L’esprit jeune à tendance à se voir au centre du monde et de l’attention ; rien ne semble pouvoir l’arrêter, car il est encore frais et immaculé d’échec. En effet, la jeune personne demeure encore pleine d’ambition et de fougue car elle n’est pas jamais encore violemment tombée : sans la chute, pas de peur. Energique et vaillante par naïveté, la jouvencelle pense pouvoir croquer le monde et que celui-ci se pliera à sa volonté. A vrai dire, elle ne possède encore aucune connaissance sur son amertume et sa complexité. Manichéenne jeunesse qui nous fait pousser des ailes, pourquoi ne nous offres-tu pas la voix de la prudence de façon innée, afin que nous n’ayons jamais à nous brûler les ailes ou à souffrir de ne plus savoir se relever ?
Jaenera Valineon n’avait que quinze ans. Adolescente orgueilleuse, elle avait si bien excellé durant ses années de formation au Collège, qu’elle pensait réussir de la même façon dans le monde. Forte d’avoir franchi le Troisième Cercle à un âge surprenant, la demoiselle faisait déjà son baluchon sans écouter aucune recommandation avisée d’un professeur. Certains ont cru que son empressement était dû au fait qu’elle n’embrasserait pas la carrière de mage et qu’elle devait rentrer promptement à Mhysa Faer pour accomplir un tout autre destin ; une vie plus domestique. Cependant, déjà aux portes du Collège, l’enfant à la féminité perçante connaissait sa direction, et ce n’était pas celle du foyer. Le doute et la réflexion ne polluaient pas son esprit encore neuf et novice. Elle annonça au cocher de la charrette sa destination avec une locution vaillante, empourprée de vanité. « Tour Vaekar. »
Valineon, un nom qui sonnait sombre aux oreilles de la noblesse valyrienne. Obscure comme les fonds marins, les origines de cette famille désargentée demeuraient un véritable mystère. On attribuait à cette tare leur caractère explorateur et errant. Cependant, voulant répondre par la négative à cette affiliation peu patricienne, Jaenera mettait un point d’honneur à se montrer décidée. L’excès n’était que l’effet d’une blessure déjà commise dans le cœur de sa candide présomption. Jaenera voulait que son nom soit aussi respecté que ceux qu’elle s’apprêtait à visiter. Les maîtres de la science et de l’heuristique allaient être détrônés par sa grandeur. En cela, la jeune Jaenera était persuadée… Ainsi, elle n’espérait non pas moins que le financement et l’appui de la grande dynastie Vaekaron pour sa réussite magique. Les gardiens de la bibliothèque et de la connaissance ne pouvaient que lui ouvrir des portes sur son passage : comme cela, interprétait-elle les compliments enhardis de ses professeurs au Collège.
Vêtue d’un pagne de laine, comme beaucoup d’apprenti mage, elle ne prit pas la peine de répondre au code vestimentaire de son rang et de son sang pour cette première entrevue dans la Tour des Vaekaron. Elle se présentait comme future mage prometteuse, et non comme descendante de possibles bâtards de l’Est et d’au-delà de l’Empire Ghiscari. Ses cheveux étaient relevés en deux tresses plaqués sur sa tête. Le teint pâle et valyrien de la presque-enfant trahissait le brin d’innocence qui la poussait à croire en ses convictions. Elle serrait ses rouleaux de papyrus contre elle, scellé entre sa poitrine naissante. Alors que l’attente se faisait interminable pour obtenir l’audience, ses lèvres remuaient nerveusement des mots qu’elle s’apprêtait à prononcer devant le chef de la famille Vaekaron.
Un homme sortit de la salle de l’audience, titubant presque d’impressions. Il vit le regard azur de la Valineon le fixer, inquiet.
« Ils sont au complet. Toute la famille. »
Jaenera déglutit, désormais anxieuse. Elle ne pourrait tromper les plus anciens des Vaekaron, gardien du savoir valyrien depuis si longtemps, qu’elle semblait ridicule du haut de ses pauvres quinze années. Elle souffla pour se donner du courage. Elle avait voyagé dans de basse condition et portaient encore les traces de cette excursion sur ses vêtements et sur ses joues. La pauvreté de sa famille, peu en accord avec ce genre de carrière, ainsi que sa précipitation, couplé à l’orgueil, l’avaient poussée à croire qu’elle pouvait impressionner uniquement avec sa magie. Comme elle le regrettait désormais.
« Jaenera Valineon. C’est à toi. » vint la chercher un homme qu’elle n’aurait su dire s’il était un savant esclave ou un intendant de la Tour.
D’un pas qui se voulait calme, elle entra dans la pièce circulaire où elle devrait exprimer sa requête aux chefs de la famille Vaekaron. La voix claire et encore pure de la Valyrienne s’éleva de la pièce, déjà agitée et lassée des entrevues.
« Je.. Je suis Jaenera Valineon, mage du Troisième Cercle du Collège. Je suis ici pour chercher la bienfaisance de la famille Vaekaron pour la suite de mes études. »
Un de ses rouleau tomba sur le sol. Jamais elle ne s’était sentie aussi petite et peu sure d’elle, peut-être avait-elle été trop loin ? Malgré son âge précoce pour une entrée au Troisième Cercle, et les éloges de ses enseignants, la famille qui se voulait gardienne de la connaissance en rivalité avec le Collège des mages allait-elle réellement accorder de l’attention à cette noble désargentée qui disait savoir faire des tours de passe-passe ?
HRP : J’ai voulu décrire le caractère et la présentation de Jaenera, pour la présenter dans sa prime jeunesse. Mais rien ne nous empêchera d’ellipser le rp pour décrire leurs rapports plus intimes et leur proximité arrachée ;)