Il est une pièce au coeur des thermes - ou plutôt un complexe - réservé aux plus riches citoyens ou du moins aux plus anciens. Si l'espace n'est ni fermé, ni réellement privé, il peut facilement se rendre impénétrable pour qui connaît le directeur de l'établissement et verse les bons dragons d'or. Le réseau de cinq ou six bassins, dont une pièce remplie de vapeur, se retrouve dès lors bloqué par quelques colosses aux muscles saillants. La seule entrée ainsi sécurisée, il est aisé d'y faire ce qu'on le souhaite. Rendez-vous galants, complots manqués ou rencontre fortuite s'y succédaient au fil des ans. Rarement s'y mêlait le sang, autre que celui qu'on le prévoyait de faire couler. Ainsi, le Clos des Soupirs méritait son surnom de havre de paix neutre. Il ne manquait guère de quelques fromages Andals et coffre pour s'en faire une réputation.
C'est pourquoi un message attendait un beau matin Laedor Arlaeron. L'encre, encore humide, détaillait une écriture soignée, presque maniaque ainsi que des mots secs dont le secret resterait entre le jeune homme et son courtisan épistolaire. Pour faire simple, il s'agissait d'un odieux, mais ô combien intrigante convocation au Clos. L'heure et le jour y étaient inscrits et ne souffraient d'aucun retard. Le déroulement des évènements apparaissait aux yeux de ceux qui savaient: juste avant l'heure des grands seigneurs, en plein déjeuner. Assez tôt pour éviter le regard des autres, mais bien tard pour que l'affaire ne soit pas suspicieuse au premier abord. Même un Arlaeron devait bien se laver de temps à autre.
Deux solides soldats, et non pas les esclaves habituels des thermes, attendaient le nouveau seigneur d'Aquos Dohen. Ils lui firent signe d'entrer avant de se poster devant l'entrée, si massifs que leurs épaules se frôlaient. Dans la première salle l'attendait plusieurs serviteurs, le cou courbé et aux traits ouvertement valyriens. Tous étaient prêts à satisfaire les besoins du jeune homme pour mieux le préparer à la deuxième salle. S'y dressait - où plutôt s'y baignait - une cousine aux yeux améthystes et aux cheveux plus riches que sa propre fortune. Dernier verrou pour accéder au commanditaire, elle se leva et détailla longuement Laedor avant de lui faire signe d'entrer dans l'antre du loup.
Maegon l'y attendait dans son plus simple appareil. La salle s'apparentait à un sauna, une chaleur sèche et excessive, mais moindre. Une table avec quelques douceurs, du vins et autres plats salés se dressait près de lui tandis qu'il était assis, les jambes négligemment écartées sur un siège. Ses longs cheveux humides dansaient sur sa nuque tandis qu'il observait Laedor approchait par ses yeux mi-clos. Avec un sourire torve, il se leva et inclina légèrement la taille. Bien qu'ils fassent sensiblement la même taille, Maegon feignit de regarder par-dessus l'ancien héritier avant de baisser ses yeux et de lever un sourcil circonspect.
"Oh il me semblait bien avoir entendu des bruits de pas. Bienvenue Laedor." Reculant, il s'assit de nouveau, avachi sur le dossier. "Nous nous rencontrons enfin. Ton père était un adversaire honorable, saches le. Si je ne peux me permettre de pleurer sa morte, je le regrette." soupira Maegon.
"Hélas, sans vouloir t'offenser, là où se dressait une statue d'argent massif, je n'en retrouve que les pieds brisés enfoncés dans ses fondations." lança t'il presque aussitôt avant de reprendre d'un ton plus doux : "Malgré tout, même la plus belle des cruches n'est que boue avant de se transformer en oeuvre d'art. Il s'agit de trouver les bonnes mains pour s'élever." Pour le moment, Laedor n'était même pas de l'argile propre à être façonnée pour Maegon. La tare de son nom l'empêcherait à jamais de seulement apprécier le jeune homme.
"Assieds toi. ordonna sèchement le dynaste en accordant le geste à la parole vers le siège qui attendait également le ferrailleur d'Aquos Dohen.