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Naerys Arlaeron
Naerys Arlaeron
Dame-Dragon

fool me once shame on you fool me twice shame on me
Naerys & Herya

Prison en Valyria & An 1067, mois 2

La robe l'observait de l'autre côté de la pièce, la robe était devenue un fantôme de ce qu'elle avait cru naïvement être le plus beau jour de sa vie. L'argent avait laissé sa place au sang ; le sien, celui de son père. Elle n'avait pas laissé une seule larme couler, avant son agression ou même après. Elle n'avait rien laisser transparaître alors que le monde s'était affolé autour d'elle pensant qu'elle avait peut-être été grandement touchée par la lame du traître. Quand elle avait vu la lame s'élever contre elle, sa seule pensée avait été pour Laedor qui se retrouverait seul si elle mourait. Elle avait pensé à tous les moments qu'ils n'avaient pas encore vécus, à toutes les choses qu'elle n'avait pas encore pu voir. La lame avait tranché un peu de la chair de son bras, mais elle n'avait pas pleuré. Elle avait voulu rester digne comme son père lui avait appris alors qu'elle était plus jeune. Aujourd'hui, il n'était plus là et pourtant, il hantait chaque pensée et chaque couloir de la maison des Arlaeron. Ses mains effleurèrent le tissu ensanglanté du bout des doigts et elle ferma les yeux en sentant les larmes s'accumuler derrière ses paupières. Elle inspira et expira profondément avant de les réouvrir. Combien de temps cela allait-il durer ? Cette douleur, qui lui déchirait la poitrine semblait incurable, une maladie qui la rongeait silencieusement ; le deuil.

Cela faisait des semaines qu'elle ne dormait plus vraiment. À chaque fois qu'elle fermait les yeux, elle voyait le regard vide de son père l'observer fixement, elle voyait le marbre se teindre de rouge, la lame finir le travail en lui transperçant le cœur. À chaque fois qu'elle fermait les yeux le soir, elle entendait les cris de douleur des gens dehors, pouvait sentir l'odeur des feux que l'on allumait, pouvait de nouveau sentir la panique paralysant ses membres. Elle ne disait pas à Laedor qu'elle s'endormait chaque soir avec un couteau à proximité de peur qu'on ne la tue, qu'elle ne dormait que deux ou trois heures par nuit. Il était lui aussi tourmenté et elle n'avait pas envie d'ajouter du poids à son fardeau. Elle n'était même pas sûre de pouvoir lui expliquer ce qu'elle ressentait sans fondre en larmes. Elle aurait voulu jeter cette robe et tout ce qu'elle représentait, mais en la simple pensée de la jeter ou la brûler lui donnait l'impression d'abandonner son père, de laisser partir la dernière partie de lui. C'était irrationnel, elle le savait, mais comment pouvait-elle jeter celle-ci alors que c'était dans ce vêtement qu'elle l'avait tenu une dernière fois dans ses bras, que c'était dans cette robe qu'elle l'avait vu sourire pour la dernière fois et elle avait peur de l'oublier ; son sourire ou le son de sa voix.

Elle sortit alors de sa chambre et avec un homme de confiance s'engagea dans les rues pour aller à la prison. À chaque pas, elle pouvait sentir les regards sur elle, les chuchotis sur son passage. Le menton haut et le regard froid, elle continua de marcher. Elle ne donnerait pas l'impression d'être une bête de foire ou pire, une victime. Elle était une Arlaeron et les Arlaeron ne baissaient jamais le regard. Elle n'adressa pas une parole au Jurée d'Argent qui lui servait de protecteur, le mot la faisait désormais rire, elle n'avait plus confiance en eux même si elle devait faire semblant que si. Ces dernières semaines, la seule chose qui la faisait tenir tenait en un seul mot ; la vengeance. Elle jouerait sa partition à la perfection pour découvrir qui se cachait derrière tout ça et elle ferait en sorte que Valyria se souvienne du traitement que sa famille donnait aux traîtres et aux meurtriers. La colère bouillonnante l'empêchait de tomber de fatigue et lorsque les cauchemars lui interdisaient le sommeil, elle passait en revue les probables coupables de l'assassinat de son père, elle pensait à la stratégie à adopter, elle pensait aux procès qui s'ouvriraient prochainement. Elle ne croirait plus aveuglément en la fidélité des gens autour d'eux. Une chose à la fois cependant, aujourd'hui, elle devait s'occuper d'Herya.

Elle croisa le regard surpris des geôliers qui semblaient surpris qu'elle daigne voir celle qu'on accusait d'avoir participé à l'assassinat de son père ou peut-être parce qu'ils pensaient qu'elle était une petite chose éplorée qui n'aurait pas la force de voir la possible traîtresse. Un des geôliers ouvrit la porte et elle le suivit à l'intérieur de la cellule. Elle leva la tête et étudia la cellule des yeux lentement avant que ses yeux ne tombent sur Herya elle-même. Elle l'observa de haut en bas silencieusement, les deux femmes se faisant face comme des miroirs opposés l'une de l'autre. Naerys n'avait jamais pris le temps de bien observer Herya, elle était un rappel douloureux de l'histoire qu'elle avait partagé avec Laedor. Elle ne savait pas à quoi elle s'était attendue à ressentir en la voyant, mais sûrement pas le vide et la colère qui commençait à monter en elle. Elle s'approcha de la jeune femme tout en laissant une distance respectable entre elles deux.

« Passons nous de platitudes vaines que nous ne pensons pas une seule seconde.» Dit-elle en faisant un geste de la main pour qu'on les laisse seules « Je suis venue ici pour t'offrir une chance ; raconte moi tout, prouve moi que tu n'as rien à voir avec l'assassinat de mon père et je t'apporterais mon soutien, tu sortiras d'ici avec une mauvaise réputation mais tu sortiras.»

Elle ne rajouta pas les conséquences de l'inverse, la menace était implicite.

Herya Valgaris
Herya Valgaris
Mage

fool me once shame on you fool me twice shame on meNaerys & Herya

Prison en Valyria & An 1067, mois 2

La solitude. C'était le mot qui, à lui seul, pouvait faire s'effondrer n'importe qui. Personne ne devrait un jour avoir à souffrir de l'isolement et de l'abandon de ses proches. Personne ne devrait non plus avoir à payer pour les méfaits des autres. Pourtant, en ce jour, Herya Valgaris, mage et fille de tisserands, se retrouvait emprisonnée pour un crime qu'elle n'avait pas commis. Son seul crime était d'avoir cherché un peu de réconfort dans les bras d'un homme, lorsque celui à qui elle avait offert son coeur l'ignorait. Dans le silence de sa cellule, Herya avait eu le temps de ressasser chaque petit détail de sa vie, chaque petites choses qui auraient pu la rendre un peu heureuse. Mais rien n'y faisait.

Assise sur sa couche, le dos contre le mur humide du cachot, son regard se perdit. Elle vit d'abord Vahaerion, Visenyx et Galaedar. Ils étaient sa seule famille, la seule qui lui donnait encore du baume au coeur, la seule qui l'aimait. Pourtant, elle voyait dans leur regard la déception. Leur seule et unique soeur les avait trahis, elle leur avait menti et avait vécu dans le secret. Herya les voyait alors se détourner d'elle. Ils s'en allèrent, sans même se retourner. Après tout, elle n'était plus leur soeur. Les larmes coulèrent le long de ses joues, et un hurlement sembla s'échapper entre ses lèvres. Mais aucun son n'en sortit. Vint ensuite le tour de Laedor. Il était celui pour lequel elle était tombée. Ses étreintes lui rappelèrent un souvenir doux et amer à la fois. Sa vie était détruite, pour lui. Lui qui vouait un amour aveugle à sa soeur. Lui qui ne vivait que par le prestige de sa famille. Lui qui ne lui était pas venu en aide alors qu'elle sombrait. Le visage du fils Arlaeron se dessina sous ses yeux, et il se feignit d'un rictus moqueur. Puis il s'évapora. Et enfin, Yraenar.

Son coeur se serra dans une douleur indescriptible. Son ventre se tordit, et sa gorge se noua cruellement. Ses larmes restèrent bloquées. Elle huma son odeur, senti la douceur de sa peau et ses cheveux sous ses doigts. Elle entendit son coeur battre dans sa poitrine, puis son rire. Elle aurait tout donné pour l'entendre rire encore un peu. Elle aurait tout donné également pour passer de nouveau ses mains sur son visage, pour l'embrasser tendrement. Alors, à mesure que ses souvenirs semblèrent se mêler à la réalité, elle prit conscience qu'une chose s'était brisée. Il avait trahi sa confiance. Son seul et unique amour avait décidé de l'envoyer lui-même en pâture aux loups. De sa patte, il avait signé son arrêt de mort. De son attitude, il avait rompu le pacte marital qui les liait. Alors, Herya pleura. Elle pleura encore plus encore face à sa misérable situation. Parce que c'était le terme : elle était misérable. Depuis le début, elle n'avait été qu'une erreur. Née d'un inceste stupide, elle avait survécu à une épreuve du feu ridicule, pour finalement finir mage de bas étage avant de voir son fiancé et seul amour la pousser en prison. Herya Valgaris semblait vivre une scène tragi-comique qui se répétait sans cesse et dont le dénouement ne faisait pas partie du scénario. Et elle était le dindon de la farce.
A force de pleurer, elle s'était effondrée d'épuisement.

Si l'on dit souvent que la nuit porte conseil, celle de la Valgaris était un cauchemar de plus. Elle rêvait sans cesse qu'elle se jetait dans les flots, et qu'elle se laissait porter par les profondeurs de l'océan. Elle imagina son dernier souffle comme la délivrance qu'elle méritait depuis trop longtemps déjà. Parfois, la mage imagina le poison qui venait doucement l'emporter sous un ciel étoilé. La même nuit, elle imagina plusieurs fins différentes. Même la plus violente lui sembla bien agréable comparé à ce qu'elle vivait. Depuis que le scandale entre Laedor et elle avait éclaté, elle avait eu envie de mourir, plusieurs fois. Après tout, cela lui sembla être la meilleure des solutions, mais également la plus digne de toutes. Mais voilà, désormais elle était enfermée pour une durée indéterminée, pour quelque chose qu'elle n'avait jamais perpétré.

Lorsqu'elle fut jetée en prison la veille, elle se résigna et abandonna toute tentative de rébellion. On l'interrogea plusieurs fois. Elle répondit la même chose, plusieurs fois également, sans jamais changer d'intonation et montrant toujours la même preuve : "je ne suis pas responsable de la mort de Lucerys Arlaeron. Je n'ai fait que suivre ses directives". A chaque fois que l'on prononçait le nom d'Yreanar, son coeur souffrait. A chaque fois que l'on prononçait le nom de Laedor, son esprit s'embrumait. Tout était allé si vite.

Elle fut tirée soudainement de ses cauchemars par des bruits de verrous que l'on fait sauter. Quelqu'un approchait et on mentionna son nom. Alors la mage se leva, passa une main dans ses cheveux pour les remettre en place tandis que l'autre main vint défroisser sa robe - toujours celle portée le soir du rêve. Puis face à elle se dressa Naerys Arlaeron. Jusqu'où les dieux iraient-ils dans leur punition ? Lui envoyer la femme de son amant, et la fille de l'homme assassiné par sa faut. Herya l'observa. Naerys était un pur produit de la noblesse valyrienne. Une peau pâle, des cheveux de la blondeur des blés, et des yeux bleus océan. Elle avait aussi la posture d'une jeune femme bien élevée selon des préceptes que seule une caste telle que la sienne pouvait enseigner. Rien à voir avec la Valgaris aux yeux verts et aux cheveux aussi sombres qu'un corbeau. Pourtant, elles se firent face et la mage ne pu oublier l'ordre jeté aux gardes le soir du massacre : « Trouvez Herya et arrêtez-là pour la questionner sur sa participation à cet assassinat. ».

Les yeux dans les yeux, Herya lui répondit sèchement.

- "Je ne crois pas que tes prérogatives s'étendent jusqu'à la justice valyrienne. Les preuves de mon innocence ont déjà été remises auprès des autorités compétentes. Dont tu ne fais, il me semble, pas partie." - Sa mâchoire se crispa. - "C'est ton père lui-même qui a demandé à ce que je lui remette le coffre le soir de votre mariage. Je n'avais aucunement le rang ni le devoir de le faire. J'y ai été obligée. La lettre signée du cachet des Arlaeron se trouve avec les autres preuves, il te suffira de la demander."

Elle se tourna et se mit dos à Naerys. Regardant la flamme de la bougie qui lui servait de seule source de lumière dans le cachot, elle poursuivit son dialogue.

- "Concernant ma réputation, je m'en sortirai seule. Comme toujours. Je n'ai pas l'opportunisme de bénéficier d'un nom empli de gloire pour laver les ignominies qui me sont attribuées, mais nous, marchands et gens du peuple, avons toujours su passer au-dessus de cela." - elle tourna la tête vers la visiteuse - "Quant à ma relation avec ton frère, ou devrais-je dire désormais, ton époux, sache que si tu avais eu un tant soit peu de confiance en lui, tu n'aurais jamais douté de tout l'amour qu'il te porte."


Naerys Arlaeron
Naerys Arlaeron
Dame-Dragon

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Naerys & Herya

Prison en Valyria & An 1067, mois 2

Comme c'était facile de la faire passer pour la petite princesse privilégiée qu'elle était. Pourtant, Naerys avait l'impression d'être plus que ce à quoi les gens la réduisait souvent ; en cette caricature de petite fille noble riche qui ne se préoccupe que des robes et des garçons alors que les gens du peuple ont des craintes plus fondées que les siennes. Naerys n'a jamais remis en cause le fait qu'elle avait eu une enfant privilégiée dans Valyria, elle en avait toujours eu conscience. Comme elle avait toujours eu conscience que l'éducation donnée par son père était singulière pour une dame du Sud parce qu'on enseignait aux femmes du Sud à tenir une maison, à satisfaire leur mari, à se taire souvent. Son père avait tenu à ce qu'elle ait cette éducation, mais il lui enseignait aussi la géographie, les mathématiques, l'Histoire, l'avait autorisé à lire autant de livres qu'elle voulait, à l'interroger sur ses décisions et à ne pas être d'accord avec lui. Elle se souvenait de ces soirées passées à jouer à des jeux de logiques et aux débats qui en découlait, elle se souvenait de son sourire à la lueur de la bougie. Par bien des manières, Lucerys avait été plus moderne que la plupart des gens autour de lui. Elle sentit sa gorge se nouer face aux souvenirs qui continuaient de la hanter, à chaque fois qu'elle fermait les yeux, elle voyait les yeux vides de son père la fixant et à chaque fois qu'elle les rouvrait, elle se souvenait à quel point il lui manquait à ces temps troubles, à quel point les dieux avaient été cruels.

« Non tu as raison mais je peux témoigner, dire que je t'ai vu conspirer ou payer des gens qui témoigneront dans ce sens. Je ne fais pas partie de la justice valyrienne mais dans sa société, Herya Valgaris, j'en suis la reine.» Elle s'approcha un peu plus de la jeune femme et rajouta d'une voix ferme « Si tu veux me peindre comme la méchante de l'histoire, fait-le mais je te crois bien plus intelligente que cela et par bien des manières, Herya Valgaris, nous nous ressemblons.»

Oui, la ressemblance n'était peut-être pas visible au premier coup d'oeil, mais elle pouvait la voir ; elles étaient des femmes trop intelligentes pour le monde qui les entourent, des femmes ambitieuses et qui essaie de s'élever dans un monde qui ne veut pas de femmes comme elles. Oui, elles se ressemblaient en cet aspect même si Naerys se pensait légèrement supérieure à la mage en face d'elle. Contrairement à ce que la mage pensait, Naerys estimait la justice, elle l'estimait même beaucoup et pouvait reconnaître qu'elle avait peut-être été vite en accusant Herya du meurtre de son père, mais qui pourrait croire le contraire. Contrairement à ce qu'Herya pensait, Naerys détestait l'injustice surtout une injustice qui ne lui servait pas à quelque chose.

« Dit-moi ce que je devais croire en cet instant alors que la femme qui avait toutes les raisons de détester ma famille et d'organiser ce meurtre par jalousie ou par amertume d'être forcé de déposer ce cadeau humiliant vient vers mon père et qu'un garde prend l'arbalète qui s'y cache comme un pièce de théâtre savamment orchestré. Dit-moi, grande et vertueuse Herya, qu'est-ce que tu aurais pensé à ma place ?»

Ses yeux semblaient hurler à Herya ces paroles alors qu'elle les avaient dites d'un ton froid ou presque sournois. Herya qui se pensait si humble, Herya qui se pensait plus vertueuse que n'importe qui et se comportait en martyre. Ce n'était pas Herya qui avait perdu l'une des personnes les plus importantes de sa vie, ce n'était pas Herya qui avait failli être tuée par un membre de sa garde. Herya n'avait pas dû supporter la vue de son père s'effondrer sur le sol de marbre et se vider de son sang dans ses bras, Herya n'avait pas vu son corps devenu de plus en plus froid dans ses bras alors qu'elle lui chuchotait de rester en vie pour elle, alors qu'elle priait les dieux de ne pas lui prendre l'homme qui l'avait vu grandir, qui l'avait réconforté quand sa mère était morte de la même manière, celui qui lui avait tout appris. Non, elle n'avait pas vu ça et pourtant, elle se comportait en victime ici alors qu'elle, qu'est-ce qu'elle aurait fait à sa place ? Elle avait envie de le lui lancer à la figure ; qu'est-ce qu'elle aurait fait si l'un des hommes les plus importants de sa vie avait été assassiné par sa rivale qui avait toutes les raisons de le tuer ? Aurait-elle été si raisonnable si cela avait été le cas ?

À la mention de Laedor, elle eut presque l'impression que sa façade qu'elle construisait depuis le meurtre de son père allait craquer mais après une brève inspiration, elle boucha les troues et continua de regarder Herya avec seulement une pointe d'énervement perceptible à la surface. Elle était sûre de l'amour de Laedor, c'était d'Herya dont elle se méfiait. Elle fit un geste de la main comme pour jeter ça derrière elle et répondit simplement à son accusation :

« Je ne suis pas ici pour parler de Laedor avec toi.»

Herya Valgaris
Herya Valgaris
Mage

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Prison en Valyria & An 1067, mois 2

Cette conversation était une sorte de vaste blague pour Herya. Ni plus, ni moins. Naerys était une jeune femme en colère et déchirée par le chagrin et même si le contrôle de ses émotions était presque parfait, ses accusations et sa manière de voir les choses firent sourire la mage. Elles n'avaient pas le même âge et... cela pouvait s'en ressentir. Bien sûr, Naerys avait bénéficié d'une éducation tirée à quatre épingles et il ne fallait pas la sous-estimer.

- "Je te pensais pourtant bien plus intelligente que cela Naerys. Donne-moi une bonne raison d'assassiner ton père. Et pas celle dont tu m'affubles, "par honte". Un meurtre comme celui-ci se prépare en amont, et durant longtemps. Crois-tu que j'aurais fomenté ça à la minute ? Et donne-moi une raison qui fait que je déteste ta famille, Naerys Arlaeron !" - elle se mordit la lèvre - "Il n'y en a aucune ! AUCUNE !" - fit-elle avant de jeter au sol son godet de terre cuite qui explosa dans un fracas assourdissant.

Elle se mit dos à Naerys et regarda la mince lucarne face à elle. Dehors, la liberté. Mais aussi la honte, la défaite, la misère et une nouvelle épreuve, cette fois, plus difficile que les autres. Herya fit volte-face soudainement.

- "Mais vois-tu, maintenant je possède trois raisons. Trois très bonnes raisons de vous haïr."

Prise d'un accès de rage, la mage sentit son pouls s’accélérer et son cœur tambouriner jusque dans sa gorge et ses tempes. Ses veines gonflaient sur le haut de son front et son visage changea de couleur progressivement.

- "La première, est pour ton père. Oui, ton défunt père ! Celui qui, pour me ridiculiser devant l'intégralité de Valyria, a lui-même demandé et signé de sa main pour que je VOUS présente vos cadeaux ! D'une part il a détruit toute la crédibilité que j'avais mis des années à construire, et d'une autre part, il a fait offense à Naerya Deltheryon pour avoir choisi une famille moindre des tisserands plutôt qu'elle pour représenter notre guilde.  La seconde est pour toi. Pour avoir demandé mon arrestation publiquement, également devant l'intégralité de Valyria en envoyant tes imbéciles de pions. Et la troisième est pour ton frère. Ton frère qui était mon ami ! En dehors même de ce qui a pu nous être reproché, il était mon ami le plus précieux ! Et il ne m'a pas défendu alors qu'il savait que j'étais innocente ! " - hurla-t-elle.

Herya se jeta sur les barreaux et planta son regard droit dans les yeux de Naerys. De nervosité, elle ricana.

- "Et si. Nous allons parler de ton frère parce que la situation mérite que nous en parlions. Outre le fait qu'il ait tous failli nous faire tuer par sa bêtise et ses élans de héros raté pour essayer de se donner un peu de valeur à tes yeux et à ceux de ton père, j'avais de l'empathie et beaucoup d'affection pour lui. Parce qu'il a été un soutien sans faille quand j'en ai eu besoin. Comme j'ai été là pour le soutenir dans des moments compliqués. C'est ce qu'on appelle un ami ! Il est vrai, nous avons fauté aux yeux des Dieux, aux vôtres, et je m'en excuse. Mais sais-tu pourquoi Laedor est venu se réfugier dans mes bras Naerys ? Sais-tu pourquoi ?" - elle avala sa salive, la bouche sèche et la nausée la prenant soudainement - "Parce qu'il souffrait de ton indifférence ! Il souffrait de ton absence ! Il ne voulait que ton corps, que ton coeur, uniquement ton amour et tu ne le lui donnais pas. Il souffrait également de toujours devoir faire mieux pour ton père et surtout pour toi, parce qu'il voulait que tu le regardes avec fierté !" - elle éclata en sanglots sous l'effet de la colère - " Je donnerais tout l'or du monde pour que mon fiancé, pour que l'homme que j'aime ait autant d'amour que Laedor en a pour toi. Mais tu sais ce que j'ai à la place ? Un futur époux qui me jette en pâture aux lions puisqu'il a signé avec ton père pour que je lui remette le cadeau piégé. Et juste pour le plaisir.

Alors Naerys, oui, je plaide coupable pour la liaison que j'ai pu avoir avec ton époux. Que les Dieux m'en soient témoins, je reconnais mon erreur. En revanche, pour le meurtre de Lucerys, je refuse que l'on me traite de criminelle. J'exige au minimum des excuses pour cette accusation qui vient de détruire l'intégralité de ma vie.
"


Naerys Arlaeron
Naerys Arlaeron
Dame-Dragon

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Naerys & Herya

Prison en Valyria & An 1067, mois 2

Elle voulait arracher son sourire, le réduire en miettes parce que sa simple vue lui était insupportable. Ce sourire remplie de suffisance, certain d'avoir la meilleure parole et d'être la personne la plus sage, la moins naïve. Elle détestait quand les gens la prenaient pour une gamine qui ne comprenait rien, une gamine trop jeune qui parodiait une adulte. Tous oubliaient qu'elle était née dans un monde de requins, dans un monde sanglant. Tout le monde avait oublié que c'était elle qui avait découvert le cadavre de sa mère, que c'était elle qui se cachait dans les escaliers pour entendre les paroles des adultes, que c'était à elle que Lucerys Arlaeron se confiait et qu'elle avait été son élève la plus studieuse, Laedor préférant pourfender des monstres imaginaires dans le jardin. Si elle avait la beauté de sa mère, elle avait sans nul doute l'esprit retors de son père et surtout, elle avait vécu plus dans sa courte vie que la plupart des filles de l'aristocratie. C'était facile de passer pour la femme tête en l'air plus intéressée par la mode que par la politique, c'était facile de cacher ses traumatismes avec un sourire, ses pensées avec des rires faux. C'était Herya qui était ignorante du monde dans lequel elle s'était immiscée, elle qui ne comprenait rien des règles qui régissaient cette société. Si cela avait été le cas, elle n'aurait pas prolongé sa liaison avec Laedor, si cela avait été le cas, elle ne se serait pas montrée à son mariage comme une poupée obéissante.

« Pauvre Herya qui ne comprend toujours pas que dans MON monde, on tue par jalousie, ou par envie parce qu'on le peut tout simplement, parce qu'on en a le pouvoir et que certains en abuse détruisant des vies au passage.» Sa voix s'élevait à chaque mot, chaque phrase qui lui écorchait le coeur et l'âme « Je te le répète Herya, qu'aurais-je dû penser ? Ma mère m'a été prise par jalousie par un meurtrier de pacotille, et je te vois encore avec ce petite sourire au visage me donnant ce maudit cadeau. Qu'aurais-je du croire alors que je tenais le cadavre de mon père dans mes bras ? Qui aurais-je du pointer du doigt alors que l'arbalète venait du coffre que tu venais d'offrir ! »

Il était plus facile de l'observer quand elle était de dos, quand elle ne pouvait plus voir sa bouche dire des horreurs, quand elle ne pouvait pas imaginer le corps enlacé de Lador et d'elle au plus profond de la nuit. Néanmoins, quand elle se retourna, elle affronta son regard toujours aussi froidement alors que la rage commençait à faire bouillonner ses veines. Elle masqua sa surprise quant à la part de son père concernant l'humiliation d'Herya. Elle n'avait pas été mise au courant par celui-ci de ces faits. Les semaines avant le mariage, elle avait été tellement prise par les préparatifs qu'elle avait à peine eut le temps de voir Laedor. Son père s'était toujours tenu à l'écart des préparations étant trop occupé par les affaires du Sénat. Elle ne lui en avait jamais voulu. Sa simple évocation lui noua la gorge douloureusement, un mélange de tristesse et de colère alors qu'elle voyait en cet acte, une preuve que son père avait toujours été de son côté et qu'il avait voulu la venger d'une manière tordue certes mais il n'avait pas été aussi sourd à ses pleurs qu'elle ne l'avait pensé. Honnêtement, elle n'en avait cure qu'elle la déteste après tout, le sentiment était réciproque alors elle se contenta d'attendre qu'elle finisse sa diatribe. Cependant, à la mention de Laedor, elle crut se voir physiquement se hérisser. Laedor n'était pas un sujet dont elle voulait discuter avec la femme à la chevelure d'ébène qui avait été sa maîtresse.

Après qu'elle ait fini son petit discours, Naerys se rapprocha de la jeune femme, les yeux remplis de colère. Qui était-elle pour oser prétendre qu'elle savait mieux qu'elle les problèmes de son couple ? Qui était-elle pour prétendre savoir toute la vérité sur cette affaire et lui jouer cette parodie de médiatrice ? Elle la jaugea du regard un instant, ses yeux allant de ses pieds jusqu'à son visage tout en approchant de plus en plus comme un chat voulant attraper une souris et finit par prendre la parole, la voix plus glaciale et cassante qu'auparavant.

« Est-ce que tu t'es déjà demandé pourquoi je ne lui offrais soit-disant pas cet amour alors qu'il rentrait empesté du parfum d'une autre femme ? Est-ce quand vous étiez enlacé l'un contre l'autre, tu te demandais si sa future femme ne s'éloignait pas à cause de toi ? Est-tu venu une seule fois t'excuser auprès de moi alors que chaque nuit que vous passiez ensemble m'humiliait publiquement ? Non, Herya Velgaris se complet à être acteur du problème en prétendant n'être qu'un observateur.» Elle finit par lui dire plus bas, d'un ton plus menaçant « Par amour pour Laedor je suis là à t'entendre alors insulte encore une fois mon mari de héros raté et je ferais en sorte qu'on t'égorge dans ton sommeil.»

Pourtant alors même que la rage vibrait encore dans sa voix, alors même qu'elle aurait voulu qu'Herya continue de détester son mari pour le reste de sa vie parce que cela voulait dire qu'ils ne se reverraient plus jamais, elle ne pouvait pas faire ça à Laedor qui l'appréciait. Elle se devait d'être juste même si elle avait l'impression d'arracher un bout de son âme en le faisant. N'était-ce pas son père qui lui avait dit un jour qu'elle se devait d'être le plus juste possible, surtout avec les gens et encore plus quand on parlait de ses fautes. C'était plus facile à dire qu'à faire, Naerys se savait orgueilleuse et voir qu'on avait fait une erreur était horrible surtout pour les personnes orgueilleuses.  

« Tu peux me détester autant que tu veux, ta haine ou ton amitié n'ont aucune importance à mes yeux mais je me dois de plaider la cause de mon mari qui était face à un choix impossible ce jour-là. Il venait de perdre son père et sa femme venait de désigner sa maîtresse comme coupable. Si tu est aussi compréhensive et aussi intelligente que tu le prétend alors essaye de te mettre à sa place.» Elle finit par prendre une inspiration et dire finalement, d'un ton un peu plus chaleureux « Je ne savais pas l'implication de mon père dans ton humiliation, je m'en excuse et pour ce que ça vaut, je m'excuse aussi pour l'accusation et pour cela, ainsi que pour Laedor, je témoignerais en ta faveur auprès d'Aeganon.»

Herya Valgaris
Herya Valgaris
Mage

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Prison en Valyria & An 1067, mois 2

Herya écouta à peine ce que lui raconta Naerys. A quoi bon. Elles entretenaient à elles deux un dialogue de sourd où il n'y aurait rien de bon à prendre si ce n'est de vagues excuses. Elles se ressemblaient mais étaient également aux opposés. Elles n'avaient pas le même âge, pas le même parcours et étaient nées dans des contextes qui n'avaient rien à voir entre eux. L'une avait grandi dans l'opulence et la pression d'un nom, l'autre dans la modestie et l'invisibilité d'un nom. Aujourd'hui, la plus jeune venait de perdre son père et la plus vieille, son seul ami. Herya était prise entre deux émotions. La colère et l'empathie. Elle ne pouvait que rire des jérémiades d'une enfant aveuglée par son égo et l'amour de Laedor pour se rendre qu'Herya n'était pas la cause primaire de leur éloignement mutuel. Mais elle ne pouvait passer outre la peine qu'elle ressentait pour elle. Naerys restait une femme qui avait vu son mari en enlacer une autre et une enfant qui perdait un parent.

Elle s'approcha de nouveau d'elle ne l'entendant la menacer.

- "Très bien dame Naerys. Alors lors de la prochaine expédition, où l'égo de ton époux me coûtera la vie, tu iras annoncer à mes frères la raison de ma mort. Parce que vois-tu, ils n'ont plus que moi. Alors je ne retirerais pas mes mots. Et si tu désires me faire tuer également, je m'assurerais pour que l'on sache que tu en es la responsable."

Baelor Cellaeron l'épaulerait-elle si elle se faisait assassiner par une Arlaeron ? Aeganon Bellarys prendrait-il sa défense ? Le Collège prendrait-il des mesures ? Impossible de le savoir par avance. C'était là son seul échappatoire. Le visage de la mage se referma sur lui-même et devint sombre. Il lui fallait prendre une décision douloureuse et elle s'y était préparée longuement depuis la mort de Lucerys.

- "Désormais Naerys, je n'approcherai plus Laedor. Je ne lui adresserai plus un mot. Plus un sourire, ni même un regard. Lorsque nous serons envoyés ensemble en mission, parce que je sers tout de même ma nation et que ton époux en fait autant, je n'échangerai avec lui que de simple formalités. Je ferai une croix sur notre amitié. Je laisserai s'effacer de ma mémoire le seul véritable ami que j'ai pu posséder un jour dans ma vie d'indigente. Mon cœur ne saignera plus de le voir en peine, ma bouche se taira lorsqu'il faudra trouver les bons mots pour lui apporter mon soutien. "

Cette promesse lui tira les larmes. Elles roulèrent le long de ses joues creusées par la fatigue et vinrent s'écraser sur le sol poussiéreux de sa cellule. Herya pensa alors à Jaenera Valineon. La Valgaris sentait une peine immense en son sein et elle savait qu'il faudrait un jour ou l'autre prendre la lourde décision de faire effacer Laedor de sa mémoire. Elle devrait tout oublier, jusqu'au réconfort de sa présence. De nouveau, les larmes coulèrent. Plus fort encore.

- "En revanche, sache que cette promesse ne tient qu'à moi. Vahaerion n'en aura cure et je crois deviner que la confiance entre deux militaires est plus forte que tout et la trahison pire que la mort. Ne prends pas cela comme une menace venant de ma part. Je ne fais que te prévenir. Je dois sans doute également te remercier pour ton... aide. Alors merci. Maintenant si tu me le permets Naerys, je veux disposer de mon seul droit ici. Ma solitude."

Elle se mit dos à Naerys et vint s'asseoir sur sa couche miteuse. Pour Herya, la conversation était terminée.


Naerys Arlaeron
Naerys Arlaeron
Dame-Dragon

fool me once shame on you fool me twice shame on me
Naerys & Herya

Prison en Valyria & An 1067, mois 2

Elle observait ces larmes avec l'envie de lui enfoncer dans la gorge. Naerys avait pleuré, trop pleuré ces derniers temps pour qu'il lui en reste assez pour pleurer en face d'Herya. Elle la regardait et la seule chose qu'elle ressentait c'était un vide intense. Elle l'observait de ses yeux secs et aurait aimé ressentir un peu plus d'empathie qu'elle n'en ressentait. La vérité était qu'elle pouvait comprendre Herya, après tout elle n'était née de rien et avait voulu jouer avec le soleil avant de se rendre compte qu'il brûle et elle s'en rendait compte à présent. Néanmoins, elle avait de la peine pour elle, elle, qui venait de perdre Laedor, sans doute, serait-elle dans ce même état si elle le perdait aussi à la différence qu'elle ne se tiendrait pas autant dignement qu'elle le faisait bien qu'elle ne le dirait jamais à la femme à la chevelure d'ébène. Elle ne se mentirait pas en disant que l'entendre dire qu'elle ne reverrait jamais ne lui insufflait pas une pointe de plaisir bienvenue après tant de malheurs. Elle avait déjà tenté de lui dire une fois, par acquit de conscience, qu'elle pourrait rester amie avec son mari, elle n'allait pas réitérer l'exploit auprès d'elle.

« Je ne réitèrerais pas ce que j'ai dis plus tôt, je nous épargnerais ainsi à toutes les deux un moment de plus en notre présence commune.»

Elle la regarda une nouvelle fois, les larmes coulant toujours dans un spectacle pathétique, sa cellule petite qui inspirerait sûrement les plus grands poètes pour écrire une tragédie. Absolument répugnant. Elle pensa aux nombreux prisonniers au Palais d'Argent, à cette femme qui avait des enfants et dont le mari avait été un traître et qui avait supplié sa compassion et son pardon. Son portrait se superposa à celui d'Herya face à elle. Herya n'était en rien dans le meurtre de Lucerys, elle en aurait porté un soupçon de fierté et elle était trop intelligente pour laisser des traces aussi évidentes. Aujourd'hui, elle le voyait, mais dans le feu de l'action, quand son père se vidait de son sang dans ses bras, elle était apparue comme la coupable idéale et son inimitié n'avait pas aidé concernant la question de la culpabilité. Néanmoins, Naerys ne regrettait pas son geste, car si elle ne l'avait pas emprisonné, elle n'aurait jamais pu être sûre de l'innocence de la jeune femme (du moins en ce qui concerne le meurtre pour le reste, elle n'en dira rien). Elle soupira en l'observant, quel gâchis d'une vie qu'elle aurait pu mener en restant à sa place comme tous les mages. Elle se détourna d'elle, la laissant à sa précieuse solitude, se dirigeant vers la porte avant de se stopper.

« Je te défendrais auprès des autorités compétentes et ferais en sorte que tu sorte d'ici, Herya Valgaris, je te crois innocente. Du moins de ce crime au moins. » Elle prit la poignée de la porte entre ses mains et rajouta « Te défendre sera peut-être la seule faveur que je t'accorderais de ta vie, savoure-la, Herya Valgaris. »

Elle tourna la poignée et sortit, laissant le garde fermer à clé la cellule et ne laissant pas à la mage le temps de lui répondre. Naerys ne perdit pas de temps et étant familière du Sénat, trouva rapidement le bureau d'Aeganon qui était plongé dans une lecture qui ne semblait guère passionnante. L'homme avait toujours eu des passions étranges. Elle lui expliqua la situation et ils se mirent d'accord sur la méthode par laquelle ils défendraient Herya lors du procès.

Les choses que l'on fait par amour...


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