Le soleil brillait haut. Ses rayons frappaient ardemment Valyria, plongeant la ville dans une torpeur presque torride. Les rues étaient vides, les habitants dormaient profondément d'une sieste méritée. Pourtant, il restait quelques points noirs, haut dans le ciel. Les dragons étendaient leurs immenses ailes, couvrant parfois l'astre ardent quelques secondes. Ils jouaient, se percutaient dans des rugissements grinçants. Parfois, un couinement s'échappait de leur gorge entre deux coups de griffe mal placés. Plus rarement encore, certains courbaient l'échine face à leurs maîtres. Tous étaient vêtus bien plus chaudement que la température au sol ne l'aurait voulu.
Maegon arborait la lourde fourrure teinte aux couleurs rouges et noires de sa monture. Ses cheveux noués sous une épaisse calotte, il observait la danse des dragons alentour. Son regard acéré ne perdait pas une miette des faux combats et autres parades amoureuses. Son propre instinct s'effaçait au profit de celui de Baraxès. Il était rare que les deux chevauchent ensemble et l'immense dragon n'appréciait pas d'être sous le contrôle de son maître. Avec sa taille et sa férocité, la bête ne voulait faire qu'une bouchée des petits dragons. Les écailles noirâtres de son poitrail dansèrent sous le souffle rauque.
"Gīda ilagon Baraxes. Aōha jēda kessa māzigon. Ah... le voilà."
Le dynaste avait quant à lui repéré sa cible et se surprit à sourire. Les traques à dos de dragons étaient toujours une gigantesque blague. La chasse en perdait presque son goût... à moins de traquer un des siens. D'un coup de talon, Maegon força Baraxes à replier les ailes autour de son corps et à plonger vers le sol. Les yeux plissés par le vent, les rênes fermement serrées entre ses mains, il observa la silhouette du dragon se dessiner de plus en plus nettement. Baraxes gronda, excité par cette soudaine chasse, et prêt à percuter l'autre. Leur différence de taille était telle qu'il le bouterait hors de sa trajectoire aisément. Pourtant, Maegon resserra fortement le mors autour du cou du dragon qui hurla sa frustration tout en ouvrant ses ailes, à peine à une dizaine de mètres de l'autre. Le cavalier poursuivi et sa monture furent aussitôt recouverts d'une ombre, peu bienvenue dans le froid de l'altitude.
Aussitôt, la proie s'effaça et vira de bord sèchement. Surpris par la vivacité du dragon, Maegon faillit rater sa manœuvre et chancela sur sa selle. Seul Baraxes, habitué à chasse seul, rattrapa son erreur et accéléra en direction du dragon. Remis de ses émotions, bien qu'encore pâle, le dynaste sentit son coeur s'accélérer alors qu'il forçait sa monture à reprendre de l'altitude. Il s'en suivit une course-poursuite aussi courte qu'impressionnante. Pris en tenaille entre le sol et la taille impressionnante de Baraxes, le dragonnier s'acharna à tourner et manoeuvrer avec brio. Le dynaste devait bien avouer être surpris et admiratif devant la simplicité avec laquelle le dragon et son maître danser. Pourtant, la masse finit par l'emporter sur la vitesse - équation ô combien quantique - et Maegon poussa sa proie à atterrir. Observant le dragonnier descendre de son cheval, il ne put empêcher Baraxes de faire un dernier tour en l'air pour pousser un rugissement triomphant avant de l'écouter et se poser à son tour.
Les muscles endoloris, les jambes en souffrance, Maegon descendit. Se tenant droit, malgré son dos malmené par la chevauchée, il retira ses gants et se frictionna les cuisses. Il vint ensuite à la rencontre du dragonnier et lui le salua avec un sourire franc:
"Rhaegar Valineon." Le dynaste l'accueillit d'un hochement de la tête sec mais poli. "Ta maîtrise des airs est impressionnante. Tu tiens de ton oncle et de ta tante d'une certaine façon. Même si leur maîtrise se trouve ailleurs."