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Magical fireft Lornaelon

Collège des Mages, 1066, dernière semaine du mois 8

L’air paraissait crépiter autour de la sorcière alors qu’elle regagnait le Collège de Magie depuis le Palais Lyseon, une ride creusée profondément sur son front trahissant son agacement ainsi que le maelstrom de pensées qui l’habitaient à cet instant précis. Dans sa longue robe noire ajustée, elle tranchait avec les tissus plus légers qu’arboraient la plupart des dames croisées dans le Berceau de la Gloire, dont les noms étaient presque aussi connus que le sien pour la plupart. Quelques-unes la saluèrent de loin, et elle répondit distraitement, veillant tout de même à ne pas commettre un impair diplomatique, mais bouillonnant d’impatience à l’idée de retrouver l’ombre de sa réelle demeure, et non pas les ors du vaste palais familial, qui contenait à vrai dire davantage de leur fortune sur ses murs que dans les coffres Lyseon. Pour autant, elle continua rapidement son chemin, pour enfin arriver devant le bâtiment dont elle arpentait les moindres recoins depuis tant d’années. Cette fois, les salutations furent plus chaleureuses, et un rien plus appuyées, avec les confrères et consœurs croisés. Elle fut arrêtée par plusieurs étudiants du Troisième Cercle détachés en renfort auprès des spécialistes des runes pour préparer le rêve de Caraxes. Alyrea leur donna des instructions supplémentaires, puis les laissa, notant mentalement de se remettre à ses études à ce sujet sitôt débarrassée de l’énervement qui la parcourait. Les affaires personnelles ne sauraient, après tout, ralentir son travail en tant que mage. Si certains avaient tendance à confondre ces deux sphères, elles étaient particulièrement séparées dans son propre esprit, et elle avait toujours veillé à ce qu’il en soit ainsi, pour ne pas dépendre de son nom et veiller jalousement à une indépendance chèrement acquise et d’autant plus précieuse qu’elle devait déployer des trésors d’imagination à l’heure actuelle pour la conserver.

Ses pas la portèrent vers l’étage dédié aux guérisseurs. Là, elle traversa les salles jusqu’à trouver la silhouette qu’elle cherchait. Un bref instant, ses yeux la parcourent avec une lueur toute particulière dans le regard, puis elle se positionna contre la porte, les bras croisés devant elle, attendant que Lornaelon ait terminé ce qu’il était en train de faire. L’attente ne dura guère. En même temps, l’air était tellement chargé d’énergie saturée en raison de la magie qui exsudait littéralement par tous les pores de sa peau et qu’elle ne cherchait pas à retenir, amplifiée par son courroux, que quiconque de normalement constitué aurait compris qu’il était plus que temps de laisser les deux amis en tête à tête. Ainsi, lorsqu’elle obtint l’attention du Haeron, elle indiqua d’un signe du menton la sortie, préférant un zeste d’intimité, avant de lui demander silencieusement de la suivre. Une fois parvenus jusqu’à sa chambre, elle déverrouilla la rune qui lui servait de garde-fou – on n’était jamais trop prudent – et le fit entrer. L’endroit était simple, presque spartiate, pratique et ordonné, à l’image de sa propriétaire, qui n’avait jamais aimé les fioritures ou les décorations trop chargées, cultivant une sobriété qui ne seyait guère à une Lyseon, la dynastie étant davantage connue pour ses membres au caractère flamboyant que pour des excès de modération. Les années au Collège comme des prédispositions de caractère y avaient pourtant concourus dans son cas. Une fois la porte soigneusement fermée, Alyrea planta ses yeux vifs dans ceux du Haeron et siffla entre ses dents comme un serpent :

« Mon frère est un imbécile. »

Ce n’était pas une grande nouvelle. Aemon Lyseon n’était pas à proprement parler un simple d’esprit, et il était même certain que ses dispositions intellectuelles étaient tout à fait correctes. Mais ses capacités à être un meneur comme leur père n’avaient, de l’avis de sa sœur, pas encore été démontrées. Pourtant, la cadette de la branche exprimait rarement un avis aussi tranché sur son aîné. C’était donc qu’il l’avait particulièrement agacé, ce qui avait tendance à arriver assez souvent depuis qu’il avait repris les affaires familiales, et qu’il s’était mis en tête de se rappeler l’existence de sa première fiancée, bien heureux d’avoir quelqu’un pour travailler à sa place, et surtout à tenter de séduire pour obtenir sur le tard l’héritier tant attendu. Inutile de préciser qu’outre la contrariété due au surcroît de travail qu’Alyrea devait endosser, le fait de supporter les avances peu délicates de son frère lui était insupportable, et ce même pas en raison de ses sentiments pour Lornaelon. Certes, cela n’aidait pas, mais depuis toujours, Aemon ne lui avait jamais rien inspiré. Elle ne le détestait pas, ne l’aimait pas particulièrement : son frère lui était singulièrement indifférent, compte tenu du peu de choses qu’ils avaient en commun. S’en débarrasser avait certes été une tactique pour éviter d’être enchaînée à un autre homme, mais aussi un choix personnel, puisqu’elle n’avait que faire d’être une des nombreuses dames Lyseon au Palais, préférant poursuivre sa carrière de mage au Collège, quitte à capitaliser davantage sur son prénom que sur son auguste nom. Cependant, elle avait aussi deux nièces, et ces dernières méritaient qu’elle évite de voir leur père se ruiner tout à fait et les laisser sans rien – ou pire, qu’elle doivent à terme s’en occuper elle-même, sur ses propres deniers chèrement acquis par ses œuvres.

« Passe encore que je doive supporter ses allusions dont la subtilité égale celle d’un soldat ivre en rut, mais devoir sauver ses affaires à chaque fois que je passe en mettant de l’ordre dans ses comptes et en l’empêchant de placer les quelques réserves accumulées par mon père n’importe comment devient particulièrement redondant.

Impossible pour un Lyseon digne de ce nom de se contenter de simplement faire fructifier son patrimoine, non, il faut construire de nouvelles choses, apporter une nouvelle pierre à l’édifice … »


Le roulement des yeux ainsi que les doigts recourbés qui s’agitaient pendant qu’elle concluait son explication indiquaient clairement qu’Alyrea citait des paroles manifestement prononcées, ou en tout cas, inspirées d’échanges réels. La crudité de la confidence aurait pu étonner. A vrai dire, la magicienne avait mis des années à être parfaitement honnête vis-à-vis de sa famille avec Lornaelon, l’orgueil Lyseon demeurant particulièrement puissant, même chez la membre de la dynastie qui en était peut-être la plus éloignée. L’intimité partagée avait fini par vaincre ses réticences, ce qui démontrait, s’il y avait encore besoin de le faire, à quel point les deux mages étaient proches, car jamais Alyrea n’aurait été aussi franche avec qui que ce soit d’autre. La confiance était la pierre angulaire de leur relation, et comme l’homme avait exactement la même capacité à lui parler des secrets de sa famille, elle acceptait d’y répondre pareillement.

S’approchant de l’homme, la Lyseon se glissa derrière lui, ses bras enlaçant son cou et son poitrail comme des filaments l’emprisonnant vers elle, avant qu’elle ne murmure à son oreille :

« Peut-être que je devrais l’épouser et m’en débarrasser après. Mais je ne suis pas certaine de faire suffisamment illusion durant la nuit de noces …

Sauf à empoisonner son vin encore une fois et m’en aller te rejoindre. A ton avis, à quel point cela serait exquis de cocufier le divin Seigneur-Dragon dès les premières heures de son union ?

Je garde un excellent souvenir de ta propre nuit de noces, tu sais. »


Evidemment, puisqu’elle l’avait passé avec un de ses cousins, avant de le rejoindre au petit jour, pour se comparer à sa sœur, et pour le comparer avec son parent, dans un jeu aussi puéril que malsain, mais qui, sur le moment, avait été doublement excitant. A bien des égards, cela avait été l’une de leurs meilleures nuits – enfin, en l’occurrence, matinée. La jalousie, maîtrisée et utilisée comme simple amusement, pouvait être à de nombreux égards, un aphrodisiaque puissant. Et entre eux régnait cette confiance aveugle qui leur permettait d’endurer les impératifs sociaux, pour mieux s’en amuser une fois seuls et y puiser un encouragement supplémentaire à braver tous les interdits pour repousser les limites de leur propre érotisme, ciment magnifique de leur couple depuis tant d’années.

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Magical fire
Lornaelon & Alyrea




À bien des égards le jeune Haeron enviait sa position à celle de Alyrea, car depuis le décès de son épouse il n'avait plus eu à s'embêter à courtiser une autre parent, dans l'idée de produire un héritier. Pour le commun des Haeron, Lornaelon semblait être un pauvre malheureux de plus se noyant dans son travail pour oublier cette perte dont il ne s'était jamais remis et, à bien des égards, cette image qu'il renvoyait lui convenait parfaitement. Cela lui permettait de se concentrer sur son travail, sur les préparatifs de la célébration de Caraxes, mais également sur les projets qu'il allait devoir soumettre à sa nièce. Il avait donc le loisir de laisser ces petits problèmes personnels de côté pour se concentrer sur sa carrière, mais il avait parfois tendance à oublier la charge de travail qu'impliquait sa fonction au sein du cinquième cercle.
Il ne s'agissait plus que de lui, à présenter, et de ses petites études. Il se devait d'être responsable, désormais, et cela commençait par guider des groupes de travail, répondre aux questions incessantes des novices dont il avait le malheur de croiser le chemin et, enfin, d'expliquer aux plus jeunes mages ce à quoi ils devraient se préparer pour la célébration de Caraxes. Quand trouverait-il le temps de réfléchir à ses propres projets ? De mener ses propres expériences ? Pas aujourd'hui en tout cas mais, au moins, il n'allait certainement pas voir la journée passer.

Il était donc là, le nez rivé sur ces parchemins à tenter d'éviter les regards nerveux lancés par deux jeunes mages. Il était là, à passer en revue la liste des effectifs détachés pour la célébration ainsi que la liste du matériel prévu à cet effet, en jaugeant si cela serait suffisant au vu des épreuves qui allaient prendre place, pour l'occasion. Certes il appréciait qu'on vienne lui demander conseil et validation, il avait gagné ce droit à la force de son propre cerveau, mais cette bleusaille ne savait-elle pas qu'il détestait qu'on regarde derrière son épaule ? Pas cette bleusaille-là, apparemment, mais il n'avait pas assez d'énergie pour se dévouer à un tel rappel à l'ordre.
Le Haeron fit donc quelques corrections sur la feuille qui lui était transmise, ajoutant quelques éléments avant de se redresser et rendre le document aux mages qui repartirent sans demander leur reste. Enfin il était libre, enfin il allait pouvoir tourner son attention vers celle dont il aurait pu sentir la présence à des dizaines de lieues à la ronde, car elle semblait avoir passé de bien meilleurs jours.

Sans un mot, l'homme suivi donc sa camarade et plus ancienne amie jusqu'à ses appartements car – et ils le savaient bien – en publics ils n'étaient que deux collègues liés par une entente évidente. En public ils ne pouvaient pas tout se dire mais c'était sans doute mieux ainsi, car cette énergie accumulée donnait généralement lieu à des retrouvailles...explosives.
Lornaelon passa un bref regard sur la pièce qu'il venait de pénétrer, une chambre au confort similaire à la sienne et qui lui convenait très bien. Cela pouvait paraître étrange mais, avec le temps, il avait fini par s'habituer à ces lits parfois trop durs, si bien qu'il n'arrivait pas à dormir correctement dans une chambre qui suintait le luxe et le confort par tous ses pores. S'habituer à l'inconfort : un drôle de concept qu'il maîtrisait plutôt bien. Enfin non, ce n'était pas l'heure de penser à cela car, de toute évidence, Alyrea semblait remontée contre Aemon, son frère. Arquant un sourcil de surprise, Lornaelon s'autorisa une remarque sur un ton léger.

« Était-ce censé être un secret ? »

Il n'était pas mauvais ou impertinent à proprement parler, mais Lornaelon savait que ici, face à elle, il pouvait se permettre de parler sans y mettre les formes. Cela avait pris du temps, plusieurs années même, mais il était bien loin le temps où ils n'avaient été que des étrangers, l'un pour l'autre. Aujourd'hui, quoi qu'il puisse se passer dans leurs existences respectives, ils pouvaient toujours trouver le calme apaisant et réconfort en se baignant dans la présence de l'autre. Le chemin avait été long et fastidieux mais ils avaient réussi, ils avaient tous deux gagné le droit de pouvoir être eux-même, même si cela se limitait à une pièce aussi petite que celle-ci.

Cette remarque fut tout ce qu'il s'autorisa pour le moment car, de toute évidence, la belle avait besoin de cracher son venin pour laisser derrière elle ce qui avait pu se passer avec son frère. Il écouta donc Alyrea parler des piètres talents de son frère en matière de gestion, mais aussi de son patrimoine qu'il voulait fructifier, ce à quoi le Haeron ne manqua pas de répondre :

« Peut-on vraiment lui en vouloir ? C'est le trait commun à chaque héritier, de vouloir laisser une trace derrière lui, pour qu'on se souvienne de lui autrement que d'un énième héritier d'une prestigieuse lignée. Bon, après, s'il est bête à manger du foin tu ne peux plus rien pour lui. »

Lornaelon ne cherchait pas à se faire l'avocat du bien, ce n'était ni son envie ni son rôle, mais son esprit cherchait instinctivement à comprendre même les plus irrationnelles des décisions. Il était ainsi, tâtonnant le noir à la recherche de la lumière, à la recherche de réponses comme il le pouvait. C'était ainsi que leur mécanique fonctionne : elle pouvait se permettre d'exploser car elle savait que le Haeron serait toujours là pour contrôler et apaiser le feui qui jaillirait en elle.

« C'est le prix à payer pour t'être rendue indispensable, ma chère. »

Certes, sa relation avec sa nièce était assez différentes car ils ne se connaissaient pas assez pour que cette dernière requiert ses services en permanence, mais le mage ne pouvait que deviner ce que cela devait faire que de travailler pour un idiot sans aucun talent pour le commerce ou la gestion. Travailler au milieu d'idiot sans jamais oublier sa propre grandeur : un exercice des plus complexes.

Ce fut un sourire discret mais plus franc qui vint s'afficher sur le visage du mage lorsque les bras de la belle vinrent entourer son cou, alors que la conversation prenait une toute autre direction. Réprimant l'envie de dire qu'être veuf était vraiment surfait, le Haeron ne put que repenser aux souvenirs de cette fameuse nuit de noces et surtout à ces délicieuses retrouvailles qui effacèrent le goût amer qu'avait laissé cette union avec sa sœur. En même temps, après avoir connu une femme telle que Alyrea, cette union avec Daerya lui avait semblé être...insipide. Oui, c'était le bon terme.

« En même temps il n'aurait que ce qu'il mérite, non ? D'être assez stupide, pour croire qu'il peut s'approprier une femme telle que toi. »

S'approprier, Lornaelon avait fait exprès de choisir le mauvais terme car, dans l'esprit du Seigneur-dragon, s'unir à cette mage reviendrait sans doute à cela. Un tel feu ne pouvait être amadoué, même avec la bénédiction des Dieux : il devait être conquis.
Chassant les délicieux souvenirs de cette matinée-là pour se concentrer sur le moment présent, sur ces bras autour de son cou et ces lèvres qui semblaient l'appeler, l'homme posa une chaude main sur la joue de son amante, caressant cette joue de son pouce avant d'approcher son visage, sans pour autant encore sceller les retrouvailles par un baiser. Tout près d'elle, si proche que leurs deux souffles ne faisaient qu'un, le guérisseur plongea son regard dans celui de sa partenaire, pour finalement lui demander :

« Dis-moi. Comment puis-je apaiser tes maux, ce soir ? »

C'était une phrase qui symbolisait leur mécanique car, si l'énergie de la demoiselle avait tendance à tirer son amant vers le haut, à rendre son feu plus intense et brûlant qu'il ne l'était, Lornaelon était celui qui chassait le trouble dans l'esprit de sa partenaire. Oh certes cela passait souvent par une danse des corps et des sens, le meilleur remède à sa connaissance, mais le résultat était bien tout ce qui comptait.
Il n'avait pas besoin de demander ce qu'il devait faire, il le savait très bien mais en avait simplement envie.

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Magical fireft Lornaelon

Collège des Mages, 1066, dernière semaine du mois 8

La sortie de Lornaelon tira à Alyrea un reniflement amusé. Toute autre personne prise à parler ainsi de sa famille en aurait probablement été quitte pour une insulte salée, ainsi qu’une promesse de mort lente et douloureuse – et de la part d’une mage, il fallait s’attendre à ce que ce ne soit pas une hyperbole, mais bel et bien une annonce qui ne manquerait pas de se réaliser, car si les runes n’étaient pas la spécialité la plus connue pour son potentiel meurtrier, en comparaison avec la pyromancie si tonitruante par exemple, elles disposaient, pour quiconque capable de les manier correctement, d’un potentiel dévastateur évident. Si les meilleurs adeptes de la discipline étaient capables de faire s’effondrer des villes entières, alors que pouvaient-ils infliger à un simple corps humain, bêtement fait de chair et de sang. ? Peu aimeraient la réponse. Cependant, parce qu’il était son confident, le Haeron échappait depuis longtemps à cet orgueil familial hypertrophié, dont certains auraient dû se méfier. Certes, la Lyseon était à bien des égards notoirement émancipée de sa lignée, pour autant, elle conservait cette fierté caractéristique des trois dynasties descendants des Fondateurs, et même les années n’avaient su la lui retirer. Envers et contre tout, et en dépit des sentiments contradictoires que lui inspiraient certains membres de sa fratrie, elle conservait une forme de loyauté pour son nom, alimentée sans doute par l’affection sincère, quoique distante, qu’elle éprouvait envers ses deux nièces, et l’inquiétude vis-à-vis de leur devenir entre les mains d’un père qui rêvait probablement plus grand que ce qu’il était capable d’accomplir, pour le moment du moins. Alors oui, évidemment, la plupart des héritiers voulaient marquer l’histoire de leur empreinte, mais justement, c’était à force d’ambitions démesurées que de grandes familles avaient chuté, dilapidant leurs biens dans des entreprises hasardeuses, plutôt que de s’attacher à prospérer et à intriguer sur le long terme. Du reste, Alyrea admettait y voir une forme de pusillanimité qui alimentait son mépris instinctif, trouvant ridicule ce besoin compulsif de gloire quand on n’avait difficilement les moyens de sa politique, et qu’on avait du jamais démontré les qualités sous-tendant de telles ambitions. C’étaient ces comportements qui avaient relégué sa glorieuse gens à un rôle de relique, tandis que de plus en plus, les premiers rôles étaient occupés par des familles plus jeunes, plus riches. D’ailleurs, les descendants des Dragons Verts auraient mieux fait de se méfier, car les noms qui faisaient frissonner les cœurs valyriens étaient moins les leurs que ceux de tous ces marchands du Nord et du Centre. Et oui, Lornaelon était issu d’une de ces familles, ce dont elle avait conscience, et dont l’ironie ne lui échappait pas. Peut-être aussi que cela avait accentué le développement de cette vision particulière, à rebours de ce qu’on aurait pu s’attendre d’une Lyseon, élevée dans les plus pures traditions du Sud de Valyria. Elle avait simplement conscience que, s’ils n’y prenaient pas garde, les siens finiraient engloutis par ceux de son amant, et qu’il était illusoire d’imaginer que le souvenir des gloires passées payerait toutes les dettes, quand les créanciers viendraient chercher leur dû. La gloire ne remplissait pas les assiettes, très prosaïquement. Hormis chez quelques rigoristes, elle finissait également par limiter le pouvoir d’influence, le cœur de la politique de la péninsule. Les clients ne pouvaient se satisfaire éternellement de promesses et de réminiscences. Il fallait les entretenir, les aider, comme eux soutenaient leurs patrons. Mais l’imaginaire familial avait la vie dure, et des générations bercées de grands rêves se succédaient, reproduisaient les mêmes erreurs, et échouaient invariablement, affaiblissant toujours plus ce qui avait été si grand, si impressionnant, si dominateur. Alors laisser son frère mettre en péril le redressement que leur père était parvenu à opérer grâce à ce coup du sort inespéré dans sa jeunesse, au moins pour leur branche cadette, lui était impensable.

« Et ainsi, des générations de glorieux flambeurs dilapident ce que leurs aînés ont patiemment amassés, et mettent en danger l’avenir de cette famille dont ils n’ont que le nom à la bouche.

Puisque la guerre ne l’a pas couronné comme il l’espérait, il est déterminé à trouver d’autres expédients, quitte à entreprendre n’importe quoi, pourvu que la bonne personne lui en ait vanté les mérites – de préférence par l’intermédiaire d’une catin grassement payée. »


Pour le moment, seul le menu fretin des profiteurs avait tenté cette stratégie, et elle avait réussi à limiter les dégâts, forte de ses apprentissages auprès des Guildes, notamment celle des Orfèvres, qui comptait en matière commerçante les plus grands requins de Valyria, peut-être. Sans cette expérience précieuse, puisqu’elle ne s’était pas contentée d’effectuer quelques sortilèges mais avait aussi décidé de s’instruire de leurs pratiques, trouvant une oreille généralement attentive chez ses interlocuteurs flattés de l’intérêt d’une femme issue d’une dynastie de Fondateurs pour leur travail, mais également intéressés par le potentiel de la conserver auprès d’eux, Alyrea n’aurait pas été en mesure de démêler le vrai du faux de ces audacieux montages. Cependant, elle avait entièrement conscience de ses limites, et viendrait un moment où elle serait dépassée. Le pire était que son frère n’était pas un mauvais bougre, loin de là, mais comme beaucoup de Lyseon, sa soif de reconnaissance et de se faire une gloire à la mesure de leur illustre aïeul avait tendance à l’aveugler. Alors indispensable, elle l’était, d’un certain point de vue, puisqu’il pouvait fort bien la congédier par la seule vertu d’être le chef de famille. Preuve qu’il n’était pas, en vérité, un imbécile : il ne l’avait pas fait, et lui demandait très régulièrement conseil. Quand bien même il était également intéressé par sa personne, la magicienne était persuadée que si cela avait réellement été son unique objectif, il ne se serait pas embarrassé de tels stratagèmes, sûr de son bon droit et de l’opportunité offerte. Ce qui aurait été une erreur particulièrement grossière, puisque si la bientôt quadragénaire n’avait pas été sensible à son charme adolescente, elle ne l’était toujours pas à son âge. La lueur flamboyante qui s’était allumée dans ses yeux le démontrait assez bien, comme le fait que Lornaelon savait parfaitement sur quels ressorts appuyer pour attiser son caractère volatil – tout en échappant à ses éclats, ce qui n’était pas une mince prouesse. Badiner sur un fratricide aurait pu être une insulte aux dieux, mais elle trouvait l’interdit doublement plaisant.

« En effet. Et d’être suffisamment obtus pour ne pas avoir compris que céder ma place à notre sœur a été une délivrance plutôt qu’une souffrance.

Mais il faudrait que je supporte la période de fiançailles, et un temps bien trop long de mariage pour que ce soit convaincant … Quelle horreur. Je m’endetterai sur plusieurs vies auprès de nos amis alchimistes pour me procurer suffisamment de somnifères afin d’endurer cela. »


L’humour noir régnait en maître, ce soir-là, permettant de tenir à distance l’inévitable, qui se matérialisait par les frissons la parcourant en sentant la main du Haeron sur sa peau, même après tant d’années, ainsi que l’affûtage extrême de ses sens alors qu’il se trouvait si près d’elle. Un sourire en coin équivoque apparut sur son visage quand Lornaelon lui demanda comment il pouvait la soulager. Vingt ans auparavant, elle n’aurait même pas pris la peine de répondre verbalement avant de l’attirer à elle et de se perdre dans le parfum de ses lèvres et la saveur de sa peau contre la sienne. L’amour permettait de tout oublier même pour quelques heures. Elle avait mûri, et n’était, heureusement, plus soumise aux caprices du désir brut, animal. Du moins, elle pouvait en jouer. Et cette fois, son sourire se fit dangereux, à l’image de cette magie qu’ils manipulaient tous les deux et qui les consumait peu à peu, emportant leurs âmes à chaque atrocité commise au nom de la science, de la recherche, de la gloire de Valyria. Ils n’en avaient cure, trop profondément corrompus pour s’en soucier. Ils s’en délectaient même, comme à cet instant, en évoquant l’assassinat de son propre sang comme s’il s’agissait d’une conversation normale. En un sens, elle l’était pour eux. Bien sûr qu’elle avait songé à se débarrasser de son ennuyeuse épouse, et d’écarter brutalement son frère. Mais parce qu’ils étaient davantage retors que fous, ils avaient conclu que la prudence était plus intelligente, et surtout, plus intéressante sur le long terme. Il avait accepté de l’épouser, et c’était son choix. Elle avait préféré manipuler les siens pour s’éviter cette fastidieuse opération. C’était aussi son choix. Son veuvage aurait été parfait, si sa situation n’avait pas changé. Et ils avaient passé l’âge de rêver, furtivement, comme à quinze ans. Se lovant contre l’homme avec sensualité, ses deux bras passés autour de son cou, la rouée se détendit pour murmurer à nouveau à son oreille :

« Soit tu m’aides à monter un projet qui me permette de détourner l’attention de mon frère de ces fantaisies sans mettre en danger l’avenir de mes nièces, et je te récompense pour cela, soit je t’offre un zeste de motivation avant que nous ne nous y attelions …

A ta guise. »

Pourquoi le nier ? Le plaisir viendrait. Restait seulement à décider des règles du jeu de leur soirée.


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Lornaelon & Alyrea




Dans ce monde rien n'était ce qu'il paraissait vraiment, toute société était faite de faux-semblants et de sourires trompeurs, voilà ce qu'on avait inculqué au jeune homme dés son plus jeune âge et ce qu'il eut tout le temps de vérifier, dans les années qui suivirent. Il n'était pas homme à suivre aveuglément ce qu'on lui disait mais, réception après réception, réunion après réunion, il avait appris à conjuguer avec les désirs personnels des uns et des autres tout en sortant son épine du jeu. Aucun de ses parent n'avait rien attendu de lui ? Qu'à cela ne tienne, il décida de devenir l'un des mages les plus doués et les plus zélés de sa génération. On voulait le marier à sa sœur ? Qu'à cela ne tienne, mais il décida de ne pas se perdre dans cette relation dépourvue d'amour. On lui ôta sa sœur, mais par la même occasion la chance d'être unie à celle qu'il voulait vraiment ? Qu'à cela ne tienne, il saurait maintenir intacte cette flamme dans le secret des alcôves et des chambres au confort spartiate.
Chaque personne en ce monde avait ce double visage comme les deux faces d'une même pièce de monnaie. Le premier masque était celui que l'on montrait au public, celui fait de sourires et de tempérance, celui teinté de contrôle et de maintien comme celui qu'arboraient les deux mages dés qu'ils sortiraient de cette pièce. L'autre ? Ah, l'autre ne devait pas être montré à n'importe qui. L'autre était le reflet de l'âme de l'individu dans ce qu'elle avait de plus beau et de plus horrible à la fois mais, évidemment, cela demandait une dose colossale de confiance pour accepter de se dévoiler tel un livre ouvert, sans réserve ni faux-semblant. Alyrea et Lornaelon n'avaient pas toujours été aussi proches, pas toujours été aussi libres de s'ouvrir à l'autre mais, à force de temps et d'épreuves, ils pouvaient à présent évoquer les sujets les plus simples comme les plus horribles, sans crainte du jugement de l'autre : c'était là, face à l'autre, qu'ils pouvaient montrer la seconde face de cette pièce de monnaie.

Pourraient-ils parler aussi légèrement et librement de leurs parents avec d'autres ? Bien sûr que non, mais c'était justement cette liberté qui leur permettait de tout encaisser et tout endurer, car ils savaient au bout du compte que, une fois la nuit venue, ils pouvaient enfin faire tomber le masque. C'était pour cela que la demoiselle pouvait se lâcher et balancer tout ce qu'elle pensait des agissements de son frère, dilapidant la modeste fortune familiale dans des entreprises qui, certainement, seraient vouées à l'échec. Les deux mages connaissaient l'Histoire de ce pays sur le bout des doigts, ayant maints exemples similaires mais, également, tout autant d'exemples de réussites improbables.
Les familles allaient et venaient, grandissaient et chutaient jusque dans les abysses de l'anonymat, mais rares étaient les personnes à voir le schéma dans son ensemble. Les deux mages le pouvaient et avaient donc la capacité d'agir avec un peu plus de recul et de sagesse, pour sauver ce qui pouvait encore l'être. Le but n'était donc pas de sauver le frère de Alyrea de sa propre bêtise, mais plutôt de l'empêcher de détruire l'héritage qui était à présent le sien.

« Il se débat, pour maintenir la tête hors de l'eau. Cela serait louable, s'il ne semblait pas aveuglé par son désir de gloire. Enfin bon, peut-être finira t-il par apprendre la leçon. »

Ce qu'il y avait d'énervant avec un homme aussi prompt au sarcasme que Lornaelon, c'était la difficulté qu'on pouvait avoir à deviner s'il était sérieux ou non. Certes, Alyrea savait qu'il ne plaisantait qu'à moitié, qu'il n'accordait qu'un crédit très modéré à l'intellect de ce frère qu'il ne connaissait que peu, mais il savait aussi que la douce ferait tout ce qu'elle pourrait pour maintenir sa famille à flot, sans se faire emporter par le courant pour autant.
Elle était forte, elle portait en elle la fierté d'une longue et prestigieuse lignée tout en gardant ses propres objectifs, ses propres désirs. C'était tout ce qui importait, au bout du compte. Elle était assez forte pour ne pas laisser l'homme qu'elle aimait lui échapper, à cause d'une chose aussi futile que le mariage. Aussi, lorsque la demoiselle dévoila l'idée d'utiliser des somnifères pour échapper au farouche désir de son frère, argumentant que le coût d'une telle entreprise serait bien au-delà de ses moyens, le Haeron sourit en lâcha sur un ton léger :

« J'ai quelques contacts qui pourraient te faire un bon prix, cela dit. Crois-moi, pour m'être ébattu avec une femme qui fait passer cette danse des corps pour de la nécromancie, le somnifère n'est pas un si mauvais investissement. »

Lornaelon avait du respect pour ses aînés et ses parents, mais quel usage les morts pourraient-ils bien avoir du respect ? Il avait apprécié sa sœur, il s'était délecté de sa douce et timide  compagnie mais, lorsque venait le soir, cette timide faisait perdre toute saveur à cette proximité intime que deux époux se devaient d'avoir. Il aurait sans doute pris plus de plaisir avec la première catin venue, si on laissait de côté les quelques maladies probablement transmises au passage. Les nuits avec Daerya avaient été douces et apaisantes à plus d'un égard, certes, mais Lornaelon n'avait que faire de la douceur. Il voulait de l'échange, de l'intensité, des pensées partagées au travers d'un seul regard, et il n'y avait qu'avec Alyrea qu'il pouvait l'avoir. Il le savait, elle le savait aussi et voilà pourquoi il se permettrait ce trait d'humour très noir en évoquant l'usage de somnifères.

« Ah. Si tu me mets une récompense à la clé, comment puis-je résister ? Rien ne vaut le plaisir de réconforter une femme éplorée, après s'être débarrassé de son prétendant. Sauf peut-être rejoindre ladite femme, juste après sa propre nuit de noces. Hum, le choix est difficile. »

En vérité il n'était pas homme esclave de ses désirs. Il n'avait pas besoin qu'on lui pende sous le nez la promesse de milles et un plaisirs pour accepter de faire quelque chose, il aimait simplement le faire croire pour qu'on le prenne pour un homme plus...simple. Plus facile à manipuler, en somme. Mais elle, elle voyait le feu dans son regard autant que les remparts qui entouraient son esprit. Elle voyait le magma brûlant au cœur de la montagne, tout comme elle voyait les flancs enneigés. Elle voyait tout, le schéma dans son ensemble. Elle put donc apprécier de voir l'homme se rapprocher d'elle, alors qu'il recentrait la conversation sur ce qui importait réellement : eux deux.

« Fort heureusement, ce soir je n'ai pas à choisir. Ce soir, tout ce qui m'importe c'est de te faire oublier ton frère, te faire oublier cette journée et t'aider à te concentrer sur l'instant présent. Il sera toujours temps de planifier, plus tard. »

Était-il sérieux, concernant ce plan dirigé vers le frère de sa compagne ? Une partie de lui était toujours sérieuse, surtout si cela permettait à la belle d'avoir la belle mais, pour l'heure, il y avait autrement plus urgent que cet idiot de frère. Là, le Haeron arborait un sourire équivoque à la demoiselle, ne cherchant même pas à masquer le feu qui brûlait dans ses prunelles, alors qu'il déposait un discret baiser au coin de ses lèvres.

« Tu parlais donc de motivation, n'est-ce pas ? »

Il n'avait pas besoin de motivation, pas avec elle mais cette généreuse offre n'était pas tombée dans l'oreille d'un sourd. Il y avait milles et une façon de dissiper des démons et passer une douce soirée mais eux, mages accomplis, maîtres de leurs sens et leur désir, en connaissaient bien plus encore. Là, dans l'intimité de cette pièce au confort très sommaire, face à cette femme dont il connaissait les courbes par cœur, le presque quarantenaire déposa un autre baiser un peu plus appuyé au bord de la mâchoire de la demoiselle, traçant une ligne qui allait à présent le mener jusqu'à son cou.

Ils avaient leurs propres idées, leurs propres objectifs mais, pour quelques instants, ils pouvaient bien se permettre cette délicieuse pause.
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Magical fireft Lornaelon

Collège des Mages, 1066, dernière semaine du mois 8

« Ce serait bien la première fois. Non, il faut simplement que, comme d’habitude, je détourne son attention … »

Oh, Alyrea avait quelques idées ayant germé dans son esprit machiavélique, surtout quand il s’agissait de se débarrasser de son encombrant frère aîné discrètement et sans se compromettre. Aemon avait toujours été un obstacle : à la tête de la branche, car après tout, il n’y avait que lui entre Alyrea et la succession de leur père – ainsi qu’une tripotée de cousins, mais soit, elle aurait pu, dans ces circonstances, consentir à un mariage. A vrai dire, elle avait même le candidat idéal en tête, qui préférait tellement les garçons d’écurie que son fessier sentait le foin à plusieurs kilomètres à la ronde. Chacun aurait donc poursuivi ses propres appétits sans que cela ne gêne personne. Et elle était certaine qu’il aurait fait un partenaire finalement bien plus intéressant que son frère. Son cousin, au moins, avait une cervelle et savait s’en servir. On ne pouvait pas en dire autant, du moins de son point de vue, de sa principe source d’agacement. Bien sûr, la Lyseon était injuste envers cet aîné qui devait brutalement assumer la charge paternelle et était affecté par le deuil de son épouse. Mais elle ne pouvait s’en empêcher : leurs caractères avaient toujours été incompatibles, et ils représentaient tous les deux ce que l’autre, in fine, aurait voulu être. Sa magie lui avait permis d’obtenir des connexions auxquelles il ne pouvait prétendre, et une liberté bien plus grande, ainsi qu’une place unique au sein de leur famille, peu productrice de mages. Lui avait la place de l’héritage, de Seigneur-Dragon, libre de ses choix et de ses marivaudages, alors que les siens restaient dans l’ombre. Sans doute qu’ils sous-estimaient le poids des responsabilités et des sacrifices de l’autre. Alors, ils étaient condamnés à s’envier. Et à, parce qu’ils n’avaient pas le choix, faire contre mauvaise fortune bon cœur, en s’épaulant comme ils le pouvaient. D’une certaine façon, tout aurait été beaucoup plus simple, y compris leur relation teintée de secrets et de non-dits, si Alyrea avait pu épouser Lornaelon. C’était une évidence à laquelle elle évitait de trop penser, pour ne pas alimenter les regrets lancinants qui parfois l’étreignaient. Pourtant, le constat, amer, était là. L’incantatrice s’était volontairement éloignée de sa famille pour ne pas avoir à dépendre d’eux si le secret était dévoilé, si elle ne pouvait plus compter sur leur soutien. Cela lui avait réussi, au-delà de ce qu’elle aurait pu espérer. Elle avait accepté la place de maîtresse de l’ombre, à défaut de pouvoir obtenir davantage, se contentant de cette place infâmante et affectant le célibat tour à tour digne ou simplement désintéressé. Elle ne regrettait pas, pas cela. Elle avait eu beau essayer, il lui était impossible de réellement vivre sans le Haeron. Parce qu’au-delà d’être son amant, il était son ami, son meilleur ami, son âme-sœur, la seule personne qui pouvait lire en elle aussi facilement, qui avait appris à supporter son caractère changeant et ses piques assassines. Sauf qu’ils n’auraient jamais pu être que des amis. Ils avaient tenté, mais il était impossible de résister à l’élan impérieux qui les menait sans cesse l’un à l’autre, à ces chaînes qui les liaient. Malgré toutes ces années, le désir n’avait jamais disparu. Il avait changé, certes, passant de la passion brutale de leurs jeunes années à l’amour mature de l’âge adulte. Mais l’envie n’avait jamais tarie, et avec les années et l’expérience, elle avait su se renouveler, à mesure que leurs jeux érotiques se diversifiaient, et qu’ils repoussaient, à travers la magie, les limites du plaisir partagé. Qui donc, après de telles folies, aurait pu rivaliser ? Sûrement pas une simple femme comme l’épouse dont Lornaelon avait été affublée. Et Alyrea le disait sans méchanceté aucune : elles n’avaient rien de comparables, et un homme qui avait aimé la compagnie de l’autre aurait eu du mal à apprécier l’autre, à moins d’être extrêmement éclectique dans ses goûts. L’une avait la douceur timide d’une jeune femme attendant de trouver le bonheur, l’autre la rouerie assurée de celle qui prenait son propre plaisir et s’en délectait. La comparaison n’avait pas lieu d’être. Un rire léger s’échappa de sa gorge à la plaisanterie macabre de son compagnon, et il susurra, esprit mauvais poursuivant une rivale décédée jusque dans la tombe :

« Je sais, tu te souviens de cette orgie où tu m’avais fait rester dans la même pièce, avec notre cher ami de la pyromancie ? Elle était tellement figée qu’elle n’a même pas remarqué que c’étaient mes caresses qui te tiraient des soupirs … Ouvrir les yeux aurait pu aider. »

Leur badinage continuait, et à nouveau, Alyrea sentit un sourire étirer ses traits sévères, ce que Lornaelon était l’un des rares à réussir aussi souvent, et il souffla à son oreille :

« Personnellement, j’ai déjà rejoint un homme après sa nuit de noces, et j’en garde un excellent souvenir. Pas toi ? »

Suprême avanie que cette plaisanterie, foulant aux pieds les traditions sacrées de Valyria. En même temps, il avait bien fallu cela pour qu’elle endure cette cérémonie de mariage, un sourire plaqué sur les lèvres tout du long. Oh, elle avait été parfaite, comme toujours dans ces circonstances, profitant de l’attraction que constituait la présence d’une dynaste, fût-elle d’une énième branche cadette, au Nord de Valyria, pour discuter avec toute la parentèle et une large partie des invités, répondant aux œillades plus ou moins subtiles de certaines jeunes hommes présents, participant aux réjouissances avec entrain. Une Lyseon savait donner le change en toutes circonstances, même quand son cœur était rongé par la jalousie. Et elle avait peu à peu perfectionné ce masque qui leur servait à cacher leur relation au monde extérieur. Qu’on les pense amants de temps en temps, cela n’avait aucune importance à Valyria. Mais il fallait dissimuler la chaleur dans son œil dès qu’il se posait sur l’homme, l’affection sincère qui perlait dans sa voix quand elle l’évoquait. Ils invoquaient l’amitié, et sous ce nom, résumait une relation qui ne pouvait s’y restreindre. Parce que, si Lornaelon était son ami et à ce titre, savait parfaitement que son éruption était surtout destinée à attirer son attention pour qu’il comprenne qu’elle avait besoin d’évacuer sa frustration, la façon de le faire était bien particulière. La sensation de ses lèvres, même furtive, au coin de sa bouche, puis contre sa mâchoire, de façon plus habituée, déclencha un frisson sur la peau de Lyseon. Les lippes du Haeron descendaient, progressant jusqu’à son cou, et la magicienne sentit instinctivement ses doigts s’enrouler dans sa chevelure sombre, ses ongles râcler doucement sa peau.

Ses mains se posèrent contre les joues de l’homme, lui faisant comprendre de relever la tête, et une fois à sa hauteur, Alyrea embrassa son amant passionnément, ses bras puissamment enroulés autour de sa tête, de ces baisers qui faisaient perdre les sens et embrumaient la tête, qui irradiaient follement de tout un être, qui représentaient toute une existence de secrets et non-dits qui ne pouvaient être révélés que d’une bouche à l’autre, collées, dévorées. En même temps, elle attira à elle la Toile, et à chaque respiration arrachée à leurs baisers fiévreux, la magicienne en profitait pour prononcer une syllabe, tandis que ses mains traçaient avec habileté une rune dans le dos du mage. Quand enfin, ils se séparèrent, complètement hors d’haleine, elle prononça l’ultime parole, et un fil invisible parut se matérialiser entre eux. Comme toujours le sortilège avait fait son œuvre, liant leurs esprits temporairement, pour qu’ils ressentent toutes les sensations de l’autre, ainsi que ses pensées. Et en la matière, Alyrea avait une imagination débordante. Un sourire notoirement amusé aux lèvres, elle quitta la chaleur des bras de Lornaelon pour le conduire du bout des doigts vers l’arrière de sa chambre. Et à chaque pas, elle prit un plaisir manifeste à bombarder son esprit d’images particulièrement suggestives de ce qu’elle entendait par le terme motivation. Elle y exposait, sans pudeur, les souvenirs de certaines de leurs anciennes étreintes les plus exquises comme certaines pensées de ce qu’elle voudrait lui faire subir. Lentement, elle resserra les fils de sa magie, accentuant la pression mentale, pour que les suggestions soient de plus en plus fortes, de plus en plus nombreuses. Lornaelon était désormais envahi d’images d’Alyrea, à leurs quinze ans, soupirante et totalement abandonnée, sur la paillasse où ils s’étaient perdus ensemble, de lui, durant son mariage, en train de la chevaucher avec ardeur alors que son épouse dormait du sommeil du juste et qu’elle prenait un malin plaisir à lui mordiller l’épaule pour le contraindre à se venger dans une vitalité torride, plutôt que de laisser échapper un soupir révélateur. Puis à nouveau Alyrea, dans le Vieil Empire, tout en haut de cette ziggourat, avec l’horizon pour être témoin de leur étreinte passionnée, encore Lornaelon le dos appuyé contre des coussins moelleux, dans le confort de leur immense chambre faussement conjugale, ondulant au rythme imposé par son amante, sa lourde chevelure lui caressant la poitrine de concert avec ses mouvements, profonds et puissants, cherchant à l’engloutir entièrement, à ne plus jamais le laisser quitter sa passion enveloppante, et cherchant ses lèvres avec ardeur de temps en temps, prolongeant leur délicieuse agonie, Alyrea ensuite, étendue dans le lit du mage, les jambes croisées autour de la tête du Haeron, occupé à martyriser les nerfs sensibles avec sa magie, poussant chaque neuro-transmetteurs à sa limite humaine, pour que le moindre mouvement soit une torture indicible et somptueuse, Lornaelon dans la même position, soumis à une rune produisant un effet similaire, Alyrea, Lornaelon, leurs corps se confondaient, partout, en tout temps, en tous lieux, comme s’ils étaient indissociables l’un de l’autre, comme si leurs existences n’avaient de sens qu’irrémédiablement liés, qu’enchâssés comme le joyau le plus magnifique autour de la bague la plus précieuse. Diminuant l’intensité du partage mental, Alyrea se rapprocha enfin et murmura :

« Est-ce que cette modeste obole mentale satisfera à ta motivation ? Ou dois-je me montrer plus inventive encore ? »

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Magical fire
Lornaelon & Alyrea




À bien des égards, Lornaelon préférait largement sa position à celle de son amante, mais c'était justement pour cette raison qu'il réfléchissait constamment à des moyens de la libérer, à des moyens pour faire en sorte qu'ils n'aient plus à vivre en secret. La position du mage dans l'ordre de succession lui avait garanti une certainement tranquillité quant à son implication dans ce jeu de pouvoir pour lequel il était assez rôdé. On lui avait donné une épouse parce que c'était la tradition, sans attente particulière mais, à présent que cette dernière était enterrée depuis un moment et que la période de deuil était passée, les deux amants pouvaient réfléchir à la neutralisation de la menace qui avait tourné son regard vers Alyrea. N'y avait-il pas quelque magie que le Haeron puisse utiliser, pour rendre Aemon stérile, ou pour que sa lance ne puisse plus jamais retrouver la vigueur nécessaire ? Certainement, oui, mais il ne s'agissait pas de sa famille et, par respect pour son amante, il n'agirait jamais sans son accord.
Il aurait voulu pouvoir faire plus, il aurait surtout voulu que leur situation soit différent mais, comme à chaque fois, les deux mages étaient capables de surmonter n'importe quel obstacle et renverser la situation à leur avantage. Ils en avaient trop vu, trop fait et trop expérimenté pour pouvoir s'arrêter en si bon chemin, parce qu'un crétin avec un titre avait jeté son dévolu sur Alyrea. Il s'en mordrait les doigts tôt ou tard et, comme à chaque fois, le Haeron serait là, souriant, en voyant l'illusion d'Aemon se briser en un millier de fragments.


En vérité, si son chemin avait croisé celui d'une autre femme, s'il avait dû garder le secret de sa relation avec une autre, Lornaelon n'était même pas certain qu'il aurait été capable de le tenir. Il n'avait pas besoin de le vocaliser, mais tous deux savaient que cette relation et ce secret étaient maintenus intacts grâce à la force combinée de ses deux membres, et pas uniquement parce que ce secret amenait une certaine dose d'excitation. Ces petits jeux étaient amusants lorsqu'ils étaient jeunes, cela venait épicer leur vie morne et assommante de travail mais, à présent qu'ils pouvaient jouir d'une plus grande liberté la Lyseon et le Haeron appréciaient davantage le caractère unique de ce qu'ils avaient là. Ils s'étaient éloignés de leurs familles par choix autant que par nécessité et, à présent que sa regrettée soeur-épouse était de l'autre côté du voile, le guérisseur n'avait plus besoin de se mentir à lui-même et pouvait se re-concentrer sur sa priorité : sa meilleure amie, son amante, sa moitié.
La vie avait essayé de les séparer en plusieurs occasions, soit par la guerre soit par le simple cours de leur existence, mais à chaque fois les deux amants se retrouvaient, car il devrait toujours en être ainsi. Il ne s'agissait pas d'un concept stupide comme le destin ou même la volonté des Dieux, Alyrea et Lornaelon finissaient toujours par se trouver parce qu'ils étaient la meilleure partie de l'autre, parce qu'ils ne pouvaient concevoir de vivre sans l'autre, et c'était ce qui avait rendu le concept d'amitié platonique impossible.


Elle était le feu et il était l'eau, c'était ce que beaucoup de jeunes mages lançaient lorsqu'ils croisaient les deux amants ensemble. Peut-être était-ce vrai. Peut-être que Lornaelon était suffisamment posé pour accepter le tempérament de feu et les piques de cette beauté, mais il serait stupide de penser que le Haeron était un homme trop calme pour être capable de se mettre en colère. Sa rage n'était pas bruyante et brûlante, elle était froide et silencieuse mais rares étaient les personnes capables de voir les mécanismes de son esprit tourner, lorsqu'il s'atelait à ourdir sa vengeance. Il était un salopard de vicieux et un sadique quand l'envie lui prenait mais,avec le temps, il avait bien compris qu'il n'y avait que l'énergie de la belle Alyrea qui pouvait égaler la sienne. Aurait-il briser ses vœux, et rejoint la couche d'une autre, la nuit de ses noces, si cela avait été n'importe qui d'autre que la Lyseon ? Ils connaissaient tous deux la réponse et s'amusaient d'en jouer, encore aujourd'hui, plusieurs années après.

Le guérisseur ne put s'empêcher de sourire, lorsque son amie amena le souvenir d'une précédente orgie où, une fois encore, leurs petits talents leur permirent de se jouer de leur monde. Il se rappelait de cette pyromancienne qui suintait de vice par tous les pores de sa peau. Elle avait cru qu'elle pourrait plier le Haeron à sa volonté, qu'elle pourrait le briser et en faire son jouet, ou simplement en tirer le meilleur juste le temps d'une orgie, mais elle s'était laissé trop aveugler par son orgueil pour pouvoir voir la vérité en face.
Les jeunes mages pensaient tous qu 'ils allaient renouveler le concept du jeu érotique grâce à l'usage de leur magie mais, en vérité, les deux amants présents ici avaient perfectionné ces petits jeux depuis bien trop longtemps, pour que quiconque autre qu'eux soit à la hauteur.

« Mais cela aurait été bien moins amusant et stimulant, pour moi comme pour toi. C'est toujours plaisant de les laisser se bercer d'illusions, ne crois-tu pas ? »

En public elle était sévère quand lui était froid, indifférent même. C'était le masque public qu'ils avaient décidé de porter et qui leur allait si bien, comme une seconde peau, mais à chaque fois que Lornaelon voyait la belle sourire, il se satisfait de savoir qu'il le seul capable de passer au-travers de ces défenses, et la toucher dans ce qu'elle avait de plus honnête et franc. Elle ne souriait pas parce qu'elle le devait, mais parce que le sujet l'amusait honnêtement et c'était un moment assez rare pour que le guérisseur saute dessus, en répondant sur un ton volontairement léger :

« Pas la meilleure nuit de ma vie, mais elle était...assez agréable. Reste à voir si tu peux faire mieux. »

N'était-ce pas là leur force, de pouvoir se stimuler volontairement, afin de faire monter l'envie et le vice jusqu'à des sommets inégalés ? Certes ils n'étaient plus les jouets de leur passion depuiis bien longtemps, le temps leur avait amené patience et sagesse mais de temps en temps, plus souvent qu'ils ne pouvaient l'admettre, c'était agréable de pouvoir s'abandonner à l'autre, le temps d'une nuit ou bien plus encore. Ils n'avaient jamais raté une occasion de le faire, car le temps ne saurait jamais diminuer le plaisir qu'ils ressentaient l'un pour l'autre et, de toute évidence, cette soirée semblait prendre la même direction.
Ils échangèrent un autre baiser tout aussi passionné et, lorsque le guérisseur sentit la Toile s'agiter autour de lui, lorsqu'il sentit la Lyseon s'affairer dans son dos, il ne put que laisser un sourire carnassier venir se dessiner sur son visage, alors qu'il sentait leurs deux esprits se connecter, avec un intensité familière. C'était un de leurs tours qu'ils maîtrisaient depuis bien longtemps, leur permettant de ressentir le plaisir de l'autre ce qui ne faisait que décupler l'intensité du moment, au final, mais c'était un tour qui faisait partie intégrante de leur petite danse des sens.

La plupart des amants rêvaient de pouvoir se comprendre, de pouvoir deviner ce que l'autre avait en tête, mais les deux mages étaient passés de la rêverie à la réalité depuis bien longtemps. Comment espérer pouvoir cacher quelque chose à l'autre, lorsqu'ils avaient littéralement été dans la tête de leur moitié ? Ainsi, le roué ne fut guère surpris lorsque la belle l'invita à le suivre jusqu'à l'arrière de sa chambre, alors qu'elle plongeait dans des souvenirs partagés pour raviver cette flamme et stimuler son amant plus qu'il ne l'était déjà.
Ces images étaient le reflet de leurs vies passées, de leur évolution aussi bien commun qu'individuelle mais, surtout, elle était le reflet d'un désir et d'une attirance partagés, que ni le temps ni la distance n'avaient pu mettre à mal. Il n'y avait pas un moment de la journée ou du soir où Lornaelon ne désirait pas Alyrea. Elle était belle, intouchable, désirable et il avait le privilège de pouvoir faire tomber ses barrières, au creux du silence et de la nuit. Ils ne comptaient plus les lieux où ils s'étaient unis et, en revoyant les images passer dans sa tête, sentant son corps s'éveiller à l'évocation de ce souvenir  des plus intenses, Lornaelon profita d'un simple contact physique avec son amant pour lui répondre :

« Nous sommes deux à pouvoir jouer à ce petit jeu, rappelle-toi. »

Elle avait toujours été capable de passer au-delà de son masque de froideur et faire fondre ses barrière avec son caractère de feu. Après plus de deux décennies partagées elle savait à quel endroit appuyer pour le faire réagir mais, fort heureusement, l'inverse était tout aussi vrai. Ainsi, si elle pouvait user de ses runes pour unir leurs deux esprits, Lornaelon n'eut besoin que d'un contact pour appeler la Toile à lui et, silencieusement, refermer son emprise sur ce corps qu'il désirait entièrement. Il pouvait guérir ce qui était brisé, il pouvait briser ce qui ne souhaitait l'être et, avec la belle, il avait appris à la stimuler, à lui faire perdre la tête sans avoir besoin de la toucher : ce fut ce à quoi il s’attela, stimulant ce corps aussi finalement et subtilement qu'il savait le faire, en étant conscient que ces sens partagés allaient le troubler, lui aussi.
Ils ne faisaient que jouer pour le moment, se tourner autour, s'exciter mutuellement, mais c'était plus tard que le brasier prendrait toute son ampleur. Prenant les rennes de la danse pour un moment, plongeant dans un souvenir délicieusement précis, le guérisseur poussa la belle contre le mur le plus proche, posant un regard sur cette longue robe qui lui barrait le passage, avant de lui sourire et d'ajouter :

« Te souviens-tu de notre dernière soirée, à Meereen ? »

Évidemment qu'elle s'en souvenir car, à l'idée de devoir retourner à Valyria et à leurs petits secrets, ils s'étaient abandonnés à l'autre, atteignant des sommets de plaisant rarement égalés en deux décennies. Il se revoyait là, la belle poussée contre le mur dans son plus simple appareil, sentant son amant s'affairer un peu plus bas dans le seul but de lui faire la tête.
Un sourire amusé sur son visage, le guérisseur déposa un baiser brûlant dans le cou de la belle, puis traça un chemin de feu jusqu'à descendre plus bas, toujours plus bas. Bien sûr qu'il allait devoir se débarrasser de cette fichue robe ou de la remonter un instant, mais ce n'était qu'un petit obstacle face à son objectif réel. Elle allait devoir rester debout quand lui s'affairerait à la stimuler, la provoquer, la goûter, l'exciter jusqu'à ce qu'elle soit sur le point de perdre la tête. C'était ainsi que commençait leur petit jeu.

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Magical fireft Lornaelon

Collège des Mages, 1066, dernière semaine du mois 8

« Tant que ces illusions ne deviennent pas notre réalité … Et qu’un jour, nous ayons une réalité qui ne soit pas un monceau d’illusions … »

L’espace de quelques instants, Alyrea abandonna le masque du sarcasme, de la colère et de la méchanceté gratuite – mais néanmoins satisfaisante – pour laisser entrevoir la sincérité de sa peur. Elle craignait de perdre Lornaelon, à cause d’Aemon ou de la famille du mage, elle avait toujours prié pour que rien ne vienne à les séparer réellement, entretenant l’espoir secret d’avoir un autre destin que ces rencontres secrètes. Dans vingt, trente ans, que resterait-il de tout cela ? Est-ce qu’ils continueraient, jusqu’à la mort, à se cacher, ou bien la faiblesse des corps aurait-elle raison de leur affection, pour ne laisser subsister qu’une tendre amitié, qu’à leurs morts, d’aucuns s’empresseraient de travestir en une simple relation platonique, de celles qui durent toute une vie et ne menacent personne. La vérité sur ce qu’ils éprouvaient serait balayée, son souvenir ne vivrait plus que dans la mémoire de quelques amis très proches qui avaient passé l’âge d’être dupes, et jamais dans son entièreté. Aucune descendance ne viendrait rappeler à Valyria qu’ils s’étaient aimés, passionnément, follement, profondément. Condamnés par des règles qui avaient fait leur puissance, les deux mages n’auraient pas cette reconnaissance sociale de leur passion, ne pourraient se prévaloir d’une famille en commun, qui aurait les yeux de l’un et les cheveux de l’autre. Longtemps, la Lyseon s’en était voulu pour rêver à cela. Elle qui avait éprouvé un réel mépris pour les chimères de sa sœur, et n’avait pas réussi durant toute sa jeunesse à comprendre ce que ses pairs trouvaient dans la perspective du mariage promis avec un frère ou un cousin, se rendait compte de la vanité l’ayant étreinte. Elle n’était pas supérieure : les dieux lui avaient joué un tour pendable en ne poussant son cœur qu’envers un étranger à sa famille. Elle ne désirait ni sa protection, ni ses compliments, encore moins son soutien. La mage avait toujours mis un point d’honneur à être indépendante, et rien n’aurait changé cela. Mais elle l’admettait, elle aurait voulu pouvoir être honnête avec leurs proches, tout simplement, ne pas devoir imaginer tous ces stratagèmes pour cacher la réalité de sa vie, et, finalement, être capable de mener une existence normale, au grand jour. Ils étaient deux mages puissants, issus de deux grandes familles … leur union aurait été un événement politique, ils auraient pu fonder une lignée brillante. Et, oui, même si elle répugnait à l’accepter, l’idée de fonder une famille ne lui paraissait qu’acceptable à ses côtés, aussi peu maternelle qu’elle soit. Elle pouvait vivre sans, n’avait pas l’impression qu’il lui manquât quelque chose pour se réaliser en tant que femme, et l’idée de vieillir avec Lornaelon était ce qu’elle désirait par-dessus tout. Néanmoins, il était évident que la pensée lui avait traversé l’esprit. Comme beaucoup, elle restait dans les limbes de ces visions qui n’étaient ni des regrets, ni des satisfecits. Juste des illusions de ce qu’aurait pu être sa vie, si elle était née dans une famille différente, une région différente, avec un nom différent. Cela ne l’empêchait pas, vainement, d’espérer qu’il en soit autrement. Qu’au moins, un jour, ils puissent afficher leur liaison. Elle se moquait, à son âge, que cette dernière soit sanctionnée par les dieux. S’ils avaient l’œil sur Valyria, ils étaient au courant depuis longtemps, surtout Meleys. Mais avoir l’assurance qu’ils ne seraient pas séparés, entretenir une sorte de secret ouvert comme ceux qui entouraient les préférences de certains nobles … rien que cela, oui, ce serait déjà un don précieux. Alors, forte de ces convictions, elle ne répondit pas sur le même ton au défi de son amant. A la place, elle plongea ses yeux dans ceux du guérisseur, et avec une honnêteté farouche, répliqua :

« Tu sais que je ne reculerai devant rien pour te faire mien, et pour le marquer au fer rouge sur ta peau, et que ma rune te rappelle, à chaque fois que tu en étreins une autre, à quel point tes nuits sont fades sans moi, parce qu’aucune autre ne peut relever ton défi. »

Et tandis qu’un baiser les unissait, Alyrea souffla entre leurs lèvres entrouvertes :

« Seulement moi. »

L’un contre l’autre, réprimant à grand peine les frissonnements de désir qui couraient sur leurs peaux électriques, tant les images envoyées étaient aussi excitantes pour lui que pour elle, la mage se prit à revivre leur relation, alternant tendresse et fascination brûlante. Son esprit s’arrêta sur un souvenir en particulier, sachant qu’il plaisait toujours particulièrement à Lornaelon. Un sourire lui vint quand il annonça que lui aussi pouvait faire usage de la Toile pour la mettre à l’épreuve, ce qu’elle attendait évidemment avec empressement. Le principe de son sortilège n’était pas uniquement dans le partage de souvenirs ou de pensées anciennes, mais dans le partage de tout ce qu’elle ressentait, plaisir compris. Il y avait quelque chose de merveilleusement érotique à confier sans pudeur les sensations qui la prenaient tandis que la magie parcourait son corps, irradiait ses nerfs dans les endroits les plus intimes et déclenchaient une vague de plaisir au niveau des chairs les plus tendres. Sans la toucher, Lornaelon était capable d’offrir les sensations les plus exquises, qu’aucun amant ou amante ne pourrait égaler. Et, sans le toucher ou le verbaliser, elle pouvait déverser en lui, dans son esprit, la jouissance qu’il offrait. En un sens, cette acmée qu’il lui offrait lui était rendu, et ils partageaient ce qu’il créait. Peut-être était-ce pour cela, aussi, que la plupart des étreintes lui étaient si fades. Elle n’utilisait cette rune qu’avec le Haeron – ou presque, mais sinon, cela lui demandait plus de temps et d’énergie puisqu’elle compartimentait son esprit afin que rien ne filtre de ses pensées et souvenirs le concernant – et cette manière d’aimer, psychiquement et physiquement, créait une osmose à nulle autre pareille. Il voyait à travers ses yeux la manière dont elle le voyait, présentement, alors qu’il embrassait son cou, sa clavicule, qu’il descendait à ses pieds. Pour autant, au-delà de l’aspect purement charnel, il pouvait voir dans ses yeux la lueur sincère de profonde affection, comme l’amour d’une rare pureté, d’une merveilleuse intensité, qui irradiait de sa psychée. Par leur lien mental, il ressentait son désir mêlé à son inaltérable passion, intacte comme au premier jour, et s’y décelait cette chaleur si particulière qu’on nommait tendresse, qui les enveloppait dans un cocon rien qu’à eux. Il aurait été faux de penser que ces trois éléments si dissemblables en apparence ne puissent pas s’entremêler au même moment. Meleys était la déesse de l’amour, charnel comme sentimental, et de tout ce qui y était associé, de l’éruptive ardeur comme de la plus douce adoration.

Tandis qu’il l’envahissait de ses attentions, elle posa une main sur sa tête et traça entre les mèches de cheveux noirs une nouvelle rune, qu’elle avait confectionné avec Lornaelon, profitant de son expertise pour créer une combinaison qui, pour utile qu’elle soit dans un autre contexte, avait ici une vocation bien précise. Doucement, la magie s’engouffra dans la pièce, et il fallut toute la force de la volonté de l’expérimenté mage pour ne pas lâcher les filaments de son sort. C’était peut-être aussi ce qui rendait l’usage de la magie dans de telles circonstances si excitante : au-delà de l’aspect purement récréatif, il y avait aussi quelque chose de particulièrement exaltant à braver ainsi les règles les plus élémentaires de prudence. C’était un défi à sa maîtrise, des éléments comme de son propre esprit. Tous les mages vivaient avec le risque, et ceux qui l’embrassaient y laissaient une partie de leur raison, mais accédaient en contrepartie à des horizons si vastes, si fous … Tellement fous. Mais tant qu’elle pouvait être folle avec Lornaelon, pour Lornaelon, de Lornaelon, le reste n’avait pas d’importance. A présent, ce dernier devait sentir la Toile l’envelopper, et ses sens s’exacerber. Au départ, l’idée avait été d’améliorer les réactions de soldats ou de personnes missionnées par Valyria. Ils avaient depuis découvert quelques applications supplémentaires. Son goût était à présent décuplé, pour des sensations à nulle autre pareille compte tenu de sa position. Son toucher était d’une sensibilité peu commune, à tel point que chaque inflexion sur la peau pouvait déclencher un frissonnant. Son odorat avait désormais une finesse d’un véritable limier, et les phéromones déclenchées naturellement par la flagrance du plaisir augmentaient naturellement. Sa vue, perçante, se gorgeait du moindre mouvement. Bien entendu, les parties sensibles étaient soumises à cette sensibilité extrasensorielle exacerbée qui, combinée à leur lien mental, ne pouvait qu’offrir une expérience unique au mage.

Elle-même sentait le plaisir l’envahir, et ne le cachait nullement. Quand elle relâcha sa magie, ce fut pour s’abandonner entièrement à la myriade de sensations qui l’envahissait, et il lui fallut prendre une profonde respiration pour éclaircir sa voix et répondre :

« J’en ai un souvenir … vivace. Notamment de ta … sensibilité, sous mes doigts. »

Lentement, lesdits doigts massèrent son cuir chevelu, avant de descendre en traçant le haut de son visage, pour arriver à la partie sensible à l’arrière du cou. On avait tort de réduire les zones érogènes à quelques emplacements bien définis, surtout chez les hommes. D’autres parties du corps pouvaient procurer un frisson tout à fait délicieux, et, il est vrai, facilité par la magie de la rune qui pulsait à travers la Toile. Le bout de ses doigts commença à le masser, et dans cet équilibre précaire, elle le poussait vers le secret dévoilé de ses jupons voilés, répliquant les électrochocs qui fusaient à la pointe de ses terminaisons nerveuses.

« Je crois que personne, dans le palais, n’a pu douter de la réalité de notre couple. »


Constat drôle. Constat amer aussi, compte tenu du double sens de la phrase. Parce qu’ils étaient un couple, illégitime mais couple tout de même, qu’ils avaient dû faire semblant d’en jouer un, et qu’in fine, la parodie avait eu la douceur de la vérité.

Il n’était pas mauvais, parfois, que les illusions deviennent la réalité. Même si le retour à la matérialité des faits était douce-amère, comme l’intégralité de leurs sentiments. Leur restait la passion, et leurs cœurs qui battaient à l’unisson.


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Magical fire
Lornaelon & Alyrea




Avec le temps, les deux mages avaient maîtrisé leur capacité à tromper leur monde, jusqu'à élever cet exercice au rang d'art et ils n'en étaient pas peur fier. Elles avaient été nombreuses les fois où leur secret, où leur affection mutuelle aurait pu être découverte mais ils n'étaient pas novices en la matière. Ils n'étaient plus de jeunes mages, rougissants à la perspective d'échanger quelques baisers dans l'intimité de la bibliothèque, tendus et excités par la peur de se faire prendre. Leur jeu était à présent parfaitement rôdé, comme une machine savamment huilée mais cela ne rendait pas l'exercice plus facile pour autant, pour l'un comme pour l'autre, à l'image de la peur qui passa sur le visage de la Lyseon.
Ils avaient eu milles opportunités d'abandonner cet amour impossible et se consoler en s'abandonnant à une autre union, en se résignant et acceptant leur sort car ils savaient que cette union était anormale pour cette société. Ils n'étaient plus des enfants, ils n'étaient plus assez naïfs pour croire aux contes de fées et, malgré tout, conscient que cette relation ne serait guère accueillie à bras ouverts, ils avaient continué à entretenir cette flamme, au fil des années. Certes ils n'étaient plus dans leur prime jeunesse, la question de la succession se posait mais, alors que Lornaelon posait son regard sur le livre ouvert qu'était Alyrea, il réalisait à quel point cette question était facile face à la présence de sa délicieuse muse, dans sa vie.

Alors oui ils maîtrisaient à la perfection le jeu des apparences, se drapant d'un voile de certitude et d'arrogance lorsque la situation l'exigeait, mais la Lyseon voyait en lui comme le Haeron pouvait lire en elle, avec une simplicité étonnante et née de décennies de complicité.Ils avaient milles raisons d'avoir peur, en se demandant s'ils devraient continuer à  vivre dans le secret, en se demandant si un jour cette union pourrait être acceptée par leurs deux familles, si la flamme de leur passion continuait de brûler ou s'ils finiraient par se séparés, remplis de remords et de regrets. Ils n'avaient pas choisi la plus facile des voies, de toute évidence, mais était-ce vraiment nouveau ? La victoire ne souriait-elle pas plus brillamment à ceux qui avaient choisi le plus ardu des chemins ? Ainsi, voyant le doute et la peur traverser le visage de sa belle, Lornaelon se pencha sur cette dernière, posant une main sur sa joue avant de la caresser de son pouce, tout en la rassurant d'un :

« Notre réalité est ce que nous en faisons. Je ne veux pas vivre dans le mensonge et le secret, pas plus que toi. J'en ai assez. »

Cette dernière phrase aurait pu être prise pour un aveu de lassitude et d'abandon, pour quiconque ne connaissait pas le Haeron, mais Alyrea n'était pas de ces personnes-là. En croisant le regard perçant et bleuté de son amant, de son amour défendu, elle pourrait y voir une détermination renouvelée et silencieuse, alors qu'il ne la quittait pas du regard, pendant ce qui lui semblait être une éternité. Il avait laissé les choses se faire pendant trop longtemps mais, avec le temps, le mage avait compris que s'il voulait quelque chose il allait devoir s'en emparer lui-même. Il avait laissé cet objectif de côté durant ses études mais, à présent qu'il touchait du bout des doigts le sixième cerclé, il pouvait enfin s'autoriser le droit de penser à lui, à elle, à eux. Il ne voulait plus attendre, il ne voulait plus se cacher et, assurément, elle non plus. Alors oui, après cette nuit partagée, Lornaelon se mettrait en marche pour amener le changement dont les deux amants avaient finalement besoin : il était temps de lever le voile.
Il avait connu beaucoup de femmes durant ses jeunes années, durant les fêtes et célébrations en faveur des Dieux et d'événements bien particuliers. Il en avait connu beaucoup mais, assurément, aucune d'entre eux n'avait jamais su le mettre à nu d'un seul regard, comme Alyrea Lyseon parvenait à le faire. Certains pouvaient dire qu'elle était le feu et qu'il était l'eau, chacun parvenant à canaliser l'autre à sa façon, mais c'était bien plus que cela. Le feu de Valyria brûlait dans leurs âmes jumelles et, même si Lornaelon s'était essayé dans les bras d'autres, aucune femme autre que la Lyseon n'était parvenu à canaliser ce brasier qui brûlait dans sa cage thoracique. Ainsi, lorsque Alyrea se pencha vers lui pour lui rappeler l'évidence, pour lui rappeler qu'aucune autre femme ne pourrait lui donner ce qu'elle lui faisait ressentir, par sa simple présence ou un simple baiser échangé, le Haeron avoua alors, dans un souffle :

« Tu es à moi et je suis à toi. Depuis et pour toujours. Tu peux t'abandonner dans les bras d'autres, t'essayer à leurs étreintes, mais chacun te rappellera qu'aucun autre homme ne peut supporter la chaleur du brasier qui brûle en toi. Aucun autre homme ne peut te faire perdre la perdre, comme tu le désires. »

C'était une vérité teintée d'arrogance, certes, mais qui n'en restait pas moins entièrement vraie. Lors de célébrations, notamment, ils avaient pu tester l'étreinte d'autres pour finalement revenir dans les bras si familiers, car l'intensité de leurs échanges était sans commune mesure. Pourquoi diable Lornaelon aurait-il quitté le lit conjugal, le soir de la nuit de noces, pour rejoindre la Lyseon, si ce n'était pas pour goûter à nouveau au plus sous sa forme la plus pure et déroutante ? Dans un baiser, une fois leurs lèvres à nouveau réunies, le mage plongea son regard bleuté dans celui de sa compagnie de toujours.

« Personne d'autre que moi.  »

Aucune femme n'était semblable à Alyrea. Aucune n'avait son tempérament, ses convictions, son esprit vif et son humour piquant. Aucune ne pouvait se vanter de connaître le Haeron aussi clairement et intimement qu'elle. Aucune ne pouvait dire qu'elle avait su pousser le guérisseur jusque dans ses derniers retranchements, qu'elle avait su le rendre absolument totalement vulnérable à son contact, comme la Lyseon pouvait le faire. Oh certes, l'usage de la magie devait être maîtrisé et cantonné à des domaines bien précis, ce qui rendait l'usage de ces runes et de sa propre magie contre-nature, en cet instant, mais depuis quand laissaient-ils les barrières et règles les arrêter ? Il se fichait de ce qu'on pourrait dire de lui, dans son dos ou face à lui, du moment qu'il pouvait s'abandonner à la folie, dans les bras de celle qui possédait déjà son corps, son âme et son cœur. Toutes les femmes de Valyria pouvaient bien être emportées par la maladie, devant, Lornaelon continuerait à ne désirer que Alyrea et Alyrea seulement.
Bien sûr qu'il sentait la rune être tracée et, en un instant, il ressentit le changement arriver. Son goût, son odeur et surtout...par les Dieux, elle était réellement en train de lui faire perdre la tête, avec la même intensité que toutes les autres nuits, comme si le temps n'avait aucune incidence, si bien que le mage eut à prendre quelques secondes pour reprendre son souffle, tout en répondant :

« Comme de la tienne...sous ma langue. »

Ils avaient toujours été habiles pour connaître les faiblesses de l'autre, pour savoir ce qui pouvait bien faire craquer leur amant, si bien que le mage s'abandonna à l'intense frisson qui le paralysa, alors que les savants doigts de son amante vinrent caresser sa nuque, avec expertise et envie. Décidément, malgré la résolution dont il pouvait faire preuve, il y avait une limite à ce qu'il pouvait endurer...surtout lorsqu'il s'agissait d'elle. Puisque, lorsque la belle mentionna leur séjour loin de Valyria et le rôle qu'ils jouaient, se souvenant du couple très convainquant qu'ils formaient, une pique de frustration vint se ficher à l'arrière du crâne du jeune homme, lui rappelant qu'il avait été contraint de quitter son pays pour qu'elle soit réellement sienne, sans avoir à se cacher. Déterminé à ne plus attendre, à prendre en main le glorieux chemin commun qu'ils méritaient d'emprunter, Lornaelon se releva, souriant à cette désirable créature, en lui soufflant avec envie et amusement :

« Tu peux voir, en cette soirée, un prélude à ce que sera notre nuit de noces. Sois rassurée, je ne me faufilerait pas au milieu de la nuit, pour aller en trouver une autre. »

Sera et non pas serait, le choix du mot était important car, dans l'esprit du Haeron, cette idée n'était pas une illusion mais bien une réalité, qui tardait simplement à se montrer. Face à elle, quelques courts centimètres les séparant l'un de l'autre, par l'intermédiaire de la rune Lornaelon pouvait sentir le souffle et l'envie de la belle, couplée à la sienne d'une intensité équivalente. Ils adoraient jouer, se tourner autour, user de leurs petits tours pour épicer leurs soirées, avant de s'abandonner l'un à l'autre et ce temps-là allait bientôt venir, ce soir. Amenant lentement la belle près de sa couche, sans jamais la quitter du regard un seul instant, un sourire satisfait venant illuminer la fin insatiable qui s'emparait de lui, Lornaelon se débarrassa du mince vêtement qui masquait le haut de son corps, conscient que le bas ne tarderait pas à suivre.
S'avançant vers la belle, une main douce posée sur sa joue, il déposa un chaud baiser au creux de son cou, avant que renouveler l'union brûlant de leurs lèvres. Là, au sein de cette tempête de désir qui faisait rage, un sourire toujours sur les lèvres, il vont à demander – sur un ton volontairement cérémoniel – à celle qui possédait déjà son cœur :

« Alyrea Lyseon. Me ferez-vous l'honneur d'être mienne, ce soir ? De t'abandonner à moi, aveuglément et complètement ? »


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