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Vahaedar Altarys
Vahaedar Altarys
Citoyen

Tu blêmis à présent
qu’a sonné l’heure
La Lumière du Peuple

Ludus Altarys, An 1067, Mois 10

Depuis des heures, les hommes s’entraînaient sous la voix haute de leur laniste. Intraitable, il répétait sans cesse les mêmes mots - le haut valyrien en semblait presque facile à apprendre ! Les corps des guerriers, tout entier, étaient en souffrance. Leurs yeux épuisés quémandaient au maître un peu de répit. L’espoir était pourtant vain. La leçon était quotidienne et c'était précisément dans cette agonie que leurs corps retenaient les mouvements. Le corps possédait une acuité formidable : alors qu’il abandonnait d’épuisement, il luttait une dernière fois. C'était précisément dans cette lutte que Vahaedar Altarys attendait ses hommes. Alors il répétait, encore et encore, les mêmes gestes. Puis, de ses deux mains, il venait les corriger comme un sculpteur donne vie à ses statues.

« Ici. L’ischion doit être détendu. Non. Grandis-toi… encore… encore ! Va chercher ces putains de dragons ! »

Il appuya son doigt dans le bas du dos alors que l’esclave grognait d'une petite douleur. Vahaedar prenait des cours de dissections avec un homme de sciences : l’ostéologie et la myologie du corps humain n’avaient aucun secret pour lui. Il avait conscience que la connaissance de l'invisible, ce qu’il y avait sous la peau, ferait de ses hommes les meilleurs.

«Là. Tu ne dois jamais bloquer. Maintenant montre moi l’enchaînement. Vous autres regardez ! C’est un observant les erreurs et les points fort de ses adversaires qu’on renforce son jeu. »

Il donna une tape fraternelle sur l’épaule de son guerrier, les efforts payaient ! Du bout de son épée de bois, il fit signe aux autres de s’assoir le long du mur. Tous étaient en nage, le sable de l’arène d’entraînement leur collait à la peau. Lui-même, en avait jusque dans la bouche et les narines. Ils étaient beaux à voir. Si il en éprouvait une joie, presque enfantine, la majorité de ses hommes avaient pourtant du mal à s’acclimater à la chaleur étouffante de la caldeira. Le climat de ces terres était drastique.

« Allez, montre-nous. »

Le guerrier, vêtu d’un simple pagne, les muscles dessinés à la perfection, recula vers le fond du manège. En silence, les bras croisés, son maître hocha la tête : qu'il commence. Il voulait voir une danse chorégraphiée à la perfection. Ces étrangers ne le savaient pas encore, mais les Valyriens étaient trop arrogants pour assister à un seul bain de sang. Il leur fallait de la palpitation, de la peur, de l’anticipation. Aussi, les spartiates du jeune esclave avaient tout intérêt à faire chanter le sable si il voulait survivre à leurs seuls yeux. L’exercice terminé, le regard épuisé du gladiateur se fixa loin derrière lui. Il souriait comme un abrutis heureux. Ce qui ne pouvait signer qu’une seule chose. Daera était là. Sa fiancée s’était rapidement faite une place à part dans ce monde masculin et brutal. Son apparition était un baume à leurs souffrances. Tous savaient qu’elle était née dans un bordel. Ils y voyaient l’assurance que leur laniste disait la vérité : si ils travaillaient, si ils persistaient, si ils gagnaient, alors la richesse aussi leur serait peut-être accordée. Appuyant ses larges mains sur ses cuisses, Vahaedar se releva. Il leur fit signe de ranger les instruments. C’était une bonne journée.

« Le masseur passera dans une heure. Mangez, dormez, nous reprendrons l’exercice demain au petit jour. » 



Disant ses mots, s’ébrouant le visage et les cheveux, il immergea ses bras dans un baquet afin d’enlever la crasse. C’est alors que, du coin de l’œil, il remarqua le visage de sa promise. Il arrêta ses gestes, aux aguets. Depuis longtemps il n’avait pas vu cette petite tension sous ses yeux, celle qui disait que quelque chose de grave s’était passé. Avalant les mètres qui les séparait, il empoigna son bras droit comme pour la soutenir. Si quelqu’un avait osé lui faire du mal, il était homme mort. La colère grondait déjà dans ses pupilles et sa mâchoire s’entrechoqua. Sans la lâcher, il la mena à ses appartements privés. 

La porte refermée, il mit ses mains autour de son visage. Le geste était mouillé et peu délicat, quoique d’une grande familiarité.

« Ñuha jorrāelagon, que se passe-t-il ? »  

Daera Melgaris
Daera Melgaris
La Lumière du Peuple

Tu blêmis à présent
qu’a sonné l’heure
La Lumière du Peuple

Ludus Altarys, An 1067, Mois 10

Depuis sa rapide ascension, elle avait retourné la question une centaine de fois. Elle devait faire attention désormais, chaque pas qu'elle ferait serait évalué de manière beaucoup plus critique et pourrait lui coûter encore plus cher que ce qu'elle avait perdu auparavant. Elle devait faire attention ; placer ses pions comme on placerait ses soldats sur un champ de bataille. Daera n'avait pas le droit à l'erreur après tout, tout le monde s'attendait à la voir échouer. Elle entendait déjà les sénateurs chuchoter que cette ascension n'était qu'un coup de chance, une manière pour les dieux de montrer aux autres à quel point on pouvait dégringoler aussi vite que l'on était monté. La peur de l'échec lui nouait l'estomac, lui retournait les entrailles à chaque fois qu'elle y pensait. Elle adorait avoir ce petit bout en plus de pouvoir, c'était comme si de l'adrénaline la parcourait à chaque fois qu'elle montait les marches du Sénat. Ses pas étaient devenus un peu plus francs et pourtant un peu plus prudent aussi. Elle avait peur de perdre aussi vite qu'elle ne l'avait trouvée cette popularité et cette importance. Elle avait peur de se perdre aussi en chemin et de ne plus incarner ce pour quoi elle s'était battue jusque-là. C'étaient ces pensées qui occupaient son esprit alors qu'elle foulait les terres sableuses qui servaient d'entraînement aux gladiateurs.

Elle préférait les appeler ainsi ; des gladiateurs, des lutteurs, des guerriers. Dans son esprit, c'était plus simple à accepter. La vérité était qu'elle détestait qu'ils soient des esclaves. Tout ce qu'elle voyait à chaque fois qu'elle posait les yeux sur eux était des chaînes, des chaînes invisibles qui les entouraient alors qu'ils étaient comme elle. Elle se reconnaissait en eux ; elle aurait pu naître esclave dans une cité lointaine ou même à Valyria, elle aurait pu être vendue à une maison de prostitué et finir comme sa mère. Ils incarnaient une alternative à une vie qu'elle préférait ne jamais connaître. Les esclaves avaient été un de ses sujets de discours quand elle était plus jeune bien qu'elle se soit faite plus discrète sur la question ces dernières années voulant amasser plus de soutiens et surtout reconnaissant une vérité qui lui brisait le cœur ; l'esclavage régnerait à Valyria pour l'éternité tant que les puissants trouveraient une utilité aux esclaves. Le constat était amer, elle avait peut-être pu changer un couvre-feu, mais elle devait reconnaître ne pas pouvoir changer un fondement même de la société Valyrienne, même si elle gagnait plus tard en influence et en pouvoir cela lui semblait tout simplement impossible. Elle détestait aussi ce qu'ils voyaient quand ils posaient les yeux sur elle ; un espoir pour qu'ils finissent comme elle. Elle détestait devenir un symbole inatteignable pour eux, un minable espoir dans une vie enchaînée. Néanmoins, elle leur adressa à tous un sourire, leur glissant, en chemin vers son fiancé, quelques mots encourageants ou les félicitant.

Elle laissa Vahaedar la mener jusqu'à ses appartements privés sans ne dire mot. Vahaedar qui lui avait appris à lire quand personne ne se serait donné la peine de le faire, Vahaedar qui était là dès ses premiers discours. Comment pourrait-elle lui annoncer sa décision ? Si elle avait un frère en ce monde, cela serait lui sans aucune hésitation. Elle lui devait tant. Elle observa cette main qui s'était posée sur son bras et se déroba, prenant quelques pas en arrière.

« Il y a peu je repensais à nos leçons, comme à l'époque j'avais même du mal à lire un conte d'enfant. Comme tu riais à chaque fois que j'écorchais un mot.» Elle osa enfin croiser son regard « Tu es mon plus précieux ami, un frère que la vie ne m'a pas donné ainsi je vais te parler sans détour ; je souhaite mettre fin à notre engagement.»
Vahaedar Altarys
Vahaedar Altarys
Citoyen

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La Lumière du Peuple

Ludus Altarys, An 1067, Mois 10

Aux premières paroles de sa belle fiancée, Vahaedar eut le même mouvement de recul — quoique le sien fut rassuré. Ainsi donc, il s’agissait de simples mœurs de femme, de celles qu’on pouvait observer une fois par lune. Il se pinça le front du bout de doigts, décidément son intimité avec Daera était quelque chose qu’il se refusait encore d’admettre.  Pourquoi avait-il soudainement eu très peur ? Pour un homme comme lui, ce fait n’était pas entendable. Néanmoins, le fait était là, elle était la seule famille qu’il n’avait jamais eue et n’aurait jamais. Cela devait bien valoir quelque chose sur ses émotions. Daera était entrée dans sa vie alors qu’elle n’était qu’une enfant des rues, un rejeton du bordel en guenilles. Alors, personne n’aurait pu deviner qu’elle atteindrait un jour les marches de Drivo… Mais lui, inexplicablement, avait tout de suite perçu quelque chose en elle. Cette sensation n’avait pas disparue, elle s’était simplement transformée avec le temps. « Tu les écorches encore. » Il avait dit ça en riant, peu amène de comprendre, ou de vouloir comprendre, les sautes d’humeur étranges et caractéristiques aux femmes. Parler mièvrement du passé, ça il ne savait pas faire ! 



Puis, elle prononça ces mots. Je souhaite mettre fin à notre engagement. Étrange sont ces moments dans la vie d’un homme, où tout bascule. Insoupçonnée, la menace de la Fortune était pourtant constamment latente. Nul n’aurait du s’étonner que le cours des choses vienne à être bouleversé ! Aussi aa première réaction fut de rire à nouveau, puis de rire un peu plus en secouant la tête. Allons donc ! Il enleva son pagne d’un geste sec, peu perturbé par cette annonce. Nu, il observa Daera en silence tenté par l’idiotie. Car de quel engagement parlait-elle — elle et lui en avait plusieurs, au-delà de leur union matrimoniale ? Il n’en fit rien, la toisant, un rictus indéchiffrable aux lèvres. Les Valyriens, du haut de leurs tours d’ogives, aimaient à dire qu’un ver demeurait ver à jamais signifiant par là que les créatures de la terre jamais n’atteignait celles du ciel. Lui avait toujours cru le contraire, persuadé qu’on pouvait s’élever dans la société même sans chevaucher une créature du feu. C’est pour ça qu’il avait aidé et soutenu la fille de la catin. Mais, désormais qu’elle possédait tout — la richesse, le siège sénatorial, la renommé, l’entrée au palais Riahenor — voilà qu’elle l’enrobait de douceurs pour mieux le dérober. Finalement, sans avoir dit un mot, il enfila enfin ses vêtements. Ils étaient de soie, l’une des meilleures, ou, surtout, des plus à la mode car elle provenait du commerce Melgaris. C’était un luxe qu’il n’appréciait pas à sa juste valeur, mais elle avait insisté. Il aurait du se douter que pour en arriver à de telles futilités, elle en arriverait là. Pour dire vrai, Daera, depuis longtemps, n’aspirait plus tout à fait à la même chose que lui. C’était compréhensible : ils ne venaient pas de la même couche de la population et n’avaient pas besoin de prouver les même choses. Pour autant, il ne s’était pas attendu à une telle décision. A réfléchir à l’irréfléchis, il ria à nouveau d’un rire franc pendant de longs instants. 



« Allons, allons, tu veux me quitter c’est ça ? Et pourquoi donc ? Un noble seigneur t’a-t-il donc fait la cour ? Baah, cela lui passera. » Voyant qu’elle ne réagissait pas, mettant sur son visage cette moue qu’il lui connaissait bien, il ajouta. « Quelle idée te trotte donc pour que tu décides de « mettre fin » à la meilleure alliance qui ne te sera jamais offerte ? » Il avait prononcé ces questions sans aucune agressivité, se montrant plutôt amusé, peu enclin à croire qu’elle puisse être réellement sincère tant la situation lui paraissait absurde.

Fatigué de sa journée, il leur servit deux grands verres de vin avant de toquer contre une petite porte dérobée pour signifier au serviteur de préparer le repas. Il avait grand faim et but de grandes gorgées pour combler le vide de son estomac. L’entraînement avait été long, mais les progrès effectués par ses hommes, le ludus tout entier, le remplissait d’un bonheur simple. C’est contre cette certitude, celle que l’avenir serait bon, à laquelle l’annonce de Daera venait se cogner. Cette certitude était si forte, inscrite dans son corps, qu’elle ne laissait rien l’ébranler.  

Daera Melgaris
Daera Melgaris
La Lumière du Peuple

Tu blêmis à présent
qu’a sonné l’heure
La Lumière du Peuple

Ludus Altarys, An 1067, Mois 10

La nervosité lui nouait l'estomac, l'enserrant d'un étau comme un serpent et pourtant elle ne laissait rien paraître ; la sénatrice restait le menton haut, les épaules droites. Elle aurait aimé que cela soit plus facile, qu'elle décide d'arrêter cet engagement avec un homme horrible tant de tempérament que physiquement, mais Vahaedar n'était pas ainsi. Vahaedar avait regardé une petite fille affamée et l'avait nourrie des lettres tout en emplissant sa tête, la façonnant sûrement sans le vouloir en une partie de la femme qu'elle était aujourd'hui. Elle aurait aimé prononcer ces mots envers un de ces Valyriens arrogants ou à un homme qu'elle portait moins dans son estime. Daera n'avait jamais aimé amoureusement l'homme qui se tenait devant elle, mais à bien des égards, il avait été le grand frère qu'elle n'avait jamais eu. Un frère qui refusait d'entendre la vérité et la résignation qui étaient pourtant bien présentes dans sa voix alors qu'elle l'observait prendre la nouvelle avec bien plus de légèreté qu'elle ne l'aurait cru. Il ne la croyait pas ou peut-être, n'osait-il pas y croire. Daera avait aimé se convaincre en venant ici qu'elle arrêtait seulement un marché ; elle en arrêtait pleins dans une journée dans son commerce, mais elle oubliait parfois que les relations humaines étaient bien plus complexes qu'un simple bout de parchemin qu'elle déchire pour arrêter un contrat. En arrêtant cet engagement envers Vahaedar, elle avait la terrible impression de se couper d'une partie de son histoire et d'arriver à un point de non-retour, car après cette conversation, leur relation changerait à jamais.

Les prochaines paroles de l'homme qui se servait de l'alcool devant elle, l'agacère pourtant pour ce qu'elles sous-entendaient. Pour Vahaedar, une femme comme elle ne piquerait jamais l'intérêt d'un homme valyrien longtemps n'est-ce pas ? Elle était assez belle pour une nuit, mais pas assez noble pour toute la vie ? La pensée si rétrograde et si blessante la frappa en plein cœur. Elle avait été effectivement autrefois amoureuse d'un Valyrien de haute naissance, un Valyrien qui avait mené ses troupes pour la soutenir lors de la Grande Marche et aujourd'hui, il était en prison dans l'attente d'un procès qui allait sûrement marquer l'histoire. Elle avait effectivement séduit sous une nuit étoilée et elle n'avait pas été choisie par celui-ci qui était toujours fiancé à un membre de sa famille comme le voulait la tradition de ce maudit pays. Daera, pourtant, ne laissa rien passer, elle avait affronté des sénateurs bien plus virulent que Vahaedar et qui surtout, était beaucoup plus subtile que l'homme en face d'elle plus habitué aux arènes de combat qu'aux arènes politiques. Elle soupira doucement en l'observant, essayant de calmer sa nervosité et son énervement naissant. Elle observa ce qu'il lui servait et n'y toucha pas se contentant de l'observer. Vahaedar devait se rendre compte du sérieux de cette situation et de ce qu'elle lui disait. Elle se mit en face de l'homme croisant ses bras sous sa poitrine en l'observant avec une expression des plus sérieuses.

« Je suis sérieuse, Vahaedar et ne me dénigre pas pour essayer de te convaincre que je dis le contraire»

Elle croisa son regard franc et rempli de sérieux voulant lui faire comprendre les mots qui sortent de sa bouche.

« Nous ne nous marierons pas, avec les récents événements je dois réfléchir à de nouveaux paramètres. Concernant l'annonce, je te laisse la faire quand tu le désireras et je continuerais de te soutenir de la même façon que je le fais maintenant mais sans promesse de mariage.»

Elle secoua la tête et s'approcha de lui, s'asseyant à côté de l'homme qui lui avait donné sa chance quand tant d'autres avaient détournés les yeux. Délicatement, elle se saisit de ses mains et plongea son regard dans le sien, essayant de dire ces prochaines paroles avec le plus de douceur possible.

« J'en suis profondément désolé, je t'aime comme le frère que je n'ai jamais eu ainsi je ferais ce que tu désires concernant l'annonce et si il faut que tu me désavoue publiquement je le ferais mais je ne veux pas perdre ton amitié.»
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