ce jeu, le Tergaryon savait bien que son plus gros défaut était lié à plus grande qualité, à savoir sa retenue et son manque d'expression de ses sentiments, ce qui n'avait pas aidé Elaena à comprendre la nature de ses sentiments à son égard. Il n'avait jamais été égoïste de toute sa vie sauf lorsque cela la concernait directement et, bien qu'il ait tenté de lutter contre cette envie, la voir au bras d'un autre lui fit plus mal qu'il ne l'aurait pensé. Il accepta donc avec joie ce nouveau baiser jusqu'à ce que la belle, une fois de plus, décide d'y couper court en rompant le contact une fois encore, pour le plus grand déplaisir de Maekar qui, malgré tout, s'autorisa un petit sourire prédateur à venir éclairer son visage, tel un fauve sur le point de sauter sur sa proie.

« Comme si tu avais besoin de cela, pour me rendre la vie impossible. »

Grâce à l'alcool elle semblait être bien plus entreprenante que d'habitude, ce qui n'était pas pour déplaire à Maekar qui sourit de plus belle, les yeux brillant toujours du même désir, attrapant la coupe qui lui fut tendue avant la vider d'une traite, comme si cela pourrait le calmer mais il n'en fut rien. Au lieu de cela il posa avidement les yeux sur la belle devant lui qui, désinhibée, commença à se déhancher pour attiser l'envie de son amant, rappelant qu'il était à elle, ce soir, avant que le concerné le réponde :

« Cela n'a t-il pas toujours été le cas ? »

Il avait simplement mis bien plus longtemps que prévu avant de s'en rendre compte, mais son destin avait été scellé avec celui de cette divine beauté dés qu'il posa ses yeux sur elle, pour la première fois.

« Est-ce comme cela que tu t'y prends pour charmer tes prétendants ? Je confirme, cela fonctionne. »

Malgré ses efforts les plus intenses, Maekar était tout simplement incapable de mentir à sa cadette, car l'étincelle dans son regard finissait toujours par trahir la véritable nature de ses pensées. Il auraient pu rester droit et en retrait, la mâchoire fermée, son regard aurait toujours brillé du désir ardent qui brûlait en lui, alors à quoi bon prétendre le contraire ? Se levant pour admirer les courbes sensuelles de son amante de bien plus près, l'homme n'eut pas le désir de danser car ce n'était pas un domaine dans lequel il excellait, mais il vint se positionner dans le dos de la demoiselle, admirer le spectacle de cette proximité et de ces mouvements, alors que ses propres mains descendant le long de ces hanches.

« Syrax m'en soit témoin, cherches-tu à me rendre fou ? »

Elle ne cherchait pas, elle était en train de le faire et tous les deux en avaient parfaitement conscience. La douceur de cette peau, ces courbes, ce parfum, tout en elle poussait Maekar à s'abandonner une fois de plus mais, dans un dernier acte de lutte, il utilsa ce qui lui restait de détermination pour s'écarter d'elle et, d'une démarche lente, parvint jusqu'à l'entrée de la pièce de laquelle il tira le rideau, afin qu'aucun n'ait dans l'idée de les déranger. Pas maintenant, surtout pas maintenant. Se léchant les lèvres comme s'il savourait déjà les événements à venir, Maekar fit demi-tour, dévorant toujours sa sœur de son regard mais, au dernier moment, au lieu de l'agripper et de l'embrasser de nouveau comme il en avait envie, il posa un genou à terre avant de murmurer :

« Laisse-moi donc être égoïste, pour cette nuit et les autres à venir. »

La scène devrait sembler assez familière à la demoiselle, et cette posture un genou à terre semblait être un aveu de faiblesse de Maekar qui positionnait sa sœur sur un piédestal, mais il n'en était rien. Sans un mot, sans un commentaire, il s'approcha et laisser ses doigts courir sur ses chevilles, remonter vers ses mollets, puis ses cuisses, alors que le soldat couvrit la peau nue de sa muse de brûlant baisers. Comme pour dessiner un schéma ou une route que lui seul avait en tête, sa bouche et ses mains remontèrent toujours plus haut, ses doigts venant caresser le haut de ses cuisses puis le bas de ses fesses, alors que ses baisers semblaient suivre un chemin plus intime.

Il la voulait. Il voulait la dévorer plus que tout, ici, maintenant.

Elaena Tergaryon
Elaena Tergaryon
Sénatrice


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Quadrant Sud, Cité de Valyria ֍ Troisième Mois de l'An 1066

Chacune de ses paroles m’enhardissaient, me confirmant ouvertement ce que ses yeux déjà me criaient. De nous deux, il avait toujours été le plus réservé, le plus prompt à respecter ce que l’on attendait de nous. Pour ma part, je me moquais des interdits de notre père, il pouvait bien retarder nos fiançailles, et je le soupçonnais d’en faire usage pour punir Maekar de ses vélléités indépendantistes, mais il ne pouvait empêcher deux êtres de s’aimer. Je mesurais la chance que j’avais de grandir comme une fille de Valyria, choquée par les moeurs rapportées par Hugor Arryn, l’ambassadeur Andal. L’homme parlait d’une interdiction pour deux êtres de s’aimer charnellement en dehors des liens du mariage, la virginité des filles jusqu’au dit mariage, tout cela pour… honorer les dieux ? Nos Dieux étaient de ceux que l’on honore avec sa chair et sa ferveur. Quel dieu serait suffisamment cruel pour requérir de ses adorateurs une chasteté si mal placée ? Par Syrax nous étions préservés de ce genre de dérives, et c’est ainsi que je me trouvais seule avec Maekar, dansant pour lui sans pour autant être accusée d’être une femme perdue.

« Est-ce comme cela que tu t'y prends pour charmer tes prétendants ? Je confirme, cela fonctionne. »

Je ne cessais pas de danser et laisser échapper des éclats de rire à l’entente de ce double aveu de faiblesse. Il me confessait son désir et sa jalousie. Je ne pouvais nier que le voir ainsi amplifiait mon plaisir, me poussant à redoubler de charmes alors que je constatais les effets de cette danse sur l’esprit et le corps de Maekar. A mon invitation il se levait finalement, me rejoignant à pas de loup. Le simple fait de le sentir se rapprocher déclenchait une séries de frissons dans le bas de mon dos. C’était d’ailleurs face à ce dos qu’il se positionnait, et j’en profitais pour me reculer, centimètre par centimètre pour finalement être contre lui. Je sentais ses mains se déposer sur mes bras nus, me maintenant presque contre lui sans que cela soit nécessaire tant j’étais disposée à ne pas m’écarter. A présent, le mouvement de mes hanches prenait une tournure autrement plus sensuel alors qu’il poussait mes fesses à entrer en contact avec le corps de Maekar. Mes bras qui se levaient en rythme effleuraient sa joue et laissait une main se glisser dans ses cheveux. Il ne dansait pas à proprement parler, mais notre danse avait commencé bien avant que la musique ne retentisse, et elle ne dépendait pas de son rythme.

« Syrax m'en soit témoin, cherches-tu à me rendre fou ? »

Amusée je me retournais pour lui faire face, déposant mes paumes de main contre sa poitrine et approchant mes lèvres de lui sans pour autant initier un contact.

« Oui. »

J’attrapais quelques mèches de ses cheveux pour tirer son visage vers le mien, le forçant à courber quelque peu l’échine.

« Je te veux fou. Je te veux sans limites. Je te veux. »

Au diable la retenue. Cette partie de la ville était connue pour ses fêtes libérées et ces petites pièces n’avaient pas été préparées sans raison. Nous n’avions que trop attendu. A le rendre fou j’étais parvenue à me rendre plus folle encore. A le provoquer, j’avais réussi à le pousser à me provoquer plus encore. J’avais imaginé que la sensation unique que pouvait déclencher le contact de nos deux peaux finirait par s’estomper, ou qu’il perdrait progressivement de son importance à nos yeux, mais il suffisait de nous voir pour comprendre qu’il n’en était rien. J’aurais pu passer la nuit à simplement caresser chaque centimètre de son corps. J’aurais pu passer toute ma vie à le laisser parcourir mon corps de ses doigts et de ses lèvres. J’allais l’embrasser, accepter avec plaisir de sombrer avec lui, mais il s’éloignait et me laissait là. Je n’avais pas immédiatement compris ce qu’il comptait faire, à vrai dire durant un instant - bien trop long à mon goût - j’avais même cru qu’il avait décidé de s’en aller. J’avais imaginé que, peut-être, il avait voulu nous protéger de ce que nous nous apprêtions à faire, que peut-être avait-il réalisé que nous allions trop vite ?

Fort heureusement il avait fini par parvenir jusqu’à la petite ouverture et par me sortir de mes douloureuses interrogations en détachant les pans du rideau destiné à protéger cette petite pièce reculée des curieux et explorateurs. Nous étions, cette fois, seuls. Oh il n’était pas exclu que quelques amants à la recherche d’intimité ne tentent d’entrer, mais je comprenais enfin qu’il n’y avait pas à craindre l’opprobre, car tout avait été pensé pour permettre les retrouvailles charnelles. Il faisait demi tour et se dirigeait vers moi, son regard ne quittait plus le mien et je pouvais y lire une détermination enthousiasmante. Je me préparais au tourbillon qui allait s’abattre sur nous… Pourtant, au lieu de reprendre où nous en étions, Maekar s’était agenouillé devant moi. Décontenancée par ce geste auquel je ne m’étais pas attendue, je le regardais déposer un genou à terre devant moi, position Ô combien inhabituelle et génératrice de nombreuses interrogations.

« Laisse-moi donc être égoïste, pour cette nuit et les autres à venir. »

Je m’apprêtais à répondre afin de lui demander de préciser son propos lorsque déjà ses doigts s’aventuraient sous les pans de ma robe caressant mes chevilles avec la même douceur qu’auparavant.

« Oh… »

Ma voix n’était plus que soupir alors que déjà sa main délaissait mes cheville pour effleurer mes mollets, remontant ma robe dans son élan, déjà il atteignait mes cuisses et ses mains, rafraîchies par le contact de la coupe d’argent, me semblaient laisser les marques invisibles et fraîches de leur passage. J’avais imaginé qu’il continuerait à parcourir mon corps de ces mains, mais celles-ci furent rapidement accompagnées de ses lèvres, qui en suivaient le chemin tout tracé sur ma peau.

« Oh… »

J’avais un millier de répliques en tête, de petites phrases acerbes parfaites pour le jeu auquel nous jouions et qui faisait bien souvent office de préliminaires entre nous. Oh ce n’était pas l’imagination qui manquait, non, c’était le souffle. Ses mains continuaient leur chemin, imperturbables, découvrant mes cuisses, ses lèvres à leur suite, pour les contourner sans hésitation et remonter jusqu’à mes fesses. Les mains caressantes restaient un instant à la naissance de mes fesses, avant de les parcourir, de les empoigner, m’approchant plus encore de ces lèvres qui, elles aussi, continuaient leur oeuvre.

« Maekar, je… »

Un soupir venait interrompre ma phrase, et déjà j’oubliais ce que j’avais souhaité dire. La musique s’était approchée, venue accompagner les invités qui se faisaient de plus en plus nombreux dans les pièces de taille variable destinées aux plaisirs de la chair. Je tentais de me concentrer sur elle, ses rythmes doux me semblaient être l’unique moyen de ne pas basculer entièrement. Pourtant, à mesures que les mains de Maekar caressaient et malaxaient mes fesses, que ses lèvres remontaient le long de mes cuisses, il me fallait me rendre à l’évidence : le basculement serait inévitable. Il me semblait que chaque nouveau baiser sur ma peau faisait louper un nouveau battement à mon coeur. Chacune de mes expirations se faisait plus audible que la précédente, transformant une simple respiration en prémices de soupirs. Du centre de ma cuisse, ses baisers se déplaçaient vers un point plus central, et furent bientôt accompagnés de sa langue qui s’amusait à tracer un chemin dont la destination ne faisait plus aucun doute.

« Si là est ta manière d’être égoïste, que Balerion emporte l’altruisme… »


Il s’arrêtait un instant, levant la tête vers moi pour m’adresser un sourire dont le pouvoir dépassait même de loin celui de ses baisers. C’était un sourire malicieux, de ceux qu’il réserve à ces moments d’intimité dont nous seuls avions le secret, un secret qui voulait tant dire. Un premier baiser hors de ma cuisse, et déjà je portais ma main à sa tête, la mêlant à ses cheveux tant pour m’équilibrer que pour le guider. Un instant je me laissais aller, fermant les yeux et basculant la tête en arrière alors que ses mains continuaient à caresser mes fesses, remontant jusqu’au creux de mes reins. Je voulais le voir, prendre le temps de regarder et parcourir ce corps qui m’avait tant manqué… plus encore que je ne me l’étais imaginé, pourtant je ne parvenais plus à l’arrêter, à vrai dire je ne voulais plus l’arrêter. Pourtant, il faudrait bientôt envisager une autre position car je sentais que mes jambes cesseraient bientôt de me porter.

A deux mains je relevais son visage, amusée par son regard surpris, non pas que je ne me délectais de le voir être arrêté en si bon chemin, mais nous nous retrouvions enfin… je voulais que nous prenions notre temps. Je m’accroupissais afin que mon visage puisse être à la hauteur du sien alors que ses mains, ne bougeant pas, sortaient du jupon et parcouraient mon corps à mesure que je me baissais. Un baiser, un deuxième, et je l’invitais à se relever sans détacher pour autant nos lèvres. Le visage soudain sérieux, rendu ainsi par l’apogée d’un désir trop longtemps repoussé, j’entreprenais de défaire, un à un les boutons de son haut, dévoilant progressivement un torse jusqu’à présent bien trop dissimulé à mon goût. Une fois le haut entièrement ouvert, j’en écartais les pans pour finalement faire glisser l’étoffe lentement le long de ses bras et la laisser rejoindre le sol. Je portais ma main vers le haut de son pantalon, mais m’en détournais rapidement, laissant ma main glissée à la lisière de l’étoffe alors que j’entamais de tourner autour du jeune homme. Je l’étudiais, sous toutes les coutures, non… non je ne l’étudiais pas, je le dévorais des yeux. Comme je l’avais fait avec son visage, j’entreprenais de dessiner d’un trait invisible les quelques cicatrices qui ornaient son corps. Ayant terminé mon tour, j’étais à nouveau face à lui, et je restais ainsi quelques secondes.

« J’ai envie de te regarder… »

Je redevenais presque timide, perdant toute la superbe de ma hardiesse précédente. C’était la première fois que nous participions ensemble à ce genre de soirées, et la première fois que nous cédions à nos désirs dans une maison autre que la nôtre. Bien-sûr il n’y avait là rien de transgressif, déjà de l’autre côté du rideau nous pouvions entendre les prémices du basculement de la soirée et d’ailleurs, ce rideau, comme pour toutes les autres pièces intimes de ce type, n’avait pas été installé pour rien. Décidée à ne pas reculer, à ne plus être la jeune fille timide et peu expérimentée qu’il avait quitté, je décidais qu’il n’y avait là aucun mal. Que quelqu’un entre, il ne trouverait ici rien de bien différent que dans les pièces voisines.

Alors je me reculais, restant à un mètre de Maekar, je continuais de détailler son torse nu, notant qu’il faudrait également se charger du bas. Lorsque je parlais de le regarder, je n’envisageais pas de le faire à moitié. Pourtant, je voulais faire une chose auparavant. Glissant mes mains dans mon dos, j’attrapais le lien qui, noué à mon cou, maintenait le haut de ma robe, laissant glisser le haut jusqu’à la lisière de mes seins qui le retenaient dans sa chute. Je laissais mes mains glisser plus bas et se charger des boutons qui maintenaient, au niveau de mes reins, le bas de ma robe solidement ancré à mes hanches. Le dernier bouton défait, je laissais ma robe tomber à mes pieds. Je réfrénais l’envie de la rattraper, de la remonter, de fuir le regard de l’homme qui me faisait face. Ne m’avait-il pas déjà tant prouvé que je n’avais pas à me dissimuler à ses yeux ? Qu’il ne cherchait qu’à me voir ?

« … Et j’ai envie que tu me regardes. »

J’étouffais un rire gêné avant de m’approcher à nouveau vers lui, délaissant ma robe sur le sol pour attraper la main de mon amant et l’attirer vers les nombreux coussins disposés à même le sol. Je n’avais pas pris le temps de retirer son bas, et peut-être ne l’osais-je pas, c’était idiot nous étions déjà allés si loin… Peut-être était-ce le dernier rempart, le dernier obstacle nous retenant de céder définitivement. Chassant de mon esprit les angoisses et hésitations, je m’allongeais, sur les coussins lui laissant le loisir de me rejoindre, ou de profiter du spectacle que j’avais décidé de lui offrir. Après tout… la nuit entière était à nous. Je l'avais interrompu, car je ne supportais plus que quelque tissu que ce soit puisse prétendre s'interposer entre nous, mais Maekar était un militaire, un meneur d'hommes, un stratège... Il n'oublie jamais un plan d'action lorsque celui-ci a été établi.


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Les valyriens avaient une conception toute particulière de la fidélité et surtout de la passion qui faisait partie intégrante de leur vie. Ils étaient un peuple qui avait su gagner suffisamment de richesses pour pouvoir vivre dans le luxe et l'opulence pour le reste de leurs jours, aussi  les couches les plus riches de cette société s'étaient laissées aller à toutes sortes de frasques et d'excès simplement parce qu'elles pouvaient se le permettre. Il n'y avait pas de palais assez grand, pas de vin assez bon ou de met assez savoureux pour pouvoir satisfaire leur soif insatiable, leur demandant toujours plus de richesses et de servant, aussi Maekar et Elaena avaient-ils tôt fait d'être exposés au côté opulent de leur héritage. Ils avaient appris à être entourés en toute circonstance, à accepter que des servants subviennent au moindre de leur besoin et, si Elaena en était sortie grandie d'une telle attention, Maekar repoussa ce privilège dés qu'il atteint les 18 printemps. Il ne s'agissait pas à proprement parler d'un acte de rébellion de sa part, ne pas avoir à se soucier de l'argent avait toujours été rassurant quelque part, car il savait que de son vivant il n'aurait pas à s'inquiéter d'un quelconque manque, mais la guerre l'avait poussé à remettre de nombreuses choses en perspective.
La discipline avait toujours fait partie autant de sa vie que de celle de ses voisins ayant choisi de prendre les armes, dans les premiers mois les réunions étaient assez officielles et cérémonieuses, empruntes d'un silence presque religieux, mais au fil des mois et de la fatigue accumulée certains officiers se firent moins regardants vis à vis du protocole.
Après une année comme officier, Maekar fit grâce aux hommes de ses phalanges des salutations respectueuses et autres gardes-à-vous quand il s'approchaient de leurs rangs pour leur explication le plan de bataille à venir, non pas par laxisme mais par compassion, car leur regard était plus transparent que toutes les postures du monde. Il avait été un soldat comme eux et c'était pour cela qu'il était si facilement accepté et respecté par eux, aussi, à partir du moment où les sergents et leurs hommes s'en tenaient au plan, pourquoi devrait-il se montrer pointilleux jusqu'à en devenir pénible ? Il ne cherchait pas l'acceptation ou la sympathie de ses hommes, mais le respect et il l'eut.

Pourquoi repensait-il à ceci, maintenant ? Parce que la guerre n'avait pas fait qu'émousser la discipline des soldats mais aussi leurs manières. Vers la fin du conflit, beaucoup de soldats du rang ne faisaient que traiter les prisonnières et femmes de Meereen comme des chiennes, les visitant sans aucune passion ou tact mais simplement pour assouvir leur plaisir personnel, car c'était tout ce qui comptait pour eux. Maekar aurait-il été de ces hommes, s'il s'était allé à cette envie réprimée pendant trop longtemps ? Aurait-il fini par être guidé par ses pulsions plus que par son sens du devoir ? Il aurait aimé pouvoir dire que non, qu'il était un homme plus droit et vertueux que cela, mais qui était-il pour l'affirmer ? En vérité il n'avait pas beaucoup plus d'expérience que sa sœur, certes il s'était laissé aller dans les bras de quelques femmes, le temps d'une nuit, alors qu'il était encore dirigé par la fougue de la jeunesse, mais aucune de ces nuits n'avait été la même que celle où il avait rejoint Elaena, dans la grotte, quelques années plus tôt.

Le plaisir de la chair était un moment des plus agréables, à n'en pas douter, mais le plaisir ressenti atteignait un tout autre niveau lorsque les sentiments des deux amants étaient partagés, lorsqu'il y avait plus qu'une connexion physique, c'était sans doute la raison pour laquelle cette nuit fut si particulière, pour Elaena comme pour Maekar.

Si la guerre avait réussi à arracher au jeune homme son innocence et son sommeil, peut-être même une partie de ses manières, la douceur et l'attention portées à sa sœur étaient restées intactes malgré le passage du temps. Il la voulait plus que tout mais n'était pas un de ces sauvages écrasant la demoiselle de tout son poids, jusqu'à lui donner bien plus de douleur que de plaisir. Cela lui coûtait de l'admettre mais même ici, alors que sa conscience s'était envolée bien loin, le Tergaryon se rappelait encore de leur petit jeu et de ses bienfaits, aussi posa t-il le genou à terre dans le but de prendre son temps, alors que son corps tout entier l'implorait du contraire.

Si sa sœur avait été la plus joueuse et contrôlée des deux, ou du moins avait-elle été la plus à même de faire semblant, elle perdit immédiatement de sa superbe lorsque son amant décida de prendre les choses au min, remontant lentement jusqu'à finalement arriver au point central qui lui avait été refusé pendant si longtemps. Comme un soldat à qui on aurait refusé eau et nourriture jusqu'à ce qu'il en perde la raison, Maekar aurait voulu rester là, à l'embrasser, à profiter de ce dont il avait privé pendant des heures mais sa sœur, joueuse comme toujours, sembla regagner assez de contrôle pour forcer le soldat à relever le visage et stopper ce à quoi il s'affairait.

« Même en cet instant tu essayes de me rendre la vie impossible. Je te reconnais bien là.»

Il avait cru que la soirée se scellerait ainsi et qu'elle le laisserait faire,  mais il venait de réaliser à quel point cette idée était sotte. Même dans les pires moments, même alors que leurs consciences laissaient place à la passion, l'un comme l'autre avaient toujours su s'en tenir à leur jeu habituel. Pourquoi en serait-il autrement, même après trois années éloignés l'un de l'autre ? Il la laissa donc se mettre à son niveau, partageant à nouveau plusieurs baisers qui ne calmèrent en rien le guerrier, jusqu'à ce qu'il se lève pour la laisser le débarrasser du haut de sa tunique, sans qu'il ne cherche à lutter en aucune façon. Elle était audacieuse et pleine d'envie, à n'en pas douter et ce seul constat fit naître un sourire amusé sur le visage du guerrier qui sentit un frisson parcourir le long de sa colonne vertébrale, en sentant les yeux de sa belle dévorer son torse nu.

« Tu aimes ce que tu vois ?  »

Il n'était pas arrogant ou orgueilleux, pas du genre à se vanter de ses traits ou  de sa musculature taillée au couteau, bien qu'il soit conscient que cela ne laisse aucune femme indifférente. Il appréciait de voir que la guerre n'avait pas laissé sur lui assez de marques pour que son amante soit rebutée à la vision de son torse nu, il ne savait pas s'il aurait été capable de le supporter s'il en avait été autrement. Bientôt son monde fut mis sens dessus-dessous lorsque ce fut au tour de Elaena de retirer le peu de vêtement qu'elle avait, Maekar l'avait toujours trouvé incroyablement belle mais en trois ans elle semblait avoir poussé encore davantage, grandissant, mûrissant, devenant encore plus désirable qu'elle l'était déjà à l'époque.

Il était l'homme le plus chanceux du monde, voilà la pensée qui traversa son esprit alors que, nerveuse, sa muse vint s'allonger sur les coussins un peu plus tôt. De quoi avait-elle peur ? Que son frère soit déçu et que l'envie lui passe ? Non. Peur à l'idée que tout ceci ne soit plus qu'un rêve, et qu'ils s'unissent réellement, à nouveau ? Probablement. Peur que opprobre soit jetée sur son frère, si quelqu'un découvrait ce qu'ils s'apprêtaient à faire, alors que leur union n'était pas officielle ? Certainement, mais en cet instant plus rien de tout ceci n'importait au général enfin de retour chez lui. Pour montrer sa détermination il prit une courte inspiration et défit les liens tenant fermé son pantalon, avant que ce dernier bastion de sa pudeur ne tombe à ses pieds, le dévoilant à sa sœur dans son plus simple appareil et, si elle avait douté de la passion qui animait son frère, le corps de ce dernier ne pouvait plus mentir.

« Il n'y a plus que toi et moi, ici. Rien d'autre ne compte. »

Un pas après l'autre, il s'avança avant de venir s'allonger tout contre sa muse, la dévorant du regard pendant un instant, avant de faire passer le bout de ses doigts le long de ses courbes sensuelles, enfin mises à nu. Il pouvait sentir la nervosité de celle qui n'avait jamais quitté ses pensées et, en s'avançant vers elle pour l'embrasser, sentant leurs deux corps reprendre contact à nouveau, il espérait faire disparaître cette tension en elle. Déposant quelques baisers brûlant au coin de ses lèvres et dans son cou, Maekar laissa sa main droite remonter depuis l'intérieur des cuisses de sa cadette, venant caresser doucement le point central qu'il avait dévoré un peu plus tôt, avant de relever la tête. Ses yeux brûlant d'un brasier à la force renouvelée, il parvint enfin à vocaliser clairement la seule chose qu'il avait en tête, à ce moment précis.

« Je te veux. Ici. Maintenant. »

Elaena Tergaryon
Elaena Tergaryon
Sénatrice


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Quadrant Sud, Cité de Valyria ֍ Troisième Mois de l'An 1066

Il s’approchait, lentement, prenant son temps comme pour faire durer encore un peu le supplice que nous nous infligions depuis que nos regards s’étaient enfin croisés. Je m’étais dénudée pour lui, je m’étais allongée, sans défenses, déposant à ses pieds les armes de malice dont j’avais largement usé contre lui, pour son plus grand plaisir comme pour le mien. Je le regardais me regarder, et je voyais dans ses yeux une admiration que je n’aurais jamais cru connaître dans les yeux de quiconque. Il y avait du désir, bien sûr, et je déposais devant ses yeux les atours nus d’une femme après quatre ans de guerre, je n’étais pas assez bête pour imaginer qu’il ait pu résister au butin des héros de Meereen mais tout de même… Il y avait toujours quelque chose de grisant à voir une femme ou un homme se mettre à nu devant vous. Pourtant l’admiration que ses yeux me partageait était bien plus profonde, elle me contait l’histoire d’un amour que je me sentais presque honteuse à présent d’avoir remis en doute. Je l’avais regardé, je m’étais délecté du grain de sa peau, des traits de son torse, et même de chacune des marques de la guerre qui le rendait, à mes yeux, plus valeureux encore.

Il s’était approché encore, lentement, comme pour goûter pas à pas à cette distance que l’on détruisait, qui bientôt ne serait plus qu’un mauvais souvenir. Je détaillais sa démarche, fixant ses épaules, le mouvement imperceptible de ses bras, les quelques mèches de ses cheveux argentés qui tombaient sur ses épaules… Il est de ces moments dont on souhaite fixer les moindres détails. De ces moments dont, des années plus tard, nous sommes capables de rappeler les éléments les plus insignifiants. Alors qu’il s’immobilisait, anticipant étrangement ce qui allait se produire, je fixais ses mains. Je suivais le chemin les conduisant jusqu’aux lacets du pantalon que les doigts experts s’attelaient à dénouer. Encore quelques secondes et nous serions à égalité. Le pantalon enfin à terre, il restait un instant ainsi, et nos yeux se répondaient d’un éclat toujours plus brillant, accompagnant sans peine nos sourires sensuels.

« Il n'y a plus que toi et moi, ici. Rien d'autre ne compte. »

Il s’allongeait à mes côtés et cette proximité retrouvait me coupait la parole presque instantanément car elle allait de paire avec le retour de ses mains sur mon corps. Pouvait-il y avoir de meilleure façon de se retrouver que de redécouvrir le corps de l’autre avec une patience infinie ? Il était inutile de nier l’existence de la pulsion des amants trop longtemps séparée et qui les poussait à se jeter l’un sur l’autre. Cette pulsion même qui occultait le sens même du mot retrouvaille et portait chacun à se jeter corps et âme dans un acte qui, finalement, perdait de son sens à l’instant même où on le pressait. Nous n’étions pas de ceux-là, car nous savions que le meilleur des plaisirs était celui qui survenait au coeur d’une complicité et d’une communion entières. Comment parvenir à n’être qu’un lorsque tant d’années nous avaient tenus si éloignés ? Nous ne pouvions nous jeter dans une passion aveugle, car aveugle elle perdait tout de sa beauté. Je ne voulais rien d’aveugle, au contraire. Je voulais tout voir de lui, et malgré ma timidité et mes réticences je voulais qu’il voit tout de moi. Je voulais qu’il soit en moi en sachant tout de moi, en voyant tout de moi, et moi de lui.

Il se penchait pour m’embrasser, et je profitais de ce rapprochement pour laisser mes mains s’aventurer dans le creux de ses reins puis sur ses fesses, dans un ballet savamment pensé, dansant presque en miroir avec ses mains à lui. Il n’avait rien pu cacher de l’excitation qui était la sienne, et je pouvais la sentir contre moi. Mes mains se bornaient à imiter les siennes, empruntant le chemin d’un plaisir commun trop longtemps refusé. Le simple contact de sa main entre mes jambes avait été à l’origine d’une salve de frissons qui s’étaient empressés de remonter le long de ma colonne vertébrale jusqu’à la nuque.

« Je te veux. Ici. Maintenant. »

Sa phrase à peine terminée, le mot ‘maintenant’ encore flottant autour de nous, je laissais échapper un gémissement, ce son que je retenais depuis de longues secondes à présent et que sa déclaration avait rendu impossible à maintenir secret. Je déposais l’une de mes mains celle qu’il avait déposée sur moi, et je laissais mon autre main lui rendre le plaisir qu’il me donnait avec tant de dévotion. Mes yeux ne parvenaient à quitter les siens que lors des instants où je ne parvenais pas à les maintenir ouverte, les salves de plaisir gagnant tant en intensité qu’il m’était à présent impossible de feindre l’insensibilité et de rester silencieuse. Je ne craignais plus que l’on puisse nous découvrir ainsi, à vrai dire mon esprit n’était plus capable de formuler la plus simple des pensées. Je sentais son corps se raidir entre mes bras et les échos de nos plaisirs joints formaient une musique si douce à mes oreilles que j’aurais voulu n’entendre plus que cela. Une décharge plus forte encore, et ce n’était plus un faible gémissement mais un cri que j’étouffais d’une main, se détachant à regret de la sienne qui n’en cessait pas son oeuvre pour autant.

D’un geste presque réflexe, je repoussais son corps afin qu’il se retrouve sur le dos, et je répondais à son regard interrogateur par un sourire. J’étais avide. Avide de lui. De son odeur. De sa peau. Déposant mes mains sur sa poitrine, je passais l’une de mes jambes au-dessus de lui afin de le chevaucher. J’attrapais ses mains et les déposais sur ma poitrine, d’un geste autoritaire mais dont la fin ne pourrait lui déplaire, et un instant je restais ainsi, sur les genoux, suspendue au la naissance de son entrejambe. Attrapant ses mains pour mêler nos doigts, je les dirigeais au-dessus de sa tête, amenant mon visage au-dessus du sien, ma poitrine au-dessus de la sienne, et je m’emparais, cette fois avec une certaine violence, de ses lèvres et de sa langue. Je me cambrais afin que cette communion de nos bouches puisse trouver un écho favorable dans la réunion de nos poitrines, et l’effleurement timide de nos sexes. Je libérais finalement ses lèvres, à bout de souffle, les joues rougies par un désir que je ne pouvais plus dissimuler, et je partais à la conquête de sa mâchoire, de son cou, dans un rythme qui n’avait plus rien à voir avec celui de la découverte, de la mémorisation… Je ne découvrais pas son cou, je m’en emparais. Je le mordais, j’y laissais mon empreinte alors que mes mains continuaient d’emprisonner les siennes.

« Tu m’as demandé si j’aimais ce que je voyais… »

Je me redressais lentement, un sourire aux lèvres, laissant mes ongles griffer doucement sa peau le long de ses bras, sur sa poitrine et son ventre jusqu’à ce que mes mains rejoignent mon bas ventre.

« Je ne voudrais rien voir d’autre de ce monde. Rien ne compte. Rien d’autre ne compte… »

Je me baissais, remontant de la naissance de son torse à son cou, retournant à mon point d’origine : ses lèvres.

« … que toi et moi. »

J’avais voulu que ma voix prenne des accents séducteurs, elle avait en réalité été tremblante, ébranlée par la force des sentiments qui faisait de cet homme le centre de mon monde. J’aurais bravé la guerre pour le retrouver s’il me l’avait demandé. Je me serais jetée au coeur du combat, si sa survie me l’avait commandée. Il était mon autre… Cet autre moi dont la présence ne rend pas complet, car je m’estimais bien assez pour me penser entière sans aide extérieure, non il était la personne dont la présence rend meilleur. Plus que complet, soi-même. Prenant légèrement appui sur son ventre, je me soulevais et l’ultime contact, celui qui nous avait été refusé depuis tant d’années, celui que je redoutais tout en l’attendant avec fébrilité…

« Oh… »

A la suite de cette rencontre retrouvée, tout m’avait semblé flou, plongé dans une nébuleuse de plaisir et de bonheur dont mon esprit avait oublié les ressorts. Sa bouche sur mes seins, ses mains guidant mes hanches, sa bouche dans mon cou, mes mains dans ses cheveux, ses mains remontant dans les miens pour y emmêler leurs doigts… D’un geste brusque, mais maîtrisé, il me soulevait, comme si je ne pesais guère plus que la coupe de vin que j’avais lancée au loin, il échangeait les rôles. Mon dos allongé contre le velours des coussins, je goûtais une seconde fois à l’assouvissement d’un désir comblé alors qu’il revenait en moi. D’un geste réflexe, comme pour chasser toute distance physique, comme pour l’empêcher de repartir et m’assurer qu’il serait toujours là, je nouais mes jambes dans son dos, accentuant plus encore la profondeur de la rencontre de nos corps.

« Je te veux…. Partout… Et toujours… »

Nos regards qui jamais ne s’abandonnaient s’adressaient un sourire complice à l’entente de la reprise de sa phrase. S’il m’avait été offert de choisir entre toutes les richesses de ce monde et cet instant avec lui, j’aurais accueilli la mendicité avec une sérénité indescriptible. Je pensais à ces êtres qui peut-être jamais ne connaîtraient la profonde connexion capable d’unir deux êtres, deux âmes, qui se reconnaissent. Il y avait bien sur l’affection, la tendresse, ce genre de sentiments qui étaient capables de naître au coeur d’un mariage arrangé et sans amour. Ce que nous avions allait bien au-delà de ce que les mots de notre culture était capable d’exprimer. Et d’ailleurs, mettre des mots sur un sentiment tel que celui-ci n’était-ce pas le rabaisser ? Pourquoi aurions-nous du user des mots inventés par d’autres pour décrire ce que nous seuls étions capables d’appréhender ? Cela n’avait pas de sens. Dire que j’aimais Maekar Tergaryon était un euphémisme, une broutille en comparaison avec le déferlement d’émotions que sa simple présence provoquait en moi.

De lui-même, il attrapait mes hanches et nous basculions afin que son dos ne retrouve le contact doux du coussin. Nous étions proches du précipice, j’étais comme suspendue au-dessus du vide, avec la conscience certaine que, très bientôt, j’y basculerai, un sourire aux lèvres. Il n’y avait plus de soupirs, il n’y avait plus de sourires gênés, nos bouches entrouvertes laissaient échapper des râles et gémissements dont l’intensité redoublait à mesure que nous nous approchions du vide. Nos regards qui avaient été malicieux, taquins, amusés, amoureux, étaient à présent brulants, intenses d’un désir devenu trop puissant pour être contenu. Très vite, il avait même été douloureux de soutenir ce regard qui m’enflammait plus encore. Je fermais les yeux, balançant la tête en arrière alors que ses mains se déposaient sur mes fesses et qu’il se remontait pour laisser ses lèvres s’emparer de ma poitrine.

C’était là. Ce moment-là. Ce moment si particulier où la fin était aussi le début. Ce moment hors du temps qui n’est jamais le même, toujours unique. Je me saisissais de ses cheveux, tirant sa tête en arrière pour déposer un énième baiser à la naissance de sa mâchoire, ultime lutte contre la vague qui menaçait de briser mes résistances… Et je m’abandonnais. Je m’abandonnais, le front collé au sien, avant de lover mon visage dans son cou alors que je m’effondrais contre lui, incapable de rouvrir les yeux, ou plutôt refusant de rouvrir pour les yeux pour laisser encore la sensation de propager en moi alors que déjà nos corps s’étaient séparés. Nous restions ainsi de longues minutes, ses bras me recouvrant pour me coller à lui alors qu’il se recouchait. Je restais ainsi, allongée sur lui, comme pour que chaque centimètres de nos peaux puissent rester en contact le plus longtemps possible. Combien de temps étions-nous restés silencieux et allongés ainsi ? Je n’aurais pu le dire. Cela aurait pu être dix minutes, une heure, un jour ? Bientôt, comme pour vérifier qu’elle en était toujours capable, l’une de mes mains se mit à remuer, laissant quelques doigts dessiner des formes sur le côté de sa poitrine que ma tête n’occupait pas.

« Maintenant… et toujours… »

Un sourire aux lèvres, un sourire destiné à rien d’autre qu’à marquer l’amour que je ressentais à cet instant, je déposais un énième baiser sur sa poitrine. J’acceptais finalement de vérifier que mon corps pouvait encore se mouvoir, et je glissais maladroitement de son corps pour laisser mon flanc se déposer contre les coussins et ma tête au creux de son bras. Nous restions à nouveau silencieux un long instant, nos mains simplement attelées à caresser la peau de l’autre, mon dos, le bras que j’avais déposé sur sa poitrine, cette même poitrine et son flanc.

« Nous devrions nous rendre jaloux plus souvent si le résultat est au moins égal à ce qui vient de se produire… Que les Dieux m’en soient témoins… tu m’as tant manqué… tant manqué que je n’avais pas les mots pour te le dire. »


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Même selon les critères de son peuple Maekar était anormalement calme et réfléchi car c'était ainsi qu'il avait été éduqué dés son plus jeune âge, on eut tôt fait de lui indiquer l'intérêt de la réflexion et l'importance de ne pas laisser ses émotions obscurcir son jugement, tout le contraire de son défunt frère en somme. Très porté sur l'introspection, Maekar avait donc pris pour habitude de tout analyser avec du recul et c'était de ce réflexe devenu naturel qu'était né son talent pour la stratégie et l'esprit tactique, l'une des raisons pour lesquelles il n'était pas resté bien longtemps un simple soldat du rang et qu'il put étendre sa perception pour avoir une vision plus globale du champ de bataille. Pourquoi repensait-il à cela, maintenant ? Parce qu'en dés qu'il eut l'annonce de la fin de la guerre il s'isola dans un coin pendant des heures voire des jours, laissant son esprit errer pour lui permettre d'imaginer tous les scénarios possibles des événements à venir, une fois qu'il serait de retour à la maison.
Oh bien sûr l'idée d'être acclamé en héros fut chassé rapidement de son esprit car la poursuite de la gloire n'avait jamais été son but, mais il avait appréhendé bien davantage l'idée de retrouver sa famille qui, suite à son choix de refuser l'héritage auquel il avait le droit, aurait pu avoir quelques virulentes réactions. Il s'était donc imaginé que son père pourrait le renier en l'insultant de tous les noms présents dans la langue valyrienne, que sa mère se serait rangé silencieusement du côté époux pour refuser son amour à son second fils, que Daenyra et Maerion – dont il n'avait été que modérément proche – lui tournent le dos également, mais la plus grande inconnue restait la réaction de la femme qu'il aimait plus que de raison.

Maekar était mort une première fois lors de sa toute première bataille, son innocence et sa vie d'insouciance furent réduites en bouillie lorsque l'un de ses voisins tomba juste à côté de lui lors de leur premier assaut, une flèche fichée dans son œil gauche. Il n'avait rien dit ce jour-là, avait enfoui son désespoir et sa peur de mourir tout au fond jusqu'à la fin de la bataille, puis avait recommencé le même processus à chaque nouvelle défaite, jusqu'à ce que la douleur de la perte d'être chers et de compagnons loyaux ne soit plus aussi horrible. Cela lui coûtait de l'admettre mais il avait fini par s'habituer à la mort, sans pour autant que cela finisse par l'indifférer, mais malgré toutes ces épreuves et sacrifices il n'aurait pas pu supporter que sa sœur lui tourne le dos, elle aussi. Il n'était pas doué avec les mots, incapable d'assembler des lettres pour définir clairement la puissance du lien qui l'unissait à cette femme désormais retrouvée, mais il savait au fond de lui que si la guerre ne pourrait jamais totalement le détruire, l'abandon de sa sœur le pourrait.

Un guerrier se devait d'être calme et serein en toute circonstance, maître de lui-même et de ses sens mais, lorsque ses yeux se posèrent sur le corps nu de sa cadette, toutes les défenses du général tombèrent en une fraction de seconde. Un seul regard de sa part suffisait à voir les failles dans la défense du soldat, raison pour laquelle il n'hésita pas un instant à aller la rejoindre, retrouvant ce contact charnel qui l'avait manqué plus qu'il n'aurait jamais pu l'imaginer. Il connaissait les plaisirs de la chair mais tout avait toujours été plus intense et profond avec elle, plus vivant, comme si le corps tout entier du général était irrémédiablement guidé vers celui de cette muse dans son plus simple appareil. Il avait envie de la dévorer toute entière mais, à l'évidence, la passion d'Elaena supplanta la sienne l'espace d'un instant, le surprenant assez pour qu'il n'ait pas le temps de réagir alors qu'elle le poussait contre les coussins, reprenant le contrôle de la situation.
Même à ce moment-là elle cherchait encore à jouer avec lui et prendre les choses en mains, littéralement. Décidément elle ne changerait jamais et c'était sans doute pour le mieux, car le soldat l'aimait tout juste comme cela. Tout guerrier de son état Maekar prenait naturellement les choses en main mais, après l'avoir fait pendant quatre années, il décida pour une fois de desserrer sa poigne et de la laisser aux commandes. Il la sentit tout contre lui, se rapprochant et son corps se raid encore davantage en sentant le contact intime avec la belle au-dessus de lui, car s'il se remémorait la nuit dans la grotte il comprit rapidement que celle-ci serait sans commune mesure. Il avait survécu à une lame au travers du flanc et plusieurs flèches dans l'épaule, mais la communion la plus purement intime avec cette déesse foudroya littéralement le guerrier sur place, lui coupant le souffle alors que ce contact fit frissonner et rigidifier son corps tout entier.
Les premières secondes prirent l'homme de court pour ainsi dire, car il avait oublié l'intention d'une telle communion mais bientôt, lorsque le plaisir envahit chaque fibre de son être, son corps prit la place de ses pensées et ses réflexes reprirent la main. Il aurait voulu la dévorer encore plus intensément, plus longtemps et déposés ses lèvres partout où il le pouvait, pour ainsi dire, jusqu'à ce qu'il décide de reprendre de nouveau le contrôle dans un éclair de lucidité. Il la voulait tout comme elle le voulait, pas seulement pour ce soir et, dans un souffle presque coupé, Maekar parvint à articuler :

« Alors c'est ce que tu...auras. »

Cela ne servait plus à rien de se retenir, surtout pas maintenir car cela pourrait être plus considéré comme une insulte qu'autre chose. Sans qu'il puisse garder le moindre contrôle, Maekar laissa donc échapper un râle de plaisir suivit par beaucoup d'autres d'une intensité croissante, sa conscience depuis longtemps écrasé par ce plaisir d'une puissance encore jamais ressentie. Il perdit totalement la notion du temps alors que ses yeux se perdait dans le regard de sa partenaire, ses mains caressant et agrippant l'objet de son désir de la seule façon qu'il connaissait, luttant encore et encore pour prolonger cet effort jusqu'à ce qu'elle comme lui n'en puissent plus. Il était capable de combattre pendant des heures mais ici, dans cette pièce, il décida de ne plus lutter et laisser le plaisir l'envahir, échangeant un tout dernier baiser, avant que la belle ne s'effondre de fatigue tout contre lui, apportant un moment d'une rare douceur après ces retrouvailles intenses.
Il aurait voulu rester dans ses bras encore et encore, pour l'éternité si l'opportunité lui était donnée, aussi s'abandonna t-il à ces douceurs, ces caresses, jusqu'à ce que Elaena glisse à ses côtés, posant sa tête tout contre lui avant de lui rappeler à quel point cet éloignement avant été douloureux. Souriant doucement face à ce constat qu'il partageait également, il lui répondit sur un ton un peu plus léger :

« Je te rassure, ce n'est que le début. J'ai survécu à la guerre, je peux bien survivre à ta passion dévorante.  »

En était-il vraiment capable ? Il espérait bien que oui car, célébrations ou pas, il se doutait bien qu'un seul moment ne serait pas suffisant pour satisfaire les deux amants.  Repensant à la mention de la douleur de cette séparation, l'esprit de Maekar dériva vers les nuits les plus sombres et glacées passées loin d'elle et, instinctivement, ses bras vinrent entourer la demoiselle, avant de lui murmurer :

« Tu es la seule chose qui m'a fait tenir, pendant si longtemps. Tu le sais, n'est-ce pas ?  »

Un soldat se devait d'avoir un point d'attache, une motivation, un but à atteindre, une famille vers laquelle rentrée lorsque la guerre serait finie et, pour Maekar, cette motivation était à présent entre ses bras. Déposant un doux baiser au coin de ses lèvres alors ses mains venaient la caresser avec une douceur infinie, Maekar se pencha pour déposer un dernier baiser sur ces douces lèvres, avant de laisser sa tête reposer sur les coussins, lâchant dans un souffle ce qu'il avait sur le cœur.

« Je ne savais pas si tu voudrais encore de moi, après...tout cela. Mais je suis content de voir que je me suis inquiété pour rien. Tu  m'as manqué.  »

Elaena Tergaryon
Elaena Tergaryon
Sénatrice


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Quadrant Sud, Cité de Valyria ֍ Troisième Mois de l'An 1066


Qu’il était bon d’être de retour chez soi. Il existe une croyance idiote qui prétend que son foyer est un endroit bien déterminé dans ce monde, et que l’objectif ultime est de retrouver le giron serein de cet endroit. Il n’existe pourtant rien de la sorte, car un vrai foyer ne prend pas la forme d’une villa ou d’un palais… Il est cette personne unique dont la simple présence suffit à apaiser l’esprit et aiguiser les sens. J’avais passé ces quatre années de guerre bien protégée dans la villa qui m’avait vue grandir et pourtant, jamais encore n’avais-je été si loin de mon foyer. Je le retrouvais ce soir, et je devais au moins concéder aux poètes qu’ils avaient raison sur un point : il n’y avait pas de plus doux sentiment que celui de retrouver son foyer. Je ne pouvais plus me départir d’un sourire idiot, sans doute sous l’effet des mains de Maekar sur ma peau et le rythme de nos respirations qui s’apaisaient progressivement.

« Je te rassure, ce n'est que le début. J'ai survécu à la guerre, je peux bien survivre à ta passion dévorante.  »

Quittant la certaine torpeur dans laquelle je m’étais lovée, j’explosais d’un rire incontrôlable à la suite de cette phrase. Peut-être ne prenait-il pas toute la mesure de ma passion pour lui… Sans doute se serait-il montré plus prudent s’il l’avait su. J’aurais pu passer la nuit entièrement simplement ainsi, caressant sa peau, l’embrassant de temps à autres, la goutant même parfois pour maintenir une saine tension entre nos corps.

« Oh tu me sembles bien sûr de toi, Général… »

Délaissant le coussin contre lequel mon corps avait trouvé un certain confort, pour recoller ma poitrine contre celle de mon frère et finalement retrouver une position chevauchante plus que provoquante. Le sourire paisible avait laissé place à une expression bien plus carnassière. Je m’abaissais lentement, suspendant littéralement mes lèvres au-dessus de celles de mon frère. Je restais ainsi un instant, caressant le bout de son nez avec le bout du mien, caressant sa poitrine avec la mienne.

« … Mais la guerre n’a eu de cesse de… d’accroître, cette passion. Et d’ailleurs… »

Je l’embrassais enfin, offrant une parenthèse langoureuse à cette attitude de défi que j’avais retrouvée avec délectation.

« … Après ce soir il te sera bien difficile de te défaire de moi. »

Un ultime baiser, presque volé celui-ci, et je m’effondrais contre sa poitrine à nouveau, riant sincèrement à la vue de son air amusé. Ses bras à nouveau se refermaient sur moi, collant nos corps dans une imitation fidèle d’une symbiose. Qu’il était doux de sentir mon corps réchauffé par le sien, ma respiration guidée par la sienne et les battements de mon corps synchronisés sur les siens. Le silence qui retombait marquait une pause bienvenue dans le petit jeu de séduction que nous aimions tant. La séduction était une chose, mais ce que nous avions était bien au-delà. Je l’avais aimé avant même d’être familière avec le tourbillons du désir de la chair. Je l’avais admiré des années avant qu’il ne devienne le héros adulé de tous. Je l’avais attendu avant même de savoir qu’il m’attendait aussi. Il aurait été bien idiot de résumer notre relation à la passion que nous ne parvenions pas à dissimuler. Elle était la partie émergée de l’iceberg, ce fait impossible à combattre qui dissimule une vérité intrinsèque à nos êtres : nous étions liés par l’âme avant de l’être par le coeur et le corps.

« Tu es la seule chose qui m'a fait tenir, pendant si longtemps. Tu le sais, n'est-ce pas ?  »

Je décollais la joue qui, depuis de longues minutes, reposait contre la peau de sa poitrine, la remplaçant bien vite par la pointe de mon menton afin de capter le regard de Maekar. Je pouvais sentir mon coeur grossir à mesure que ce que je pouvais lire dans le regard de mon frère faisait écho à ce que ses lèvres venaient de formuler. Je cherchais les mots, ceux qui seraient capables de répondre à une déclaration que je savais puissante. C’était l’aveu d’une nécessité, d’une faiblesse, une manière de confesser le caractère de mon être pour le sien. Par là, Maekar me disait qu’il avait marché au coeur du royaume de Balerion, côtoyé la mort, et que mon être avait été ce qui lui avait permis de rejoindre le monde des vivants, ce monde dont nous profitions pleinement ce soir là. Quels mots pouvaient donc répondre à un tel aveu ? J’aurais pu lui répondre que le simple souvenir de son visage avait été suffisant à maintenir un sourire sur mes lèvres lorsque ma vie entière s’effondrait autour de moi. Que sa peine avait été suffisante pour briser à jamais mon coeur. Que cette nuit, il y a trois ans, à simplement le regarder dormir alors que le matin tardait à se lever, avait été capable de donner un but aux trois années qui avaient suivi. Mais comment tout cela aurait-il pu être suffisant ? Je n’avais pas regardé la mort dans les yeux, elle n’avait fait que me hanter chaque nuit. Aucun mot n’aurait pu être à la hauteur de ce sentiment qui, à cet instant, menaçait de faire exploser mon coeur.

Il portait ses lèvres vers les miennes, à nouveau, d’un geste tendre et aimant, et je fermais les yeux, comme envoutée par ce contact retrouvé.

« Je ne savais pas si tu voudrais encore de moi, après...tout cela. Mais je suis content de voir que je me suis inquiété pour rien. Tu  m'as manqué.  »

Mon corps toujours sur le sien, je me hissais maladroitement afin que nos visages soient à la même hauteur, et sans attendre j’enfouissais mon visage dans son cou, tentant de plonger mes mains entre les coussins et le dos de mon amant pour l’enserrer entièrement de mes bras. Sans doute avait-il du deviner mon intention puisqu’il nous faisait basculer sur le coté, me donnant l’occasion de glisser une jambe entre les siennes pour nous entrelacer plus encore.

« Tu as raison, je ne veux plus de toi… D’ailleurs comment pourrais-je encore vouloir d’un homme doux, aimant, attentionné, et plus important à mes yeux que l’air que je respire ? Tu as raison, ce serait la bien idiot. »

Mon sourire narquois serait sans doute suffisant pour le faire rire, ce qui était là mon objectif principal. J’abandonnais finalement cette posture ironique, laissant retomber ma tête contre le bras qu’il avait étendu à cet effet.

« J’avais peur d’être… que... que tu aies perdu l’intérêt que tu avais démontré pour moi… Nous avons tant changé en quatre ans… J’avais peur de ne plus être à ton goût, ou bien qu’une autre ait pu… te conquérir. »

Il était difficile pour moi d’être si honnête tant je craignais qu’il me trouve ridicule ou trop immature. J’enfouissais mon visage dans sa poitrine autant pour cacher la rougeur qui me montait progressivement que pour ne pas être témoin d’une éventuellement expression moqueuse sur ses traits. Je soupirais, encouragée par la relative protection que ma position offrait, et me décidais à continuer dans cette démarche si importante si nous voulions nous retrouver pleinement.

« Je n’ai pas vécu la guerre, et je me sens… coupable d’avoir été si protégée. Mais tu sais… cette décision… La décision de Père de faire de moi son héritière parce que tu avais refusé… Tu aurais du voir sa défiance… Il devait me prendre pour la dernière des idiotes. J’ai eu peur de tout ce que cela signifiait, je me suis sentie soudainement écrasée par ce que l'on attendait de moi. Mais quand j’ai su que toi… toi, tu avais eu foi en moi, dès le début… Et que cette décision te permettrait d’obtenir enfin la liberté que tu recherchais… »

Je devais être courageuse. Il n’était plus question d’agir en petite fille apeurée. Je relevais le visage, affrontant son regard pour la première fois depuis le début de ma confession.

« … Alors je me suis dit que là était mon devoir. Envers notre famille et… et envers toi. Je veux que Père soit fier de moi et lui prouver à quel point il avait eu tort de me sous-estimer mais… Je veux que tu sois fier de moi, je veux que tu me vois comme… une égale. Pas comme une enfant. Pas comme ta soeur cadette. Mais comme une femme forte, intelligente, indépendante et… digne de toi. »

Avec un gémissement gêné je dissimulais à nouveau mon visage cette fois à l’aide de ma main.

« Tu dois me trouver ridicule… »



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For the two of us, home isn't a place. It is a person. And we are finally home 




Tous dans la famille savaient que Maekar avait toujours été plus dans son élément lors des moments de silence que lorsque son avis était désiré, non pas parce qu'il ne savait pas s'exprimer clairement lorsque la situation l'exigeait mais parce qu'il n'aimait pas le faire. Peut-être n'aimait-il pas être au centre de l'attention, peut-être ne trouvait-il pas ses pensées suffisamment intéressantes pour qu'elles méritent d'être entendues à voix haute, ou peut-être avait-il appris à accepter sa place de second dans l'ordre de succession en étant le plus discret possible. Quoi qu'il en soit, il n'était pas bon avec les mots et se murait naturellement dans un silence pour masquer ses pensées mais, rapidement, il comprit qu'en présence de sa sœur il s'exprimait davantage en dix minutes qu'il ne le faisait généralement en dix jours, sans qu'il ne semble avoir le moindre contrôle là-dessus. Cela fut effrayant et déroutant au départ, car il avait été éduqué pour être maître de lui-même et il ne parvenait pas à l'être en présence de la demoiselle mais, au fil du temps, il avait appris à accepter cette incapacité comme...la vie, tout simplement.
Il ne pouvait pas et ne cherchait plus à l'expliquer, car il savait que cette absence de retenue voulait simplement dire que cette femme, celle qu'il tenait à présent dans ses bras, était la seule au monde à qui il pouvait et voulait naturellement se confier, malgré des années de silence et de maintien. Malgré ses plus intenses efforts il ne parvenait jamais à rester sérieux et taciturne bien longtemps en la présence de sa cadette et, comme il put le constater quelques secondes plus tard, elle était la seule à parvenir à le faire s'ouvrir si naturellement.

Même en ce moment-là elle restait joueuse en clamant qu'il ne parviendrait pas à suivre le rythme et tenir la distance. Oh qu'elle était présomptueuse, cette femme-là, mais n'avait-elle pas raison ? Peut-être était-il trop fatigué et épuisé par ce conflit sans fin et cette absence d'un repos réparateur pensant aussi longtemps. Qu'elle que puisse être la vérité, lorsque la demoiselle ajouta qu'elle ne s'en irait pas de si tôt, Maekar s'autorisa un petit sourire tout en répondant sur un ton léger :

«Vraiment ? C'est dommage. Moi qui comptais aller retrouver l'une de mes nombreuses conquêtes.  »

Lui non plus ne perdait jamais de vue leur petit jeu, un vent de fraîcheur dans une vie qui était devenue anormalement compliquée, au cours des dernières semaines. La présence de cette muse semblait l'apaiser plus qu'il n'avait cru cela possible et, alors qu'il avait des milliers de pensées dans sa tête en même temps, il resta humblement silencieux jusqu'à ce que Elaena tourne en ridicule ses propos, pointant du doigt avec sarcasme qu'il était bien plus désirable qu'il n'y paraissait. Souriant à ces propos, Maekar laissa échapper son premier rire franc et doux de la soirée, son premier vrai rire depuis l'annonce de la fin de la guerre, à dire vrai. Ce rire fut écourté lorsque sa cadette lui fit part de sa plus grande crainte, à savoir la disparition de son désir pour elle ou bien  la possibilité que quelqu'un d'autre puisse avoir ravi son cœur entre temps.
En d'autres circonstances il aurait ri et se serait gentiment moqué pour adoucir l'atmosphère, mais il savait que chaque fois que la demoiselle s'adressait à lui elle le faisait avec le cœur et, dans le cas présent, se moquer de ses peurs et en diminuer l'importance par une boutade n'aurait été que pure insulte. À la place, il tint à lui rendre son geste en caressant sa douce chevelure avec une infinie précaution, déposant un doux baiser sur son front en formulant un constat dont seul son camarade Aeganon avait eu vent, au fil des dernières années.

« Si cela peut te rassurer, la seule femme ayant partagé mon lit pendant ces quatre dernières années se trouve ici, dans mes bras.   »

Il ne pouvait pas passer sous silence une telle information en ayant écouté et entendu la vraie nature des peurs de sa cadette. Passant ses mains dans le dos de la demoiselle pour venir caresser ses épaules, Maekar sourit en voyait la belle masquer son visage dans son cou mais, bientôt, lorsque la jeune Elaena releva son visage, toute trace d'un quelconque sourire avait disparu du visage de son aîné. À la place son regard sembla si loin et teinté d'une pointe de tristesse, ou plutôt de culpabilité, alors qu'il écoutait la demoiselle raconter à quel point cette transition avait été difficile pour elle. Comment avait-il pu croire qu'il en serait autrement ? Il ne pouvait pas dire que cette décision avait été faite sur un coup de tête car cela n'avait pas été cas, mais le plus frustrant dans cette histoire avait été de ne pas trouver de solution qui le satisfasse sans mettre sa sœur dans l'embarras. Et maintenant il était trop tard alors, dans un souffle, détournant ses yeux d'un regard qu'il ne pouvait soutenir, il souffla :

« Je suis navré de t'avoir mise dans une telle situation, vraiment. Néanmoins ce n'est pas la liberté que je cherche pas, c'est...autre chose. Dur à expliquer, en tout cas.   »

Ce n'était pas dur à expliquer, il savait très bien ce qu'il voulait et pourquoi il le voulait, mais il préférait être aussi évasif que possible pour ne pas encombrer sa sœur avec encore plus d'informations. Elle avait suffisamment à faire de son côté, sans se soucier de ce que voulait un frère à cause de qui elle devait endosser un rôle pour lequel elle n'avait jamais été préparée. Il avait pris sa décision et devait en assumer silencieusement les conséquences, comme toujours mais, malgré ce constat, il ne put se rappeler pourquoi il avait toujours cru que sa cadette aurait les épaules pour ce poste.
Il avait eu foi en elle depuis le départ même avant d'avouer ses sentiments, même avant d'en avoir conscience d'ailleurs alors, dans un autre souffle, le regard toujours perdu dans le vide, il diffuser une autre portion de ses pensées en quelques mots.

« J'ai demandé à Père un moment pour que nous puissions discuter, demain. Désaccord ou pas, je ne repartirai pas sans que nos fiançailles soient officialisées.   »

Même si ces mots étaient forts leur présentation n'était guère romantique, un autre rappel de la difficulté du soldat à exprimer correctement ses pensées les plus intimes, mais le message était pourtant clair. Aussi, lorsque vint le moment pour la demoiselle de s'ouvrir encore davantage, le regard de son frère ne put qu s'attendrir alors qu'elle tentait de cacher le sien. Elle voulait être son égal et...digne de lui ? Depuis quand était-il digne de quoi que ce soit, à part d'apporter la honte sur sa famille en ayant repoussé ce qui lui revenait de droit ? Chassant ces sombres pensées pour le moment afin de ne pas ruiner cet instant, Maekar sourit à la toute dernière déclaration de sa sœur, pour ramener le sourire sur son visage.

« Pas plus que d'habitude. »

Devait-elle être ridicule parce qu'elle osait dire tout haut ce qu'elle pensait tout bas ? L'honnêteté devait-elle être source de moquerie ? Pas selon le soldat en tout cas. Ce dernier déposa un doux baiser sur le front de sa muse, pour lui faire part de son point de vue sur la question.

« Elle est bien loin, à présent, la jeune fille qui essayait de s'entraîner avec une épée bien trop lourde pour elle. Elle a laissé sa place à une femme déterminée et qui sait ce qu'elle veut. Une femme que je ne peux que respecter et désirer encore davantage. »

Lui avait choisit de grandir en partant à la guerre tandis qu'elle avait été contrainte de le faire par la force des choses, mais elle avait réussi assez brillamment. Comment ne pouvait-il pas être fier d'elle, honoré d'être son égal ? Elle était une femme brillante, plus intelligente qu'il ne le serait jamais. Il passa donc sa main sous le menton de la belle, pour la contraindre  à relever son visage vers elle et, se pencha vers elle, déposa un dernier doux baiser sur ses lèvres avant de lui murmurer :

« Une femme que j'aime.  »
Elaena Tergaryon
Elaena Tergaryon
Sénatrice


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Quadrant Sud, Cité de Valyria ֍ Troisième Mois de l'An 1066

Sans doute personne n’aurait pu comprendre la profondeur de signification de ce moment pour nous deux. Je ne m’étais jamais questionnée sur la nature de l’amour liant un homme et une femme jusqu’à ce que j’en sois une victime bien consentante. Nous avions eu la chance de grandir dans un foyer où le couple parental était parvenu à atteindre, sinon l’amour, du moins une tendresse qu’on ne pouvait pas ignorer. Pourtant, la base du mariage n’avait jamais été l’amour, ou du moins l’amour autre que fraternel pour nos familles. N’était-ce dès lors pas unique d’aimer de tout son être une autre personne que soi ? N’avions-nous pas en notre possession un trésor précieux qu’il nous fallait protéger ? Combien de fois avais-je remercié les Dieux d’avoir permis à mon coeur d’être libre de ses élans, d’avoir mis Maekar sur mon chemin et d’avoir fait qu’il m’aime aussi. Il pouvait plaisanter, menacer de rejoindre ses prétendantes, je n’avais plus peur. L’absence et un certain silence avaient permis au doute de s’immiscer dans son esprit, mais il n’avait fallu que le contact de ses lèvres sur les yeux et la communion de nos regards pour me prouver qu’il ne pouvait y avoir de doutes. On n’embrasse pas ainsi sans amour. On ne regarde pas ainsi en pendant à d’autres, et…

« Si cela peut te rassurer, la seule femme ayant partagé mon lit pendant ces quatre dernières années se trouve ici, dans mes bras. »
« Quoi ? »

Je me surélevais au-dessus de lui à l’aide de mes bras pour sonder son regard. Il devait plaisanter ? J’avais beau le scruter, son regard ne flanchait pas, et aucun sourire moqueur ou ironique n’était venu orner son visage. Sceptique, je tentais de déceler derrière ce que j’imaginais être un jeu d’acteur une quelconque trace de plaisanterie… Mais rien. Alors sans même m’y attendre moi-même je me laissais emportée par un fou rire irrépressible.

« Mais… Comment ? Je… Je croyais que Meereen avait été le lieu de toutes les tentations terrestres ? Et… Mais enfin Maekar tu ne quittes pas Aeganon ! Comme tu ne me feras pas croire que LUI n’a pas… Enfin… tu sais quoi ! »

Incapable de tenir en équilibre sur mes bras pour le dominer, je m’effondrais sur lui riant encore quelques secondes avant de retrouver le silence. Le choc passé, je prenais la mesure de ce qu’il m’avouait. Oh ce n’était là rien de glorieux aux yeux des nôtres, c’était au contraire pour beaucoup une preuve de faiblesse. A mes yeux, c’était l’ultime preuve, au contraire, que la force de ce qui unissait avait du sens pour lui aussi. Je n’avais pas considéré un seul instant qu’il avait pu ne fréquenter aucune femme, je m’étais rassurée en imaginant qu’il ne s’agirait que de femmes de passage, bonnes simplement pour soulager les élans physiologiques de tout homme. Il avait refusé cela… Provoquant sans doute l’incompréhension de son ami Aeganon, et probablement quelques remarques moqueuses. Il avait placé notre « nous » au-dessus de son « moi » alors même que je n’étais pas là. Comment ne pas considérer cela comme le geste le plus pur d’amour et de considération qu’un homme puisse offrir ? Inquiète que ma réaction ait pu le froisser, je me hissais vers lui, déposant mes lèvres sur les siennes avec douceur tout d’abord puis plus éperdument, encadrant son visage de mes mains.

« Mais alors cette soirée, où tu es revenu… Tu n’avais pas… Et tu ne m’as pas touchée ?! Et bien, moi qui te pensais satisfait, si j’avais su j’aurais insisté davantage. »

J’avais pris un faux air outré, avant de me faire plus douce, plus séductrice et sensuelle, caressant du bout de mon index sa lèvre inférieure. La conversation ne pouvait se faire que douce, car la guerre avait changé de nombreuses choses, pour lui comme pour moi. Notre famille avait été lourdement touchée par les pertes au combat et cela avaient été nos vies à tous qui avaient été chamboulées. Comment expliquer à Maekar la crainte que cette nouvelle situation provoquait en moi sans pour autant le culpabiliser ? Je ne lui reprochais rien, il avait suivi la voie qui était la sienne et avait estimé que j’étais capable de reprendre ce rôle qui n’aurait jamais du être mien. Aurais-je préféré le voir refuser un siège à Drivo offert en récompense de ses actes héroïques pour lui préférer un acte obtenu par le simple fait d’être né ? Non, il n’était pas ces hommes là, et c’était une des choses qui forçaient mon admiration pour lui.

« Je suis navré de t'avoir mise dans une telle situation, vraiment. Néanmoins ce n'est pas la liberté que je cherche pas, c'est...autre chose. Dur à expliquer, en tout cas.   »

Je déposais mon doigt sur ses lèvres, le remplaçant vite par mes lèvres pour un baiser volé.

« Tu n’as pas à expliquer. »

Nous restions ainsi un instant. J’aurais voulu me gifler pour le sourire béat que je ne parvenais pas à effacer de mes lèvres. Je ne pouvais plus faire barrière à cet élan de bonheur qui me traversait de toute part. Toujours allongée sur lui, nos peaux plus fusionnées que jamais, je me délectais de la sensation de chaleur que son corps apportait au mien, aux frissons que le plus simple des contacts de ses mains sur mon corps déclenchait le long de ma colonne vertébrale.

« J'ai demandé à Père un moment pour que nous puissions discuter, demain. Désaccord ou pas, je ne repartirai pas sans que nos fiançailles soient officialisées. »

Je souriais, attendrie par la détermination que cet homme avait à faire de moi sa compagnie pour la vie, mais je ne disais rien. Je n’aurais pu émettre le moindre doute quant à la détermination de Maekar et sa capacité à tenir tête à notre père, cela il l’avait déjà prouvé… Mais je reconnaissais tout autant à mon père cet entêtement qui nous caractérisait tous. J’avais abordé le sujet le matin même, et Vaegon Tergaryon semblait plus résolu que jamais à ne prendre aucune décision concernant le mariage de ses enfants. C’était absurde. Comment pouvait-il renoncer à une promesse qu’il nous avait faite il y a des années déjà ? Pourtant, à mesure que les jours passaient, je finissais par être convaincue qu’il ne repoussait pas en vain… Il avait une stratégie. Notre père avait toujours une stratégie. Il semblait trouver un intérêt dans cet entredeux inconfortable, se convainquant que le simple fait de nous aimer en secret serait suffisant à nous faire patienter… Les mots n’auraient rien fait que renforcer la tension qui accompagnait ce sujet, alors je gardais le silence, n’essayant pas de l’informer des réticences exprimées le matin même par notre père, ne tentant pas de le galvaniser ou de le décourager. Nous aurions tout le temps pour cela, un autre jour, un autre moment, pas celui de nos retrouvailles. Alors à défaut de mots j’embrassais les traces encore visibles de maux anciens, déposant mes lèvres sur les cicatrices de son torse, m’égarant parfois à embrasser une peau immaculée pour le simple plaisir de la goûter. Il avait repris la parole, mais trop concentrée à ma tâche je ne l’entendais guère.

« Elle est bien loin, à présent, la jeune fille qui essayait de s'entraîner avec une épée bien trop lourde pour elle. Elle a laissé sa place à une femme déterminée et qui sait ce qu'elle veut. Une femme que je ne peux que respecter et désirer encore davantage. »

Il se saisissait de mon visage pour le mener à lui, substituant la peau humide de ses lèvres à celle de son torse. J’étais émue, et je dissimulais bien volontiers des yeux devenus brillants dans ce baiser, m’y perdant avec délice. Allais-je, un jour seulement, m’en lasser ?

« Une femme que j'aime. »
« Une femme qui t’aime… »

Un premier baiser, doux.

« …Tendrement… »

Un deuxième baiser, cette fois plus appuyé, plus intrusif, plus possessif et sûr de lui.

« … Passionnément… »

Un troisième baiser, alors que je me relevais légèrement, laissant mes jambes glisser le long des siennes puis les encadrer alors que je reprenais une position dominante, mes jambes encadrant son ventre. Je mettais fin à notre baiser à contre coeur, gémissant de regret alors que déjà mon corps réclamait toujours plus du sien.

« Et qui va devoir s’éloigner de toi très rapidement au risque de ne plus pouvoir quitter cette pièce… »

Je l’embrassais de nouveau, profitant de cette liberté retrouvée, puis je me levais d’un bond. Il n’y avait quelques pas à faire pour mettre la main sur mon unique vêtement, et bientôt je retrouvais une apparence pudique alors que mon esprit, lui, se perdait dans les méandres de fantasmes que les dernières heures avaient provoqué.

« Mais ne te crois pas sauvé… Quatre ans de frustration et d’attente… Que Syrax m’emporte si je n’en tire pas pleinement parti… »

Je lui envoyais un baiser et me dirigeais vers le rideau en velours que j’écartais légèrement avant de rediriger mon attention vers Maekar.

« … D’ailleurs rien ne t’empêche de me suivre à cet effet. »

Je m’engouffrais derrière le rideau, le laissant en grande partie fermée pour laisser à Maekar le loisir de se rhabiller au calme. Nous avions pris une certaine avance mais le reste des invités nous avait emboité le pas. A présent, les gémissements étaient au moins aussi fréquents que les notes de la musique qui était devenue plus discrète et effacée. Alors que je traversais la pièce, les corps se mêlaient, comme une projection dans le monde des images et envies sensuelles qui habitaient mon esprit et mon corps. Je refusais quelques invitations à rejoindre l’action, car je pouvais déjà sentir la présence de l’objet de mon désir à ma suite. Nous n’avions que trop abusé de l’hospitalité des maîtres des lieux, et il était grand temps de rejoindre notre palais. Nous nous étions retrouvés, et tout semblait avoir pris un sens nouveau. L’air était plus doux, l’oxygène plus savoureux, les étoiles plus brillantes, les arbres plus forts et les feuilles plus vertes… Le monde venait de retrouver de son éclat, de sa vigueur, et même de son intérêt à mes yeux. Tout était plus intense et plus beau.

L’avenir nous réservait tant d’obstacles à surmonter et pourtant, en cette soirée, je refusais de les considérer. Nous saurions les surmonter. J’en avais l’intime conviction. La peur de l’avenir n’était qu’une illusion véhiculée par les fâcheux pour nous convaincre que nous n’avions d’influence sur notre propre vie… Il ne pouvait y avoir de vie sans liberté, liberté d’aimer et d’être, et il n’y avait de liberté sans courage.

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