Le Deal du moment :
Cartes Pokémon : la prochaine extension ...
Voir le deal

avatar
Invité
Invité


Tout s'était enchaîné si vite...

Après des premières rencontres pleines de promesses bien que sous le signe de la suspicion Vastraya s'était permise un premier bilan plutôt positif de sa situation. Rompre la glace promettait d'être long et difficile mais les intérêts convergents des deux nations laissaient entrevoir une ouverture plutôt facile avec les Valyriens.

De toute évidence elle se trompait...

La Guivre d'Astapor releva la tête en soupirant, s'arrachant à la contemplation fiévreuses des documents qui s'entassaient sur la table pour se perdre dans les voûtes de son bureau. Bien qu'elle ait ouvert les fenêtres donnant sur l'atrium il persistait encore dans la pièce ce parfum de jasmin pourpre que Sia avait aspergé sur ses vêtements en signe de deuil. Une tradition de la maison Djedé... Elle-même avait suivi le même rituel lors du décès de son mari ce qui semblait une éternité plus tôt. L'arôme de cette fleur qui poussait le long des rivières de Ghis n'était pas désagréable mais lourdement chargé de sens. Et présentement Vastraya aurait donné n'importe quoi pour alléger une atmosphère déjà trop lourde.

Et puis il y avait eu le Triomphe...

Il y avait un mot pour décrire la situation : un désastre. Que les Valyriens soient des lourdauds arrogants qui confondaient grandeur et tapage, soit, elle le savait déjà en arrivant. Par contre elle avait clairement sous-estimé l'effet délétère de plusieurs générations consanguines sur leur cerveau. Comment œuvrer à la paix alors que Valyria venait clairement de signifier son souhait pour la guerre dans un bûcher ardent ? Elle ne regrettait pas d'avoir quitter les lieux, rester sur place à sourire aurait été plus facile mais indigne de la nation qu'elle représentait. Ils la détesteraient pour ça mais c'était un prix acceptable à payer. Ils la détestaient déjà de toute façon. Non, plus que la réaction des Valyriens c'était celle de l'Empereur qu'elle redoutait...

Vastraya baissa les yeux, revenant vers les parchemins étalés sur la table. Avec précaution elle entreprit de les ranger dans les rayonnages prévus à cet effet qui se trouvaient derrière elle. Il y avait parmi ces documents plusieurs lettre à l'intention de sa très gracieuse majesté. Elle n'en avait envoyé aucune pour l'instant à défaut de savoir sur quel pied danser. A vrai dire elle espérait beaucoup de l'invité qu'elle n'allait pas tarder à recevoir. Arraxios Maeron, est un des Cinq, lui envoyait son fils cadet pour discuter de la situation. Il était heureux qu'au moins un des membres du Conseil fasse preuve de suffisamment de clairvoyance pour s'intéresser à la situation.

Enfin le bureau était vierge à nouveau. Elle était fin prête à recevoir ce fameux émissaire. L'office de Vastraya, la décoration générale de l'ambassade en général, était très différent de ce qu'on pouvait trouver ailleurs dans la cité. Ce n'était pas le plus luxueux que pouvait offrir le Vieil Empire mais conforme à ses goûts personnels. Les murs étaient peint d'un rouge chaleureux simplement orné par une délicate mais complexe frise géométrique. Les meubles étaient de bois précieux impeccablement laqués et ciselés de motifs floraux. Ce qui pouvait surprendre était sans doute les nombreuses plantes disposées dans des pots d'or et qui donnait à la pièce des allures de serre d'intérieur. Bien que les hautes fenêtres soient ouvertes Vastraya avait fait refermer les persiennes, garantissant une certaine intimité. Un brasero brûlant dans un coin de la pièce diffusait des parfums exotiques recouvrant peu à peu le jasmin pourpre de Sia. Enfin, dans un angle de la pièce, non loin de son bureau, avait été aménagé un petit salon autour d'une table basse circulaire. Une banquette colorée et confortable invitait à s'y asseoir alors que sur la table était disposé un plateau d'argent largement garni en rafraichissements et en amuses-gueules.

C'était le Ghis qu'elle aimait. Envoûtant, exotique, tamisé. C'était le Ghis où elle se sentait confortable.

Après tout, il est peut-être encore possible de sauver les meubles...
Aerys Maerion
Aerys Maerion
Seigneur-Dragon

https://rise-of-valyria.forumactif.com/t44-aerys-maerion
 Rencontre entre cadets de grande famille
Valyria - An 1066, Mois 3
Aerys Maerion n’avait guère eu à marcher longtemps pour parvenir devant la ville qui tenait lieu d’ambassade au Vieil Empire. Dans toute la ville, les célébrations donnaient encore un air encore jamais vu à la capitale du jeune pays valyrien. Les grands bâtiments façonnés par le feu-dragon étaient parés de grandes voiles colorées qui leur donnaient l’air d’être aussi vivants que le reste de la population en liesse. Pourtant, à peine la famille Maerion avait pu se retrouver à peu près au complet dans leur castel sur les hauteurs de la ville que Père avait fait mander son cadet dans son bureau. Pour une fois, il avait pris du temps et avait exposé son problème à son cadet.

Toute respectable – et respectée – Lumière qu’il était, Arraxios Maerion n’était pas pour ainsi dire libre de ses actions. Ses quatre égaux pouvaient lui demander des comptes en permanence et, en définitive, le Sénat se prononcerait également sur ses actions. La réélection du paternel ne tarderait plus à être une question prégnante, à la fois au sein de la politique valyrienne et dans la famille. Si les Maerion gagnaient confortablement leur vie, c’était leur empire souterrain qui leur permettait de conserver cette assise spécifique à leur nom. Des plus hautes tours aux bas-fonds les plus profonds, les Maerion avaient des gens acquis à leur cause, qui leur faisaient remonter les informations nécessaires. Malgré cette puissance officieuse, Père devait respecter les institutions suprêmes et ne pouvait agir sans le consentement des autres Lumières. Pourtant, il faisait partie des politiciens les plus avisés de la République, selon Aerys en tout cas. Et s’il n’était pas étranger à l’organisation du supplice destiné à venger la Trahison de Bhorash, il en avait soigneusement mesuré les conséquences. Le départ de l’ambassadrice Amasis démontrait, si besoin en était, que le message avait bel et bien été reçu par l’empire de la Harpie ; peut-être trop, même. Soucieux de maintenir les relations diplomatiques avec Ghis, Arraxios avait donc fait le choix d’envoyer son cadet sonder la Guivre d’Astapor. Il ne s’agissait guère d’une rencontre officielle, et Aerys ne serait pas là avec l’autorité du Conseil. C’était pour cela que ce n’était pas Jaehaegaron qui s’était chargé de l’affaire ; trop connu de la société valyrienne, il aurait été immédiatement identifié par ceux qui surveillaient immanquablement la demeure de Vastraya Amasis. Après un court vol sur le dos de Myhtrax, Aerion avait rejoint le quartier noble de Valyria et laissé son dragon dans la fosse avant de rallier à pieds l’ambassade, drapé dans un foulard qui dissimulait suffisamment ses traits pour lui permettre d’entrer sans être identifié.

Dès que l’objet de sa visite fut énoncé, on le guida au travers des couloirs et des pièces jusqu’au bureau de l’ambassadrice. Il profita du trajet pour retirer l’étoffe qui dissimulait ses traits. Des murs aux couleurs chaudes, d’un ocre rassurant, rappelaient à Aerys l’intérieur de certaines petites pyramides et d’autres bâtisses qu’il avait pu visiter à Meereen après la reddition de cette dernière, marquant l’issue du siège de huit mois de la ville. Des motifs géométriques entrelacés avec complexité donnaient une espèce de profondeur hypnotique à la pièce où l’on se sentait instantanément bien, au risque de baisser sa garde. S’enroulant autour des nombreuses plantes disposées çà et là dans ce qui était sans doute une science à part entière, des volutes d’encens dans laquelle jouaient les raies de lumières de l’extérieur s’échappaient d’un brasero. Après le grand soleil tapageur de l’extérieur, la pièce semblait presque plongée dans l’obscurité et il fallut un moment pour qu’Aerys puisse y voir clair. Ce faisant, il put enfin poser les yeux sur la fameuse ambassadrice.

Vastraya Amasis était une personnalité. A tous les sens du terme. Elle comptait à Valyria par sa fonction et le fait qu’elle parlait avec la voix de l’empereur ghiscari. Il y avait autre chose. Quiconque prenait un minimum de temps pour l’observer pouvait sentir la force d’une femme qui avait su gagner la confiance de son monarque et de toute son administration impériale. Elle était forte et son regard calmement déterminé ne laissait aucun doute sur les raisons de sa présence dans la ville. La prendre à la légère – voire pire, la sous-estimer – aurait sans doute été la plus grande erreur qu’aurait fait un Valyrien, toute Lumière qu’il fût. Portant une simple tunique bleue aux motifs en fil d’or, Aerys s’inclina légèrement devant celle qui le dépassait en âge et en rang.

« Votre Excellence, je suis ravi de vous rencontrer. Soyez la bienvenue dans notre cité et dans notre République. J’espère que votre mission en ces lieux portera ses fruits. »

Pas de nom, pas de détails. Il ignorait encore qui écoutait derrière ces persiennes rabattues et si ces murs étaient suffisamment épais.
Codage par Libella sur Graphiorum
avatar
Invité
Invité


Alors que son invité était finalement introduit dans son bureau, Vastraya se redressa et esquissa un sourire engageant. Avec toute la dignité et la mesure requise elle se dirigea vers le cadet des Maerion et lui tendit la main. Enfin... Elle supposait que c'était lui. Un délicat foulard lui recouvrait le visage de cet homme qu'elle ne connaissait pas assez pour l'identifier avec certitude. Elle pouvait tout aussi bien accueillir un assassin venu venger une offense de guerre et / ou accuser les Maerion d'incident diplomatique.

Potentiellement les deux en même temps, connaissant les Valyriens...

Lorsque l'homme dévoilà enfin son visage elle ne fut pas plus avancé. Pour l'instant la Guivre joua le jeu de la confiance. Il pouvait y avoir de nombreuses raisons pour justifier de se présenter à elle masqué. Elle rendit donc son salut avec politesse. Si on exceptait les chapeaux extravagant qu'elle affectionnait cet homme la dépassait largement en taille et en stature.

"Je vous souhaite la bienvenu mon seigneur... J'attendais votre venue avec impatience. Quand au succès de mon ambassade... et bien cela ne dépend que de nous n'est-ce pas ? Mais je vous en pris, prenez-place. "

L'Ambassadrice désigna le salon aménagé dans un coin de la pièce. Elle-même pris place sur la banquette, la même que son invité.

" Un rafraîchissement peut-être ? "

Et elle accompagna sa proposition d'un large geste de la main qui épousa l'ensemble des carafes disposées sur le plateau. Pas de serviteurs en vue, l'Ambassadrice comptait bien faire honneur à son invité en le servant elle-même.

Il y avait là plusieurs crus de grands prix en provenance du Vieil Empire. Un petit assortiment minutieusement sélectionnée pour couvrir, hypothétiquement, tous les goûts possibles. Chaque alcool avait été versé dans une bouteille délicatement ciselée et les différentes couleurs jetaient des reflets dansant sur les gravures du plateau d'argent. Pour parachever l'éventail de saveurs un vin valyrien avait été glissé dans le lot, au cas où les interlocuteurs de la Guivre se montreraient chauvins...

" Prenez donc un amuse-gueule. Ils viennent d'un traiteur de la Rue des Bouchers qui m'a été recommandé. Je ne pensais pas être d'humeur à profiter des festivités mais je me suis laissé tenter malgré tout. Il est heureux qu'au moins une petite chose de bonne soit ressortie de tout ça... "

C'était un demi-mensonge. Elle appréciait effectivement les délicatesses confectionnées par ce traiteur mais elle les avait choisi pour pouvoir glisser discrètement le sujet principal de cet entretien. Comme pour encourager Aerys à se dérider elle piocha elle-même un petit toast aux crevettes. Elle ne le porta pas tout de suite à la bouche, attentive à l'attitude de son invité.

"  De qui vous cachiez-vous jeune Dragon ? De vos pairs ou de moi ? "
Aerys Maerion
Aerys Maerion
Seigneur-Dragon

https://rise-of-valyria.forumactif.com/t44-aerys-maerion

De l’empire de Ghis, Aerys ne gardait qu’une connaissance relativement fractionnée de ses pérégrinations tout au long de la guerre. Il avait franchi la frontière quelques jours après être arrivé auprès de la troisième armée, pour sa première reconnaissance au-dessus du territoire désormais ennemi. Jusqu’alors, le Vieil Empire avait toujours été perçu par Aerys comme un béhémoth endormi et lointain avec lesquels les Dragons cohabitaient. Du jour au lendemain, la puissance lointaine et potentiellement menaçante était devenue un fer de lance pointé droit sur le cœur de la civilisation valyrienne. Bhorash avait été réduite en cendres et là où s’élevait jadis une fière ville frontalière fortifiée ne subsistaient désormais plus qu’une vaste aire circulaire de désolation carbonisée. Seuls les quelques vestiges fondus des épais murs d’enceinte qui avaient protégé la cité contre trois assauts valyriens en règle proclamaient l’histoire tragique de Bhorash. Finalement, le seul moment où le jeune homme avait pu véritablement découvrir la culture ghiscarie, cela avait été à la capitulation de la grande cité de Meereen, et durant les semaines qui avaient suivi d’occupation valyrienne en attendant la fin du conflit. Il en gardait un souvenir ébahi devant tant d’opulence et d’exotisme. Revenir dans cet univers qu’il n’avait qu’effleuré dans un contexte particulier ravissait le jeune Maerion plus qu’il n’aurait voulu le concéder en public.

« Je vous souhaite la bienvenu mon seigneur... J'attendais votre venue avec impatience. Quand au succès de mon ambassade... et bien cela ne dépend que de nous n'est-ce pas ? Mais je vous en pris, prenez-place. »

Aerys s’obligea à faire abstraction de cette désagréable impression qu’il avait d’ignorer si l’ambassadrice le vouvoyait à dessein de lui manquer de respect ou si elle avait simplement considéré que s’il utilisait le vouvoiement, elle n’avait guère d’efforts à faire de ce côté-là. Ne s’en formalisant pas plus pour le moment, Aerys hocha du chef à la question quasi-rhétorique de son interlocutrice. La suivant, il s’installa dans le salon du bureau. La banquette était confortable et invitait à la détente, au repos ; à baisser sa garde, en somme. Lorsqu’elle lui proposa un rafraîchissement, son regard ne put que tomber sur la coquette collection de flacons de qualité que possédait l’ambassadrice. La plupart des couleurs ne lui disait rien, mais Aerys imaginait qu’il ne s’agissait pas de la piquette que l’on servait dans les tavernes mal famées.

«  Prenez donc un amuse-gueule. Ils viennent d'un traiteur de la Rue des Bouchers qui m'a été recommandé. Je ne pensais pas être d'humeur à profiter des festivités mais je me suis laissé tenter malgré tout. Il est heureux qu'au moins une petite chose de bonne soit ressortie de tout ça... »

Aerys sentit ses oreilles frémirent sous les paroles tantôt mielleuses, tantôt coupantes de la Ghiscarie. Il n’était pas certain de ce qu’elle voulait dire ou bien vers quoi elle souhaitait amener la conversation. Sans doute imaginait-elle qu’il se positionnerait en opposition avec l’exécution des prisonniers de marque. Sautant toutefois sur l’occasion, il attrapa un canapé au foie gras qui, il dut le reconnaître, était effectivement de grande qualité. Bien qu’il appréciât de goûter à la bonne chère, ce n’était pas la raison de sa venue en ces murs et Aerys essaya de rassembler ses esprits et son courage avant de s’adresser à l’ambassadrice : bon sang qu’elle était impressionnante. Comment une telle personne pouvait dégager autant d’aura en mangeant des crevettes ? Aerys n’était pourtant pas le dernier des pleutres, mais il y avait quelque chose de profondément intense dans le regard de la femme qui lui faisait face. Le simple fait de croiser ces yeux sombres vous donnait subitement envie de faire en sorte de ne pas la contrarier. C’était peut-être cela, la diplomatie ? Ce qui faisait d’elle une excellente diplomate, envoyée dans la tanière des dragons pour négocier des accords sur une base impossible ?

« Je constate que vous avez su vous entourer de personnes qui sont de bon conseil, Excellence. J’espère que vous continuerez ainsi : Valyria regorge de traiteurs » répondit Aerys avec un regard aussi intense que possible.

Après tout, il n’était pas le seul à pouvoir faire des sous-entendus sur certains points, ah mais.

« Puis-je vous poser une question, Excellence ? Voyant qu’il n’était pas interrompu, il continua. A quoi pensez-vous avoir assisté, lors des festivités que vous mentionnez ? Pour vous, en tant qu’individu et en tant qu’ambassadrice, qu’avez-vous perçu du Triomphe ? C’est là une préoccupation majeure de la famille Maerion, Ambassadrice.  »

Une façon déguisée de lui signifier que le Conseil des Cinq, ou qu’au moins l’un de ses membres, s’inquiétait de la façon dont avait été perçu le Triomphe. Mal, évidemment. Aerys était un jeune fou, arrogant et seriné à la grandeur et à l’opulence. Il n’avait aucune limite et sa position de fils de Lumière de Sagesse lui donnait encore plus d’ailes que d’ordinaires. Tels étaient les Valyriens, déconnectés, pour la plupart, des réalités du monde. Là où certains pouvaient y voir une désinvolture ou des actes agressifs, d’autres ne voyaient que l’expression d’une culture qui se vivait aussi intensément qu’une cérémonie religieuse. Avant de parler affaires, Aerys jugeait donc plus sage de balayer les non-dits et les rancœurs liés à cet événement.

Puis, il observa les bouteilles. Les flacons aux reflets ambrés l’inspiraient désormais. Il s’imaginait que la rencontre pouvait durer un moment et qu’un remontant ne serait pas de trop s’il était besoin de gagner quelques secondes de réflexion en faisant diversion avant de répondre à une question difficile. Il ajouta une dernière question.

« Que prendrez-vous, Excellence ? Votre choix sera le mien. »
avatar
Invité
Invité


Hmm… Que boire…  Vastraya affectionnait personnellement les vins légers macérés avec des herbes aromatiques mais de telles liqueurs étaient considérées comme des alcools de femme dans le Vieil Empire. Proposer une bière semblait bien triviale étant donné la situation, et s'il y en avait effectivement une à disposition sur le plateau l'ambassadrice n'était pas très sûr de sa température. Son regard passa d'une bouteille à une autre, méditative, profitant de ce maigre répit avant de se jeter dans la bataille. Son dévolu se porta finalement vers une liqueur de corail, un cordial plutôt corsé que l'on servait en faisant fondre des fleurs cristallisées dedans. Il y avait tout une histoire lié à cet alcool, ou comment une boisson de marin était devenu un apéritif raffiné. Mais il n'était pas l'heure pour les histoires.

"Question épineuse n'est-ce pas ?" Répondit-elle finalement en versant délicatement la liqueur dans deux verres de cristal. A l'aide d'une petite pince elle vint piocher quelques pétales givrés de rose et de violette. Elle tendit finalement les deux verres à son invité en souriant, lui laissant l'opportunité de choisir qui boirait lequel.

"Entendons-nous bien, je conçois parfaitement que le peuple de Valyria avait besoin d'exorciser cet événement traumatique. La guerre a déchiré des familles et réduit des veuves à la misère. J'ai supposé que le festival, et l'humiliation des vaincus, suffiraient à cela. Sur ce point je m'en veux de ne pas avoir su anticiper davantage le besoin de revanche et de conclusion des Valyriens."

Son regard s'assombrit l'espace d'un instant. Toute considération politique écartée la Guivre était furieuse que sa carrière d'ambassadrice en Valyria commence par un tel échec. Non pas qu'elle aurait pu faire grand-chose, il aurait été inconvenant de demander aux Lumières des comptes avant le festival et l'Empereur aurait été ulcéré qu'elle ne quitte pas la cérémonie une fois l'affront essuyé. C'était là son seul réconfort dans l'affaire : au-delà de l'affront sa Majesté validait son initiative. Mais ça ne réglait pas le problème pour autant.

"Seulement ce qui est une conclusion pour les uns est un affront pour les autres. Pour être tout à fait sincère j'ai du mal à concevoir que les Lumières n'aient pas envisager davantage la réaction de Gith. Ces prisonniers sacrifiés étaient des membres de grandes familles. La bataille politique ne se joue pas qu'au Sénat : à la Cour Impériale il y a également des détracteurs contre la paix et la diplomatie. Pensez à ces pères, ces enfants, ces conjoints qui viennent soudainement, et gratuitement, de perdre leur proche alors que la guerre est finie. De quel côté pensez-vous qu'ils vont faire pencher la balance ? Et c'est sans compter le camouflet jeté à la face de sa Majesté..."

Un sacrifice pour éponger un affront… Et qu'est-ce qui épongerait l'affront du sacrifice ?

Comme pour illustrer son propos elle soupesa délicatement de la main un petit canapé au foie gras, similaire à celui que son invité avait pris plus tôt. Ici à Valyria Vastraya pouvait essayer de faire bouger les choses, mais la Cour Impériale était loin et elle était impuissante contre les tractations politiques de ses rivaux qui venaient brusquement de croître en nombre. Son père et son parti étaient supposé la couvrir, mais ce constat d'impuissance personnel était rageant.

Trêve de ruminations, il est temps de montrer les avantages qu'il y a traiter avec nous plutôt que contre nous...

"Si Valyria avait tant besoin d'épancher son deuil dans le sang et le feu il aurait été possible de trouver un accord qui satisfasse tous les partis. Tenez... Dit-elle en levant les yeux au ciel, faisant semblant de réfléchir à une question qui était déjà dans sa tête depuis des jours. Les diplomates et officiers responsables de la Trahison de Bhorash  sont tombés en disgrâce avec la défaite de Ghis, Sa Très Gracieuse Majesté aurait trouvé savoureux de les envoyer à l'abattoir chez l'ennemi d'autrefois. Imaginez... Sur cette place, devant le peuple en liesse, les vrais coupables immolés plutôt que des agneaux sacrificiels... Et avec la bénédiction de l'Empereur en prime."

Elle laissa planer un peu léger silence pour bien laisser au cadet des Maerion le temps de se représenter la scène. Elle profita de l'occasion pour boire une première gorgée.

"Non, pour résumer... J'y ai vu un gâchi monstrueux tout autant qu'une opportunité manquée. J'ai vu la ruine de mes efforts et de la raison même de ma présence en Valyria."

Et bien qu'elle préférerait mourir plutôt que de formuler le problème en ces termes, l'Ambassadrice de Ghis s'autorisa à le penser très fort :

Comment diable rattraper la sauce de ce merdier ?
Aerys Maerion
Aerys Maerion
Seigneur-Dragon

https://rise-of-valyria.forumactif.com/t44-aerys-maerion

« Question épineuse, n’est-ce pas ? »

Le bruit d’un liquide emplissant du cristal fut le seul à répondre à cette question rhétorique. La liqueur de corail avait une couleur chaude et une texture qu’Aerys aurait caractérisée d’onctueuse, du moins de ce qu’il pouvait en voir. Il gardait le silence alors que la plénipotentiaire emplissait les deux verres finement ouvragé avant d’attraper un pot contenant des pétales de fleurs givrés. Si certains auraient été assez aveugles pour douter de l’opulence du Vieil Empire, le fait de voir un plein pot de cuivre argenté contenant l’un des condiments les plus compliqués à obtenir – et donc l’un des plus chers qui soi – aurait suffit à faire taire toute critique. Aerys n’ignorait rien du monde des puissants et de la richesse la plus excentrique. Pourtant, même sa famille pourtant largement bien dotée restreignait ses achats de pétales givrés. Tout d’abord parce que Mère n’avait jamais pu trouver de fournisseur satisfaisant. Et ensuite parce que Père avait toujours assez peu apprécié le fait qu’une amphore complète pouvait payer l’équivalent de plusieurs navires de guerre, équipage compris. Elle lui laissa le choix des verres et Aerys apprécia la démarche : il prit celui de gauche et se renfonça dans son siège, verre cristallin à la main pour écouter ce qu’avait que l’ambassadrice avait à lui dire.
« Entendons-nous bien, je conçois parfaitement que le peuple de Valyria avait besoin d'exorciser cet événement traumatique. La guerre a déchiré des familles et réduit des veuves à la misère. J'ai supposé que le festival, et l'humiliation des vaincus, suffiraient à cela. Sur ce point je m'en veux de ne pas avoir su anticiper davantage le besoin de revanche et de conclusion des Valyriens. »

Aerys n’eut guère de mal à capter l’émotion de fureur froide qui envahît alors le regard de l’ambassadrice. S’il pouvait admettre qu’il n’y avait guère de quoi se réjouir de la mort de compatriotes, il ne parvenait pas à comprendre. Malheur aux vaincus, disait l’adage. Et ces vaincus-là, ils étaient la personnification de la trahison initiale qui avait causé la guerre dans la chronologie admise par tous les Valyriens. Les livrer au feu-dragon avait été à la fois un châtiment et un honneur. Les dragons étaient les enfants des dieux, la preuve par l’exemple que les Valyriens étaient un peuple élu et supérieur. Il aurait été inconvenant d’en faire des esclaves ou de les monnayer ; n’en déplaise aux Ghiscaris. Les Valyriens n’agissaient pas simplement par pulsion sanguinaire. Du moins, Aerys le pensait tout en ignorant pas qu’il pouvait lui-même avoir des accès de violence inconsidérée.

« Seulement ce qui est une conclusion pour les uns est un affront pour les autres. Pour être tout à fait sincère j'ai du mal à concevoir que les Lumières n'aient pas envisager davantage la réaction de Gith. Ces prisonniers sacrifiés étaient des membres de grandes familles. La bataille politique ne se joue pas qu'au Sénat : à la Cour Impériale il y a également des détracteurs contre la paix et la diplomatie. Pensez à ces pères, ces enfants, ces conjoints qui viennent soudainement, et gratuitement, de perdre leur proche alors que la guerre est finie. De quel côté pensez-vous qu'ils vont faire pencher la balance ? Et c'est sans compter le camouflet jeté à la face de sa Majesté... »

Aerys avait sa réponse en tête mais se contenta de tremper ses lèvres dans la liqueur au goût exceptionnel. Il n’avait aucune envie de s’enivrer face à la représentante à Valyria de l’homme le plus puissant du monde. Laissant son regard aller à celui de son interlocutrice puis ensuite sur la table d’amuse-gueules, Aerys se pencha de nouveau pour en prendre un nouveau avant de laisser Vastraya continuer.

« Si Valyria avait tant besoin d'épancher son deuil dans le sang et le feu il aurait été possible de trouver un accord qui satisfasse tous les partis. Tenez... Les diplomates et officiers responsables de la Trahison de Bhorash  sont tombés en disgrâce avec la défaite de Ghis, Sa Très Gracieuse Majesté aurait trouvé savoureux de les envoyer à l'abattoir chez l'ennemi d'autrefois. Imaginez... Sur cette place, devant le peuple en liesse, les vrais coupables immolés plutôt que des agneaux sacrificiels... Et avec la bénédiction de l'Empereur en prime. »

Aerys arbora alors un fin sourire qu’il essayait de dissimuler. Plus l’ambassadrice parlait, moins il parvenait à s’en cacher. Il avait en tête ce qui aurait pu être un châtiment plus officiel et mieux organisé que la crémation du Triomphe. Et du point de vue d’une ambassadrice, il comprenait que cela pouvait faire sens.

« Non, pour résumer... J'y ai vu un gâchi monstrueux tout autant qu'une opportunité manquée. J'ai vu la ruine de mes efforts et de la raison même de ma présence en Valyria. »

Le sourire qu’Aerys ne parvenait guère à masquer disparût de lui-même. Voilà qui était plus ennuyant. Que Ghis ne prenne pas bien l’exécution et que sa représentante en soit perturbée passait encore, mais que celle-ci songe déjà à quitter les lieux ne pouvait guère augurer du bon pour la suite. Arraxios Maerion comptait largement sur une période de paix pour préparer sereinement sa réélection au Conseil. La conclusion du conflit était indissociable du bilan de Père et ce dernier aurait bien du mal à convaincre s’il devait bâcler sa campagne pour pouvoir superviser Valyria face à un regain de tensions avec la Harpie rivale. Plissant le nez sous la réflexion, Aerys comprit qu’il allait devoir rattraper le coup et tenter de convaincre Vastraya de donner à cet endroit une seconde chance. A son tour, il laissa passer un silence durant lequel il rassembla ses pensées.

« Vous n’avez pas une tâche aisée, Excellence. Vous arrivez tout juste dans une cité étrangère qui était voici six mois encore la cible des légions impériales. Nos peuples se détestent cordialement, même s’ils savent cohabiter et commencer ensemble. Et les dirigeants des deux pays sont désireux de montrer qu’ils sortent la tête haute de ce conflit. »

Aerys s’autorisa de siroter une nouvelle gorgée de corail. C’était véritablement un délice et il pouvait sentir le piquant délicat de la violette et l’arôme entêtant de la rose. Ce n’était pas une boisson qu’il avait l’habitude de boire ici à Valyria. En réalité, il avait largement perdu le goût et l’habitude des produits luxueux depuis le début du conflit. Bien entendu, en sa qualité de noble et fils de Lumière, il avait eu certains privilèges mais il n’avait pas nagé dans l’opulence, loin de là. Il prenait conscience de l’immensité de la tâche qui attendait Vatraya et comprenait mieux pourquoi son auguste paternel avait souhaité qu’il se présente ici.

« Je comprends votre frustration et vos griefs, et je suis certain que Arraxios Maerion partage cette compréhension. Sans quoi, je ne serais pas devant vous à et instant. Au-delà de cet aspect cathartique que vous mentionnez, le Triomphe et ses événements n’ont pas été une insulte directement dirigée contre Ghis. »

Anticipant une réaction incrédule, voire agacée, Aerys leva une main en signe d’apaisement, espérant éviter toute protestation et intervention de l’ambassadrice.

« Je sais, je sais : ce n’était pas évident à voir et cela importe peu. Ce qui compte, c’est comment cela sera perçu par l’Empereur. Cependant, ce n’est pas votre souverain qui se trouvait dans la tribune et qui vit à Valyria, c’est vous, Excellence. Il me semble donc que le rapport circonstancié que vous lui ne manquerez pas de lui adresser – si c’est n’est déjà fait – comptera pour beaucoup dans sa compréhension des faits. »

A ce point, il se doutait que l’ambassadrice commençait à voir où il en arriverait. Déposant ses coudes sur ses cuisses, Aerys se pencha vers la table pour y déposer son verre et s’exprimer clairement, ne quittant pas son interlocutrice des yeux.

« Vous êtes la voix de l’empereur à Valyria, Excellence. Si nous avons livré ces prisonniers au feu-dragon, c’était autant un avertissement qu’un honneur. Nul esclave ou prisonnier de bas-rang n’a été livré au feu-dragon. Vous n’êtes peut-être pas encore très familière avec notre culture, Excellence, et ce n’est guère surprenant puisque vous venez d’arriver et que je gage que la pratique et la théorie sont deux choses bien distinctes dans votre ligne de métier. Mon estimé père veut donc s’assurer que votre compréhension de la culture valyrienne ne vous trompe pas. Nous aurions pu effectivement négocier ces prisonniers. Mais ils appartenaient à l’armée, à des soldats vaillants qui les ont capturés. Ils ont porté le fer contre Valyria et se devaient d’être châtiés. En leur accordant la bénédiction libératrice du feu-dragon, notre élément le plus sacré, nous avons reconnu leur valeur et leur importance au sein de votre appareil impérial. Comme n’importe quel agresseur du peuple valyrien, ils méritaient la mort et y étaient promis dès l’instant où ils furent pris. Le peuple réclamait ces coupables et les enfants d’Aegarrax leur ont offerts.   »

Aerys expliquait son point de vue avec une sincérité absolue, absolument pas troublé par la banalisation de l’immolation des prisonniers enchaînés. Certains pouvaient trouver le geste abject ou stupide, mais la culture valyrienne était brutale et sophistiquée, pleine de principes et pourtant si expéditive.

« Là où vous voyez la ruine de vos efforts et de votre présence ici, je vois exactement l’inverse. L’incompréhension entre nos peuples et nos dirigeants est telle que nous sommes incapables de communiquer et de comprendre les autres. Votre empereur vous a envoyé ici pour le représenter et y défendre les intérêts de votre empire ? N’attend-t-il pas également que vous soyez celle qui sera capable de lui dresser des rapports précis de notre civilisation et de la façon dont les choses sont perçues par chez nous ?   »
Contenu sponsorisé