-28%
Le deal à ne pas rater :
Précommande : Smartphone Google Pixel 8a 5G Double Sim 128Go ...
389 € 539 €
Voir le deal

Aerys Maerion
Aerys Maerion
Seigneur-Dragon

https://rise-of-valyria.forumactif.com/t44-aerys-maerion
Sur le fil d’une lame aiguiséeRencontre avec Enoria Zahor Amai

Castel Maerion - An 1066, mois 5

La soirée était belle à Valyria. Elles étaient toutes belles, selon Aerys, mais celle-ci avait une atmosphère particulière. Le ciel était dégagé et la voûte étoilée semblait encore plus intense que d’ordinaire. Depuis son retour dans la capitale des dragons, le cadet Maerion ne se lassait pas des plaisirs qu’offrait la vie valyrienne. Il avait couru toutes les orgies de la capitale et enchaîné à un rythme effréné les fêtes et couru les tavernes au grand dam de son père qui, malgré tout ce qu’il avait à penser, continuait à surveiller son fils. S’il avait été décrété qu’Aerys prendrait davantage de responsabilités au sein du réseau Maerion, cela restait encore à démontrer. Dans les faits, Aerys rongeait son frein en attendant de prendre une part plus active dans la gloire familiale. Il essayait surtout d’occulter tout ce que le retour à Valyria avait réveillé.

Aerys était toujours éclaireur dans la troisième armée et, s’il profitait d’une permission bien méritée, il y avait fort à parier qu’il devrait bientôt retourner aux affaires militaires… A moins que son père ne lui offre quelque chose digne de retenir son intérêt. Il n’avait plus que cela. Arraxios Maerion, Lumière de Sagesse et guide des Valyriens dans ce conflit qui s’était achevé récemment, n’était pas un père facile, mais il était écouté par sa progéniture. Aerys était loyal, à outrance peut-être, mais loyal. Aussi, quand le puissant seigneur-dragon qu’était son paternel lui avait demandé de réserver sa soirée, il avait accepté sans moufter. Jaehaegaron était sans doute à une soirée où se mêlaient la plupart des grands héritiers de Valyria, et il croyait comprendre que Mère et Daenerys étaient à la présentation d’une vaste collection d’œuvres rassemblées par Vhaenyra pour célébrer la victoire. Pour tuer le temps, il s’était résolu à s’entraîner. Il travaillait son jeu de jambes et ses parades avec le maître d’armes de la maison : un ancien soldat, un homme d’expérience qui avait longtemps servi son père dans les ruelles et qui avait jadis eu la réputation d’être un sbire redouté parmi les ennemis des Maerion. Maintenant âgé, il avait été promu par Père au service exclusif de la famille et l’homme, quoiqu’encore très capable, avait accepté avec reconnaissance. En le sortant de la rue et en le recrutant à ses côtés, Arraxios avait démontré qu’il était un homme attentif aux siens et à ses gens.

« Allons Aerys, tu m’as habitué à mieux ! Montre-moi que tu n’es pas un fils d’unijambiste, avec tout le respect que je dois à ton cher père ! »

L’homme n’avait peur de rien, mais c’était cela qui plaisait à Aerys. Vêtu d’une tunique beige à liseré bleu clair, il faisait tournoyer son glaive court en contrant les différentes attaques de l’ancien tueur. Coup à droite, coup à gauche, nouveau coup à gauche, feinte au centre, attaque verticale, hop. Sans être un héros du corps à corps, Aerys se débrouillait bien et plusieurs années de conflit en avaient fait un vétéran accompli. Le maître d’arme pouvait être railleur, il n’en restait rien d’autre qu’aucune attaque n’avait franchie les défenses érigées par Aerys. Ils s’exerçaient depuis une bonne demi-heure sur l’une des vastes terrasses du Castel, avec une vue imprenable (« la meilleure », se vantaient les Maerion) sur Valyria. Assoupi dans un coin, Mythrax surveillait d’un œil entrouvert l’entraînement. Le petit dragon améthyste avait presque l’air d’un – certes imposant – chat endormi, à moitié roulé en boule, enveloppé dans sa queue, les ailes repliées comme pour le protéger. La créature connaissait suffisamment son maître pour savoir quand il s’entraînait.

« Tu te fais vieux, mon cher ! Tu attaques comme une pucelle ! Peut-être devrais-je reprendre l’initiative. »

Il attendit une confirmation de son opposant, un simple signe de tête en l’occurrence, et il débuta son attaque avec soin. Il se rappelait toutes les leçons apprises ici, et toutes les autres, mortelles, qu’il avait reçues durant la guerre. Il commença par échauffer son adversaire avec quelques attaques classiques. Un coup latéral sur sa gauche, une attaque d’estoc et un coup latéral du bas droit vers le haut gauche, sans succès, tous parés efficacement. La pique ne tarda pas à tomber.

« Eh bien jeune Aerys ! Si tu as pu abattre les fiers légionnaires de Ghis avec des attaques aussi prévisibles, je m’étonne que vous ayez mis cinq ans à revenir ! »

Aerys se mit à sourire. Touché. Il n’avait connu aucun adversaire aussi coriace qu’un légionnaire ghiscari, entraîné, équipé et soldé durant tout un service. Si l’armée valyrienne n’avait pas à démériter, aucune armée du monde n’égalait la tactique ghiscarie. Tolos et Mantarys s’en souvenaient encore. Aerys sentit un regard peser sur son épaule et il sentit Myhtrax se tendre. Il ne s’en préoccupa pas et utilisa quelques bottes élaborées et plus compliquées. Certaines provenaient directement des Ghiscaris qu’il avait combattus. Sur ces enchaînements compliqués et inattendus, le vieil homme finit par trébucher et tomba le postérieur par terre dans un éclat de rire. Haletant et transpirant, Aerys lui tendit une main pour l’aider à se relever. Ils se congratulèrent chacun pour leurs performances et le maître d’armes lui fit signe de regarder. Sur la terrasse qui surplombait la leur, Père et son invitée les observaient. Un grondement sonore résonna dans la gorge de Mytrhax qui se réveilla et redressa la tête, dévisageant la jeune femme d’un air peu sympathique. Tandis Père et cette charmante apparition descendaient l’escalier de marbre blanc qui les mènerait à hauteur d’Aerys et du maître d’armes, ces derniers profitèrent du répit pour rapidement se débarbouiller et évacuer le trop plein de transpiration.

Lorsque leurs deux visiteurs posèrent le pied sur la terrasse et qu’ils se dirigèrent vers Aerys et son compagnon, Mytrhax se planta derrière son maître et poussa un rugissement menaçant dévoilant une rangée de crocs acérés. Un cri bien plus fort, bien plus rauque, fit vrombir l’air et résonner les cœurs alors que l’énorme créature d’Arraxios survolait la terrasse dans une bourrasque digne d’un ouragan. Le grand dragon du patriarche faisait clairement signifier à son inférieur de ne pas menacer son maître : Père. Il suffit d’un simple échange de regards entre Arraxios et sa créature pour que cette dernière s’éloigne d’un battement d’ailes et disparaisse derrière un piton rocheux, sans doute pour surveiller la rencontre de loin. Les pupilles légèrement dilatées, Myhtrax restait très méfiant, ne lâchant pas la jeune princesse du regard. Il fallu qu’Aerys se tourne vers lui, lui flatte l’encolure et qu’il lui murmure quelque mystique formule en valyrien pour que le dragon se calme. Ses écailles s’agitèrent de méfiance mais il retourna se coucher dans son coin, l’air attentif à la suite. Arraxios s’avança, présentant son invitée.

« Aerys, pourrais-tu tenir cette bête et saluer dignement Son Altesse Princière Enoria ? Pardonne-lui princesse, il est difficile de tenir inactifs de jeunes gens comme vous êtes. »

Aerys connaissait vaguement Enoria pour lui avoir adressé la parole plusieurs fois durant les festivités qui avaient eu lieu à la suite du Triomphe. Il congédia son maître d’armes d’une tape sur l’épaule et s’avança vers les deux nouveaux arrivants. Il nota instantanément que l’œil de Père luisait d’une lueur particulière : il avait quelque chose en tête et Aerys nota cette information avant de s’incliner devant Enoria avec une révérence toute protocolaire. Il saisit avec délicatesse la main à la peau douce de la princesse, sans trop savoir si elle la retirerait et lui offrit un baisemain qui aurait ravi Mère si elle avait pu voir qu’il était capable d’interactions sociales dignes de son rang. Lorsqu’il releva les yeux, il plongea ses disques violets dans le regard de la native du royaume de Sarnor.

« Princesse Enoria, c’est un plaisir et un honneur que de te voir en ces murs vénérables. Sois la très bienvenue au Castel Maerion. Et pardonne-moi pour cet accueil en tenue bien pitoyable. »

Enoria Zahor Amai
Enoria Zahor Amai
Étrangère

Sur le fil d’une lame aiguiséeRencontre avec Enoria Zahor Amai

Castel Maerion - An 1066, mois 5

« Tu n’es pas concentrée ! »

Enoria relevait les yeux du bijou avec lequel ses mains s’étaient mises à jouer comme pour fuir l’immobilité. Elle n’était pas concentrée, non. Cela faisait à présent cinq moi que la jeune femme avait quitté sa terre natale pour les terres de la République valyrienne et si elle avait été préparée par sa mère au mode de vie local, elle ne s’était guère doutée que le choc serait tel. Le fait était que sa mère avait été élevée dans une famille du Nord de Valyria, et si cela avait pu sembler anecdotique à Enoria, c’était à présent un point absolument crucial. Elle qui avait été élevée dans une culture où les femmes se font guerrières, et pas seulement de manière épisodique, où les mariages servent à sceller des alliances et non à préserver le sang. Ces différences sur des points si centraux de l’identité valyrienne ne pouvaient être balayées du revers de la main.

« Arlaeron ? »
« Chef de famille Lucerys, héritier… Laedor. Très riches, très vaniteux. La première épouse du patriarche a été violée puis tuée, personne ne connait les responsables mais il est a parié que les débusquer est un des objectifs centraux de l’homme. »
« Bien. Quoi d’autre ? »
« Rien d’autre. Je ne les connais pas. Tout au plus ai-je rencontré la fille… Naerys ? Oui, Naerys. Elle ne m’a guère parlé d’autre chose que de sa toilette et du mauvais goût d’une autre demoiselle dans ses choix de partenaires. »
« Bien. Cellaeron ? »
« Combien de temps encore ? »
« Autant qu’il en faudra. »
« Je rencontre les Maerion, pas les Cellaeron, et nous avons déjà passé en revue tout ce qu’il me fallait savoir. J’y suis conviée pour un repas, je ne vais pas négocier une guerre commune contre le Vieil Empire. Ils ont invité la princesse, et pour cela, tu n’as de cesse de le rappeler, je n’ai guère besoin d’entraînement. »

Enoria se levait, repoussant la chaise d’un geste calme et maîtrisé. Une fois debout, comme une ultime provocation, elle repoussait la chaise tranquillement jusqu’à sa place originelle. L’invitation avait été communiquée le matin même, il n’était pas étrange d’être invitée à rencontrer une grande famille valyrienne, la qualité de princesse étrangère avait cet effet. Ce qui était étrange, c’était que les Maerion ne l’aient pas invitée pour une fête ou un diner grandiose, mais pour un repas en comité restreint. Leur réputation n’était plus à faire, et Enoria s’était ainsi demandé s’ils n’avaient pas déjà des soupçons sur les véritables motivations de sa venue à Valyria. Qu’à cela ne tienne, elle ne craignait pas la confrontation, et les valyriens du sud ne se méfiaient guère souvent d’une jeune fille envoyée pour être mariée sur leurs terres. C’était chose commune. Bien sûr, ce n’était pas répandu parmi les familles du Sud – préservation du sacrosaint sang pur – mais nombre de familles du Nord avaient déjà mêlé leur sang à ceux de leurs voisins étrangers. Certaines familles, les plus prestigieuses, pouvaient se targuer de mêler leur sang au sang royal des personnages les plus prestigieux des royaumes voisins. D’autres se contentaient de se servir d’un commerce florissant pour prospérer.

Le rendez-vous était important. Il n’était pas anodin d’être conviée à se rendre au Castel Maerion en plein jour et l’occasion était trop belle. Il n’y aurait là évidemment aucune tentative plus poussée de la part d’Enoria de récolter des informations, mais elle pourrait observer les lieux et se rapprocher de cette famille. Elle n’avait pas plaisanté, elle y allait en princesse, le rôle qu’elle maîtrisait sans doute le mieux.

« Princesse Enoria, c’est un plaisir de te rencontrer enfin. Sois la bienvenue au Castel Maerion ! »
« C’est un plaisir amplement partagé, Excellence. Dame Vhaenyra, je constate que les rumeurs vantant ton goût exquis pour l’art n’étaient pas à la hauteur de la réalité… »

Les échanges de politesse durèrent quelques minutes durant lesquelles Enoria se vit offrir une coupe de vin épicé et quelques biscuits. La discussion n’avait rien de très formelle, elle portait sur l’installation de la jeune femme à Valyria. Le palais dans lequel Enoria s’était installé était des plus grandioses. Un des caprices qu’elle s’était permise de faire. Après tout, puisqu’il lui fallait être princesse, il lui fallait le décor adéquat. Il ne fallut guère longtemps pour la conversation ne dérive vers le sujet de la famille, et sans même qu’elle ne comprenne comment ils en étaient arrivés là, elle se laissait conduire par Arraxios Maerion à travers les majestueuses pièces du Castel Maerion, jusqu’à la terrasse dont l’imposant escalier de marbre desservait une petite cour. En contrebas, c’était une véritable scénette qui se déroulait. Elle reconnaissait Aerys Maerion, le second fils du couple Maerion, qu’elle avait eu l’occasion de rencontrer brièvement auparavant. Le combat était inégal. Le vieil homme avait beau maîtriser son art à la perfection, les deux hommes ne menaient pas le même combat. Ils ne combattaient pas non plus avec le même objectif.

A leur côté se tenait un dragon. Sans doute aurait-elle du y être habituée, il ne se passait guère de journée sans être amené à croiser un dragon à Valyria, et sa mère n’avait jamais pu se séparer du sien, bien qu’il ne niche jamais dans le palais ou la ville environnante. Pourtant, il était une chose de voir des dragons dans le ciel, au-dessus de soi, et une toute autre chose que de voir leur masse imposante posée à quelques mètres de soi… A même le sol. D’être à portée de crocs. Sans doute aurait-ce été une expérience plus aisée pour la jeune femme si le dragon en question ne s’était pas mis en tête d’intimider la native de Sathar. Il y avait bien peu de choses capables d’effrayer la jeune femme, mais parmi celles-ci sans doute les dragons seraient-ils au premier rang. Elle eut un instant de recul, fronçant les sourcils face à une telle réaction. Qu’avait-elle donc de si menaçant pour provoquer une ire si immédiate ? Un deuxième cri sembla mettre fin aux velléités du jeune dragon, et l’intervention de son maître finit de l’apaiser. Pour l’instant.

« Aerys, pourrais-tu tenir cette bête et saluer dignement Son Altesse Princière Enoria ? Pardonne-lui princesse, il est difficile de tenir inactifs de jeunes gens comme vous êtes. »
« Qu’y a-t-il donc à pardonner ? Sans doute ne connaissez-vous guère suffisamment le tempérament des femmes de Sarnor, Excellence, nos cris n’ont rien à envier à ceux que nous venons d’entendre. »

Enoria adressait un sourire malicieux aux hommes qui l’entouraient, sincèrement amusée et légèrement soulagée d’avoir été capable de donner le change face à un accueil si… valyrien. Le jeune homme qui lui faisait face ne perdit pas un instant et s’avança vers elle. Il avait ce charme particulier des valyriens si sûrs de leur naissance et de leur valeur. Sans doute le fait de posséder une bête capable de déchiqueter un homme était-il un élément suffisamment rassurant. S’inclinant respectueusement, le jeune homme saisit la main d’Enoria d’une poigne délicate mais ferme afin de la porter à ses lèvres.

« Princesse Enoria, c’est un plaisir et un honneur que de te voir en ces murs vénérables. Sois la très bienvenue au Castel Maerion. Et pardonne-moi pour cet accueil en tenue bien pitoyable. »
« Je te remercie, Aerys. J’excuserai bien volontiers la tenue si tu promets de me rendre ma main. Si l’adage qui veut que le comportement du dragon soit à l’image de celui de son maître est vrai, je ne peux que m’inquiéter. »

Cette fois, le sourire malicieux de la jeune femme s’accompagnait d’un rire discret et rapidement réfréné.

« Son Excellence vantait tes exploits martiaux, il est vrai que ta technique et ta rapidité jouent en ta faveur… Mais… pardonne-moi ce sont les souvenirs du service militaire qui me reviennent… A force de positions défensives tu offres l’opportunité à ton adversaire de mener la danse. »

Enoria ne se l’expliquait pas, mais s’était immédiatement instauré entre elle et Aerys une atmosphère particulière. Il était coutume à Valyria de ne pas craindre les mots d’esprit et les provocations. Ce peuple aimait le feu et le défi. Aerys Maerion n’était d’ailleurs pas de ces jeunes hommes timorés et effrayés que l’on pouvait parfois rencontrer. Pourtant, sans doute n’aurait-elle pas osé s’aventurer sur un tel terrain si tôt en présence du Patriarche Maerion si elle n’avait pas senti l’invitation silencieuse du jeune homme. Les valyriens respectaient l’audace et la force. Ils les auraient donc.


Aerys Maerion
Aerys Maerion
Seigneur-Dragon

https://rise-of-valyria.forumactif.com/t44-aerys-maerion
Sur le fil d’une lame aiguiséeRencontre avec Enoria Zahor Amai

Castel Maerion - An 1066, mois 5

« Je te remercie, Aerys. J’excuserai bien volontiers la tenue si tu promets de me rendre ma main. Si l’adage qui veut que le comportement du dragon soit à l’image de celui de son maître est vrai, je ne peux que m’inquiéter. »

Aerys accueillît la pique avec une surprise réelle, d’autant plus qu’elle était lancée devant son patriarche de père qui le regardait d’un œil sévère. Il répondit avec un sourire discret, voulant éviter des effusions trop éclatantes tant que son père était là. Il ignorait pourquoi le vieux Maerion avait amené ici la princesse sans le prévenir avant. Venue d’une contrée lointaine, Enoria faisait office de curiosité et de petite perle parmi la haute-société valyrienne. Elle était dépositaire d’un bien qui n’existait pas à Valyria : un sang royal, et une couronne de princesse. Les Valyriens étaient connus pour leur appétit de la rareté et du luxe. Quoi de plus prestigieux à exhiber qu’une couronne légitimement portée ? La République l’interdisait, et donc logiquement les plus hauts cercles de la société valyrienne fantasmaient sur ces dynasties qui gardaient le pouvoir de manière héréditaire, parfois depuis des siècles. La couronne venait symboliser cette perpétuité entre les générations et l’assise que ceux qui la portaient avaient sur le peuple. Peut-être que le vieux serpent avait une idée plus précise en tête mais Aerys l’ignorait.

Pourtant, ni l’un, ni l’autre n’eut l’occasion de pouvoir vraiment répondre ou intervenir que déjà la princesse relançait. Elle s’exprimait dans un valyrien quasi parfait quoique teinté d’un accent chantant typique du royaume de Sarnor là où la langue valyrienne était plus gutturale. Cela lui donnait un air absolument charmant et Aerys devait bien avouer que la jeune femme n’était pas comme les autres qu’il fréquentait. A ce caractère tranché qu’elle laissa déjà paraître s’ajoutait une crinière noire comme la nuit, très exotique dans la noblesse valyrienne.

« Son Excellence vantait tes exploits martiaux, il est vrai que ta technique et ta rapidité jouent en ta faveur… Mais… pardonne-moi ce sont les souvenirs du service militaire qui me reviennent… A force de positions défensives tu offres l’opportunité à ton adversaire de mener la danse. »

Arraxios Maerion semblait leur lancer un regard indéfinissable. Il regardait la discussion s’amorcer entre les deux jeunes gens, comme s’il ne s’était pas attendu à cela. Aerys le surveillait du coin de l’œil mais il ne pouvait pas exclure du moment leur invitée. Mère leur avait suffisamment inculqué les valeurs d’une bonne hospitalité et il ne tenait pas à se faire sermonner comme un enfant de cinq ans. De plus, les propos de la princesse l’interpelaient. Avant qu’il ait pu répondre, Arraxios s’adressait à son fils d’un ton sec.

« Je souhaite que tu discutes avec Son Altesse : je dois m’absenter brièvement, un messager de Qoherys est arrivé il y a peu et je dois absolument voir ce qu’il me veut. La princesse Enoria est issue d’une grande famille régnant sur Sathar, elle a également été à la cour du roi de Sarnor. Princesse, si tu me pardonnes cette brève absence, je serais de retour très vite pour que nous puissions discuter plus avant des manières de rapprocher nos deux pays. »

La princesse ayant donné son assentiment muet, Arraxios la salua d’un hochement de tête qui sembla à Aerys presque familier. Son père n’était pas connu pour être un grand diplomate mais il savait ce qu’il pensait en son for intérieur. Il n’était pas roi mais il siégeait au conseil de la nouvelle puissance continentale, à la tête d’un pays dont les dragons pouvaient consumer le monde. Et il ne se laisserait pas impressionner par une jeune femme, toute fille de roi soit-elle. Un instant plus tard, le patriarche Maerion s’éloignait, laissant seuls les deux jeunes gens et un Aerys plein de doutes sur les véritables motivations de son père. Derrière, Mythrax faisait semblant de dormir. Aerys plongea ses pupilles améthyste dans celles, sombres, d’Enoria.

« J’ignorais que les personnes de ta qualité, Altesse, se salissaient les mains dans l’armée. Ainsi donc tu sais combattre ou ne s’agissait-il que d’une bravade pour impressionner la Lumière de Sagesse Arraxios ? »

La réponse ne laissait que peu de doute sur ce point. Il n’écouta que distraitement, regardant autour de lui. Il n’avait qu’une façon de vérifier si elle était honnête ou non. Sa remarque était juste d’un point de vue d’escrime mais il était curieux de savoir si elle avait véritablement des connaissances martiales ou s’il ne s’agissait que d’une bravade provenant de quelqu’un ayant l’éducation suffisante pour improviser sur ce sujet. Si Père voulait en faire un relai pour une relation commerciale florissante, il était intéressant de savoir ce qu’elle valait vraiment. Il l’invita à le suivre jusqu’à un râtelier où étaient rangées différentes armes : arcs, épées courtes, lances, et boucliers se côtoyaient dans deux matières, bois et fer. Il prit deux glaives valyriens, à la lame légèrement courbée, et présenta les deux à la princesse.

« J’ai le sentiment que tu meures d’envie à vous mesurer à un légendaire seigneur-dragon, Ton Altesse Princière. Je ne voudrais pas te blesser, alors je te laisse le choix entre le bois et les armes émoussées. Père me tuerait s’il t’arrivait le moindre hématome. Et puis… celui en fer est plus lourd, » conclua-t-il avec un sourire ravi de son insolence.

A sa différence, elle prit la décision d’une arme en fer, plus lourde certes, mais plus proche d’une véritable ; détail notamment important dans ce que cela signifiait puisqu’elle demandait plus d’expertise dans son maniement. Aerys fit le choix de s’entraîner à la valyrienne, sélectionnant uniquement une épée courte qu’il soupesa dans une main, puis dans l’autre, avant d’inviter la jeune femme à se mettre en position. D’un ton un brin moqueur, il la détailla de pied en cape avant d’ajouter :

« Je ne voudrais pas que nous abîmions une si belle apparence. Ton tailleur serait furieux après moi si j’entaillais ce beau tissu. Je te propose donc de me montrer ce que tu sais faire en quelques passes rapides. »

Il était manifeste qu’il la sous-estimait et qu’il n’imaginait pas qu’elle se battrait autrement que mal avec un tel accoutrement. Ils commencèrent à se tourner autour dans un ballet qui aurait pu sembler chorégraphié. Rapidement, avant même que le premier coup ne fût échangé, Aerys put comprendre qu’il n’avait pas une débutante face à lui. Elle ajustait en permanence la distance entre eux, fléchissait ses genoux et pivotait sur ses chevilles avec une mécanique toute meurtrière que seule une armée pouvait apprendre à ses citoyens. Restant muet, Aerys échangea un regard avec la belle étrangère. Un sourire perla à ses lèvres : oui, il était intrigué et ravi de voir la tournure que prenaient les événements.

Décidant de couper court avant qu’elle ne s’endormît, il fit une première attaque… qui se retrouva parée avec une facilité déconcertante. Il avait bâclé son attaque, ne croyant pas à la capacité de défense de la jeune femme mais il était désormais manifeste qu’elle était plus vive qu’elle n’y paraissait avec une arme en main. Il attaqua de nouveau, et encore une fois. Rien ; elle parait systématiquement, même ses coups plus élaborés. Une lueur de doute passa sur le visage du seigneur-dragon et il la laissa venir à lui. Il découvrit un style de combat fluide et très difficile à prévoir, car elle semblait incertaine de ses mouvements qui, eux, étaient manifestement conçus pour perdre l’ennemi. Il para tous les coups, et parvint à lui en rendre un en la frappant du plat de l’épée sur sa cuisse. Le métal claqua sur la robe avec un bruit mat qui fit crier la princesse. Et soudain, elle lança une attaque suivie d’une feinte impossible à esquiver et la lame émoussée vint frapper ses côtes, Aerys se ploya en deux par réflexe. Il abaissa la lame et regarda le jeune femme droit dans les yeux.

« Je dois confesser t’avoir un peu trop vite méjugée, tu es une bonne combattante malgré ton style un peu… brouillon ! En garde, je demande une revanche ! »



Enoria Zahor Amai
Enoria Zahor Amai
Étrangère

Sur le fil d’une lame aiguiséeRencontre avec Enoria Zahor Amai

Castel Maerion - An 1066, mois 5

« Je souhaite que tu discutes avec Son Altesse : je dois m’absenter brièvement, un messager de Qoherys est arrivé il y a peu et je dois absolument voir ce qu’il me veut. La princesse Enoria est issue d’une grande famille régnant sur Sathar, elle a également été à la cour du roi de Sarnor. Princesse, si tu me pardonnes cette brève absence, je serais de retour très vite pour que nous puissions discuter plus avant des manières de rapprocher nos deux pays. »

Enoria inclinait gracieusement la tête, un sourire aux lèvres, indiquant au patriarche des Maerion qu’elle serait ravie de reprendre leur conversation plus tard. Une jeune femme moins rompue aux manières du monde ou plus naïve n’aurait-elle rien vu de suspect au soudain rendez-vous du Maerion, mais s’il y avait bien une chose qu’Enoria avait perdu depuis bien longtemps c’était sa naïveté. Elle ne savait guère ce qui se tramait dans l’esprit de celui que l’on savait à la tête d’un réseau d’informateurs plus qu’étendu, mais elle doutait que cela ait un rapport avec sa propre position auprès du Haut Roi de Sarnor. Si Arraxios Maerion avait eu vent de sa mission, Enoria ne serait sans doute pas entrée au Castel Maerion. Que fallait-il comprendre de l’air perplexe qu’Enoria pensait percevoir sur les traits d’Aerys ? Si elle était intriguée, la jeune femme n’eut guère le temps de s’appesantir sur ce sujet, déjà le regard du jeune homme se refixait au sien et son sourire provoquant reprenait toute sa place sur un visage dont toute ombre s’était effacée.

« J’ignorais que les personnes de ta qualité, Altesse, se salissaient les mains dans l’armée. Ainsi donc tu sais combattre ou ne s’agissait-il que d’une bravade pour impressionner la Lumière de Sagesse Arraxios ? »
« Voilà que tu cherches à me vexer, prétends-tu dès lors qu’il me soit nécessaire d'user d'un tel subterfuge pour impressionner ? »

Si le jeune homme s’était attendu à une jeune femme aisément déstabilisée, sans doute n’avait-il pas été suffisamment attentif lors de leurs précédents, certes brefs, échanges. Qu’est-ce qui pouvait pousser une femme à se laisser malmener par l’humour provoquant d’un interlocuteur ? La timidité ; Enoria n’avait jamais eu le luxe de l’être. Le manque de confiance en soi ; si elle n’était pas des plus vaniteuses, la jeune femme ne dépendait guère du regard ou de l’assentiment des autres pour reconnaître sa valeur. L’éducation ; elle était une princesse élevée dans un royaume où les femmes combattent. Enfin, la conscience de potentielles répercussions sociales ; Enoria était dès le départ considérée comme hors de la société Valyrienne, bien que son sang soit pour moitié issu du peuple des seigneurs-dragons. Elle était issue d’un peuple et d’une culture différente, il était donc commun de regarder les extravagances des étrangers avec un œil, certes non moins empreint de jugement, mais moins réprobateur. Alors Enoria ne s’embarrassait pas de fausse modestie, de réserve feinte, elle se présentait telle qu’elle était : dans toute la splendeur d’une native du grand royaume de Sarnor. Elle ne s’était guère attendue à ce que le résultat de cette stratégie soit un accueil tout à fait enthousiaste de la part d’un peuple qui condamnait toute tentative d’indépendance de leurs femmes mais ne désiraient rien plus qu’une étrangère capable de leur résister.

« J’ai le sentiment que tu meures d’envie à vous mesurer à un légendaire seigneur-dragon, Ton Altesse Princière. Je ne voudrais pas te blesser, alors je te laisse le choix entre le bois et les armes émoussées. Père me tuerait s’il t’arrivait le moindre hématome. Et puis… celui en fer est plus lourd, »
« Oh, un légendaire seigneur-dragon doit ainsi nous rejoindre ? Moi qui pensais me battre contre toi, Aerys Maerion. »

La réponse au tac au tac aurait sans doute pu être évitée. A vrai dire, il était évident que le mentor d’Enoria l’aurait bâillonnée plutôt que la laisser malmener l’égo d’un seigneur-dragon. Il n’y avait là pas de secret à révéler que les valyriens avaient un penchant pour la fierté démesurée et une trop grande confiance en eux. Sans doute un pendant de l’oppression qu’ils exerçaient sur leurs femmes. Voilà ce que donnait une société où la majorité des personnes estiment qu’une femme n’a de place que dans les salons, la bouche fermée en un sourire, sans voix à porter autre que celle de son époux : des hommes à l’égo surdimensionné et au besoin presque instinctif de domination. Non, Enoria Zahor Amai ne retiendrait aucun de ses coups, qu’ils soient verbaux ou physiques, car son rôle n’était guère de protéger et entourer de coton la fierté du jeune homme, sa mère et ses sœurs s’en chargeaient probablement avec talent.

A la proposition d’une arme légère et de bois, Enoria se contenta de répondre par un sourire narquois, attrapant une épée courte émoussée, elle prit le temps de l’observer alors que de son côté Aerys soupesait la sienne. L’arme était de bonne facture, bien qu’évidemment laissée dans un état ne permettant pas de la rendre mortelle. La prise était légèrement inconfortable, ce n’était évidemment pas un pommeau fait à sa main, mais Enoria avait appris il y a bien longtemps que l’arme ne faisait pas le guerrier. Il la regardait, détaillant son allure avec ce qu’elle décela comme une once de supériorité. Elle en aurait ri si cela n’était pas si agaçant. Il la sous-estimait tant que tout chez lui, de sa décontraction malvenue à son sourire moqueur, motivait en Enoria l’envie dévorante de lui faire mordre la poussière. La jeune femme était lucide, elle se doutait qu’un guerrier valyrien n’aurait guère de mal à avoir le dessus sur une jeune femme dont l’arme la plus puissante était l’esprit et qui n’avait jamais été des plus douées dans le combat à l’épée. Elle n’avait, cependant, jamais cessé de s’entraîner, et l’esprit ne coupait certes pas mais il était capable de bien beaux exploits.

« Je ne voudrais pas que nous abîmions une si belle apparence. Ton tailleur serait furieux après moi si j’entaillais ce beau tissu. Je te propose donc de me montrer ce que tu sais faire en quelques passes rapides. »
« A ta place je m’inquièterais moins de l’ire de mon tailleur que de la mienne, Aerys. »

Les quelques passes étaient d’un ennui mortel. Elle ne se souvenait pas d’avoir attendu si longtemps qu’un événement se produise. Enoria fut même tentée, un instant, de feindre quelques mauvais réflexes pour inviter Aerys à corser son jeu. Le jeune homme n’attendit cependant guère longtemps avant d’attaquer. C’était amusant de constater que sa propension à la défense semblait avoir disparu depuis qu’elle l’avait pointée du doigt. Cependant ces attaques étaient trop évidentes, trop faciles à contrer. Là était l’avantage d’être sans cesse sous-estimée, les premiers coups sont toujours évidents et ridiculement accessibles. Puis, une fois la réalisation par l’adversaire de son erreur, vient la frustration, l’envie d’écraser pour démontrer au monde qu’il avait eu raison de la sous-estimer, qu’elle n’avait bénéficier que de quelques accolades de la chance lui ayant permis de résister jusqu’à présent.  

Il fallait attendre le bon moment avant de sortir de l’observation, et lorsqu’elle le fit Enoria eut le plaisir de découvrir qu’elle n’était pas si rouillée après tout. Elle ne combattait pas comme un guerrier. Elle n’enchaînait pas les techniques et n’essayait pas d’emmener son adversaire sur un terrain qui lui convenait mieux. Bien au contraire. Elle prenait le temps de comprendre son adversaire, d’explorer son terrain à lui, et elle l’y suivait avec décontraction. Elle ne voulait pas déstabiliser Aerys, elle voulait au contraire qu’il se sente plus stable et en confiance que jamais. C’était sans conteste dans le confort que l’on laissait se former les failles nous menant à notre perte. Alors, bien sûr, cela impliquait d’accepter de se faire mener par le bout du nez durant de longues minutes, et cela impliquait aussi de ne pas faire preuve d’une fierté mal placée.

Elle se débrouillait bien. Pourtant, elle laissa malgré elle son tempérament prendre le dessus et dérogea à sa règle pour la première fois depuis le début du combat. Aerys avait exploité une faille et le coup qui heurtait sa cuisse dans un bruit sourd eut raison de sa patience. La douleur était tout à fait supportable, bien qu’elle ne doute pas un instant qu’elle en garderait la trace durant quelques jours, mais c’était bien son calme qui avait été mis à mal. A présent guidée par l’envie de lui rendre la monnaie de sa pièce, Enoria se fit plus offensive, plus agressive, avec la volonté de laisser de côté pour un moment sa stratégie plus indirecte pour montrer au jeune homme qu’il ne pouvait plus se permettre de la sous-estimer. Lorsque le plat de son épée atteignait les côtes du jeune homme, avec une force cependant toute mesurée, elle parvint à lui imposer une pause. Il ne s’était pas attendu à être ainsi touché.

« Je dois confesser t’avoir un peu trop vite méjugée, tu es une bonne combattante malgré ton style un peu… brouillon ! En garde, je demande une revanche ! »

Enoria ne répondait pas, se contentant de sourire avant de reprendre sa garde et de se déplacer sur un arc de cercle autour du jeune homme qui tournait à son tour afin de ne pas lui offrir le dos ou les flancs. Ce fut à elle de jeter la première attaque, il n’eut aucun mal à la parer et attaquait immédiatement après, forçant Enoria à reculer de plusieurs pas pour échapper à un corps à corps qu’elle n’aurait pu gagner. Les coups se faisaient plus directs, plus dangereux également. D’autres auraient sans doute pris peur face à la tournure que prenaient les événements, mais Enoria n’était pas prête à céder du terrain, et il ne faisait aucun doute qu’Aerys non plus. Un nouveau coup, sur son bras à présent, sur lequel une trace rougie ressortait déjà. Quelques échanges et un nouveau coup de la part d’Aerys qui atteignait son dos. Elle n’était guère en reste, et il fallut à Aerys un réflexe inouï pour échapper à l’épée qui, à présent visait sa tête.

« Je ne voudrais pas que nous abîmions une si belle apparence. Ton Père serait furieux après moi si j’entaillais le visage de son fils. »

La reprise était belle, sans doute ferait-elle sourire Aerys. Pourtant il gagnait, elle le savait. Elle ressentait déjà largement l’engourdissement de son bras du fait du poids de l’arme choisie, et sa tenue l’entravait de tant de manières qu’elle envisagea un instant de s’en débarrasser. La pensée l’amusa un instant, au moins pourrait-elle compter sur l’effet de surprise et la distraction de son adversaire. Si elle savait d’ores et déjà qu’elle ne sortirait pas vainqueur de cet affrontement, cela aurait été mal la connaître que d’imaginer qu’elle n’y jette pas toutes ses forces avec pour seule ambition d’en sortir la tête haute.  


Aerys Maerion
Aerys Maerion
Seigneur-Dragon

https://rise-of-valyria.forumactif.com/t44-aerys-maerion
Sur le fil d’une lame aiguiséeRencontre avec Enoria Zahor Amai

Castel Maerion - An 1066, mois 5

Enoria restait silencieuse alors qu’ils reprenaient leurs assauts. Les enchaînements étaient rapides, techniques et les deux jeunes gens tournaient l’un autour de l’autre avec une fluidité qui trahissait leur expérience. Entre les lames se croisant et s’entrechoquant, Aerys pouvait voir l’expression espiègle de la princesse qui semblait plus que ravie de pouvoir le moucher. Le Maerion avait l’avantage de la musculature et d’avoir servi cinq ans dans une armée professionnelle. Le combat n’était pas équitable, et bientôt il gagna du terrain, obligeant la native de Sahar à reculer pour éviter de se retrouver enfermée dans une configuration impossible.

Aerys appréciait son escrime et sa manière de se déplacer. A la différence des Ghiscaris, qui comptaient sur lourd bouclier et une cuirasse aux multiples éléments, obligés de rester très statiques au combat, Enoria virevoltait, faisant voler les tissus nobles de sa toilette, la rendant difficile à toucher… Fallait-il y voir un signe ?

Malgré tout, il continuait à gagner du terrain. Il frappa du plat de la lame sur l’avant-bras dénudé de la jeune femme, y imprimant une marque rougissante, et ne lui laissa pas cette fois le bénéfice de la touche. Il imprima un peu plus son offensive sur la défense d’Enoria. Il sentait ses réflexes et l’exaltation guerrière revenir. Il parvint à toucher son dos, il l’entendit lâcher un cri surpris et la vit se raidir sans que cela n’interrompe le combat. Elle envoya une violente contre-attaque dont la rapidité manqua de peu de prendre Aerys par surprise. Il esquiva au dernier moment, sauvant sa tête, et reculant d’un bon, leur autorisant une pause.

« Je ne voudrais pas que nous abîmions une si belle apparence. Ton Père serait furieux après moi si j’entaillais le visage de son fils. »

Aerys baissa un bref instant sa garde, éclatant de rire. Il l’avait bien volée. Il voyait la fatigue de la jeune femme à la façon dont la poitrine – fort charmante au demeurant – d’Enoria se soulevait à intervalles rapprochés. Pourtant, elle restait droite, sa lame émoussée brandie devant elle, prête à encaisser un nouvel assaut. Aerys n’allait pas décevoir une si charmante invitée en faisant preuve de manque d’endurance. Il se remit en position de combat et commença à faire jouer son épée pour échauffer son poignet. En quelques moulinets, il se considéra de nouveau prêt et envoya une première attaque sournoise. Dans un premier temps, il crut qu’il avait percé la défense de la native du royaume de Sarnor mais un choc lui fit bientôt comprendre qu’elle l’avait esquivé et touché. Il trébucha et manqua de s’étaler de tout son long, emporté par son élan mais il recouvra son équilibre et se retourna aussitôt pour parer une série d’attaque rapide. La jeune femme se battait comme une lionne. Et lui, en bon dragon, n’abandonnerait que lorsqu’il dominerait seul la place. Derrière eux, Mythrax s’était visiblement lassé et avait fini par se rendormir.

De nouveau, les deux privilégiés de ce monde trop jeune pour réaliser l’impact de leurs pays sur l’Histoire se tournèrent autour. Dans un ballet qui aurait été mortel en temps de guerre, ils se jaugeaient, se découvraient dans une danse de confrontation où l’un ou l’autre sortirait vainqueur. Une attaque, une parade, une feinte : ils enchainaient les démonstrations de leur compétence sans vraiment pouvoir triompher l’un de l’autre.

Alors qu’Enoria envoyait son épée vers l’avant dans une attaque frontale qu’Aerys esquiva en se décalant sur le côté, il attrapa le bras de la princesse de sa main libre, se retrouvant derrière elle, maîtrisant sa main armée. Il se pencha pour lui parler au creux de son oreille :

« Très chère princesse, je crois que j’ai-   »

Il n’avait pas vu venir le coup de coude de l’autre bras de la jeune femme, qui le frappa pile dans le ventre. Il s’effondra au sol, entraînant la jeune femme qui chuta sur lui avant de rouler à ses côtés. Ils se retrouvèrent tous deux les membres entremêlés dans un joyeux capharnaüm humain. En se retournant un peu, il croisa le regard de la jeune femme, alors qu’ils étaient toujours par terre. Il la regarda avec une attention nouvelle, comme s’il la découvrait de nouveau au travers de cette inédite proximité. Elle avait un visage aux traits d’une finesse stupéfiante, comme si elle avait pris des meilleurs côtés de ses parents, joignant les plus belles qualités physiques des Valyriens. Il reprenait sa respiration sans la lâcher des yeux, un sourire fatigué sur ses lèvres. Il parvint à libérer l’un de ses bras en se tortillant de manière grotesque et s’enhardît pour saisir la main douce de sa partenaire d’entraînement d’un jour. Il éleva la main de la Sarnore jusque devant ses yeux, pour l’étudier comme une pierre rare.

« Voici donc l’arme la plus redoutable de Sarnor… Ce n’était pas très honorable, chère Enoria, mais cela reste efficace et c'est bien ce qui compte, à la fin du jour. Je dois t’avouer une fascination pour ton style de combat. Tu es une brave, et j’espère que nous aurons l’occasion de pouvoir t’enlever tout ça...  »

Ce faisant, il détailla un brin trop longtemps les vêtements de la princesse. Il aimait jouer, Aerys. Et il avait le sentiment d'avoir trouvé une partenaire de jeu toute trouvée.

« Après tout, je suis maintenant très curieux de savoir comment tu te débrouilles sans ces handicapants vêtements qui, convenons-en, nous ont gênés plus qu’autre chose ! » conclut-il avec un sourire insolent.



Enoria Zahor Amai
Enoria Zahor Amai
Étrangère

Sur le fil d’une lame aiguiséeRencontre avec Enoria Zahor Amai

Castel Maerion - An 1066, mois 5

Enoria perdait. Elle n’était pas habillée convenablement pour un tel combat, et elle n’avait pas la condition physique capable d’égaler celle d’Aerys. Il y avait cependant un aspect agréable à le voir s’évertuer à le faire plier, car il avait enfin compris qu’il avait devant lui une adversaire à sa taille. Il y avait bien des domaines dans lesquelles Enoria excellait davantage que le combat à l’épée, et si elle n’en faisait pas étalage elle doutait qu’Aerys Maerion puisse l’y dépasser. Cela ne la rendait pas moins prompt à essayer de le dominer durant ce combat qui avait cessé, depuis de longues minutes déjà, d’être un simple échange. Elle ne tiendrait plus longtemps, elle le savait, ainsi la jeune fille s’évertuait-elle à attaquer plus directement. Il y avait fort à parier que ses attaques soient repoussées sans peine par le jeune homme, mais à force de l’assaillir peut-être finirait-il par plier. Une esquive, une passe simple et voilà qu’elle tournait sur elle-même, envoyant danser autour d’elle les volants d’une jupe bien trop légère pour la protéger d’un quelconque coup. Sa cuisse pouvait en attester. Une fois revenue de face à Aerys, Enoria lançait une attaque qu’elle-même aurait pu qualifier de grossière. C’était une attaque qui aurait pu convenir contre un adversaire peu expérimenté, ou moins rapide. Cependant, et elle l’avait noté elle-même plus tôt dans la conversation, l’un des points forts d’Aerys était sa rapidité.

L’attaque ne fut en aucune manière menaçante pour leur jeune homme qui se contenta de se déplacer sans même se fatiguer à la parer. Cela aurait pu être la partie la plus insultante de cette attaque mal calibrée. Pourtant la suite ne fut guère plus glorieuse. Prête à se repositionner rapidement pour attaquer, Enoria fut stoppée dans son élan alors que la main d’Aerys se refermait sur son bras, bloquant par là même sa maîtrise de l’arme et imposant à la jeune femme un rapprochement qui ne pouvait guère tourner en sa faveur… Quoique.

« Très chère princesse, je crois que j’ai-   »

Lorsque la route principale est bloquée, il faut savoir changer d’itinéraire. Puisque le combat à la loyale avait pris fin et qu’Enoria se retrouvait sans issue, elle n’avait que deux choix : accepter l’échec et laisser au jeune homme – qu’elle savait vaniteux – le plaisir de se vautrer dans une gloire arrachée de justesse ou elle pouvait… Changer de tactique. Le coup de coude qu’elle lui envoyait dans le ventre n’avait guère pour objectif de le blesser – bien qu’elle eût pu le faire si elle l’avait souhaité – mais tout simplement à le forcer à libérer sa prise pour reprendre le combat. Elle n’eut qu’un résultat mitigé puisqu’elle déstabilisa bien Aerys, mais que loin de lâcher sa prise il l’entraîna avec elle au sol, tant et si bien qu’elle se retrouva rapidement au sol. La main d’Aerys n’avait toujours pas lâché son bras, l’une des jambes de la jeune femme s’était malencontreusement retrouvée sous celles du Maerion, et les nombreux volants de son jupon s’étaient chargé d’ajouter de la confusion à la scène. Elle se serait bien relevée rapidement, espérant qu’Arraxios Maerion ne soit pas témoin de ce piteux spectacle, mais il s’avéra rapidement qu’elle était bloquée. A bout de souffle, épuisée, elle tenta quelques instants de démêler les différents éléments de l’enchevêtrement avant d’abandonnement tout bonnement. Il lui fallut quelques secondes avant de s’apercevoir que le jeune homme n’avait pas, comme elle se l’était imaginé, le regard porté vers le ciel, mais que les yeux violet d’Aerys s’étaient fixés sur elle.

Un sourire aux lèvres, Aerys réussit là où Enoria avait échoué et commençait à se détacher de la sculpture grotesque qu’ils formaient tous deux. Elle s’apprêtait à le suivre et se lever, mais au lieu de se remettre debout et de l’aider à le suivre grâce à la main qu’il venait de saisir, le jeune homme se contenta de la lever et de… l’observer.

« Voici donc l’arme la plus redoutable de Sarnor… Ce n’était pas très honorable, chère Enoria, mais cela reste efficace et c'est bien ce qui compte, à la fin du jour. Je dois t’avouer une fascination pour ton style de combat… »

Amusée de le voir retrouver sa célèbre désinvolture, Enoria se contenta de rire et si elle voulut l’interrompre pour se vanter ou le complimenter en retour, elle n’en eut guère le temps. Ne jamais oublier l’amour d’Aerys pour la provocation.

« …Tu es une brave, et j’espère que nous aurons l’occasion de pouvoir t’enlever tout ça... »

Le regard qu’il laissait traîner le long de la silhouette d’Enoria ne laissait guère de place à l’ambiguïté. La jeune femme n’ignorait rien de ces regards qui n’avaient pas besoin de mots d’accompagnement pour être éloquents. Oh Aerys Maerion était indubitablement de ces hommes que peu de choses parvient à déstabiliser. S’il pouvait se laisser happer quelques secondes, il ne lui faut guère de temps pour retrouver ses marques et donner à voir le visage d’un jeune homme séducteur et provoquant. Qu’y avait-il derrière ce masque ?

« Après tout, je suis maintenant très curieux de savoir comment tu te débrouilles sans ces handicapants vêtements qui, convenons-en, nous ont gênés plus qu’autre chose ! »

Cette fois il n’était plus possible de feindre le sérieux, Enoria laissa éclater un rire sincère et retentissant. Il y avait bien des choses qu’elle pourrait reprocher à Aerys, mais cet aplomb lui plaisait. Sans un mot elle tentait à nouveau de se détacher physiquement de lui, y parvenant cette fois, et elle redressait légèrement son buste, en appui sur ses avant-bras, le visage au-dessus de celui d’Aerys dans une proximité qu’elle n’aurait pu prévoir quelques minutes auparavant.

« A Sathar, nous aimons à dire que la curiosité a deux faces, elle peut mener aux plus grands des dangers comme aux découvertes les plus exquises… »

Le sourire mutin d’Enoria finit de donner à sa phrase des accents capables d’égaler l’aplomb et les insinuations du jeune homme.

« … Cependant, cher Aerys, il est de bon ton de satisfaire sa curiosité en des lieux adéquats et en bonne intelligence avec toutes les parties concernées… »

Le regard de la jeune femme glissait du visage d’Aerys en direction de leurs jambes. Si elle était parvenue à libérer sa jambe de celles du valyrien, son jupon était en grande partie coincée entre celles-ci. L’effet aurait pu être seulement amusant s’il n’avait pas eu pour effet de dénuder très largement les jambes de la jeune sarnori.

« Puisque nous nous accorderons pour dire que le moment n’est guère opportun de… m’enlever tout ça, comme tu le disais, puis-je récupérer toute maîtrise de mon vêtement ? »

Il n’était pas question de perdre de vue l’objectif de cette visite au Castel Maerion. L’intermède avait été agréable, tout autant que la compagnie du fils du maître de ces lieux, mais il en fallait bien plus pour faire perdre à Enoria le fil de sa mission. Elle se relevait prestement, prenant garde à ne pas dévoiler plus de peau qu’elle ne l’avait déjà fait et tendait une main secourable et sans doute non nécessaire à un Aerys toujours au sol. Une fois le jeune homme debout, Enoria lâchait sa main afin de se concentrer sur sa tenue. Elle lissa les plis de son jupon prestement, habituée à devoir retrouver une allure présentable après les remous inévitables de ses missions. Replaçant le fin bandeau d’or qui ornait ses cheveux, elle lissait également quelques-unes de ses mèches devenues folles durant le combat. Cela ne l’empêcha pas de fixer Aerys d’un regard provoquant, amusé, et de reprendre le contrôle de l’échange.

« Dois-je conclure, Aerys, que c’est ainsi que tu reçois une princesse ? Après avoir pris d’assaut ma main tu t’attaques à mon jupon, et je ne me vois offrir aucun breuvage pour excuser tout cela ? Tu as tort pourtant, je suis bien moins redoutable une coupe à la main. »

Enoria avançait en direction d’Aerys, les bras croisés, une fois exactement à ses côtés, dans une position similaire à celle qu’il lui avait imposée avant qu’elle ne cherche à s’en dégager de manière radicale, elle murmurait :

« Peut-être même, grâce à cela, pourrais-tu prétendre à avoir le dessus un jour. »

Elle ne s’arrêtait guère plus longtemps qu’il n’en fallait pour prononcer cette dernière phrase et continuait son chemin en direction de l’épée qu’elle avait abandonné au sol. Enoria se penchait pour la ramasser avant de l’élever face à son visage pour admirer un instant les reflets du soleil sur la lame abimée. Il n’y avait rien de plus titre qu’une lame émoussée. Elle n’était plus que le souvenir d’une gloire passée, une arme autrefois létale à présent destinée à simplement imiter le combat, à préparer un bras pour une autre armes. Lorsqu’elle baissait le bras pour ramener la pointe de la lame au contact du sol, Enoria se fit la réflexion que tous étaient destinés à devenir des lames émoussées. Un jour, ne resterait plus qu’un lointain souvenir de leurs gloires.

Il était donc impératif que celles-ci soient éclatantes.


Aerys Maerion
Aerys Maerion
Seigneur-Dragon

https://rise-of-valyria.forumactif.com/t44-aerys-maerion
Sur le fil d’une lame aiguiséeRencontre avec Enoria Zahor Amai

Castel Maerion - An 1066, mois 5

Alors qu’ils se relevaient tous deux, Aerys se fit la réflexion qu’une princesse était définitivement un animal intéressant.

Il n’aurait su dire si cela provenait de son statut héréditaire forcément spécial, de la sophistication de son éducation, du côté exotique de sa culture si différente de celle de Valyria ou simplement de son caractère en tant que personne. Elle était en tout cas parfaitement à son aise avec l’opulence des Valyriens et leur côté détaché des réalités terrestres. Comment garder les pieds sur terre lorsque l’on chevauche un dragon ?

« Dois-je conclure, Aerys, que c’est ainsi que tu reçois une princesse ? Après avoir pris d’assaut ma main tu t’attaques à mon jupon, et je ne me vois offrir aucun breuvage pour excuser tout cela ? Tu as tort pourtant, je suis bien moins redoutable une coupe à la main. »

Le jeune seigneur-dragon arqua un sourire intrigué. Il avait un peu de mal à suivre les lubies des femmes, par moment. Il avait toujours eu du mal à anticiper les réactions de Naerys Arlaeron, qu’il connaissait pourtant depuis longtemps. Enoria était faite d’un bois différent mais d’une essence similaire, et elle avait une inconstance toute princière qui luisait comme écrin protecteur. Il se prit à se demander qui elle était vraiment, en dehors des apparences, de son rôle et de ses obligations. Elle s’avança vers lui, les bras croisés sur son torse.

« Peut-être même, grâce à cela, pourrais-tu prétendre à avoir le dessus un jour. »

La proximité qu’elle avait installée entre eux réveillait des instincts primaires chez Aerys et il se contrôla du mieux qu’il pût pour éviter un accident diplomatique potentiel. En réalité, c’était moins la perspective de l’incident avec Sathar que la fureur de son paternel qui le stoppait. Tandis qu’Enoria se baissait pour ramasser l’épée qui avait chuté un peu plus loin, il constata à loisir les formes de la princesse et réprima un sourire stupide. Cependant, il n’oubliait pas les dernières paroles de la jeune femme, et il y répondit en s’approchait d’autant plus d’elle, jusqu’à sentir le souffle de sa respiration sur son torse.

« Damné soit le jour où j’aurai besoin d’un tel stratagème pour avoir le dessus sur un relief aussi… inaccessible, » glissa-t-il d’une voix chargée de désir, en faisant descendre son regard vers le sillon délicat qui se trouvait dans le prolongement de la gorge de la jeune femme.

Ce faisant, il releva la tête. Derrière eux, il devinait que le soleil commençait à décliner. La soirée promettait d’être magnifique et ils auraient été stupides de ne pas en profiter. Il sentait le soleil chauffer son dos et il voyait les ombres s’étirer alors que le ciel prenait une teinte orangée. Sur les hauteurs d’un volcan, Castel Maerion était peut-être un peu à l’écart du centre de la ville mais bénéficiait d’une situation exceptionnelle du côté des points de vue. Aerys se dirigea vers une table de marbres noir et blanc autour de laquelle plusieurs fauteuils confortables étaient disposés. Il attrapa une clochette d’argent et l’agita pour attirer l’attention du personnel. Instantanément, un duo de serviteurs apparût. Il se dirigèrent avec déférence vers le fils de leur maître et entendirent ses requêtes. Ils repartirent aussi vite, laissant les deux jeunes gens seuls alors qu’Aerys revenait vers Enoria.

« Je préfère te prévenir, ô princesse. Les affaires du Conseil prennent souvent des heures à mon père… et j’ai le sentiment qu’il n’avait pas à l’esprit les seules discussions diplomatiques officieuses que vous deviez avoir. Je le connais suffisamment pour savoir cela.   »

Un air mystérieux sur son visage, Aerys invita Enoria à se diriger vers la rambarde de pierre grise non loin. Il alla lui-même s’y accouder, admirant le panorama splendide des tours valyriennes alors que le soleil les illuminait de ses derniers rayons avant de disparaître derrière le volcan auquel était accroché la demeure des Maerion. Déjà on pouvait distinguer la lune et bientôt les premières étoiles feraient leur apparition. De nuit, Valyria brûlait de mille feux, de ces centaines de brasiers – magiques ou non – qui illuminait les grands bâtiments et les endroits les plus fréquentés. Derrière eux, un vaste plateau porté par deux esclaves approchait. Trois serviteurs firent leur apparition et disposèrent sur la table à proximité une multitude de carafes de cristal soufflé par les talentueux artisans valyriens et contenant une grande variété de boissons plus ou moins alcoolisées, provenant des quatre coins de Valyria et du monde connu. Alors que certains serviteurs installaient des couverts et quelques chandeliers d’or, Aerys abandonna la vision sur Valyria pour se tourner vers Enoria.

« Vu que nous sommes livrés à nous-mêmes et que je ne vais pas t’abandonner pour un bain maintenant, j’ai pris la liberté de demander qu’on nous prépare un dîner léger. Peut-être que Son Excellence la Lumière de Sagesse nous rejoindra avant la fin de la nuit… en tout cas, nous devrions trouver de quoi nous occuper d’ici son retour. »

Ce faisant, il s’arracha à la contemplation d’Enoria pour se diriger vers la table non loin. Parcourant du regard la collection de grands crus et de liqueurs exotiques, il se tourna vers la jeune femme avec un air intrigué.

« On dit qu’il est aisé de découvrir la nature d’un homme en fonction de l’alcool qu’il choisit… mais qu’en est-il des femmes ? Quel sera ton poison, ô princesse ? Puis-je te suggérer la liqueur de myrte de Yi Ti, ou peut-être l’hyparos de Ghis ? »



Enoria Zahor Amai
Enoria Zahor Amai
Étrangère

Sur le fil d’une lame aiguiséeRencontre avec Enoria Zahor Amai

Castel Maerion - An 1066, mois 5

Le contact chaud de la peau d’Aerys contre celle d’Enoria parvint à aiguiser ses sens, le temps d’un instant, la rendant particulièrement sensible aux éléments qui les entouraient. Elle entendait la voix du jeune homme, bien sûr, mais également le bruit du vent qui s’engouffrait entre les hautes tours de Castel Maerion ou le cri d’un dragon non loin de là. La jeune femme entendait également le souffle d’Aerys, s’apaisant à mesure que les minutes s’écoulaient, autant qu’elle le sentait sur sa peau alors qu’il profitait de la démarche taquine de la native de Sathar. Elle s’amusait à imaginer jusqu’où le jeune valyrien pourrait aller. Elle se souvenait d’un entraînement à l’épée, alors qu’elle était encore à Sathar, et qui avait eu une conclusion tout à fait délicieuse. Il y a un avantage à être une princesse dans un Royaume où les femmes ne sont pas soumises, c’est celui de prendre ce que l’on veut, quand on le veut. Enoria ne s’était jamais embarrassée de la fausse pudeur que tant de demoiselles de certaines contrées s’évertuent à maintenir. N’étaient-ils pas, par définition, des êtres de chair et de sang ? N’était-ce pas honorer leur condition que de suivre les élans de leur corps, leurs besoins ? Et puisque les hommes qui se comportaient ainsi étaient perçus en héros, pourquoi les femmes devaient-elles s’en priver ? Le regard d’Aerys en était un exemple parfait. Bon nombre de ses homologues masculins le congratuleraient de profiter d’une telle proximité pour observer, avec attention, ce qui se dissimulait sous le rempart d’une robe. Enoria, elle-même, ne s’en formalisait guère. Elle avait été façonnée ainsi, pourquoi devrait-elle chercher à dissimuler ce qui faisait d’elle une création des Dieux ?

« Damné soit le jour où j’aurai besoin d’un tel stratagème pour avoir le dessus sur un relief aussi… inaccessible. »
« Cher Maerion le jeune, il n’y a là rien d’inaccessible… Comme pour bon nombre de trésor il suffit de le mériter. »

La tension était palpable, le sourire d’Enoria s’était fait séducteur, et elle avait été tentée de pousser plus loin encore son test sur les capacités de maîtrise du jeune homme. Elle n’avait pas plus intérêt que lui à être trouvée en posture instable avec le jeune homme, mais elle pariait qu’il craignait davantage son père qu’elle ne le craignait. Seulement, il y avait une certaine arrogance chez Aerys qui titillait Enoria. Elle aimait les hommes arrogants, tout particulièrement parce qu’ils étaient les plus savoureux à soumettre. Elle n’avait pas encore rencontré d’homme, tout arrogant soit-il, qu’une femme consciente de ses armes ne puisse mettre à genoux. C’était devenu un jeu pour, divertissant et plaisant, et elle n’avait encore jamais reçu de plaintes de la part des jeunes hommes concernés.

Elle ne prêta qu’un intérêt limité au vas et vient des serviteurs chargés d’amener les victuailles d’un diner qui se ferait, visiblement, sans Arraxios Maerion. Son attention fut tout entière mobilisée par ce qu’Aerys déployait sous ses yeux. Elle s’approchait de la rambarde, le suivant sans faire de difficulté, et s’étendait à leurs pieds la ville de Valyria dans tout ce qu’elle avait de plus grandiose. L’architecture Valyrienne n’avait pas le lustre des palais sarnori, mais Enoria devait leur concéder leur goût de l’harmonie. Les tours des palais, les brasiers allumés dans toute la ville, cet ensemble donnait à la ville de Valyria une aura de magie indéniable. Imitant Aerys, Enoria s’accouda à la rambarde, grimaçant cependant alors qu’elle se penchait. Son flanc était douloureux, sans doute conséquence logique de leur combat et des nombreux coups qu’elle avait reçu.

« Je préfère te prévenir, ô princesse. Les affaires du Conseil prennent souvent des heures à mon père… et j’ai le sentiment qu’il n’avait pas à l’esprit les seules discussions diplomatiques officieuses que vous deviez avoir. Je le connais suffisamment pour savoir cela. »

Suivant Aerys du regard alors qu’il s’éloignait de leur point de vue, Enoria découvrait une table dressée élégamment. De nombreuses carafes avaient été disposées à leur intention, réponse foisonnante à la demande d’une princesse assoiffée et peu encline à refuser les doux nectars d’une riche péninsule.

Enoria n’était ni sotte, ni naïve, elle savait aussi bien qu’Aerys ce qui avait pu passer par la tête d’Arraxios Maerion. Elle n’était certes pas l’ambassadrice de Sarnor, mais elle était celle de Sathar, la ville aux milles cascades, dont la richesse dépassait celle de bon nombre d’autres villes du royaume. Ainsi, laisser la jeune princesse entre les mains du cadet des enfants Maerion ne pouvait répondre qu’à un seul objectif. Elle n’y apporta guère plus d’attention, posant la question davantage pour tester Aerys que par intérêt pour la réponse.

« Vu que nous sommes livrés à nous-mêmes et que je ne vais pas t’abandonner pour un bain maintenant, j’ai pris la liberté de demander qu’on nous prépare un dîner léger. Peut-être que Son Excellence la Lumière de Sagesse nous rejoindra avant la fin de la nuit… en tout cas, nous devrions trouver de quoi nous occuper d’ici son retour. »

Lorsqu’il ne s’amusait pas à revêtir son masque de seigneur dragon fantasque et prétentieux, Aerys Maerion se révélait un compagnon tout à fait agréable. Enoria ne pouvait que regarder avec intérêt ses postures, son sourire devenu plus sincère et la douceur de ses traits lorsqu’il l’invitait à se joindre à lui pour le diner.

« Il me faudra donc me contenter de toi, jeune Maerion… »

Enoria feignait une expression de lassitude extrême avant de laisser échapper un rire éclatant, de ceux que l’on s’offre à soi-même plus qu’aux autres.

« … Voilà que je risque de m’attirer ton courroux… A bien y regarder, je n’ai de doute que beaucoup de jeunes valyriennes m’envieraient cette position avantageuse, cher seigneur-dragon. »

Son rire passé, la jeune femme redirigeait son attention vers la table où avaient été disposées les carafes afin d’en évaluer le contenu.

« On dit qu’il est aisé de découvrir la nature d’un homme en fonction de l’alcool qu’il choisit… mais qu’en est-il des femmes ? Quel sera ton poison, ô princesse ? Puis-je te suggérer la liqueur de myrte de Yi Ti, ou peut-être l’hyparos de Ghis ? »

« Pour te répondre, je ne puis que dire qu’un simple alcool ne serait suffisant pour t’aider à me connaître entièrement, Aerys… »

Enoria était joueuse, parfois trop pour son propre bien, mais elle aimait ces échanges piquants qui faisaient d’elle une adversaire à leur taille pour les seigneurs de la péninsule.

« Je ne peux choisir ainsi, alors je m’en remets entièrement à toi. Je m’enivrerais à tes conditions, vois comme je suis une invitée docile. »

Docile, elle ne l’était guère. Les personnes ayant fréquenté, de près ou de loin, la princesse Enoria Zahor Amai n’auraient pu que rire à entendre de cette phrase. Elle était cependant en représentation ce soir-là, et elle avait appris, il y a bien longtemps, qu’il était plus aisé d’obtenir ce que l’on souhaite par la ruse. La première ruse était aisée avec les hommes bien nés, notamment lorsque l’on était une femme : il suffisait de jouer à la jeune femme en détresse. Il était évident qu’Enoria avait d’ores et déjà grillé cette carte. Pourtant, la stratégie était toute autre. Elle donnait l’impression à Aerys d’être capable de la dompter. Que pouvait-il y avoir de plus gratifiant et excitant pour ce genre d’homme que le fait d’avoir l’ascendant sur une femme impossible à dompter ? Cela endormait leurs sens, émoussait leur attention, et souvent suffisait-il pour Enoria d’user d’autres charmes pour les endormir tout à fait.

Elle n’était pas sûre de poursuivre le moindre objectif avec Aerys ce soir-là, mais elle savait également où elle avait mis les pieds. Les Maerion n’étaient, et ne seraient jamais, une famille comme les autres, et notamment pour cela elle se devait de faire illusion et d’entrer dans leurs bonnes grâces. Si cela devait passer par un rapprochement avec le jeune Aerys, elle n’y voyait que des avantages.

Elle se saisit du verre que le jeune homme lui tendait, le portant à ses narines tout d’abord pour en humer les effluves avant d’y tremper sa lèvres supérieure, lèvre qu’elle lécha par la suite. La première gorgée exposa en bouche, c’était un alcool fort mais sucré, donnant l’illusion d’être tout à fait inoffensif alors que le degré d’alcool représentait sans doute une menace réelle pour tout esprit humain. Enoria ne sut trop que penser de ce choix. Etait-ce ainsi qu’Aerys se voyait lui-même, ou bien était-ce un message pour montrer à la jeune princesse qu’il ne la sous-estimait pas ?

« Un nectar plein de surprises. Je suis ravie de t’avoir suivi les yeux fermés, Aerys. »

Sa coupe à la main, la jeune femme se mit à parcourir du regard leurs alentours, la terrasse était superbe, baignée d’un soleil qui serait bientôt couchant. Son observation la mena aux deux fauteuils déposés à leur intention. Tout à fait épuisée par le combat, et absolument endolorie, la jeune femme s’y assit sans un mot mais non sans une grimace.

« Il me faudra bien plus qu’un bain pour effacer les traces de cet échange, je ne te remercie pas pour cela. Te voilà à présent forcé de faire amende honorable pour avoir ainsi frappé une princesse. »

La jeune femme laissait son dos reposer contre le dossier du fauteuil, s’allongeant légèrement dans le fauteuil d’un air nonchalant. Croisant les jambes, elle en dévoilait l’une d’elle sans y penser, du fait du jeu des volants et soieries qui constituaient son jupon.

« Que peux-tu me dire de cette entrevue avec ton père, nous n’avons guère eu l’opportunité d’échanger sur les motivations de cette très gracieuse invitation… Je suppose que l’or qui abonde dans les rivières et cascades de Sathar ne sont pas tout à fait étrangères à cet intérêt ? »




Aerys Maerion
Aerys Maerion
Seigneur-Dragon

https://rise-of-valyria.forumactif.com/t44-aerys-maerion
Sur le fil d’une lame aiguiséeRencontre avec Enoria Zahor Amai

Castel Maerion - An 1066, mois 5

« Pour te répondre, je ne puis que dire qu’un simple alcool ne serait suffisant pour t’aider à me connaître entièrement, Aerys… »

Un fin sourire répondant à la piquante provocation de la princesse, Aerys fit signe à ses serviteurs et esclaves de ne pas s’attarder, les congédiant d’un signe de la main. Bientôt, ils reviendraient avec quelques mets exotiques. La prise de Meereen avait eu de bon d’ouvrir aux Valyriens les merveilles de la gastronomie du nord de l’empire ghiscari, et très vite de nouvelles saveurs et de nouveaux plats avaient afflué dans les cuisines et sur les tables des seigneurs-dragons.

« Je ne peux choisir ainsi, alors je m’en remets entièrement à toi. Je m’enivrerais à tes conditions, vois comme je suis une invitée docile. »

Aerys laissa cette fois éclater un franc éclat de rire, qui résonna dans la torpeur du crépuscule. Docile, elle pouvait bien faire semblant de l’être mais tout dans ces derniers moments avait hurlé le contraire. Elle était fière et déterminée, elle venait à Valyria avec un but précis et celui-ci ne pouvait pas se cantonner à s’enivrer avec des fils de grandes familles. Les familles puissantes comme la sienne avaient souvent plusieurs cordes à leur arc, et ce n’était guère surprenant de parfois découvrir que certaines traitaient sur plusieurs tableaux à la fois, cherchant le plus rentables pour elles. Les intérêts familiaux étaient pour Aerys la chose la plus importante. Il était, comme son frère aîné, soumis aux volontés de leur père qui agissait en patriarche absolu. Ils ressentaient d’autant plus la hiérarchie familiale qu’Aerys était impliqué dans le réseau Maerion et qu’à ce titre, il était également subordonné à Arraxios qui restait le grand patron du monde criminel valyrien.

Aerys prit le parti de servir un alcool pur et doux, bien que pourtant fort. L’une des bouteilles les plus prisées de son père. Vin du Nord de la région valyrienne, le Turriculae de Draconys était fabriqué au cours d’un complexe processus d’ajout d’ingrédients au cours de sa maturation dans des barriques de hêtres flamboyants. On y ajoutait de l’eau de la Mer des Soupirs, du sirop de raisins blancs et du romarin cendré. Surprenant par sa complexité en bouche, il était généralement dégusté pour des occasions spécifiques, notamment au cours de négociations officielles ou pour parler affaires. A ce titre, il convenait bien à une princesse venue en visite plus ou moins formelle.

« Un nectar plein de surprises. Je suis ravie de t’avoir suivi les yeux fermés, Aerys.
- Et tu me vois ravi que tu aies placé cette confiance en mes compétences. »


Tandis qu’elle observait la vue sans pareil – selon lui – qu’offrait la terrasse sud de Castel Maerion, Aerys prit un moment pour détailler son profil. Elle avait un petit nez élancé qui se retroussait légèrement avec effronterie lorsqu’elle déclamait les lignes de la partition qui était sienne, mais elle restait plus assagie lorsqu’elle retrouvait sa véritable personnalité, ou tout du moins celle qu’elle laissait entrevoir. Désormais adossé à la rambarde de marbre à ses côtés, Aerys constait à quel point Valyria était bénie des Dieux et qu’il était impossible de voir autrement la fortune de ses habitants. Ses hautes tours défiant les cieux, l’opulence omniprésente, les arts toujours plus raffinés, son armée désormais redoutée, Valyria pouvait enfin prétendre écraser le monde sous l’ombre qui s’étendrait lorsque le Dragon prendrait son envol. Imitant Enoria, il alla s’asseoir dans les deux fauteuils confortables. Là, il ferma brièvement les yeux, profitant de la douce brise du soir qui commençait à souffler entre les pics acérés crachant feu et fumée.

« Il me faudra bien plus qu’un bain pour effacer les traces de cet échange, je ne te remercie pas pour cela. Te voilà à présent forcé de faire amende honorable pour avoir ainsi frappé une princesse. »

Les yeux perdus dans le vague, scrutant les premières étoiles qui se dévoilaient dans le ciel virant au gris sombre, il eut un nouveau sourire. Il souriait beaucoup ce soir, et il se fit la remarque que la jeune femme n’y était évidemment pas étrangère. N’étant pas ignorant de la raison du cœur et de celui que la raison n’avait parfois pas, il s’interrogeait s’il appréciait la compagnie de la jeune femme pour sa personne ou son titre. Une authentique princesse avait, à Valyria, forcément quelque chose de magnétique, d’exotique et de chamarré qui attirait inéluctablement tout seigneur-dragon habitué aux beautés valyriennes. Les yeux noirs d’Enoria, son teint mat et ses manières la rendaient unique dans toute la cité, et forcément dégageant de fortes convoitises pour sa compagnie.

« Que peux-tu me dire de cette entrevue avec ton père, nous n’avons guère eu l’opportunité d’échanger sur les motivations de cette très gracieuse invitation… Je suppose que l’or qui abonde dans les rivières et cascades de Sathar ne sont pas tout à fait étrangères à cet intérêt ? »

La discussion reprenait un ton sérieux, et Aerys regarda la jeune femme avec un intérêt renouvelé. Il admirait sa façon tout à fait subtile de reprendre le contrôle de la soirée, et de ramener la discussion sur une base bien plus formelle, quand bien même le cadre hurlait autre chose. Il n’était pas stupide – du moins pas en permanence – et sentait bien qu’au-delà des apparences, ils représentaient chacun un pays différent, et qu’à travers leurs yeux, tout ce qu’avaient construit leurs ancêtres se jaugeait dans un choc civilisationnel certes apaisé et tout en voluptuosité, mais toutefois bien réel. Toutefois, il ne comptait guère soutenir les projets de son père de l’écarter aussitôt de sa famille. Que devait-il faire toutefois ?

Il avait signifié de manière claire à Daenerys qu’il souhaitait mettre de la distance entre eux pour sauvegarder la stabilité familiale et il ne tenait guère à dévoiler à une étrangère, aussi charmante était-elle, la situation interne des Maerion. Ils avaient de nombreux ennemis et ils seraient nombreux à se délecter d’une telle information pour faire chanceler le pouvoir dynastique. Cela serait intolérable. Il s’efforça de prendre un air détaché, après tout, il n’était pas ne charge et restait surtout le cadet. Il balaya la question d’un geste de la main accompagnant un haussement d’épaules.

« Il t’a sans doute invité en ta qualité de représentante de Sathar, oui. Après, bien malin serait celui qui pourrait te dire s’il t’a fait venir ici en qualité de Lumière de Sagesse ou en qualité d’Arraxios Maerion. Il est certain que l’or est toujours utile, mais nous en avons ici en abondance. Je pense qu’il s’intéresse à ta famille, à ce que valent les tiens dans cet agglomérat ma foi compliqué de cités qui composent ton royaume, très chère princesse. »

Du coin de l’œil, il vit quelques serviteurs expérimentés commencer à apporter quelques premiers plats et préparer l’arrivée du repas. Bientôt, la table serait emplie de ce que le cuisinier avait pu préparer mais Aerys n’avait aucun doute sur sa compétence. Sans être particulièrement notable par rapport aux autres, la table des Maerion restait un agréable moment gustatif. Cela n’importait que peu, toutefois. Il revint à Enoria.

« Valyria entretient des liens ténus avec Sarnor, d’après ce que je comprends. Nous pouvons faire mieux. Et j’imagine qu’il sera toujours positif de connaître les grands acteurs de la politique de ton royaume, surtout quand celui-ci repose plus sur les familles comme la tienne que sur le souverain incarné... »

Se penchant vers Enoria, il plongea son regard dans le sien, cherchant à capter son attention tout en focalisant la sienne.

« Peut-être devrais-je te poser la question, ta majesté. Qui sont les Zahor Amai ? Qui est Enoria Zahor Amai ? »




Enoria Zahor Amai
Enoria Zahor Amai
Étrangère

Sur le fil d’une lame aiguiséeRencontre avec Enoria Zahor Amai

Castel Maerion - An 1066, mois 5

« Il t’a sans doute invité en ta qualité de représentante de Sathar, oui. Après, bien malin serait celui qui pourrait te dire s’il t’a fait venir ici en qualité de Lumière de Sagesse ou en qualité d’Arraxios Maerion. Il est certain que l’or est toujours utile, mais nous en avons ici en abondance. Je pense qu’il s’intéresse à ta famille, à ce que valent les tiens dans cet agglomérat ma foi compliqué de cités qui composent ton royaume, très chère princesse. »

Voilà qui était honnête. Tous les Valyriens étaient attirés par ce chose exotique qu’ils n’avaient pas : le pouvoir royal. Bien que fortement attachés à l’idée d’une République, du moins pour la majorité d’entre eux, ils ne pouvaient s’empêcher de fantasmer sur la vie de ceux dont la tête avait été faite pour porter la couronne. En cela, Enoria était très largement favorisée dans l’exercice de sa mission, car il lui suffisait d’attendre les invitations pour pénétrer dans les maisons et palais les plus prestigieux de la capitale. Elle avait suffisamment d’exotisme pour intriguer, et suffisamment de sang valyrien pour ne pas être considérée comme déplacée dans la bonne société. Oh bien sûr, elle n’avait pas le prestige de ceux qui conservaient le sang le plus pur de la péninsule, mais elle avait quelque chose en plus : du sang royal. La légende voulait, dans le Royaume de Sarnor, que les familles royales descendent immédiatement des différents fils du dieu Soleil. La puissance et la magie de leur sang ne pouvait être contesté tant ceux-ci se mêlaient étroitement avec la puissance divine.

Enoria fut tirée de ses pensées par les plats qui déjà s’accumulaient sur la table joliment dressée. Elle reconnaissait, parmi les plats valyriens, quelques mets directement inspirés de la cuisine de Sarnor, une attention qu’elle appréciait. Il y avait bien des choses pour lesquelles les valyriens pouvaient se targuer de dépasser les sarnori, la nourriture cependant n’en était pas une. En Sanor, la nourriture était une affaire de famille, et bon nombre de recettes étaient issues d’une tradition orale remontant à des siècles reculés. Dans la cuisine sanori se mêlaient épices, fruits secs, baies et huiles précieuses, un mélange capable de donner un goût divin à l’aliment le plus simple. Il n’y avait là guère de prodige, simplement la sublimation de produits offerts par la terre et le soleil. Il ne s’agissait pas seulement de se nourrir, le repas était une expérience sensorielle en lui-même. Les odeurs et les goûts, les textures et les couleurs, tout était savamment orchestré pour envelopper le corps tout entier.

« Valyria entretient des liens ténus avec Sarnor, d’après ce que je comprends. Nous pouvons faire mieux. Et j’imagine qu’il sera toujours positif de connaître les grands acteurs de la politique de ton royaume, surtout quand celui-ci repose plus sur les familles comme la tienne que sur le souverain incarné... »

Le visage d’Aerys s’approcha de celui d’Enoria, son regard captant le sien avec une intensité tout à fait nouvelle. Sans pour autant lâcher le regard du jeune homme, Enoria laissa sa main survoler quelques plats avant d’attraper une petite tomate et de la porter à ses lèvres.

« Peut-être devrais-je te poser la question, ta majesté. Qui sont les Zahor Amai ? Qui est Enoria Zahor Amai ? »

A mesure qu’Aerys parlait, Enoria laissait ses lèvres s’étirer en un sourire amusé. Il n’était guère subtil, c’était amusant à observer tant on lui avait vanté les intrigues Maerion. Elle s’était imaginé trouver un jeune homme taciturne, discret et éminemment secret. Pourtant, celui qui lui faisait face était un être de spectacle, de représentation, elle le voyait dans la manière qu’il avait eu de dramatiser sa question. Il maîtrisait l’art du silence pour introduire les effets d’annonces. Il avait l’art de manière son regard et son corps pour jouer le rôle qu’il avait choisi d’endosser. C’était amusant à regarder, car sans doute usait-il des mêmes subterfuges qu’Enoria elle-même pour dissimuler la véritable nature de ses activités. Le réseau était catégorique, le réseau Maerion était l’un des plus anciens et redoutables de la péninsule. Se pouvait-il qu’Aerys n’y prenne pas part ? Cela, la jeune femme refusait de l’imaginer, elle ne connaissait que trop bien le sens de la famille des Valyrien. Aerys savait des choses et participait nécessaire aux affaires du clan.

« Me voilà surprise, combien furent-ils à me dire que les Maerion savaient tout de tous… Ou dois-je en conclure que la famille du Roi de Sathar, ne présente pas suffisamment d’intérêt pour que les Maerion ne s’y intéressent ? »

Le visage de la jeune femme était redevenu fermé, guère agressif ou froid, simplement neutre. Le sourire avait laissé place à un regard perçant, scrutateur, presque transperçant, en tout cas ayant absolument capturé celui d’Aerys.

« Il y a bien des ouvrages capables de t’apprendre bien des choses au sujet de ma famille. Peut-être t’en ferais-je la lecture un jour, mais c’est un privilège qui se gagne. »

L’un des coins de la bouche de la jeune femme se releva légèrement, laissant poindre un sourire, comme pour retrouver la légèreté de leurs échanges. La soirée était douce, le ciel s’était obscurci mais restait strié de couleurs magnifiques. Le rouge se mêlait au jaune et à un bleu indescriptible, donnant une impression surnaturelle à la scène qui liait la princesse et le jeune Maerion.

« Quant à Enoria Zahor Amai… »

Prenant appui sur ses avant-bras, déposés sur la table, la jeune femme se pencha légèrement en avant pour rapprocher davantage son visage de celui d’Aerys.

« … Penses-tu réellement que je vais ainsi te faciliter la tâche, Aerys ? Si tu ne trouves guère en mes yeux les paroles que tu réclames, sur mes lèvres les mystères à résoudre, et si tu ne saisis pas, sur mon corps, plus d’indices qu’il n’en faudrait, pour savoir qui je suis… Alors il te faudra porter une plus grande attention. »

La jeune femme se pencha encore davantage, offrant un point de vue tout à fait confortable au regard d’Aerys sur les courbes de sa poitrine.

« Je ne suis guère mystérieuse, jeune Maerion, je suis ce que tu vois. Je suis ce que tu ne parviens pas encore à voir mais commence déjà à imaginer… »

Enoria resta quelques secondes ainsi, un sourire enjoleur aux lèvres, avant de reculer son buste et de retrouver une position plus convenable, d’un geste lent et maîtrisé, à la manière d’un félin. Détachant son regard de celui d’Aerys, elle se saisit de quelques mets aisés à picorés, et trempa ses lèvres dans le nectar que lui avait servi le jeune homme. Lorsqu’elle regardait à nouveau le jeune Maerion, elle avait retrouvé un visage tout à fait serein.

« Je peux en revanche te parler de Sathar… Je reconnais bien volontiers la beauté de Valyria, mais en mon cœur aucune ville n’égalera la beauté de celle qui m’a vu naître. L’eau est partout. Sais-tu qu’elle est connue comme ‘La ville des Cascades’ ? Entre les cascades et les rivières s’élèvent de magnifiques palais, le rose et le blanc du marbre se mêlant au vert de la végétation comme deux corps unis et fertiles. Ajoute à cela le bleu du ciel, les couleurs chamarrées des voiles avec lesquelles joue le vent, la douce harmonie s’élevant des rues et jardins, l’odeur particulière des orangers en fleur et du jasmin. Il y a là tant de raisons de se languir, c’est une ville inébriante, et pourtant elle n’a que faire de l’IDOLATRIE et ne craint pas la convoitise ou le fiel, résolument accort elle se laisse enlacer, elle tolère les CAPRICES… Elle n’est pas un bégin, elle est une idylle. »

Le sourire d’Enoria s’était fait plus doux, tendre, et son regard s’était perdu dans celui d’Aerys avec une douceur qu’elle ne lui avait pas permis de percevoir chez elle jusqu’à présent.

« Il y a la beauté, bien sûr, la passion et la tentation. Cela vous l’avez. Mais il y a la sensualité. La nature elle-même se fait sensuelle, la caresse de l’eau, la taquinerie de l’herbe, le souffle du vent, ce n’est pas notre manière de révérer nos Dieux, c’est notre manière de vivre et d’exister. Rends-toi à Sathar, Aerys Maerion, et tu comprendras que bien des plaisirs te sont encore inconnus. Je ne parle pas là que des plaisirs du corps et de l’assouvissement de la pulsion. Je te parle d'agapé, de plaisir sensoriel pur, dénué de lubricité et d’envie, habitant simplement chacun d’entre nous et nous conférant une liberté que vous ne pourrez jamais avoir.»

La voix de la jeune femme était devenue murmure, une volute suave seule capable de rendre justice à la douceur de vivre satharienne.

« … Du moins que vos femmes ne pourront jamais avoir, puisqu’il me semble comprendre que vous autres, Valyriens du Sud, n’avez guère de tolérance pour les élans de liberté de ces femmes que vous dites aimer. Alors dis-moi Aerys Maerion, que dis-tu d’une femme capable de combattre ? Comment juges-tu une femme dont la sensualité n’a de limite que sa volonté propre ? Crains-tu une femme dont la volonté ne peut-être dictée par autre qu’elle-même ? Serais-tu de ces valyriens, avec lesquels j’ai pu échanger, qui prétende que le plaisir d’une femme n’a de réalité que lorsqu’il fait échos à celui de l’homme auquel elle appartient ? »

Enoria se recula, déposant son dos contre la chaise pour croiser les jambes, sans pour autant délaisser sa coupe. Jouant, du bout de la fourchette, avec les quelques bouchées déposées dans son assiette, elle ne se décida pas pour l’une d’entre elles cependant. Elle n’était pas de ces femmes au faible appétit, mais elle n’était pas là pour la nourriture, elle poursuivait un objectif tout autre. La conversation avait beau prendre la direction du marivaudage

« Sans doute tout cela est-ce ma manière de demander qui est Aerys Maerion… »



Aerys Maerion
Aerys Maerion
Seigneur-Dragon

https://rise-of-valyria.forumactif.com/t44-aerys-maerion
Sur le fil d’une lame aiguiséeRencontre avec Enoria Zahor Amai

Castel Maerion - An 1066, mois 5

Aussi évasive et inébranlable semblait-elle être, Enoria Zahor Amai restait une personne avec laquelle Aerys prenait grand plaisir à échanger.

Cette rencontre confirmait qu’ils avaient tous deux des atomes crochus évidents. La question restait de savoir si Arraxios Maerion méritait effectivement son titre de Lumière de Sagesse en les présentant à dessein. Aerys n’était pas née de la dernière pluie. Il se doutait que tant qu’il n’aurait pas retrouvé une relation amoureuse, il resterait un facteur d’instabilité au sein de sa propre famille. Il ne souhaitait pas mettre en péril le mariage entre Daenerys et Jaehaegaron car il avait bien conscience que ce qui se jouait, c’était l’avenir de leur nom.

Au-delà de tout le reste, Enoria n’était pas une simple représentante plénipotentiaire d’un royaume fédéré au sein d’un ensemble plus large. Là où l’ambassadrice du haut-roi Amaya Huzhor était l’interlocutrice idéale pour quiconque souhaitait négocier des accords globaux face à la plus haute des diplomates officiels de Sarnor, Enoria évoluait dans un entre-deux à mi-chemin entre représentation diplomatique et influence passive. Aussi, la question de se présence à Valyria ne manquait pas d’intriguer. Il y avait bien entendu cette affaire de famille qui l’amenait à la capitale, mais Aerys ne l’achetait pas si aisément. Une personne de son calibre, avec un esprit aussi aiguisé n’était pas simplement là pour chercher un époux et renouer avec une famille installée à l’étranger. Qu’y avait-il à Valyria qu’elle ne pouvait obtenir en Sarnor ?

Évidemment, la réponse n’aurait pas lieu ce soir. Ils faisaient plus amplement connaissance, apprenaient à se découvrir à la fois comme relations et comme acteurs de la politique officieuse. Ils étaient l’un et l’autres des enfants de personnages puissants, en position dirigeante. Arraxios avait probablement des ambitions précises en ce qui concernait leur duo, mais il ne révèlerait pas ses cartes tout de suite. Aerys, quant à lui, n’était pas encore certain de pouvoir vraiment choisir ce qu’il voulait faire d’une telle beauté. Il avait un nombre incalculable d’idées de positions et d’expériences à tenter avec une telle beauté étrangère, mais il se doutait que rien n’arriverait ce soir.

Ce soir, ils étaient deux jeunes gens profitant d’un panorama sans concurrence sur la plus formidable cité de tous les temps. Ce soir, ils vivaient et profitaient de privilèges d’un niveau inimaginable pour la plupart des habitants de ce monde. Ils avaient tout le temps du monde, car c’était là un autre luxe auquel ils étaient habitués. L’un et l’autre avaient grandis en héritiers et en descendant de personnages illustres. Depuis toujours, leur nom pesait sur leurs épaules. Et, partageant toutes ces expériences, ils s’étaient trouvés.

Bien entendu, Aerys ignorait tout d’Enoria et ne manquerait pas de se renseigner. Son enfance à lui était relativement commune selon les standards de la haute-noblesse valyrienne. Celle d’Enoria, toutes les expériences qui l’avaient peu à peu façonnée en cette femme sublime à la mine mutine lui étaient inconnues et il voulait en savoir plus sur cette femme unique à Valyria. Il sentait une attraction notable entre eux, se muant en une danse nuptiale presque bestiale. Il se demandait encore jusqu’où cela pourrait les mener.

Ils avaient tout le temps du monde.

C’était bien là une chose qui le confortait, mais il gardait un objectif en tête.

Il ferait sienne Enoria Zahor Amai… Ou bien serait-ce elle qui ferait sien Aerys ?


RP terminé Sur le fil d’une lame aiguisée 2991234872

Contenu sponsorisé