An 1066, mois 5. Avant l'effondrement des rues de Valyria.
La ville était en effusion depuis le tour de force qu'il y avait eu au Sénat. Depuis que les esclaves arrivaient en masse dans la cité, les mages ne savaient plus où se positionner dans la politique actuelle. La tension s'était emparée du Collège qui n'arrivait pas à savoir ce qu'il allait advenir de lui. On faisait appel aux mages spécialisés dans la divination mais la question était bien trop importante pour tenter une quelconque tentative de voir l'avenir sans se risquer à devenir fou ou pire. Qu'allait-il advenir d'eux si la ville se déchirait entre les différents partis ? L'angoisse ambiante pesait sur les épaules de tous, même de ceux dont la politique semblait bien loin de leurs préoccupations principales. Herya, elle, se contentait d'un mal de tête alimenté par son propre stress et les bavardages incessants de la voix. Il parlait sans cesse, critiquait à tout va et lui faisait perdre les pédales. Ce soir, la mage en avait assez. Elle avait passé la journée à travailler sa magie, essayant de s'améliorer avec pour objectif de passer au 5ème Cercle et son corps n'en pouvait plus. Alors qu'elle se rendait chez elle pour aller dormir, elle passa devant l'une des échoppes du Grand Bazar. Alors elle s'arrêta devant la porte, observant les flammes dansantes dans le petit vestibule et écouta le brouhaha qui émanait de la taverne. Pendant un instant, Herya n'entendit plus la voix qui continuait de parler sans cesse. Elle fut comme attirée à l'intérieur, comme obnubilée par l'ambiance qui s'échappait. Depuis quand n'avait-elle pas pris du bon temps ? Du vrai bon temps ? Pas depuis l'accident, c'est-à-dire déjà 3 mois. Et une idée lui vint soudainement. Et si l'alcool faisait taire la voix ? Et si en embrouillant son esprit, "il" ne pouvait plus trouver le chemin pour cracher ses paroles acerbes ?
Elle aimait festoyer, tout particulièrement lors des célébrations pour Syrax. Herya n'était ni mariée, ni promise, ni même suggérée à une famille pour une quelconque union. La liberté s'offrait à elle comme un cadeau divin, cadeau qui finirait par devenir un piège. On la pressait sans cesse de trouver un époux, au moins pour la bonne forme. Dans son entourage - à l'exception de ses frères - on lui suggérait gentiment quelques tisserands de son âge, prêts à fonder une famille à n'importe quel moment. La mage refusait poliment. Personne ne déciderait à sa place, même si un mariage devait se faire par simples intérêts et sans moindre sentiments, alors elle le ferait, mais uniquement si elle et seulement elle le décidait. Alors ce soir, elle profiterait de ce que Valyria avait à offrir et en ce sens, la ville était riche de surprises en tout genre.
"Qu'est-ce que tu fais ? N'entre pas.". À la place, la jeune femme entra. "Ne fais pas un pas de plus.". Elle en fit deux. "Tu vas le regretter.". À l'inverse, dès son entrée, elle ne regretta pas un instant. Un franc sourire s'afficha même sur son visage. L'espace d'une soirée, elle serait maître de son corps et de son esprit, juste une fois. Alors elle s'approcha du tavernier et pointa du doigt quelque chose dans l'étagère lorsque celui-ci lui demanda ce qu'elle désirait boire. Il la regarda interloqué et malgré la volonté de la dissuader de consommer cette chose, elle insista. Plus c'était fort, mieux elle ferait taire la voix. "Tu es une sotte. Je prierais pour que les dieux te le fasse payer.". La jeune femme leva les yeux au ciel, attrapa son godet et s'installa au fond de la pièce. Elle déroula l'un de ses parchemins et parcouru ses notes tandis qu'elle sirotait sa boisson infâme. Une grimace se dessina sur son visage mais le feu qui dégringola dans son gosier, réchauffant l'intégralité de son corps déjà bouillant.
Un jeune garçon servait les autres clients et Herya l'attrapa au passage.
Jeune homme. Vous seriez bien aimable de m'en apporter un deuxième. - fit-elle en agitant son verre face à lui - Et dites à votre patron que je suis encore en pleine conscience de ce que je consomme.
Il revint quelques instants plus tard avec sa commande et elle se leva pour récupérer sa boisson. Mais dans un geste maladroit, elle se retourna et renversa son verre sur quelqu'un. Son premier réflexe fut d'essuyer la tâche sur la chemise de l'inconnu.
Oh je suis vraiment navrée, je suis d'une maladresse... fit-elle légèrement gênée et agacée.