Le soleil était sur le point de terminer cette course menée chaque jour par Meraxes, inondant Valyria de sa lumière chaude aussi vive que le feu. Ce spectacle créait de nombreuses nuances d'orange qui plus elles s’éloignaient de l'astre diurne, plus elles s'assombrissaient pour se mêler à l’indigo si caractéristique d'un ciel nocturne. Les rues s'étaient peu à peu vidées de ses marchands et de ses clients pour laisser place à une tout autre ambiance, bien plus légère où les éclats de rires supplantaient le bourdonnement des voix s’haranguant mutuellement. Avec l'aurore, le crépuscule était le tableau qu'il aimait admirer le plus. Pour cela il montait toujours sur les toits pour flatter ses yeux de cette vue inoubliable, nourrir son âme de cette beauté naturelle, et laisser cette lumière si particulière venir caresser les traits de son visage.
Il fallait se préparer à la hâte et les gestes de Garaevon se faisaient rapides, presque maladroits alors qu'il essayait de nouer le fin lacet de cette fine chemise de lin blanc. D'agacement il tapant du pied. Comment ces doigts étaient-ils capables de faire preuve de dextérité des heures durant près d'une fournaise mais se retrouvaient dans l'impossibilité de de nouer un simple lacet ? Une voix retentie derrière lui et il sursauta, pris au dépourvu par cette arrivée. Le cœur battant il se retourna d'un bond et découvrit qu'il ne s'agissait pas de son maître venu pour le disputer de son retard mais son épouse. Il soupira de soulagement alors qu'elle s'avançait vers lui pour venir l'aider. Tyraxes était bien avisée de lui envoyer Hesella pour qu'il puisse gagner en sérénité. Cette dernière lui tendit la tunique sans manche d'un orange qui tirait vers l'ocre, la remerciant d'un sourire il prit la pièce de tissus et la mise avec une facilité qui contrastait avec son ennui précédent.
-Tu es beau comme un cœur. Hâte-toi et ne le fais pas attendre plus longtemps, lui dit-elle enfin avant de venir déposer un baiser sur son front. Il hocha la tête et la serra quelques instants dans ses bras avant de quitter la pièce et de descendre rejoindre son maître à l’entrée de la demeure. Ainsi apprêtés pour la soirée qui se profilaient, ils se mirent tous deux en chemin pour rejoindre la demeure du chef de la Guilde des esclaves.
Lorsqu’ils arrivèrent sur les lieux des festivités, Garaevon fut éblouis par tout le faste qui a avait été mis en place pour ravir les yeux des invités. Plantes et décorations offraient une vue des plus agréables tandis qu’un doux parfum floral se mêlait à celui d’épices mais aussi à l’odeur caractéristique …du feu ? Était-ce les précédents effluves qui venaient à le tromper de la sorte ? Les yeux du jeune volantin survolaient les lieux mais ne voyaient que fortunés invités profitant des lieux, esclaves les servant à foison et d’autre servant de spectacle alors que leur corps bougeait au rythme de la musique qui se jouait dans un coin de la grande pièce. Il alla s’installer sur une banquette encore libre et commença à servir lorsque le maître des lieux les invita tous à prendre part aux festivités.
Les mets étaient tout simplement des plus exquis, les épices de certains d’entre eux venaient réchauffer sa langue ou encore venaient chatouiller sa gorge. Entre chaque bouchée de plat différent il buvait de cette eau infusée de menthe qu’une esclave venait le servir, il venait goûter aussi ce vin qui lui semblait venir de Volantis et il se laissait un peu plus aller aux influences de Syrax tandis que Tessarion le divertissait. Les corps qui se mouvaient devant lui réveillaient cette flamme qui sommeillait en lui et qui aimait admirer la beauté sous toutes ses formes, aussi étrangères soient-elles. Mais voilà qu’après une durée indéterminée de bouchées et de gorgées, les danses se stoppaient pour laisser place à un spectacle bien plus ardent à admirer en une telle soirée comme celle-ci.
La lumière provenant des torches s’amenuisât alors qu’arrivait une femme dans une tenue d’apparat. Mage à n’en point douter, c’était qu’il commençait à en connaître à certain nombre, même s’il pouvait les compter sur les doigts d’une main. Le silence commença à envahir la salle, les musiciens engagés jouant un grand rôle avant qu’ils ne reprennent leurs gestes sur un rythme bien différent, plus envoûtant. Intrigué, Garaevon posa des yeux brillants sur la jeune femme qui officiait à quelques pas à peine de lui. Gracieuse, ses gestes étaient précis et dansaient comme les flammes qu’elle créait, jouant avec elles avec une dextérité sans pareille. Il avait l’impression d’avoir déjà vu un tel spectacle se jouer devant lui, dans un tout autre contexte que celui-ci en revanche, mais les vapeurs du vin l’empêchaient décemment de reconnaître cette femme qui ne s’était guère dévoilée aux yeux des invités.
Il avait beau n’être qu’un sang-mêlé, peu certain de sa résistance s’il se brûlait, le feu était autant une passion que le cœur même du travail qu’il effectuait chaque jour que les dieux faisaient. Sans le feu, le verre ne peux être travaillé. Cette phrase prononcé par une voix féminine tirée de ses souvenirs, flotta tout le long du spectacle qui leur était offert, à lui et aux autres. L’inconnue continua à jouer avec les flammes jusqu’à ce que sa démonstration touche à son terme et qu’un tonnerre d’applaudissements et de vivats ne la congratulent, l’apprenti-verrier allant même jusqu’à se lever péniblement pour applaudir. La mage méritait une audience de pieds et non couchée, trop enivrée pour tenir debout. Il la regarda saluer le public avant de s’éloigner tandis que les torches regagnaient en vivacité et que les danseurs reprenaient leur place. Garaevon la suivit du regard et lorsqu’il constata que la compagnie de l’inconnue s’éloignait momentanément d’elle, il profita de cette occasion pour se rapprocher d’elle. Il pensait savoir qui elle était.
- Par Gaelithox, la plus belle étoile de Draconys se trouve à Valyria en cette douce soirée, dit-il en s’approchant de la jeune femme et ce ne fut que lorsqu’il put enfin voir son visage qu’il fut certain de son identité. Rhaenyra. Tu m’as manqué comme le soleil manque à la fleur au cœur de la nuit la plus sombre… Rhaenyra.