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Femmes de pouvoirRhaenys Haeron et Elanea Tergaryon

Palais Hoskagon, mois 4, an 1066  
Le palais Hoskagon était d’une architecture bâtie par des artisans aux mains les plus douées et dont il était impossible de nier qu’ils avaient pu y mettre toute leur passion, tant le résultat final était des plus grandioses. Il s’agissait-là d’un vaste bâtiment dont le luxe ne pouvait laisser la moindre place à l’exécration, que l’œil qui se posait dessus puisse être averti ou non il était indéniable que le palais faisait partie des plus belles œuvres crées en ville. Car oui, le bon goût des Tergaryon y était à son apogée et l’extérieur du palais n’était qu’une façade qui renfermait bien des éléments qui suscitaient autant de convoitise que la galerie d’art du Castel Maerion tant les détails étaient d’une finesse sans pareille. Cela faisait bien longtemps que Rhaenys Haeron ne s’était pas rendue en ces lieux et sa toute première fois devait remonter à sa tendre jeunesse où sa chère mère l’avait amenée dans le Sud du pays pour y parfaire son éducation, pour autant elle n’en avait jamais oublié l’œuvre de fierté et de grandeur qu’était Hoskagon. Et ce fut grâce à cette certaine fidélité entre les Haeron et les Vaelarys que la matriarche se retrouvait ainsi devant le palais, à observer les moindres détails sculptés avant de prendre enfin la décision de se présenter aux gardes.

La raison de sa présence n’était autre que Saera Tergaryon, née Vaelarys. Cette femme d’une bénignité comme il n’était pas rare de voir mais qui était une enfant du Nord, élevée dans l’optique de ne pas être de ces dames de l’ombre considérées comme étant inférieures aux hommes dans le Sud de Valyria, sachant imposer sa volonté. Avec une telle similitude sur cette force de caractère il n’était que d’une logique implacable que la jeune matriarche poursuive ces relations entretenues par sa défunte mère. Les gardes escortèrent alors à l’intérieur du palais la Haeron accompagnée de son cousin porteur d'une amphore vin venu tout droit de leurs vignes à Volantis. La jeune femme pu ainsi redécouvrir une partie de ces immenses salles qui composaient le bâtiment et elle fut menée jusqu’aux jardins où elle pu ravir ses yeux par l’harmonie des lieux qui leur donnait une beauté sans pareille. Rhaenys jeta un coup d’œil à son cousin puis elle prit une grande inspiration alors que ses yeux se mettaient à observer les alentours puis elle soupira de soulagement lorsqu’elle aperçu cette silhouette familière au premier regard.

Leur escorte les laissa à quelques pas de la valyrienne pour s’entretenir avec elle puis lorsqu’ils s’effacèrent, Rhaenys Haeron et Zalalthal Qhosan s’avancèrent. La surprise assaillit la jeune matriarche alors qu’elle se rendait compte que ses yeux l’avaient induite en erreur. La femme qu’elle rejoignait partageait les traits de Saera c'était sans équivoque, ils affichaient cette même force latente et cette similitude physique, mais son esprit conclu rapidement qu’il ne s’agissait pas de cette dernière. Il s’agissait-là de traits juvéniles, non pas ceux qu'elle gardait en mémoire et qui étaient eux marqués par l’expérience. La matriarche afficha tout de même un sourire empli d'une certaine tendresse alors qu’elle comprenait de qui il s’agissait. Elaena Tergaryon, le troisième enfant de Saera et de Vaegon.

- Elaena ? Quel plaisir de rencontrer, tu ressembles beaucoup à ta mère. A ce propos, où est Saera ? Elle devait me recevoir, dit-elle tout d’abord avec une politesse sincère avant que le sérieux ne prenne le dessus dans ses paroles et qu'une pointe d'appréhension ne vienne se mêler sur ses traits. Était-elle en proie à un mal quelconque, ce qui justifiait son absence à cet instant ? Rhaenys l'ignorait totalement et elle espérait que la matriarche des Tergaryon soit en parfaite santé.


Elaena Tergaryon
Elaena Tergaryon
Sénatrice

Femmes de pouvoirRhaenys Haeron et Elanea Tergaryon

Palais Hoskagon, mois 4, an 1066  

Voilà de nombreux jours que la première séance de rentrée du Sénat avait eu lieu, et sans doute Elaena n’avait-elle pas envisagé que celle-ci puisse avoir un tel impact sur sa vie. Tout lui semblait à présent sans dessus dessous. Vaegon et Saera avaient disparus, retournés à Oros ils tentaient de reprendre le dessus après le traumatisme de l’empoisonnement du patriarche. Maekar était absent, occupé nuit et jour par le Sénat et cette mission de protection dont Elaena l’aurait relevé bien volontiers. Fort heureusement restait Daenyra, dont la présence et l’intelligence se révélaient être les seules bouées capables de maintenir sa sœur ainée à flot. Les journées étaient à présent toutes entières dédiées à la tâche sénatoriale, et notamment à continuer de convaincre les esprits qui s’étaient rallié au clan Tergaryon suite au discours de la jeune femme.

« Et le sénateur Haeryanos ? »

Maelion Velnarys ne prononça pas un mot, se contentant de secouer la tête d’un air déçu. Haeryanos était un doyen de la faction, présent à Drivo depuis plus de vingt ans, et il avait démontré un intérêt tout particulier pour la succession de Vaegon Tergaryon. C’était de son propre chef qu’il s’était approché de Maelion afin de s’enquérir de la fille de Vaegon. Son discours n’avait guère été des plus inspirés, trop idéaliste au goût du vieil homme, mais elle avait démontré du courage et une détermination qui faisait défaut à bon nombre des leurs. Il allait suivre l’ascension de cette jeune demoiselle, mais il avait été formel auprès de Maelion, elle était bien trop inexpérimentée pour être laissée à la tête d’une faction comme la leur. Il y avait eu tractations pourtant, et Vaegon n’avait guère été le dernier à rappeler à Haeryanos qu’il restait présent pour guider la jeune Elaena, et qu’elle était un visage lui permettant de concilier ses affaires à Oros, qui allaient dans le sens des intérêts mercantilistes, et une présence au Sénat. Cela n’avait guère suffit, Haeryanos n’était pas convaincu, et son amitié de longue date avec Vaegon n’avait guère suffit, il serait de ceux qui soutiennent Baelor Cellaeron.

Debout, prenant appui d’une main sur la table où avait été déposés de nombreux parchemins de comptes, Elaena se contenta de soupirer à la vue de la réaction de son conseiller. Si leurs estimations étaient juste, la faction mercantiliste était à présent divisée en trois parties égales que se disputaient deux membres historiques, Baelor Cellaeron et Echya Odenys, et un troisième membre, bien plus jeune… Elaena elle-même. Le discours qu’elle avait prononcé contre l’avis de ses conseillers n’avait pas convaincu les plus sceptiques, mais certains qui doutaient encore avaient décidé de faire confiance à la fille de Vaegon et ce que le patriarche avait en tête pour la faction. Il n’était jamais bon de voir une faction ainsi divisée, et très vite chacun devrait faire ses jeux pour s’assurer que leur influence ne puisse en pâtir. Elaena n’avait jamais imaginé être ainsi propulsée à une place que beaucoup ne considéraient pas comme la sienne. Elle devait avoir des années d’apprentissage aux côtés de son père, des années d’expérimentation et elle aurait ainsi gagné aux yeux de ses pairs la légitimité dont elle avait besoin pour être une véritable meneuse. Cela elle ne l’était pas. Il lui arrivait d’ailleurs de même remettre en question sa capacité à l’être un jour.

« Ton père m’avait prévenu… Mais la nouvelle ne l'a pas ravi... »
« Tu l’as vu ? »

L’air embarrassé de Maelion ne laissait aucun doute sur la réponse du conseiller. En vérité, Maelion Velnarys se rendait à Oros toutes les semaines afin de s’entretenir avec Vaegon Tergaryon. Ce n’était pas chose difficile, à dos de dragon le voyage n’était guère long, et cela lui permettait d’obtenir les instructions et décisions nécessaires pour continuer. Seulement voilà, Elaena, elle, n’avait pas eu de nouvelles de son père depuis son départ, et apprendre qu’il s’entretenait ainsi avec leur conseiller mutuel la blessa. Elle n’en dit rien, se contentant de froncer les sourcils avant de se détourner pour prendre une longue inspiration.

« Vaegon veut seulement te protéger… Et je… »
« … Me protéger ? En me laissant sauter dans l’arène sans protections ? En te donnant les instructions qu’il me refuse ? Je n’ai jamais douté n’être qu’un pantin, mais les fils sont trop gros Maelion. Qu’importe. Qu’a-t-il dit d’autre ? »
« Ta mère devait s’entretenir avec Rhaenys Haeron, ce jour même, mais dans la précipitation du départ elle ne l’a guère avertie qu’elle ne serait pas à Valyria. Ton père et moi avons pensé qu’il serait utile que nous puissions nous entretenir avec elle. »

Agacée et surtout fatiguée, Elaena laissa échapper un rictus ironique avant de se détourner pour quitter la pièce.

« N’hésitez pas à vous concerter pour m’indiquer avec qui honorer les Dieux ce soir, il semblerait que je n’ai plus de volonté propre. J’irai seule, et si tu insistes pour m’accompagner alors tu pourras indiquer toi-même à dame Haeron que c’est à toi qu’elle devra parler. »

Elle était difficile à conseiller, difficile à contenir, c’était un fait indéniable. Pour Maelion, l’exercice était périlleux, conseiller la fille tout en s’assurant que les vœux du père soient respectés, il fallait aider Elaena à gagner en autonomie tout en la maintenant sous la coupe des ordres paternels. Cependant, Elaena était encore jeune, elle avait besoin d’être guidée, mais elle n’était pas d’un caractère à accepter des instructions trop forcées. Il faudrait au sénateur être plus discret, plus patient, et faire en sorte que la jeune femme ait l’idée que son père avait foi en elle. Sans doute était-ce la seule manière d’apaiser son esprit fatigué et de l’amener à apprendre toujours plus. Alors qu’elle sortait dans le couloir, immédiatement suivie par trois gardes, Elaena constata avec plaisir que son conseiller avait décidé de ne pas s’imposer davantage. Elle n’était pas en colère, simplement à bout. Etait-elle de mauvaise foi à ainsi blâmer son père et Maelion de vouloir la cadrer ? Probablement. Seulement elle ne dormait plus. Elle n’avait plus un moment de calme. Et son frère était plus absent que jamais. Son esprit étant sans cesse en ébullition, elle en venait à perdre la maîtrise lorsqu’elle se sentait remise en question.

« Elaena ? Quel plaisir de rencontrer, tu ressembles beaucoup à ta mère. A ce propos, où est Saera ? Elle devait me recevoir. »

Les jardins où Elaena rencontrait Rhaenys était en fleur, autour d’elles les fragrances florales et fruitières étaient enchanteresses, elles suffisaient à apaiser l’esprit épuisé de la jeune sénatrice. Elaena n’avait jamais vraiment été consciente de la ressemblance avec sa mère, et pourtant celle-ci dépassait de loin le simple critère physique. Elaena Tergaryon était la fille de Saera, en bien des points une Vaelarys, famille connue pour l’indépendance d’esprit et le caractère affirmé de ses femmes.

« Rhaenys, c’est un plaisir partagé, je n’ai fait que t’apercevoir lors de la séance à Drivo, je suis navrée de ne pas être venue te saluer… Tu n’ignores sans doute pas le malaise ayant frappé mon père, il reprend des forces mais ils sont repartis à Oros, tous les deux. Elle s’excuse de ne pas t’avoir prévenue à l’avance, mais vois-tu je profites de cette occasion pour te proposer ma compagnie en lieu et place de la sienne. »

D’un geste gracieux, Elaena invita son homologue à prendre place sur l’un des fauteuils qui avaient été disposés à leur intention. Sur la table autour de laquelle ils se trouvaient, avaient été déposés deux coupes, des fruits, des pâtisseries mais également de nombreuses carafes remplies de vin aromatisés, de divers alcools mais également d’eau agrémentée de citron, de fleur d’oranger ou encore de lavande.

« Je peux te proposer ces délices, mais je ne peux que te conseiller de goûter à cet alcool, certes fort mais aux arômes impressionnants… Et un peu d’alcool ne sera sans doute pas en trop pour nous remettre de cette séance sénatoriale, n’est-ce pas ? »

Elaena se mit à rire sincèrement, tendant sa coupe à l’esclave qui se chargea de la remplir du fameux alcool conseillé à Rhaenys, avant de la lever en direction de Rhaenys qui finissait d’être servie.

« A ce bel après-midi qui me permet de rencontrer la chère amie dont m’a tant parlé ma mère ! »  


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Femmes de pouvoirRhaenys Haeron et Elanea Tergaryon

Palais Hoskagon, mois 4, an 1066  
Il était indéniable que le palais Hoskagon représentait un véritable joyau dont il fallait prendre grand soin, nul doute que chaque artisan ayant travaillé à sa construction et à ce tel embellissement avait été récompensé à la hauteur du travail accompli. C’était définitivement un véritable plaisir de pouvoir fouler ce sol et de ravir ses yeux, les jardins ne dérogeaient pas à cette passion artistique et créaient une ambiance des plus apaisantes, tout à fait bienvenue après le tumulte du Sénat et des rues de la ville.

Les informations à Valyria circulaient de la plus efficace des manières, ainsi lorsque la rumeur du malaise ayant touché Vaegon Tergaryon était parvenu aux oreilles de bon nombre de sénateur les murmures s'étaient élevé sur la question de la gestion de la faction mercantiliste. Qui les dirigerait ? La question avait rapidement obtenu une réponse lorsque ce fut Elaena qui se présenta au Sénat. Une présence qui n’avait pas fait taire les murmures mais la séance de débat menant au vote sur l’Edit de Consolation avait eu tôt fait de changer la donne. La bataille de parole avait été rude mais le regard de Rhaenys s’était porté sur la jeune femme qui aurait pu se laisser ronger par l’appréhension des lieux et qui portant n’avait pas hésité à se lever pour s’adresser aux sénateurs. Une intervention tout à fait passionnée et prometteuse au contraire du discours bien trop exalté d’Odenys qui avait su autant lui faire éprouver une once d’approbation que de lui faire grincer les dents.

Elaena ressemblait sans le moindre doute à Saera et sa présence au Sénat avait été des plus rafraîchissantes, la Haeron espérait que d’avoir été ainsi plongée dans cette mer capricieuse que représentait Drivo saurait l’inspirer sur le long terme. Ou du moins le temps que Vaegon revienne à la capitale. Mais il y avait un point sur lequel l’esprit de la tolosienne se focalisait : Saera. Où était-elle ? La réponse que la jeune femme lui apporta lui paru après coup parfaitement logique et Rhaenys hocha solennellement la tête.

- Je souhaite que ton père connaisse un prompt rétablissement et je ne manquerai pas de faire parvenir une missive à ta mère afin de prendre de leur nouvelle. Et bien sûr j’accepte ta compagnie !

Répondit-elle avant de prendre place sur l’un des fauteuils que la Tergaryon lui indiquait d’un mouvement accort. Non loin d’elles se trouvait une table sur laquelle avaient été disposées plusieurs pâtisseries qui attiraient sur elles un regard des plus gourmands tandis que de nombreux fruits promettaient une note de fraîcheur, le tout était accompagné de carafes dont le contenu ne demandait qu’à être goûté. Lorsqu’Elaena reprit la parole, Rhaenys releva les yeux vers elle et hocha de nouveau la tête, acceptant la proposition. La Tergaryon se laissa aller à un rire sincère dont l’harmonie parfaite du timbre sonnait comme une douce musique aux oreilles de la tolosienne, qui confirmait ainsi cette apparente fraîcheur dont semblait être modelée la jeune Tergaryon.

- Tu as bien raison.

Rhaenys se laissa ainsi observer quelques instants la jeune femme se faire servir par l’esclave avant de s’emparer d’une coupe et de se faire servir à son tour. Elaena leva ensuite sa coupe en direction de la Haeron qui fit de même, un sourire aux lèvres. A cet après-midi qui m’honore de ta présence ! répondit-elle avant de porter son contenant à sa bouche de boire une gorgée de cet alcool que son hôtesse venait de vivement lui conseiller. Les yeux de la brune s’agrandirent légèrement face à cette découverte gustative des plus surprenantes et plaisantes tant par sa force et ses arômes précédemment vantés. Effectivement, c’est tout à fait délicieux. Avec qui dois-je m’entretenir pour m’en obtenir ? demanda-t-elle avant de tendre le bras pour prendre une de ces pâtisseries qui avaient attiré son regard.





Elaena Tergaryon
Elaena Tergaryon
Sénatrice

Femmes de pouvoirRhaenys Haeron et Elanea Tergaryon

Palais Hoskagon, mois 4, an 1066  

« Je souhaite que ton père connaisse un prompt rétablissement et je ne manquerai pas de faire parvenir une missive à ta mère afin de prendre de leur nouvelle. Et bien sûr j’accepte ta compagnie ! »

Elaena adressa un sourire tendre à la femme qui lui faisait face. Ils étaient bien nombreux à souhaiter bon rétablissement au patriarche de la branche cadette de la famille, bien moins nombreux à le penser. L’absence de Vaegon Tergaryon au Sénat était une catastrophe pour certains, mais une aubaine pour de nombreux autres. Son retrait du Sénat permettrait de rebattre les cartes, et bien rares étaient ceux qui envisageaient Elaena comme une successeur crédible. Elaena elle-même n’avait pas la naïveté, ou la prétention, de s’imaginer à la hauteur de l’œuvre de son père.

Il était coutume de dire qu’il n’y a pas de relation plus forte que celle d’un père et de sa fille, ni d’admiration plus complète que celle d’une fille envers son père. C’était un fait, Elaena Tergaryon avait grandi dans l’ombre d’hommes hors du commun, que la nation valyrienne elle-même élevait au Panthéon des grands hommes. Mais Vaegon était son modèle, il avait été son premier amour comme il est coutume de le dire. Elle avait regardé, toute sa vie, cet homme solide, puissant, imperturbable, gravir les échelons d’une vie politique dans laquelle il n’aurait du avoir qu’une place minime. Petite fille, elle se cachait non loin de salle du conseil de l’archonte, où se père avait commencé sa carrière, auprès de son grand-père. Elle l’écoutait, le regardait, et se forgea avec l’idée qu’il ne pouvait y avoir d’homme plus brillant que ce père qui représentait tout un monde.

Mais le colosse était tombé. Elaena ne prit pas la mesure du choc que la vision de son père, étendu au sol, à l’article de la mort, avait eu sur elle. Elle n’avait fait qu’avancer, accepter son sort et tenté de survivre jetée dans les eaux troubles d’un océan sans jamais avoir appris à nager. Pourtant, rares étaient les nuits où la figure de son père ainsi effondré ne venait pas la hanter. Cette chute n’avait pas seulement été la matérialisation de la mortalité de son père, qu’elle avait toujours imaginé protégé des lois de Balerion, c’était le basculement de son monde tout entier. A présent, Elaena devait avancer en pleine obscurité, sans autre repères que son propre instinct, qu’elle avait appris à entendre mais dont elle doutait toujours plus à mesure que se complexifiait sa situation.

« Je te remercie, et je suis sûre de Mère sera ravie de recevoir de tes nouvelles. Je prévois de me rendre à Oros sous peu, je suis certaine qu’elle serait ravie que tu m’y accompagnes. Une pause loin du tumulte de la capitale est toujours bienvenue. »

Rhaenys était l’une des rares personnes en qui Saera Tergaryon, née Vaelarys, avait confiance. Saera avait toujours été une femme puissante, non seulement par le prestige de son nom en la cité d’Oros, non seulement de par son mariage avec un enfant d’une des plus grandes et riches familles de Valyria, mais parce qu’elle était de ces êtres que rien ne peut abattre. Elle n’était pas de ceux qui crient au monde leur force ou encore de ceux qui tiraient fierté d’afficher leur insubmersibilité, non, Saera Tergaryon était en apparence une parfaite épouse modeste et soumise à la volonté de son seigneur d’époux. Cela n’aurait guère pu être plus inexact. C’était Saera qui avait fait de Vaegon l’homme qu’il était. C’était Saera qui avait fait de ses filles des personnalités fortes. C’était Saera, encore, qui avait entretenu les liens politiques de son mari au sein de la faction mercantiliste. Et le couple formé avec Vaegon était d’autant plus fort qu’il n’ignorait rien de ce qu’il devait à son épouse. La dame-dragon avait appris très tôt à distinguer le vrai du faux, les êtres de confiance et ceux qui ne cherchaient qu’à tirer profit de sa situation, un talent que sa fille Daenyra avait élevé au rang de don. Présentées dès l’enfance, Rhaenys et Saera ne purent que se plaire tant leurs caractères étaient aussi semblables sur certains aspects que complémentaires sur d’autres. Ainsi, bien que la vie les aient éloignées, Saera Tergaryon avait immédiatement pensé à Rhaenys lorsqu’il lui avait fallu quitter Valyria et laisser l’ainée de ses filles seule face à la tâche terrible qui lui incombait à présent.

« A cet après-midi qui m’honore de ta présence ! Effectivement, c’est tout à fait délicieux. Avec qui dois-je m’entretenir pour m’en obtenir ? »
« Oh je t’en prie, je t’en ferai parvenir avec plaisir. C’est l’un des favoris de Mère, il me semble que tu connais l’exigence de son palais, nous en avons donc de larges caisses. »

Parler de sa mère plongeait souvent Elaena dans une mélancolie certaine. Ses parents étaient partis si vite, et ils lui semblaient être plus loin que jamais à présent tant elle se sentait abandonnée. Elle aurait tant voulu bénéficier des conseils de sa mère, de son soutien, bien qu’elle soit bien entourée et conseillée, rien ne pouvait égaler l’amour d’une mère.

« Je me dois de te dire qu’il est très réconfortant pour moi de pouvoir échanger avec une des rares femmes sénatrices de notre faction… J’ai l’impression que notre sexe est une raison supplémentaire, pour ces messieurs, de nous pousser du revers de la main vers les bancs les plus éloignés. Toi qui vis cela depuis plus longtemps que moi et dont l’influence n’est plus à prouver, comment es-tu parvenue à t’imposer auprès de ces hommes certains de leur supériorité ? »

Elaena était jeune mais pas idiote, elle savait bien que son sexe n'était pas la seule raison du rejet de certains au sein de la faction. A leurs yeux elle était une parvenue, une parachutée qui menaçait leur opportunité de prendre enfin le pouvoir. Elle se demanda un instant si Rhaenys faisait partie de ceux-là. Après tout, la sénatrice avait l'expérience et s'était taillée une place de choix au sein de la faction, comment voyait-elle l'arrivée d'une jeune femme à la tête de cette faction qu'elle connaissait bien mieux ? Il y avait une chose, cependant, qui rassemblait les deux femmes et c'était bien leur sexe. Le pouvoir des femmes n'était pas chose rare au nord de la République, mais elle était un non-sens dangereux pour les hommes du Sud qui considéraient que la place du beau sexe se trouvait au foyer. Elaena voyait les regards, entendaient les murmures qui clamaient que ces sénatrices étaient une insulte à leur propre pouvoir. Elle les voyaient s'empourprer quand l'une d'elles osait les contredire et affirmer leur parole qu'ils estimaient non légitime. Elaena manquait peut-être de légitimité de par son expérience et son âge, mais elle avait une force : elle représentait ceux que la vieille garde voulait faire taire, les jeunes que l'on écoutait pas, les plus modestes que l'on regardait de haut, et les femmes qu'on tentait d'enfermer loin de la vie publique. Elle était de ceux-là, et elle comptait bien renverser la tendance qui voulait que cette minorité repoussée soit aisément ignorée. Le temps viendrait où les vieux sénateurs, les politiciens de naissance, les hommes de ce Sud conservateur, ne pourraient plus les ignorer, ne pourraient plus les faire taire. Viendrait un temps où le pouvoir serait à eux. Viendrait un temps, où il pourraient remodeler Valyria à leur image.


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Femmes de pouvoirRhaenys Haeron et Elanea Tergaryon

Palais Hoskagon, mois 4, an 1066  
Cela faisait des années que Rhaenys connaissait Saera, bien avant qu’elle ne devienne une Tergaryon, et cette dernière faisait partie de ce cercle restreint de personnalité pour qui la Haeron éprouvait de la confiance, pour qui la déloyauté n’était ni de mise ni ne serait-ce que pensée. Les deux femmes du nord se ressemblaient autant qu’elles pouvaient se compléter, leur chemin s’étaient séparés mais in fine toutes deux restaient des femmes de poigne à la tête d’une riche famille. Ainsi lorsque la native de Tolos exprimait son souhait de voir Vaegon connaître à prompt rétablissement, elle le pensait et ne faisait partie de ceux le souhaitant être emporté par Balérion.

Aux mots d’Elaena, elle hocha tout d’abord la tête avant qu’elle ne hausse un sourcil, quelque peu surprise par la proposition qui lui était faite par la jeune femme. Oros et ses tours de granit rose. Ses vastes marchés et à l’achalandage si diversifié. Cela faisait longtemps qu’elle ne s’était pas rendue dans cette majestueuse ville du centre de la péninsule parsemée de palais à l’architecture splendide, visitant ces jardins exotiques d’une grande qualité tant visuelle qu’olfactive. Un léger sourire étira les lèvres de la sénatrice face à ces souvenirs. L’idée d’y accompagner Elaena, s’éloigner de Valyria, lui paraissait attrayante et revoir Saera serait un réel plaisir.

- Et bien dans ce cas je serais ravie de t’y accompagner, cela fait bien longtemps que je n’ai pas eu le plaisir de déambuler parmi les étalages des marchés et d’apprécier la vue des tours de granit rose !

Répondit-elle avant de goûter ce breuvage que son hôtesse venait de vivement lui conseiller. Le goût en bouche était des plus surprenants mais il était d’une qualité d’arômes particulièrement plaisante tant et si bien qu’en faire l’acquisition devenait une évidence. Alors que s’apprêtait à goûter une de ces délicieuses pâtisseries exposées devant elles, la réaction de la Tergaryon lui fit se pincer les lèvres. C’était tout à fait louable et cela confirmait les pensées de Rhaenys : elle ressemblait tant à Saera. Cela n'était guère une pensée désobligeante mais bien un compliment sincère, tant la Haeron appréciait celle qui était née Vaelarys.

- Cela ne me surprend guère en effet et je te remercie, c’est tout à fait le cépage qui séduirait les miens, dit-elle avant que leur conversation ne dérive loin des souvenirs amicaux et des critiques des saveurs liquoreuses.

La réflexion d’Elaena se révélait être des plus intéressantes et elle ne doutait pas de la sincérité dont elle faisait preuve en avouant à quel point cela pouvait la toucher de converser avec une autre sénatrice. Les femmes étaient bien trop rares au Sénat alors chacune de celles qui y étaient présentes se révélaient toutes plus redoutables les unes que les autres mais pour autant les relations qui pouvaient les unir ne restaient généralement que des alliances aussi friables que celles nouées avec les hommes. Et lorsqu’elles n’étaient plus en scène les murmures continuaient encore et toujours à s’élever sur leur passage. Rhaenys ne doutait pas qu’elle pouvait être le sujet de rumeurs comme l’étaient Echya Odenys et Elaena, tous les sénateurs en étaient les cibles, seulement les sénatrices devaient redoubler d’esprit et force afin de surpasser ceux qui se complaisaient dans le confort de leur siège sénatorial et qui se laissaient grandement aveuglés par leurs coutumes de secoués du Sud.

- Je ne leur ai pas laissé le choix. Je suis une femme de Tolos, le commerce est ce qui m’a forgée et ce qui a fait aussi bien ma propre richesse que celle des miens. Ils savent qu’il suffit de quelques mots pour que les matières premières, dont ils ont besoin pour que leurs artisans puissent pour créer pour eux, que leurs serviteurs puissent leurs servir des mets de qualité, leur coûte bien plus qu’à l’accoutumée ou que leur qualité se retrouve amoindrie. Rhaenys prit une légère inspiration puis elle bu une nouvelle gorgée de vin. Ecoute, toi comme moi héritons notre siège de notre parent c’est indéniable et n’importe qui souhaitant nous nuire pourra s’en servir à notre encontre. Pour cela nous devons sans cesse nous montrer habiles, puiser dans nos ressources pour trouver la force de leur montrer qu’il ne s’agit pas d’une erreur des dieux mais bien leur volonté divine et notre intelligence.

Si Rhaenys ne s’intéressait guère à ce jeu de pouvoir purement politique consistant à tant de mondanités permettant de s’attirer les meilleures faveurs pour atteindre les plus hauts sommets, préférant les enjeux commerciaux, elle était bien consciente qu’elle faisait partie de cet échiquier lors que sa mère l’avait amenée à la Capitale afin de parfaire son éducation. Elle ne trouvait pas son intérêt à diriger la faction mercantiliste car si elle pouvait y gagner bon nombre de soutiens et elle gagnerait tout autant de détracteurs. Ce qu’elle recherchait était de continuer à forger l’histoire des Haeron, continuer à rendre son réseau commercial toujours plus performant et vaste. Agir. Ne pas rythmer ses journées dans la luxure. Récupérer l’Île aux Cèdres pour que sa famille ait la possibilité d’y établir une longue dynastie. Pour cela elle devrait trouver les oreilles les plus attentives et les soutiens les plus déterminés.

- Cette dernière séance au Sénat était une mauvaise représentation théâtrale et tu as admirablement montré qu’aucune erreur n’avait été faite en te laissant à la tête des mercantilistes. Si chacun avait ses raisons ou pouvait y voir l’occasion de protéger ses intérêts en prenant la parole, tu as fait preuve d’une humanité sincère... Je peux te dire que tu as marqué des esprits Elaena, dont le mien, et de ceux-là tu bénéficieras de leur attention, cela te sera important.



Elaena Tergaryon
Elaena Tergaryon
Sénatrice

Femmes de pouvoirRhaenys Haeron et Elanea Tergaryon

Palais Hoskagon, mois 4, an 1066  

- Et bien dans ce cas je serais ravie de t’y accompagner, cela fait bien longtemps que je n’ai pas eu le plaisir de déambuler parmi les étalages des marchés et d’apprécier la vue des tours de granit rose !

Cela ne faisait que quelques mois qu’Elaena avait quitté Oros, et pourtant il lui semblait ne pas avoir revu sa ville natale depuis des siècles. Il y avait quelque chose d’exaltant à vivre à Valyria, mais la capitale, aussi belle soit elle, ne parvenait guère à rivaliser avec la douceur de vivre d’Oros. Les fruits y avaient une saveur différente, l’air semblait plus pur, plus doux peut-être également. Les souvenirs d’enfance que la jeune femme conservait avaient une saveur particulière et chaque jour passé à Valyria l’épuisait davantage que le précédent. Elle n’avait pas osé se rendre à Oros, elle craignait de fatiguer son père ou de laisser entrevoir la faiblesse de son esprit. Pourtant, elle avait plus d’une fois commencé le trajet, poussant Meghar à toute allure pour retrouver rapidement les plaines de sa jeunesse. Elle avait pourtant toujours fait demi-tour. Au-delà de ses parents, elle regrettait ses cousins et cousines mais avant tout la sagesse de son grand-père qui avait été une figure décisive pour la jeune femme. Toutes ces personnes n’étaient pourtant guère loin, et le voyage jusqu’à Oros une simple formalité, mais il lui semblait que les barrières à franchir rendait cette ville aussi lointaine que Westeros.

« Cela ne fait guère longtemps pour moi, mais je regrette déjà la douceur de vivre si particulière à Oros. Je ne sais pas si tu as eu l’opportunité de revoir les jardins du palais, mère y a ajouté tant de merveilles, je suis certaine qu’elle serait ravie de t’y guider. »

Parler d’Oros était une chose, mais les jeunes femmes n’étaient pas simplement unies par l’amour de douces liqueurs et les plaisirs de la vie plus au nord de Valyria. Elles étaient femmes et sénatrices. Rhaenys avait bien plus d’expérience qu’Elaena en la matière et cette dernière ne comptait plus les louanges qu’avait fait sa mère au sujet de son amie d’enfance. Rhaenys était un des membres qui comptait le plus au sein de la faction mercantiliste, et bien qu’elle n’ait pas encore pris part aux luttes émergeantes, il lui faudrait se positionner.

« Je ne leur ai pas laissé le choix. Je suis une femme de Tolos, le commerce est ce qui m’a forgée et ce qui a fait aussi bien ma propre richesse que celle des miens. Ils savent qu’il suffit de quelques mots pour que les matières premières, dont ils ont besoin pour que leurs artisans puissent pour créer pour eux, que leurs serviteurs puissent leurs servir des mets de qualité, leur coûte bien plus qu’à l’accoutumée ou que leur qualité se retrouve amoindrie. »

Elaena sourit amusée par cette image d’une femme capable de réduire au silence une troupe d’hommes suffisants. Il y avait quelque chose de fascinant dans cette maîtrise qu’avaient ces femmes du Nord, capables de régner sur des empires marchands et de dicter leurs lois. Elles n’échappaient pas à la misogynie de leurs congénères mais elles en faisaient fi car le pouvoir était leur. Elaena réfléchit aux leviers dont elle disposait. Le port de Gelios en était un, des taxes y étaient collectées et une grande majorité des biens importés à Valyria y transitaient. Seulement le port était entre les mains des Tergaryon, plus précisément de Maegon à présent, et elle n’était guère certaine de parvenir à influer sur ses décisions. Il y avait évidemment Oros, la perle du Centre, ce nœud crucial du commerce Valyrien. Rhaenys dominait par les matières premières, sans lesquelles rien ne pouvait être créées, Elaena pouvait dominer par le marché, après tout à quoi servirait de produire si vendre devenait plus coûteux ou plus difficile ? De même, Oros se trouvant sur la route commerciale elle disposait de nombreux liens avec les marchands étrangers qui déversaient de nombreux biens et matières premières exotiques pour abreuver Valyria. La jeune femme avait besoin de creuser davantage, elle savait que la famille de son grand-père disposait également de nombreuses affaires à Volantis et Draconys. Cependant elle comprit qu’au-delà des alliances qu’elle parvenait à nouer, il lui faudrait se pencher sur son influence commerciale, sujet sur lequel elle n’avait reçu que trop peu d’instruction jusqu’à présent.

« Ecoute, toi comme moi héritons notre siège de notre parent c’est indéniable et n’importe qui souhaitant nous nuire pourra s’en servir à notre encontre. Pour cela nous devons sans cesse nous montrer habiles, puiser dans nos ressources pour trouver la force de leur montrer qu’il ne s’agit pas d’une erreur des dieux mais bien leur volonté divine et notre intelligence. »
« Tu dis vrai, il me semble parfois ne disposer que de si faibles ressources… Et pourtant à t’entendre parler je vois déjà ce qu’il me faut faire pour affirmer ma légitimité et les forcer à m’écouter. Que veux-tu, je suis en prise avec les conséquences d’avoir eu pour mère une femme du Nord et comme père un homme du Sud… Difficile synthèse. »

Elaena se mit à rire et souleva sa coupe, pourtant le sujet n’était une plaisanterie qu’en apparence car le combat était réel. La jeune femme était sans cesse tiraillée entre la perception que son père avait d’elle et celle de sa mère. Pour Saera, Elaena devait être une femme à la mesure de Rhaenys : forte, indépendante et combattive. Il ne pouvait y avoir d’invocation de la féminité comme une quelconque excuse pour baisser les bras. Saera Vaelarys était une femme forte et convaincue de la légitimité de ses filles dans le combat que leur famille menait. Vaegon Tergaryon avait, quant à lui, été éduqué dans une famille où les femmes n’étaient vouées qu’au foyer. S’il avait accepté que sa fille lui succède, laissant son épouse le guider sur un chemin qu’il ne connaissait pas, il n’en perdait pas les idées qu’avait ancré en lui son éducation. Il traitait ainsi sa fille comme une enfant et peut-être même avait-il, inconsciemment, omis de lui donner les clés de réussite. N’avait-il pas, après tout, omis de lui présenter les affaires de la famille de manière extensive ? N’avait-il pas placé Maegon comme tuteur pour palier à de potentielles faiblesses de sa fille ? N’avait-il pas, a présent, fait de Maelion Velnarys son interlocuteur dédié, reléguant sa fille au rang de simple exécutrice de sa volonté ?

« Cette dernière séance au Sénat était une mauvaise représentation théâtrale et tu as admirablement montré qu’aucune erreur n’avait été faite en te laissant à la tête des mercantilistes. Si chacun avait ses raisons ou pouvait y voir l’occasion de protéger ses intérêts en prenant la parole, tu as fait preuve d’une humanité sincère... Je peux te dire que tu as marqué des esprits Elaena, dont le mien, et de ceux-là tu bénéficieras de leur attention, cela te sera important. »

Le visage d’Elaena se para d’un sourire sincère et la jeune femme déposa sa main sur celle de Rhaenys. Elle avait eu à mener tant de combats dernièrement qu’il lui semblait presque étrange de recevoir quelques paroles encourageantes.

« Je ne peux te remercier suffisamment pour ces mots. Tu connais sûrement Maelion Velnarys ? Il m’avait conseillé de me taire, lui et d’autres fidèles conseillers de mon père. Ils estimaient que je n’étais pas prête. Mais lorsque j’ai vu Baelor se lever et prendre la parole, parler en notre nom à tous… Je n’ai guère pu faire autrement que faire valoir une autre voix. La voix d’une jeune femme, d’une sénatrice, d’une personne ayant longuement aidé les veuves de guerre d’Oros. Je doutais que Cellaeron dispose d’une telle expérience. »

Elaena prit une gorgée et rassembla son courage, elle craignait d’avancer trop vite ses pions. Rhaenys était évidemment une amie très chère de sa mère mais elle n’en restait pas moins une sénatrice, membre d’une faction sur laquelle Elaena tentait de maintenir le pouvoir des Tergaryon.

« Nous n’avons fait que montrer un front désuni, Baelor, Echya et moi. Il n’est plus secret pour personne que la faction mercantiliste est sur le point de se déchirer… Que penses-tu de tout cela ? »



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Femmes de pouvoirRhaenys Haeron et Elanea Tergaryon

Palais Hoskagon, mois 4, an 1066  
Parvenir à s’imposer était un chemin pavé d’embuches qui se révélaient bien plus importantes selon l’endroit où un noble naissait mais rester à ce sommet durement atteint était une épreuve de tous les instants et la vigilance ne pouvait être réduite au silence. La réflexion et la question de la jeune Tergaryon étaient des plus légitimes et si elles étaient évoquées dans l’intérêt de trouver des conseils, la native de Tolos y voyait un manque de confiance et des doutes qui ne risquaient que de s’accroître au fil du temps. Elle pouvait se montrer déloyale dans le but de mieux servir ses propres intérêts mais Elaena était l’extension de cercle proche qu’elle s’était constitué dans sa jeunesse ou par le biais même du cercle proche de sa défunte mère, il n’était donc pas question de la laisser seule alors qu’elle venait à peine d’entrer dans ce cercle politique qui la mettrait à rude épreuve. D’autres qu’elle, tireraient profit de cette situation et s’insinueraient dans ces failles, feignant la volonté de l’aider pour mieux la détruire.  Comment était-elle parvenue à s’imposer parmi ces hommes ? Elle ne leur avait effectivement pas laissé le moindre choix quant à sa présence dans leur cercle qu’ils semblaient tant enclins à garder le plus hermétique possible.

Tout d’abord il y avait sa naissance. Le Nord de la péninsule était exposé à une richesse directe provenant des cultures rhoynares et ghiscaries, les échanges étaient facilités, plus naturels et des principes venus des principautés de la Rhoyne influençaient les esprits. Lorsqu’elle en avait été en âge, elle s’était servie de son service militaire non seulement pour apprendre mais pour se constituer un réseau qui pourrait lui servir à l’avenir. Elle avait fait main basse sur l’industrie marine de Tolos, engageant les pêcheurs et elle avait surpassé son frère, leur mère la faisant ainsi son héritière. In fine elle avait démontré l’étendue de ses capacités pour que sa position lui revienne par son mérite et non pas par une naissance heureuse qui avait de Gaemor l’aîné de leur fratrie. Le sourire amusé d’Elaena face aux paroles qu’elle lui adressait, dérida quelque peu Rhaenys qui se laissa aller à lui adresser un sourire amusé. Il était vrai qu’il était que cette idée de mettre à mal les marchés de la péninsule par de simple mots si l’on se montrait trop borné ou gourmand à son encontre, ce n’était pas par pur caprice que les Haerons portaient le surnom de douaniers.

Humidifiant sa bouche en prenant une gorgée de vin, Rhaenys se pencha légèrement vers Elaena. Il était indéniable que leur place au Sénat leur revenait par la volonté, ou le décès, de leur parent et elles se devaient de conserver ce fait dans un coin de leur esprit même s’il était lié aux capacités dont elles faisaient preuve. Tous ceux qui souhaiteraient les exclure de cette incessante courses n’hésiteraient pas un seul instant à se servir de cette information, même s’ils se trouvaient dans le même cas de figure. La réponse la Tergaryon lui confirma cette sensation de doute qu’elle avait perçu mais rapidement sourire satisfait étira ses lèvres alors que la jeune femme lui avouait qu’elle voyait d’ores et déjà ce qu’il lui fallait accomplir pour affirmer sa légitimité, que dire pour les forcer à l’écouter.

- Des conséquences ? Allons donc, ne me dis pas que tu vois cela comme un désavantage ? Elle leva les yeux au ciel. Il n’y a vraiment que dans le Sud où ce sang est d’une sacralité compulsive… Ce que je vois là, c’est l’association de deux modes de pensées qui te donnent le droit non seulement de t’affirmer mais aussi de t’insinuer parmi les cercles les plus fermés pour mieux utiliser leurs coutumes à ton avantage.

Rhaenys bu une nouvelle gorgée de vin avant de prendre un fruit qu’elle dégusta alors qu’elle laissait ses yeux observer la beauté des jardins du Palais Hoskagon. Après quelques instants, elle reprit la parole pour aborder la séance au Sénat qui avait tant agité les sénateurs et vu être voté l’Edit de Consolation. Le théâtre valyrien était réputé mais ce qui s’était joué durant la séance avait été des plus effarant et si le discours passionné du sénateur Bellarys avait attiré l’attention de la native de Tolos, les discours prononcés par l’hydre mercantiliste avait été plus bruyante. Elaena Tergaryon s’en était sortie à merveille et si elle avait prouvé autre chose que le fait que sa place soit légitime à Drivo, elle avait aussi démontré que le nom Tergaryon devait encore rester à la tête de la faction. La main de la jeune femme sur la sienne surpris quelque peu Rhaenys qui braqua sur elle un regard étonné, en notant ce sourire qu’Elaena arborait il semblait que ses mots lui faisaient plaisir. La Haeron haussa un sourcil alors qu’elle écoutait attentivement les paroles de son hôtesse.

- Je le connais et je fais confiance à son jugement plus qu’à celui des autres conseillers de ton père, s’il ne te jugeait pas encore prête à prendre la parole c’était qu’il voyait la difficulté d’intervenir sur un tel sujet pour ta première séance à Drivo. Mais, tu as écouté ton cœur et si cela aurait pu t’être fatal, cela t’a été une réussite. Pour ce qui est de Baelor, il a sa propre expérience concernant cette guerre mais effectivement, il n’a pas été confronté aux affres de la guerre comme l'ont été nos soldats, toi ou moi. Elle marqua une pause, reprenant une courte gorgée de vin puis elle reprit la parole. J’en pense qu’il y a trop monde pour un seul objectif et que s’il faut choisir qui doit nous diriger, cela doit être un regard neuf et intelligent avec un nom synonyme de puissance et de stabilité, finit-elle par répondre en braquant son regard sur la jeune femme.



Elaena Tergaryon
Elaena Tergaryon
Sénatrice

Femmes de pouvoirRhaenys Haeron et Elanea Tergaryon

Palais Hoskagon, mois 4, an 1066  

« Des conséquences ? Allons donc, ne me dis pas que tu vois cela comme un désavantage ?  Il n’y a vraiment que dans le Sud où ce sang est d’une sacralité compulsive… Ce que je vois là, c’est l’association de deux modes de pensées qui te donnent le droit non seulement de t’affirmer mais aussi de t’insinuer parmi les cercles les plus fermés pour mieux utiliser leurs coutumes à ton avantage. »

Elaena sourit alors que les dernières paroles de Rhaenys lui évoquaient sa mère. Saera avait, sa vie durant, tenu ce discours sans vaciller. C’était elle qui avait insisté pour que Vaegon mette de côtés ses idées fixes sudistes et accepte de donner sa confiance à sa fille ainée. Qu’aurait-il pu faire d’autre après tout ? Aenar était parti. Maekar ne voulait pas de cet héritage, souhaitant diriger sa vie dans une direction dont lui seul serait maître, quant à Maerion il n’était pas destiné au Sénat et à la politique, il ne l’avait jamais été. Ainsi, l’entêtement de Vaegon à refuser d’officialiser la positon d’Elaena comme héritière avait été insupportable aux yeux de Saera qui voyait son héritage être menacé par des considérations qu’elle exécrait. Née Vaelarys, fille d’une famille puissante du Nord, Saera avait, à l’instar de Rhaenys, été élevée dans l’idée qu’une femme n’était en aucun cas moins compétente qu’un homme. Le Nord de Valyria habitait des idées bien différentes de celles du Sud, et nombreux furent les étonnés lors du mariage de Saera et Vaegon. Les Tergaryon étaient le fleuron de cette aristocratie du Sud, conservatrice et rétrograde – du moins aux yeux de Saera – et Vaegon en était certes un cadet mais pas moins un fils élevé dans cette idée. Les premiers temps du mariage ne furent pas de tout repos, car il avait fallu à Vaegon beaucoup de temps pour comprendre que les choses ne pourraient plus se passer comme il l’avait pensé dans son enfance. Il apprit très vite à connaître son épouse et cette dernière gagna son respect et son estime. Ce fut Saera, la première, qui apprit à Vaegon la valeur d’une femme, lui qui avait été élevé dans l’idée que celle-ci se limitait au foyer. Ce fut Elaena qui, par la suite, parvint à le convaincre définitivement. Il fallait beaucoup de courage pour mettre de côté son éducation tout entière et prendre une place qui ne lui avait jamais été promise, ce avec l’idée d’une réticence paternelle. Pourtant, la jeune femme avait accepté le lourd poids des responsabilités et avait accepté d’avoir tout à prouver.

Rhaenys avait raison et l’expérience transparaissait de ses paroles. Elaena pouvait être caméléon. Elle était, aux yeux des sudistes, une bizarerie des héritages mais elle n’en restait pas moins une Tergaryon, avec tout ce que cela impliquait. Aux yeux des nordistes, au contraire, elle était une Vaelarys, fille d’une famille tentaculaire devenue maîtresse d’une des cités les plus riches et prospères du centre de Valyria. Elaena avait sans doute davantage le caractère de sa mère, affirmé et indépendant, décidée à ne pas faire fi de sa condition de femme mais plutôt d’en faire un atout et de faire progresser avec elle la condition de ses congénères féminines. Pourtant, elle maîtrisait les codes de la société sudiste et pouvait tout à fait, si cela devenait nécessaire, se glisser dans le rôle que son père aurait aimé le voir endosser toute sa vie.

Elle était aidée en cela par Maelion, un homme qui avait promis de ne pas l’abandonner et qui s’était révélé un véritable soutien. Avec lui, il n’était pas utile de faire semblant, et issu d’une famille du Nord de Valyria celui-ci n’avait jamais remis en question les capacités d’Elaena à être meneuse de jeu. Elle avait compris, de par leurs échanges, que Maelion et Rhaenys se connaissaient, probablement du fait de leurs origines.

« Je le connais et je fais confiance à son jugement plus qu’à celui des autres conseillers de ton père, s’il ne te jugeait pas encore prête à prendre la parole c’était qu’il voyait la difficulté d’intervenir sur un tel sujet pour ta première séance à Drivo. Mais, tu as écouté ton cœur et si cela aurait pu t’être fatal, cela t’a été une réussite. Pour ce qui est de Baelor, il a sa propre expérience concernant cette guerre mais effectivement, il n’a pas été confronté aux affres de la guerre comme l'ont été nos soldats, toi ou moi. J’en pense qu’il y a trop monde pour un seul objectif et que s’il faut choisir qui doit nous diriger, cela doit être un regard neuf et intelligent avec un nom synonyme de puissance et de stabilité. »

Elaena offrit un sourire humble mais reconnaissant à Rhaenys, elle comprenait que Rhaenys lui affirmait son soutien, ce qui ne manqua pas de réchauffer le cœur de la demoiselle qui n’oubliait pas l’expérience difficile de la séance au Sénat et les nombreuses négociations qui avaient eu lieu par la suite.

« Nous parviendrons à stabiliser notre faction, je suis certaine que des compromis pourront être trouvés pour le bien de notre prospérité et de celle de Valyria. »

« Sénatrice Haeron. »

Elaena n’avait pas entendu les pas qui avaient menés Maelion Velnarys jusqu’à elles. Le regard de Maelion était doux, empreint d’une véritable affection pour celle qu’il dévisageait avec un sourire chaleureux. Il n’était pas commun de voir Maelion sourire, il était un homme grave, n’offrant que de rares sourires en dehors de l’espace privé des échanges qu’il avait avec Elaena. Cette dernière s’était même longuement questionnée sur les raisons de cette différence de traitement entre elle et ceux qui l’entouraient, mais elle en avait conclu qu’il avait adoucit son comportement parce qu’elle était une jeune femme. Se retournant pour le regard, elle lui adressa un sourire et l’homme reporta son attention sur la demoiselle.

« Elaena, le sénateur Gaeryos t’attend pour votre entrevue. »

Il tendit la main un instant pour inviter la demoiselle à se lever sans attendre, main qu’elle prit sans se faire prier.

« Rhaenys, merci pour cet échange, je suis navrée de devoir l’écourter ainsi… Je te propose de diner ensemble sous peu, nous pourrons ainsi prendre le temps de parler davantage de ce qui nous anime. »

Elaena salua avec respect et chaleur la sénatrice Haeron avant de se diriger vers l’intérieur du palais, laissant derrière elle une femme qu’elle considérait à présent comme une alliée. Maelion resta quelques instants en arrière.

« Il nous faudra diner également, Rhaenys, cela fait bien trop longtemps que les responsabilités me privent de ta compagnie. »





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