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Voix de l'Ombre
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Séance IÉdit de consolation valyrien
« De l’ordre ! Sénateurs, s’il vous plaît, de l’ordre dans l’assemblée ! »

Une fois n’était pas coutume, le sénat valyrien était plein à craquer. Chaque responsable politique valyrien avait choisi d’inviter autant de personnes que les règles centenaires de l’assemblée autorisaient. Si l’on y ajoutait les gardes prétoriens détachés de la première armée de Valyria – le Commandement I Fer – ainsi que les huissiers et les employés du Sénat, la grande coupole devait abriter plus de six cents personnes là où une séance habituelle n’en comptait rarement plus de deux cents. La salle avait beau être monumentale et grandiose, pouvant accueillir probablement deux mille personnes, elle semblait étrangement pleine tant cette affluence était inhabituelle. Au centre de l’assemblée, sur une estrade de marbre rose poli, Taecegor Noheneos, le polémarque du sénat, tentait tant bien que mal de se faire entendre et de ramener un peu de quiétude dans l’auguste chambre.

Pour la première véritable séance depuis l’achèvement du conflit avec l’Empire de Ghis, le cœur battant de l’âme valyrienne battait vite et fort. Ces dernières semaines, les couloirs et les ruelles avaient bruissé d’une activité intense. La puissante faction militariste, encore tout auréolée de sa gloire à la suite de la victoire contre la Harpie, avait déposé une proposition de loi qui allait être débattue par le sénat aujourd’hui. Au fil des tractations et des discussions, les grandes lignes de la proposition avaient fini par être connues des personnes s’y penchant dessus et ayant en général accès aux informations politiques de la cité. Si cette séance était si particulièrement, c’est qu’il s’agissait du premier acte éminemment politique depuis la fin du conflit. Le fait que les militaristes fassent le premier pas en disait déjà long sur les conséquences de la guerre sur le paysage politique valyrien. La séance qui s’ouvrait était donc l’occasion pour tous de contempler les nouveaux rapports de force et la dynamique politique héritée de la domination de l’armée valyrienne sur une grande partie des affaires courantes durant pratiquement cinq ans.

« Sénateurs, sénatrices, je vous en prie ! Asseyez-vous, asseyez-vous. Nous allons commencer. J’en appelle à votre calme, et à votre respect les uns des autres sous le regard des dieux et en l’honneur du peuple. »

Taecegor Noheneos était un vieil orateur qui parlait d’une voix de stentor. Il avait été choisi de nombreuses années auparavant pour son timbre qui résonnait parfaitement dans le vaste espace du sénat et qui lui permettait de se faire entendre correctement. Garant du calme et du bon déroulement des séances, il veillait à ce que chacun puisse s’exprimer sans être gêné ou intimidé. S’il usait souvent de tournures de phrases très symboliques, sa voix et sa réputation de ne pas se priver de montrer du doigt les mauvais joueurs politiques avaient de quoi calmer les ardeurs des plus chevronnés. Il s’en référait ainsi régulièrement au peuple – plus qu’aux dieux – lors de ses interventions, rappelant à qui voulait l’entendre que le sénat servait avant tout les Valyriens et non pas les intérêts des grandes familles. Il était profondément adulé et respecté par les sénateurs proches du groupe populiste qui voyaient en lui un défenseur des droits du peuple. La vérité était que ces formules très protocolaires étaient chères au polémarque qui savait qu’aucune famille n’irait se risquer à montrer un mépris ouvert à l’opinion populaire en pleine séance du sénat.

Peu à peu, telle une marée descendante, le calme revenait sous la grande coupole. Les accolades se brisaient pour laisser chacun retourner à sa loge, tandis que les discussions de collègues sénateurs qui ne s’étaient pas vus depuis parfois deux ans s’étiolaient. Enfin, la rumeur décrût jusqu’à ce qu’il n’y ait pratiquement plus un bruit. Tous étaient prêts pour l’ouverture. Les grandes loges regorgeaient de soieries et de richesses tandis que les yeux de tous allaient et venaient entre le polémarque qui allait ouvrir la séance sous peu, les Cinq qui étaient installés dans leur propre tribune, et les grands de la politique valyrienne. Certains, un peu moins concentrés, observaient avec un peu trop d’intensité les contours dévoilés par une robe échancrée ou les muscles saillant sous une toge négligemment entrouverte. Que voulait-on ? C’était une façon comme une autre de songer à honorer Meleys. Et Meleys, comme tous les autres dieux de Valyria, avait toute sa place au sénat.

« Très estimées Lumières de Sagesse, honorables Flammes de Vérités, seigneurs et dames dragons, citoyens et citoyennes de Valyria. Vous êtes réunis ici aujourd’hui pour honorer votre mandat et servir Valyria, son peuple et ses dieux. Votez en conscience et votez juste. Pour cette séance, le sénat est appelé à se proposer sur la proposition déposée par le général Lucerys Arlaeron. »

L’assemblée bruissa de plusieurs applaudissements vigoureux venant de la faction militariste mais également d’autres sénateurs et invités, reconnaissant la valeur du général et son apport substantiel dans la victoire finale. Tandis que d’un geste théâtral, le polémarque invitait Lucerys à décider s’il défendrait lui-même sa motion ou s’il enverrait un de ses hommes de confiance, la foule des décideurs retint imperceptiblement son souffle pour savoir qui serait le prochain à pénétrer dans l’arène.
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Séance au Sénat
Pareil au fracas de quelque trompette d’airain, le puissant coffre de Taecegor Noheneos domina sans effort le tumulte ambiant. « De l’ordre ! Sénateurs, s’il vous plaît, de l’ordre dans l’assemblée ! »

Lucerys ne sourcilla pas. Drapé d’une riche trabée de laine blanche décorée d’élégantes bandes de pourpre, le torse piqué d’une délicate fibule d’argent à mufle reptilien (précieux ouvrage, s’il en était, issu du savoir faire des artisans d’Aquos Dhaen), le patriarche dardait sur l’assemblée - ô combien vociférante et chamarrée - un regard attentif, quoique profondément hermétique à l’agitation sénatoriale. C’est que l’heure, enfin, n’était plus à la frivolité du Triomphe ! Après plusieurs semaines de débauche, d’insouciance et de sympathique léthargie, voilà que, doucement, l’Empire semblait revenir à une réalité autrement plus prosaïque - et pourtant essentielle. La vie, telle qu’elle l’avait été avant la guerre, devait reprendre son cours. Et avec elle, le Sénat, que le conflit avec la Harpie avait, pendant quatre années durant, vidé de ses représentants les prestigieuses loges de son antique coupole.

« Sénateurs, sénatrices, je vous en prie ! Asseyez-vous, asseyez-vous. Nous allons commencer. »

Jusqu’alors affairé à l’examen intérieur de son agenda politique, l’imminence de l’ouverture de la séance arracha finalement Arlaeron à ses ruminations, lequel, la nuque roidie par les années passées à manier l’écu et l’épée, se redressa sensiblement sur sa cathèdre. Installé dans l’un des nombreux gradins inférieurs du Sénat, dans une loge aux couleurs de sa faction, le général tourna un instant sa ganache sèche en direction des hommes assis à son côté. Là, tout près de lui, parés de leurs plus beaux atours et auréolés de gloire, @Aeganon Bellarys et @Maekar Tergaryon reposaient sur leur curule respective, à l’instar de @Laedor Arlaeron, que Lucerys avait prié de se joindre à lui. Le fils, après tout, n’était-il pas aussi Héros ?

« Très estimées Lumières de Sagesse, honorables Flammes de Vérités, seigneurs et dames dragons, citoyens et citoyennes de Valyria. Vous êtes réunis ici aujourd’hui pour honorer votre mandat et servir Valyria, son peuple et ses dieux. Votez en conscience et votez juste. Pour cette séance, le sénat est appelé à se proposer sur la proposition déposée par le général Lucerys Arlaeron. »

Son nom résonna dans l'hémicycle, et avec lui des applaudissements, sur lesquels le patriarche se leva - non sans un brin d’orgueil. Debout au milieu de la loge, le dos droit et l’allure militaire, Lucerys se coula calmement au bas de l’estrade de marbre rose, le flegme de sa démarche trahissant des décennies d’engagement et estocades politiques. Impressionné ? Arlaeron ne l’était plus. Plus depuis de longue et nombreuses années. Il était un fauve. Un vieux fauve rompu aux manigances du Sénat, dont il demeurait l’un des plus redoutable prédateur.

Il monta sur le promontoir de marbre et, l’assistance silencieuse, s’adressa d’une voix forte et claire aux tribunes.

« Très estimées Lumières, Sénateurs et Sénatrices, bienheureux polémarque, citoyens et citoyennes de Valyria. Voilà des années que certains, ici, n’avaient plus goûté au plaisir autrefois pourtant si commun de pareilles séances. Votre devoir envers Valyria vous a tenu éloigné de cet hémicycle. Quatre années d’efforts. De tourments. De privations. De sacrifices. Quatre années de souffrances. Quatre années de pertes, qui se seront soldées par la victoire de notre bienaimée République.

Le prix de notre triomphe n’aura pas été mince. Nous sommes nombreux à avoir perdu des êtres chers. Pères, époux, frères, fils, amis… Ces gradins sont peuplés de fantômes. Mais nous ne les oublierons pas.

Oui, nous avons vaincu. Et tous, nous espérons cette épreuve derrière nous. La guerre est finie, ai-je entendu les rhapsodes chanter. L’heure est à la fête. A la vie. Il nous faut nous tourner vers l’avenir, panser nos blessures et oeuvrer à des lendemains plus sûrs. A cela je réponds : vous avez raison. Mais pas sans reconstruire ce que la Harpie à tenter d’anéantir.

Nombreux sont encore ceux, à ce jour, à porter les stigmates de cette guerre. A vrai dire, nous en portons tous. Il suffit d’arpenter les rues de nos cités pour croiser des âmes à qui Ghis à voler jusqu’à l’espoir. L’espoir de vivre dans la dignité. L’espoir de grandir à l’abri du besoin. L’espoir d’un avenir.

La proposition que je défends devant vous, aujourd’hui, s’adresse à tous ces citoyens et citoyennes que nous refusons d’ignorer. Ainsi, nous proposons :

Aux veuves de guerre, premières parmi les victimes de l’Empire, une prise en charge matérielle par la patrie. Nous souhaitons qu’un logis soit assuré à toutes celles dont les époux sont tombés sur le champ d’honneur, et qu’elles soient dotées en cas de remariage.

Aux orphelins de guerre, innocents parmi les innocents, qui paient quotidiennement le prix de la loyauté de leurs pères, une incorporation, à titre gracieux, comme cadets de l’armée de Valyria. Nous demandons à ce qu’ils bénéficient du titre de “pupilles de la nation”, ce jusqu’à leur majorité et qu’en cas de mariage, ils soient eux aussi dotés.

Aux invalides de guerre, ces braves qui ont versé leur sang pour la sauvegarde de notre bien aimée République, la versation d’une rente de l’état, proportionnelle à leur incapacité. Nous souhaitons, en outre, que ceux ne possédant de moyen de subsistance puissent obtenir, de la part de la patrie, un logis. Pour ce faire, nous suggérons la création de domus des vétérans dans chaque cités d’importance de Valyria.

Croyez-bien, Lumières, Sénateurs et Sénatrices, citoyens et citoyennes, que j’espère cette guerre être la dernière. Il s’agit là, à la vérité, de mon voeu le plus cher. Hélas, la naïveté va rarement de pair avec l’âge, et mon expérience me dicte le contraire. Notre République a montré sa valeur, mais d’aucun pourrait voir en sa force une menace, et en sa détermination un défi. Aussi, et afin de prévenir quelque entreprise guerrière belliqueuse, nous demandons à ce que les villes martyres soient reconstruites et fortifiées, pour que plus jamais nos murs ne connaissent pareils tourments.

Voilà, Lumières, Sénateurs et Sénatrices, citoyens et citoyennes, la proposition qui est la nôtre. La faction militariste a à cœur la protection du peuple Valyrien. M’est avis qu’il ne s’agit là que de bon sens. En l’honneur de tous ceux que la Harpie a happé entre ses griffes, en l’honneur de tous ces destins brisés et de ce sang versé, je vous invite, chers confrères, à étudier sérieusement cette proposition.

Il n’est, aujourd’hui, nullement question de couleur politique, mais de dignité humaine.

Merci.
»

Une ultime œillade inquisitrice, et Lucerys rejoignit son siège, non sans saluer respectueusement le polémarque.
Baelor Cellaeron
Baelor Cellaeron
Le Seigneur-Soie

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Séance au Sénat
Un franc sourire ne dévoilant aucune dent, de petits yeux agiles plissés par une peau affaissée et une moue soigneusement étudiée, Baelor Cellaeron se tenait assis sous le dais de sa loge sénatoriale. Animal politique évoluant depuis un temps conséquent dans les arcanes du pouvoir valyrien, le maître du Pinacle – du nom de la forteresse qui servait de repère à sa famille – coiffait l’assemblée plénière d’un regard quasi heureux. Quel bonheur de pouvoir assister à la plus belle séance sénatoriale depuis plus de quatre ans. Tout le monde était présent, et cela faisait chaud au cœur du Cellaeron qui aimait constater la puissance de la démocratie valyrienne. Les Cinq et tous les sénateurs, les employés du Sénat et tous les invités : chacun était à sa place et la coupole était anormalement peuplée en comparaison de séances plus ordinaires.

Mais celle-ci ne l’était pas. Le pouvoir valyrien tout entier se retrouvait après quatre longues années pour débattre en tant que peuple. Il ne pouvait pas y avoir d’erreur, aujourd’hui s’écrivait l’Histoire. Oh non, pas la grande qui faisait et défaisait des empires mais celle qui planterait le décor pour les prochaines années. Verrait-on le reste des factions ployer l’échine face à la gloire absolue des sénateurs militaristes et des officiers présents pour représenter les forces armées au Sénat ? Ou au contraire, l’assemblée dédaignerait-elle la gloire des hommes vivant du métier des armes pour se concentrer sur les affaires courantes ? Cela semblait peu probable car l’ordre du jour était déjà fixé et en disait long.

Enveloppé dans un complexe enchevêtrement de soieries et d’autres tissus nobles, Baelor Cellaeron trônait : énorme patriarche d’une famille immense, père de nombreux bâtards, il avait choisi de s’afficher avec son épouse Myssaria et n’avait invité personne d’autre. Leurs ensembles étaient assortis dans un mélange époustouflant de vert et de jaune qui faisait ressortir la chevelure noire de jais de la Rhoynarde qui était sans doute la seule étrangère présente. A ses doigts boudinés, Baelor arborait une collection de bagues d’or et d’argent serties de pierres précieuses finement taillées tandis qu’un saphir gros comme un œuf de poule reposait sur le sillon de la poitrine de son épouse, habilement mis en valeur par un décolleté savamment conçu pour sublimer et le corps, et le bijou. Baelor lui-même arborait une chaîne d’argent et de cuivre piquée de grenats. Myssaria avait complété sa tenue avec un discret diadème de bronze incrusté de turquoise rappelant ses originaires princières.

« Très estimées Lumières de Sagesse, honorables Flammes de Vérités, seigneurs et dames dragons, citoyens et citoyennes de Valyria. Vous êtes réunis ici aujourd’hui pour honorer votre mandat et servir Valyria, son peuple et ses dieux. Votez en conscience et votez juste. Pour cette séance, le sénat est appelé à se proposer sur la proposition déposée par le général Lucerys Arlaeron. »

La voix puissante de Taecegor Noheneos venait de résonner et déjà, la rumeur s’atténuait. Se rasseyant après avoir conversé avec ses voisins, Baelor regardait autour de lui, cherchant des visages pour scruter leurs réactions. Il y avait évidemment le camp militariste qui faisait d’ores et déjà bloc autour du patriarche des Arlaeron : Lucerys Œil d’Argent. Ce dernier se tenait tel un pilier de l’assemblée, et il n’y avait aucune appréhension ou surprise dans son attitude. L’homme était rompu à l’art et à l’exercice sénatorial, bien plus que la majorité de l’assemblée. Il se tenait assez bas, proche de l’estrade et du centre : là où les plus influents siégeaient, proches des Lumières. Il était encadré de ceux que tout le monde avait identifié comme ses héritiers spirituels : le général Maekar Tergaryon, fils de Vaegon Tergaryon, qui avait longtemps tenu les mercantilistes d’une main de fer, et le sénateur Aeganon Bellarys qui avait embrassé la carrière militaire pour devenir l’un des officiers les plus en vues parmi les cercles politiques. Tous deux auraient sans doute l’occasion de faire leurs preuves devant les sénateurs, mais une question se posait : lorsque le vieil Œil d’Argent prendrait sa retraite sénatoriale : qui lui succèderait ? Qui pouvait dire si les deux protégés, dont l’amitié était connue de tous, sauraient s’arranger en bonne intelligence ? Lucerys Arlaeron n’était pas encore mort et il le fit savoir en se levant d’un geste fluide et élégant témoignant de sa bonne santé malgré son âge relativement avancé. D’une voix tonnante et où chaque syllabe se détachait avec précision, il entama son discours.

Feignant de l’écouter avec attention, Baelor hochait la tête à des intervalles plus ou moins réguliers et plus ou moins calculés. Il réfléchissait plutôt à ce que ce scrutin allait signifier pour lui. Il savait les mercantilistes relativement peu convaincus par la proposition des militaristes. La plupart de ses compagnons avaient été échaudés par les coûts stratosphériques qu’allaient représenter toutes les propositions. Pour les calmer, Baelor avait cherché à amender la proposition de Lucerys en prenant directement contact avec lui, sans succès. Cela importait peu car Baelor avait tout de même obtenu ce qu’il convoitait : l’aide future du maître-argentier d’Aqos Dhaen dans une affaire où il avait besoin d’aide. Cela valait bien le sacrifice d’une partie des richesses extorquées à la Harpie par le traité de paix. Il avait peiné à convaincre ses fidèles de le suivre dans cette épopée en leur promettant que cela leur assurerait le contrôle de la faction à long-terme. Il espérait en voir d’autres se rallier à lui. Il était convaincu que l’arrangement avec Lucerys ne tiendrait qu’en cas de victoire à l’assemblée, ce dont il doutait assez peu. A peine l’Arlaeron se fut rassis que Baelor se jeta sur l’occasion et fit signe au polémarque dont il avait assuré le concours en lui graissant la patte plus tôt dans la semaine. Rien ne devait être laissé au hasard. Il était le premier mercantiliste à prendre la parole depuis le retrait de Vaegon Tergaryon au profit de sa fille et il n’avait pas l’intention de laisser à quelqu’un d’autre le bénéfice du moment. Il descendit promptement vers l’estrade centrale avec une agilité qui étonnait toujours malgré sa masse rebondie. Il eut un sourire jubilatoire en saluant sa camarde mercantiliste Echya Odenys avant de rejoindre l’estrade centrale sur laquelle il s’inclina brièvement devant le polémarque et les membres du Conseil. Puis, il débuta :

« Très estimées Lumières, chères collègues et auguste polémarque, chers concitoyens, je vous remercie pour présence en ces lieux. Merci à toi, Sénateur Lucerys, pour ton brillant exposé. Quant à vous autres, je souhaite vous rassurer : je serais bref. Et ce n'est pas une formule, je vous en fais la promesse ! Il est évident que la guerre a eu un coût, et je ne trouverais personne parmi mes camarades pour en dire le contraire, débuta-t-il avec un grand sourire charmeur. Tout le monde savait à quel point les mercantilistes avaient souffert de la rupture des routes commerciales orientales.

Voici quatre ans que Valyria n’a plus connu la paix et la prospérité. Aujourd’hui, enfin, nous pouvons nous retrouver tous ensemble et communier en tant que peuple et civilisation. Nous avons réussi à triompher de l’empire le plus puissant du monde et, je pense, cela vaut bien une salve d’applaudissements à direction de notre armée et du sang qu’elle a versé.»

Alors que se taisait Baelor, il arborait toujours cette mine presque ahurie où le sourire était apposé comme un masque sur une chair flasque dissimulant un esprit redoutable. Des applaudissements polis et réservés montèrent des bancs mercantilistes, d’autres furent plus appuyés du côté des suivants de Baelor et de la faction civiliste tandis que les militaristes applaudissaient à tout rompre. Le Seigneur-soie savoura son moment : l’assemblée entière bruissait de sa suggestion. Marchant en cercle pour voir tout le monde et rester actif à l’œil de son auditoire, il leva la main pour demander le silence.

« Cependant, il s’interrompit avec ce sourire figé qui semblait aussi frustré qu’heureux. Les applaudissements décrurent et stoppèrent. Cependant, nous devons garder à l’esprit que notre économie a, elle aussi, été profondément endommagé et les marchands, les négociants et les artisans ont souffert de ne pouvoir vendre leur production et le fruit de leur négoce. Mes affaires personnelles ont-elles-même largement été impactées par le contexte politique des dernières années. Et j’en suis fier. Nous avons, nous aussi, porté notre part du fardeau et ces pertes sont notre participation à l’effort collectif. Je vous accorde que certains considèreront qu’elle ne vaut pas le prix du sang du peuple et j’en conviens, malgré le fait que nous avons tous perdu des êtres chers.

Aussi, et en gardant à l’esprit l’ampleur des dépenses que va nécessiter la proposition du Sénateur Lucerys, j’appelle tous mes amis, mes chers collègues et mes estimés confrères à soutenir de tout leur poids cette résolution. Durant quatre ans, nous avons été une armée avec un État. Il est temps que nous revenions à un État avec une armée, comme tous les autres pays de ce monde. Soutenons la résolution de l’édit de consolation et montrons-nous à la hauteur de l’Histoire et de notre peuple. Cela n’a pas de prix et ne saurait être considéré dans l’ordre de ce que notre génération a déjà réussi à achever. Demain, qui sait où la civilisation valyrienne s’arrêtera ? Le ciel-même n’est pas la limite grâce à la bénédiction de nos dragons. Alors si nous avons le pouvoir de marquer l’Histoire à tout jamais et d’en changer la face, souhaitez-vous que les générations futures se souviennent de cette grande époque et de leurs ancêtres comme d’une nation de boutiquiers scrupuleux ou d’un peuple conquérant qui a pris soin des siens tout au long de sa marche vers la gloire ? Chers amis, estimées Flammes de Vérité et Lumières de Sagesse, soyons à la hauteur de notre passé et dignes de notre futur. Honorons les nôtres pour leurs efforts !

Soyons un peuple, une fois encore !

Je vous remercie.
»
Elaena Tergaryon
Elaena Tergaryon
Sénatrice

Séance au Sénat


Pareil au fracas de quelque trompette d’airain, le puissant coffre de Taecegor Noheneos domina sans effort le tumulte ambiant. Le Sénat. Bien des fois m’étais-je aventurée dans cette salle immense surmontée d’une coupole grandiose, j’avais admiré les tapisseries, les sculptures et autres ornements de fer, longuement depuis la loge j’avais admiré ces grands orateurs qui s’étaient succédé sur l’estrade. Sans subjectivité aucune, mon père avait toujours été l’un des meilleurs d’entre eux. Il y avait une expression bien connue au sein de la faction Mercantiliste et qui disait que Vaegon Tergaryon aurait pu convaincre un homme à se jeter à l’eau par la simple puissance de ses mots. Alors longuement, je m’asseyais dans la loge qui m’était réservée, et longuement j’observais et écoutais les circonvolutions, parfois sans fin, des débats sénatoriaux. Il y avait toujours quelque chose de fascinant à observer ces échanges parfois violents mais toujours maîtrisés, comme si chacun s’évertuait à conserver ce cadre invisible de cordialité feinte nécessaire à toute discussion civilisée. J’observais les visages rougir à mesure que la colère ou la frustration s’emparait de l’un des défendeurs. J’observais les gestes emportés et les cris de désapprobation lorsque celui qui avait pris la parole s’était risqué à une provocation trop ouvertement exposée. J’écoutais, également, les conversations qui m’entouraient, celles de ceux qui ne prenaient pas part au débat mais n’en manquait pas un seul instant. Ils étaient, eux également, part intégrante du spectacle qui se déroulaient entre ces murs glorieux.

Là était sans doute mon plus grand enseignement. Tout ceci était un spectacle.

Il y avait bien sûr l’enjeu politique, mais il était éminemment public. A mesure que les séances passaient, je découvrais qu’il était souvent moins question de ce qui était dit – même s’il était de bon ton d’avoir des choses à dire – mais de la manière avec laquelle cela était dit. Il fallait le bon ton de voix, une panoplie d’expressions faciales et corporelles pour appuyer l’émotion que l’on souhaitait faire transparaître. Il fallait connaître son public, oh pas seulement ceux qui se trouvaient face à vous dans l’hémicycle mais également ceux qui se trouvaient dans les loges, ceux qui se trouvaient dans les loges plus modestes et lointaines, et surtout ceux qui se trouvaient en dehors même de ce lieu sacré. L’enjeu était même davantage en dehors qu’au-dedans. C’était en soi un paradoxe qui m’avait frappé la première fois que l’opportunité m’avait été donnée d’assister à une séance. A mesure que le temps avançait, il n’était plus tant question de convaincre les autres sénateurs, mais de s’assurer l’appui d’un peuple ayant souffert d’années de guerre et de lourdes pertes. Ils avaient été les victimes collatérales de la rivalité entre deux puissances, et ils seraient la clé de toute victoire à venir s’il fallait y en avoir d’autres.

Voilà pourquoi nous étions, en ce jour, réunis à nouveau. Mon point de vue avait cependant changé. Je n’étais plus de ceux qui observent depuis les loges, à bonne distance. J’étais en bas. Au cœur de ce tout. Assise sur ce même siège qu’avait occupé mon père durant de si longues années.

Combien de regards surpris avais-je croisé depuis mon entrée au sein de Drivo ? La stratégie avait été de rassembler le plus de soutiens possibles au sein de la faction tout d’abord, parce que tout était une question d’image. J’avais donc passé les portes de la grande salle du Sénat entourée de la dizaine de sénateurs de notre faction les plus fidèles à mon père. Certains avaient été plus difficiles à convaincre, d’autres étaient venus d’eux-mêmes, les plus proches conseillers de mon père notamment qui avait reçus les fameuses instructions de la part du chef de famille. Alors que nous prenions place, ils s’étaient installés autour de moi comme un rempart humain face à ce qui était mon premier pas dans une arène où déjà les fauves affutaient leurs griffes et dents. Il y avait quelque chose de rassurant dans ce déploiement autour de moi, les visages directement à mes côtés étaient amis – ou alliés à minima, et les voix qui chuchotaient sur mon passage n’en étaient que plus lointaines. Elles chuchotaient bien cependant, je n’avais pas la naïveté de croire que mon arrivée au sein de Drivo en tant que nouvelle sénatrice ne serait pas le sujet central de commentaires plus créatifs les uns que les autres.

Le sénateur directement à ma droite, Maelion Velnarys, avait rencontré mon père lorsqu’ils n’étaient que deux jeunes hommes effectuant leurs services militaires. La rivalité des premiers temps avait laissé place à une proximité d’idée, puis à une amitié puissante et profonde. Il avait été son premier soutien lorsqu’ils étaient eux-mêmes de jeunes sénateurs, et lorsque Vaegon avait pris la tête de leur faction, Maelion s’était immédiatement rangé à ses côtés.  Le sénateur Velnarys n’étaient pas de ceux qui prenaient la parole sans vergogne au sein de Drivo, il n’en avait guère besoin puisque là était le rôle de Vaegon, mais il était un formidable diplomate. Silencieux en public, il avait une capacité d’adaptation unique en son genre, et sans doute était-ce cela qu’avait valorisé Vaegon en lui confiant toujours plus de responsabilité et d’influence au sein de la faction. Aussi, il avait été le premier vers lequel s’était tourné le patriarche Tergaryon lorsqu’il avait été question de préparer sa succession. D’un naturel charmeur, bien que discret, d’aucun disait qu’il aurait pu aller bien plus loin que son rôle de bras droit.

« Sénateurs, sénatrices, je vous en prie ! Asseyez-vous, asseyez-vous. Nous allons commencer. J’en appelle à votre calme, et à votre respect les uns des autres sous le regard des dieux et en l’honneur du peuple. »

« Le rideau s’ouvre. »

Il s’était penché vers moi, légèrement, chuchotant à mon oreille alors que ma respiration se coupait immédiatement. Les regards qui s’étaient concentrés sur moi à mon arrivée me quittaient enfin, et nous reportions tous notre attention sur l’estrade majestueuse depuis laquelle s’était élevée la voix de Taecegor Noheneos.

« Très estimées Lumières de Sagesse, honorables Flammes de Vérités, seigneurs et dames dragons, citoyens et citoyennes de Valyria. Vous êtes réunis ici aujourd’hui pour honorer votre mandat et servir Valyria, son peuple et ses dieux. Votez en conscience et votez juste. Pour cette séance, le sénat est appelé à se proposer sur la proposition déposée par le général Lucerys Arlaeron. »

Quelques applaudissements s’étaient élevés. Je m’étais contenté de sourire à la vue de mon frère que quittait d'un pas leste le sénateur Lucerys Arlaeron pour rejoindre l'estrade. Je refoulais toute sorte de pensées attendries face à la figure glorieuse de celui que j’aimais. Je n’étais guère présente pour cela, et il fallait à présent que je sois capable de faire la distinction entre la femme que j’étais, et la sénatrice que je devenais.

Le discours du sénateur Arlaeron était de ceux qu’il est difficile d’ignorer. Non seulement parce que l’homme possédait une autorité naturelle que personne, à Valyria, n’aurait su lui contester, mais également parce que le sujet était éminemment stratégique. Le peuple était la clé de voute de la stabilité de la société valyrienne, et ce peuple avait souffert durant de longues années. Il s’agissait à présent non seulement de reconstruire notre société, mais avant tout d’en assurer la stabilité. Cela devait représenter un certain effort financier, et la faction mercantiliste n’était guère encline à consentir à des dépenses conséquentes alors que la guerre avait largement impacté ses propres ressources. Il fallait reconnaître cependant que la mesure paraissait incontournable, aussi démagogique puisse-t-elle sembler. J’avais vu, moi-même, la souffrance des veuves et orphelins d’Oros alors même que la guerre ne faisait que commencer. Je n’avais pu ignorer la détresse de ces familles plongées dans une misère soudaine dont n’avait d’égale que la souffrance et le traumatisme de la perte. Les militaristes avaient eu le nez fin de se positionner ainsi. Toute faction contre se serait exposée à l’ire du peuple et la désapprobation des autres factions. Et la reconnaissance du peuple se dirigerait immanquablement en direction de ceux qui avaient pris la parole, en ce jour, pour défendre ses intérêts.

« Vermine. »

J’avais à peine murmuré ce mot, comme une malédiction lancée au vent, alors que se levait déjà Baelor Cellaeron. C’était à peine s’il avait attendu que le senateur Arlaeron ne reprenne sa place dans l’hémicycle avant de se lever à son tour. Sa stratégie était si grossière qu’elle en était insultante. Cette opportunité était la sienne. Mon père n’était pas là. Et moi qu’étais-je ? Pour l’instant tout au plus un sujet de discussion. Les quelques soutiens qui m’entouraient n’étaient guère assez nombreux pour tout à fait faire douter les autres de la légitimité potentielle de Baelor. Et après tout pouvais-je le blâmer pour cette tentative, bien que trop évidente, de prise de pouvoir ? Je n’étais qu’une jeune fille. Je succédais à mon père, certes, mais que savais-je des jeux politiques et des enjeux du Sénat ? Ce que l’on m’avait appris, ce que j’avais observé de loin, mais aujourd’hui était ma première séance, et il était bien décidé à ne pas me laisser la moindre opportunité de raffermir une quelconque influence sur les sénateurs de la faction.

A l’entente de mon souffle, Velnarys déposait une main apaisante sur la mienne. Il n’avait jamais douté que le Cellaeron verrait en cette séance une opportunité en or de se positionner. Il me l’avait dit, nous n’étions pas dans la même démarche. Baelor menait une course de vitesse, il lui fallait agir vite, frapper fort. Mais l’homme n’avait qu’une résistance physique médiocre. Alors il était question, pour nous, de faire durer sa course de vitesse… jusqu’à ce qu’il ne puisse plus courir du tout. Maelion retirait sa main presque immédiatement, me laissant non moins tendue mais légèrement plus calme. J’écoutais, non sans déplaisir, la tirade de Baelor, mon déplaisir grandissant à mesure que je constatais qu’il portait avec talent une pensée qui l’amenait à se ranger du côté de Lucerys Arlaeron. Baelor ne faisait jamais rien gratuitement. Il avait un intérêt à soutenir la proposition des militaristes. Et sans doute était-ce cette musique de fond qui me tendait. Bien plus encore que sa tentative grossière pour m’éclipser.

« Ne dis rien. »

A mesure que le discours, mon corps se faisait plus tendu, ma bouche plus pincée bien qu’arborant un sourire poli de circonstance. Baelor invoquait ses affaires impactées, le prix du sang, mais que savait-il de ce prix ? L’homme s’était enrichi comme personne et qu’avait-il perdu ? Rien. Surement pas son culot du moins, de cela nous pouvions tous témoigner. Velnarys connaissait bien le caractère de notre famille, et notre propension à ne faire que très rarement ce qui nous est conseillé. Il était parvenu à une certaine maîtrise de Vaegon, du fait de leur confiance mutuelle, mais je n’étais pas mon père.

« Elaena, ne dis rien. Pas maintenant. »
« Je suis désolée. »

Le discours de Baelor prenait fin, et à peine avait-il refermé la bouche que je faisais signe au polémarque afin de prendre la parole. Je me levais, consciente de ma position plus que bancale, mais je ne pouvais pas rester silencieuse. Croisant Baelor, je lui adressais un sourire, sourire cependant moins grand que celui que j’adressais à Echya Odenys à mon passage à ses côtés. Des sourires qui se voulaient assurés alors même que mes jambes flageolaient. Pendant une seconde, il m'avait semblé que je ne serais pas capable de faire l'ascension des quelques marches qui me séparaient de l'estrade. Une nausée terrible s'était emparée de moi et il me semblait que mes mains tremblaient tant qu'il m'était impossible de le dissimuler. A présent sur l'estrade, je restais un instant silencieuse, mal à l'aise, effrayée presque par mon propre geste fou. Face à cette audience, je me maudissais d'avoir cette impulsivité, cette incapacité à me maîtriser, car voilà où cela m'avait mené ! J'étais une idiote qui se rêvait sénatrice. Pourtant, à présent que j'étais sur cette estrade, il n'était plus temps de reculer. Un regard vers Maekar, un autre vers Aeganon puis enfin vers Maelion Velnarys, et déjà je sentais qu'il était temps de me jeter au feu.

« Très estimées Lumières, chères collègues, vénérable polémarque et chers concitoyens.»

Une nouvelle inspiration tortueuse, je fermais les yeux un instant puis reprenait la parole, mon sourire le plus grand possible aux lèvres.

« Si vous aviez pu questionner le choix de notre premier porte-voix aux premières minutes de son discours, vous voici certainement convaincus par ses talents d’orateurs ! Je ne m’adresserai pas aujourd’hui aux sénatrices et sénateurs, j’en ai laissé le soin à mon très estimé collègue.

Non. Ceux à qui je souhaite m’adresser sont les femmes et les hommes qui endossent ce rôle avec dignité et noblesse. Ces femmes et ces hommes qui, chargés d’une mission supérieure à leur être, ont pour coutume de laisser à la porte les tourments de leurs âmes au profit de leur rôle public.

Je souhaite m’adresser, en cet instant, à ces âmes. Ainsi ne parlerais-je pas, comme mon estimé collègue, d’or, de dépenses et de coûts. Là est l’essence de ma mission au sein de la faction Mercantiliste, là est ma préoccupation quotidienne. Mais aujourd’hui, je suis devant vous, Elaena Tergaryon, et je vous parlerai de ce prix du sang que je porte dans ma chair.

Gaemon Lyseon, Daelor Vaekaron, Saenor Valineon, Maelor Vaekaron, Taelor Vaekaron, Vaekar Tergaryon, mon oncle, et Aenar Tergaryon, mon propre frère. Haeron, Naehrys. Combien d’autres encore avons-nous perdu et dont je ne pourrai citer le nom sous peine d’étendre cette séance au-delà du raisonnable ? Mais vers lesquels mes pensées se portent à cet instant.

En tant que Sénatrices et Sénateurs, il nous faut nous prononcer sur cette proposition du Sénateur Arlaeron, et sans doute certaines sensibilités pourraient y voir des obstacles comme l’a souligné mon estimé collègue. Mais nous avons, tous, chacun d’entre nous, payé le plus lourd des tribus de la guerre… Celui du sang. Nous le portons en nous. Nous partageons cette souffrance avec le courageux et digne peuple de Valyria. Alors devrions-nous permettre que ce peuple, qui tout entier participe du rayonnement de notre belle civilisation, doive ajouter à la liste de ses souffrances la perte d’un foyer ? La vue d’un enfant affamé voire condamné ? L’obligation de mendier et la perte de cette dignité si propre à notre peuple ?

Il ne s’agit pas de ce que penserons les générations suivantes. Il ne s’agit pas de marquer l’Histoire. Cela nos braves soldats et notre peuple l’ont fait, et le referont s’ils le doivent. Cela nous nous efforcerons de le faire chaque jour de nos vies où nous sera donné la chance de servir notre belle République. Nous ne parlons pas là non plus de gloire ou d’argent.

Non. Il s'agit, en ce jour, de protéger coûte que coûte notre identité. Cette dignité. Cette résilience. Cette beauté qui fait de Valyria un brasier au cœur de l’obscurité !

Et voilà enfin que notre âme, notre humanité, ne font plus qu’un avec cet honneur suprême que nous avons de siéger ici ! Nos soldats, par les armes, ont défendu notre foyer commun, en ont protégé la flamme vitale… Achevons aujourd’hui de défendre, par les mots et les actes, les millions de foyers que l'avenir menace d'éteindre. »



Je marquais une pause, à bout de souffle mais exaltée par un discours motivé par une énergie que je ne me connaissais pas, une énergie venue de mes tripes elles-mêmes. Alors je reprenais, d'une voix plus forte.


« Pour que jamais le feu de Valyria ne puisse s’éteindre ! Pour qu’aucun de ceux ayant sacrifié à Balerion ne soit dépouillé de leur bien le plus précieux : leur humanité.

S’il devait rester un doute, mes chers et estimés collègues, j’appelle au soutien de la proposition du Sénateur Arlaeron. Laissons, par pitié, à la porte les divisions, rivalités et préoccupations de faction. Nous aurons tout loisir de les reprendre demain. Agissons comme un corps uni. Agissons en dignes filles et fils de Valyria.

Je vous remercie. »


A bout de souffle, je restais un instant sur l’estrade, un sourire aux lèvres alors que déjà s’élevaient les applaudissements, venant de toutes les factions. Certains applaudissements s’étaient élevés tout au cours du discours, d’autres sénateurs avaient régulièrement ponctué mes paroles d’un cri d’approbation, de hochement de tête, mais c’était à présent un bruit presque assourdissant qui s’élevait dans l’hémicycle. Oh non pas assourdissant parce qu’il s’agissait d’une approbation unanime, à vrai dire je n’étais guère capable d’évaluer la portée de mon discours tant il m’avait été dicté par l’instinct. C’était assourdissant parce que c’était bien la première fois que j’étais applaudie de la sorte.

Descendant de l’estrade avec grâce, je rejoignais mon siège non sans accrocher le regard de plusieurs sénateurs qui m’accueillaient avec un sourire. Assise à présent, je respirais enfin et comprenais que cela faisait de longues minutes que j’étais restée en apnée. Je jetais un regard discret vers Baelor Cellaeron avant de me retourner et fixer l’estrade avec détermination. Maelion Velnaris se penchait à présent vers moi.

« Bon et bien, que la guerre commence. »

Voyait-il que je tremblais ? Sentait-il que ma gorge brulait tant elle était nouée et sèche ? Sans doute aurais-je pu m'évanouir s'il ne s'était pas s'agit de donner le change. J'avais peur. L'adrénaline d'avoir fait un choix et de l'avoir tenu publiquement brouillait ma vision. Un nouveau regard discret que je coulais à présent en direction des tribunes militaristes. Lucerys Arlaeron était là, fier, grand et son regard accrochait le mien à la minute où ils se croisaient. Oui, j’avais pris un risque. Peut-être même serait-il le début de ma perte. Mais je ne perdrais pas sans combattre. Je restais impassible alors que mon regard était toujours harponné à celui du sénateur Arlaeron.  

Oui, ma guerre pouvait commencer.


Arrax
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Vaemor Baeriar, Sénateur Populiste.




Chaque faction à sa place, chaque personne à son rôle. Quatre années s’étaient écoulées, égrainées, s’étaient marquées dans les chairs de chacun et de chacune. Certaines de ces âmes qui peuplaient cette assemblée il y a encore de cela quelques années, n’étaient désormais plus. Elles avaient été remplacées par des créatures plus jeunes et plus vives. Tel était le destin de toute chose, de tout un chacun. Un jour, lui aussi serait remplacé. Tout comme ces hommes qui siégeaient à ses côtés. Leurs prénoms et noms iraient peut-être jusqu’à s’effacer des mémoires du commun, pour ne rester que mentionnés dans ces écrits qui rythmeraient la vie des Valyriens d’aujourd’hui et de demain. Car après quatre années de guerre et de peur, telles étaient les choses à fêter. Le renouveau et une allégresse retrouvée.

Vaemor Baeriar faisait partie de ces hommes qui étaient restés bien malgré eux à Valyria, au cours du conflit. Noble, bien que de petite naissance, l’homme souffrait de ces maux qu’on ne pouvait qu’imputer à sa seule naissance, qui, mal assistée, l’avait laissé marqué au niveau d’une jambe il y a de cela bientôt cinquante ans. Cette même blessure qui l’avait forcé, des années durant, à se consacrer au savoir, aux lettres, et aux écrits en tous genres alors que ses frères pouvaient se vanter de savoir tenir une épée. Un savoir qui l’avait porté au Sénat. Avec bien d’autres choses encore, il est vrai. Le temps passé dans ses livres, aussi bien que dans les rues de Valyria, lui avait attiré une certaine sympathie de la part des gens du commun. Ne leur ressemblait-il pas, avec sa démarche quelque peu gauche, avec ses préoccupations bien lointaines de celles de ces grands nobles, entourés de dragons ?

« Voilà une assemblée qui entrera dans l’Histoire. songea l’homme, un fin sourire aux lèvres. Nous voilà tous réunis, comme auparavant. Ces nouvelles têtes devront se faire à nos jeux bien rapidement. Tyraxes seule peut savoir s’ils seront à la hauteur de cette pièce qui se joue à chaque instant en ces lieux. »

Une offre bien généreuse était faite, en ce jour. Une offre que Vaemor aurait sans doute pu faire lui-même. Aurait-elle été acceptée ? A cette réponse, sans doute n’aurait-il jamais de réponse sûre et certaine. Toujours est-il que bon nombre de populistes offrirent de généreux applaudissements quant à ces mesures, qui, il fallait l’espérer, seraient prises. Applaudissements auxquels Vaemor ne pouvait que se mêler. Tous avaient souffert au cours de ce conflit. Absolument tous et les petites gens restaient les plus sévèrement touchés. Qu’il était dur de remplacer ces mains perdues dans une guerre lointaine, de consoler ces cœurs qui ne pourraient jamais réellement faire leur deuil. S’il ne fallait pas en oublier les jeux de pouvoir qui se jouaient là, comme le Seigneur Soie qui semblait avoir pris un malin plaisir à ne point respecter les usages habituels quant à la prise de parole, ces résolutions pourraient sans doute apaiser quelque peu cette douleur qui ne manquerait pas de resurgir une fois que le reste de liesse provoquée par le Triomphe se serait totalement envolé.

Aidé de sa canne de bois clair, Vaemor rejoignit à son tour l’estrade. Si sa démarche était gauche, il avait appris avec le temps à la faire oublier, à ne point s’en formaliser. Son esprit était ce qu’il fallait remarquer chez lui. Ses paroles étaient ses flèches, son âme, son arc. Voilà ce pourquoi il était là. Voilà ce pourquoi, parmi les Populistes, il était celui qui s’exprimait le plus souvent. Après tout, ne serait-il pas dommage de ne point profiter d’une arme affûtée ? Vaemor avait pour lui un âge, certes peu avancé, mais un savoir qui l’était bien plus. Une certaine sagesse, disait certains. Si Tessarion ne l’avait pas gratifié de cette beauté presque étrange qui habitait de nombreux Valyriens, Tyraxes lui avait fait bien d’autres présents. C’est donc de sa voix grave, mais posée, que Vaemor prit la parole :

« Mes frères, mes sœurs venus de tous horizons. Vous qui avez soufferts de la guerre de bien des manières, de bien des façons, toutes plus atroces les unes que les autres, je vous conjure d’écouter ces paroles qui sont les miennes et celles de bien d’autres encore. Ceux et celles qui m’ont précédé sur cette estrade ont parlé fort justement, cela va sans dire. Le Peuple a souffert et souffrira encore de cette guerre. C’est là la malheureuse suite des choses. Bientôt, ce glorieux Triomphe dont nous avons tous été les témoins ne sera plus qu’un souvenir pour ceux et celles qui ont faim. Pour ces enfants qui n’ont ni parents, ni dragon, pour veiller sur eux. Pour ces femmes qui sont menacées de bien des maux que même nos Dieux réprouvent car leurs époux, leurs frères, leurs cousins, ne sont point revenus comme vous. Pour toutes ces âmes en peine, pour toutes ces âmes qui ne peuvent même plus gratter la terre, qui ne pourront compter que sur la charité si rien n’est fait en leur sens, les Populistes ne peuvent que se joindre à ce projet. Un projet qui rendra le monde de demain plus juste que celui d’hier. Qui permettra à tous et à toutes de panser ses blessures, de pleurer et de rebâtir ce qui a été détruit et bien plus encore. Mes frères, mes sœurs, Sénateurs, Sénatrices, Lumières qui illuminent cette assemblée de leur Sagesse, le temps de la souffrance se doit de s’achever pour tous et toutes. Puissent nos paroles vous guider vers le seul choix qui reste à faire. Le seul choix juste. »

Ces derniers mots prononcés, Vaemor salua l’assemblée comme il se devait. Quittant l’estrade toujours appuyé sur sa canne, il reprit sa place avec un soulagement qu’il prit le soin de dissimuler. Les années passant, sa jambe le faisait de plus en plus souffrir. Un jour viendrait où sa canne ne lui suffirait plus pour se tenir debout. Mais d’ici là, bien d’autres débats se dérouleraient sous son regard et bien d’autres lignes se devraient d’être rédigées. Et tant que son esprit ne lui faisait pas défaut, Vaemor jouerait son rôle. Que le Peuple de Valyria soit rassuré. Il était entendu et défendu.
Voix de l'Ombre
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Daeron Gazarelys, Sénateur de la faction religieuse



« La parole est à présent à l’honorable Sénateur Daeron Gazarelys. »

La voix de Taecegor Noheneos avait résonné à nouveau dans l’enceinte, interrompant applaudissements et murmures. Le silence se fit, entrecoupé par quelques échos curieux. Pour les plus anciens dans l’assemblée, le fait était suffisamment rare pour être souligné, le futur orateur ne prenant que rarement la parole. Pour les plus jeunes, le nom résonnait avec son cortège d’ombres mystérieuses. Ils en avaient entendu, à propos de cette figure de la politique valyrienne. Et tous, à présent, observaient l’improbable cérémonial qui précédait sa déclaration. Quatre serviteurs empoignèrent le tronc enveloppé dans sa toge immaculée, tandis que deux autres apprêtaient un siège face au pupitre de marbre qui servait aux allocutions. Leur fardeau en mains, les jeunes valets parvinrent, non sans mal, à le hisser sur la chaise, et l’y sanglèrent comme ils purent, pour que, emporté par les élans de son unique bras, le représentant parvienne à s’exprimer. Tous purent voir, alors, ce qui lui restait de visage commencer à s’étirer en un sourire douloureux, du moins, c’est ce qu’ils devinèrent, tant la face simiesque était difficile à lire et à décrire. Son œil valide parcourut l’assemblée, et sa noirceur en fit frissonner certain. On murmurait que son regard était plus sombre que celui de Balerion en personne, et qu’il apportait la froideur du tombeau, qui n’avait pas voulu de lui et se vengeait en terrorisant tous ceux qui avaient l’audace de poser leurs yeux sur Daeron Gazarelys, l’élu du dieu de la Mort.

Tout jeune homme, ce fils d’une ancienne et noble famille du sud de Valyria avait vu toute sa famille périr dans l’effondrement de leur demeure dans un glissement de terrain. Après quatre jours, il avait été extirpé des décombres, tuméfié, brisé, broyé, mais en vie. Le miracle avait fait le tour de Valyria, et le Collège des Mages s’était employé à le sauver. En le voyant, certains ne pouvaient s’empêcher de se demander s’il n’aurait pas été plus raisonnable de le laisser périr. Il avait fallu amputer ses jambes et son bras gauche, tandis que rien n’avait pu sauver son œil droit. Les os du visage avaient été reconstitués par la magie, mais la chair avait ondulé, macéré, pour former un amas hideux qui gâchait toute la partie droite de sa face. Était-il encore un homme ? Difficile à dire. Mais à son réveil, il avait proclamé avoir été sauvé par les dieux en personne. Et que cette tuméfaction putride qui lui mangeait désormais le faciès était en réalité la marque de Balerion en personne. Avec le temps, en effet, elle forma son symbole sacré, et on se mit à croire à ses élucubrations. Le clergé de Balerion l’aida à reprendre sa vie en main. Depuis, il travaillait à reconstruire la fortune des Gazarelys. Vu par certain comme marqué par la main des dieux, il avait bénéficié d’un soutien important des prêtres en vue d’une élection au Sénat. Son histoire émouvait les foules. Il n’y avait pas eu d’adversité. Et depuis, il siégeait au sein de la faction religieuse, n’hésitant pas à rappeler les tenants de la religion valyrienne, pestant contre la culture libre qui régnait dans la péninsule à ce sujet, promettant fureur et tempêtes aux ennemis désignés par le Divin. L’affront fait aux enfants des dieux lors de la Trahison de Borrash l’avait convaincu de la volonté de ses maîtres. Ghis devait être punie. Ghis devait souffrir. Et un jour, Ghis devrait être anéantie. La Mort appelait ses enfants. L’Au-delà clamait ses fils. Valyria s’y était complu. Et maintenant ? Sa bouche se tordit plus encore que d’habitude, si cela était possible. Il jaugea de son regard pétrifiant les Arlaeron, Tergaryon, Cellaeron, et tous les autres. Le vieux clientélisme était de retour, avec ses rondes ambitions et ses juvéniles détestations. Que tout cela le fatiguait ! Ne voyaient-ils pas, aussi clairement que lui, le dessein des dieux ? Et surtout, étaient-ils tous aussi stupides qu’ils le paraissaient, à applaudir bêtement sans penser réellement à ce qu’ils s’apprêtaient à voter ? Les bons sentiments n’avaient jamais créé une bonne loi. Pardi, il les vomissait, toutes ces envolées de compassion pathétique. A quoi cela servait, hormis se congratuler d’avoir été si bon, si empathique, si gentil. Nourrir les gueux et les affamer de l’autre main, voilà ce à quoi tous étaient prêts. Alors sa voix, monocorde et rauque, s’éleva et lâcha, caustique :

« Que de grands sentiments nous entendons aujourd’hui. Si j’en avais été capable, les larmes me seraient venues aux yeux. Qui eut cru que ceux qui s’apprêtent à affamer sans vergogne notre peuple puisse avoir autant d’empathie pour eux ?

Oh, mais après tout, je les comprends. Nous allons acheter le silence de ceux qui vont souffrir en leur jetant quelques bouts de pain, et nous pourrons tous aller nous coucher le cœur léger, avec le sentiment du devoir accompli, et en songeant à tous ces profits à venir, quand nous pourrons acheter à ceux qui ont fait couler le sang valyrien de nouveaux esclaves, qui réduiront à néant les tentatives d’être employés de nos chères veuves pour lesquels vous meuglez si fort, de ces chers enfants pour lesquels vous tressaillez de manière si convaincante.

Dites-moi, estimés sénateurs, grandioses Lumières, êtes-vous donc tombés si loin dans des travers impies que vous êtes aveugles à vos propres décisions ? Sommes-nous là pour faire la loi, ou pour succomber à des jérémiades qui cachent la vérité, à savoir que ceux qui promeuvent si fort cette brillante avancée sont ceux qui ne cherchent qu’à détruire les fondations de notre belle et glorieuse civilisation ? »


A ces mots, un brouhaha indigné s’éleva. Alors que beaucoup s’attendaient à une unanimité continue après ces nombreuses interventions, voilà que cette dernière était brisée, mais qui plus est avec un fracas impitoyable. Quelques noms d’oiseaux volèrent, que l’honorable Sénateur Daeron Gazarelys chassa comme des moucherons l’importunant. Après une respiration profonde, il reprit, de la même voix monocorde :

« Pensez-vous réellement avoir quoi que ce soit à m’apprendre de la souffrance ? De la compassion ? »


Pour accompagner cette question rhétorique, il offrit à l’assemblée son plus beau sourire torve, montrant de sa seule main son visage détruit, avant de passer, en un geste théâtral, tout au long de son buste, la seule chose qui resta de lui, cube grotesque et flageolant qui se dandinait sur cette chaise posée en un défi silencieux face à l’assemblée vitupérant.

« Lorsque ma famille a tout perdu, ai-je quémandé ? Ai-je jamais considéré que tout était perdu, que je devais m’en remettre à l’assistance de quelque généreux donateur ? Jamais. Les dieux ne l’auraient pas voulu.

Je suis ce que je suis, devant vous, ce corps grotesque et massacré, par Leur volonté. Et je me tiens pourtant debout par Leur grâce.

Les dieux ont voulu que nous vengions l’offense faite à leurs enfants. Le sang a été versé par eux, pour eux, et ils sauront subvenir aux besoins de leurs filles et fils survivants car ils ont créé nos lois parfaites. Lorsqu’Arrax a posé son regard sur nos ancêtres, il leur a offert l’illumination. Et il ne tient qu’à nous de l’honorer, en préservant les fondations de Valyria l’Elue, et non en la pervertissant par nos mauvais choix, ou notre mauvaise conscience. »


Son ton, désormais, était comme possédé, tranchant avec ses déclarations précédentes, et dans son œil unique luisait la croyance passionnée dans ce monde qu’il décrivait, ainsi que la révérence à chaque référence aux divinités. Il continua, martelant son message :

« La vérité, c’est que cette loi est un renoncement. Elle montre avec éclat que nous serons incapable d’offrir, comme nous l’avons toujours fait, une juste subsistance attachée à une place dans notre société à nos plus faibles.

Les dieux nous ont fait don de l’artisanat, ils ont encouragé nos travaux des champs. Nous avons toujours eu tout ce qui était possible pour que les élus réussissent, pour peu qu’ils aient confiance dans la clémence divine et respectent les commandements divins. Le travail élève nos âmes, et tout artisan est un artiste, aimé de Tessarion comme de Vermithor. Arrax lui-même s’est révélé aux humbles parmi les humbles.

Vous condamnez des familles entières à ne vivre que dans une forme de mendicité qui ne dit pas son nom.

Vous condamnez des familles entières à ne plus ressentir la bénédiction des dieux, la fierté de créer de leurs mains.

Vous condamnez des familles entières à n’être plus des hommes, des femmes, mais à devenir la seule chose que vous êtes capables de voir : des diminués.

Alors moi, diminué parmi les diminués, grotesque parmi les grotesques, je vous en conjure : ne vous laissez pas convaincre par ces paroles mielleuses, cette fausse compassion. Elle n’a jamais servi à personne. Elle n’est qu’une chaîne passée aux pieds de ceux qui n’auront plus d’autre choix que d’attendre, bouche ouverte et mains jointes. Mais après tout, cela ne dépareillera pas dans notre paysage, n’est-ce pas, que de voir de presque esclaves, ni libres de leur destin ni de leur choix, dépendants de quelques-uns. C’est finalement ce que beaucoup d’entre vous désirent, n’est-ce pas ? »


Des frémissements parcoururent militaristes et mercantilistes, courroucés et voyant bien où, finalement, le discours du Brisé débouchait, terminant la boucle de ce qu’il avait commencé à son début :

« Cette loi inique est l’incarnation des méfaits qui verront le jour et accableront notre peuple, depuis que les fondements de notre République ont été maltraités, en imposant des coutumes venues d’ailleurs et qui insultent nos traditions.

Nous ne pouvons plus nourrir notre peuple, parce que nous acceptons que d’autres le fassent. Là est la vérité.
Et interrogez-vous, partisans de notre Glorieuse Cité, sur les motivations de ceux qui, aujourd’hui, font assaut de bonté. Demandez-vous pourquoi.

Peut-être parce qu’ils n’ont aucun intérêt à ce que nos frères et sœurs valyriens se battent pour accéder à la transcendance d’une place dans la société par le travail.

Peut-être ont-ils tant aimé être acclamés comme les demi-dieux qu’ils ne sont pas qu’ils rêvent de l’être à nouveau, par leurs nouveaux esclaves.

C’est un homme qui en est à peine un, qui vous conjure de réfléchir. Et de s’opposer à ce texte, et à tous ceux qui viendront et dénatureront la République de Valyria. De prendre la parole pour dénoncer les atteintes à notre civilisation. Et de ne pas céder à des émotions compréhensibles, mais dont ceux qui ne cherchent que la gloire personnelle et l’enrichissement se servent pour, lentement, asphyxier la parole des dieux, et nos préceptes. »
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Séance au SénatFaire de nos héros pis que des esclaves ? Jamais !
Vêtu de sa toge d'un blanc immaculé strié de motifs verts, Maegon étaient venu au Sénat avec peu d'espoir. C'était la mort dans l'âme et la mine sinistre qu'il avait pris place dans les rangs de la faction civiliste. Peu d'alliés, clients ou encore Sénateurs affiliés à sa politique, ne l'approchèrent car tous savaient sa colère destructrice. Son ennemi juré, ancien allié temporaire, triomphait en ce jour. Maegon maudissait encore les Dieux d'avoir soufflé de telles idées aux militaristes. Leur proposition de loi était un coup de maître. A nouveau, ils seraient applaudis comme des héros alors même que les dépenses seraient gérées par la République, la mettant à genoux, les pieds et les mains liés pour des mois. Bien qu'il sache que voix puisse influencer près du tiers de la faction civiliste - et peut être quelques militaires mécontents - le dynaste n'avait pas d'autre choix. Il lui fallait se soumettre à l'union politique qui ne manquerait pas de survenir.

Fat obèse bienheureux, puisses te nourrir des graisses même de tes esclaves gros porc, pensa amèrement Maegon en voyant Baelor se lever. La ronde des pourléchages - plutôt que pourparlers - ne s'arrêteraient pas aux opportunistes marchands. Maegon comptait être le dernier à se lever, montrer jusqu'au bout son insoumission. Mais avant même qu'il ne prenne la parole, cette atroce souche de Gazarelys obtint la parole. Surpris par le discours impromptu du tiers d'homme, Maegon leva de hauts sourcils en entendant la haine déversée tout haut par le mutilé, une haine que Maegon pensait tout bas évidemment. Rassemblant ses toges, il comprit que le moment était venu et qu'il devait saisir cette chance de transformer le triomphe Arlaeron, en un désastre sénatorial.

« Daegon ! Ne crois-tu pas que tu dois la vie et ta réussite aux Mages du Collège et aux prêtres qui t’ont prêté main-forte ? Tu parles de l’Illumination d’Arrax sans réfléchir à tes mots. N’oublie jamais que les descendants de Vaekar, Lyseon et Riahenys se trouvent devant toi et écoutent tes propos ! »

Maegon rejeta sa longue chevelure d’argent en arrière et toisa longuement la chose qui osait se faire appeler un être humain.

« Cependant, j’entrevois une vérité dans ta bouche. Les Enfants d’Arrax, les Premiers parmi les premiers, ont saigné bien avant que le malheur ne frappe ta maison, Daegon. Où était l’armée lorsqu’un couteau trouva le cœur de mon illustre ancêtre Daenya ? Nulle part. Les prêtres brillèrent par leur absence également lorsque les Arlaeron menèrent à la destitution d’un ordre établi par Arrax lui-même ! »

Maegon regarda longuement et froidement l’homme dont il avait appris à haïr jusqu’au nom. Les années à servir ensemble n’avait en rien changé les sentiments du dynaste à l’égard de Lucerys. La seule pensée qui lui venait était qu’au moins, il s’avérait être un adversaire de valeur. Son regard retourna au tronc au faciès humain.

« Daegon, entends-moi car je ne suis pas ton ennemi. Tes adversaires argueront que ton cœur est aussi dure que la pierre qui t’a autrefois ensevelie et que ton âme est noircie par la marque de Ballerion. Je suis qu’un triste observateur. »

Maegon tira violemment sur sa toge et interpella Lucerys.

« Hélas ! Hélas, ce serait aller contre notre devoir de ne pas soutenir la motion du général Arlaeron ! Nous, les Pères du Peuple, ne décevrons pas les enseignements de Meleys. »

Maegon laissa un sourire torve s’épanouir sous ses lèvres alors qu’il jetait un regard sur l’assemblée. Pantins de la République, misérables vermisseaux soumis à l’or et au pourpre pour la plupart. Rares étaient ceux qui méritaient cette place. Un murmure s’éleva de la faction civiliste mais également des autres parties. Nul n’aurait jamais cru voir Maegon Riahenor soutenir le moindre projet d’un des ennemis naturels de son sang. Ils n’avaient pas tort.

« Lucerys ! » s’écria à nouveau le dynaste, le visage aussi pâle que la mort et la mine féroce. « Que mes mots ne tombent pas dans l’oreille d’un sourd. Entends à ton tour mes propos comme autrefois, nous nous sommes écoutés pour conduire notre peuple à la victoire contre Ghis ! Es-tu prêt à voir des hommes et des femmes réduits à un statut pire que celui des esclaves ? Quelle arrogance dans tes mots alors que tu parles des véritables héros de la République et non quelques seigneurs perchés sur leurs dragons ! Lesquels des hommes que nous avons honorés présente un handicap ? Dans sa sage beauté, Elaena Tergaryon, nous a montré les cicatrices qui ravagent le flanc de Valryia. »

Un nouveau silence s’ensuivit avant que Maegon ne lève son poing en l’air avec un cri de rage.

« NOS HOMMES ET NOS FEMMES SONT DES ENFANTS D’ARRAX ! LES PREMIERS DES PREMIERS SE SONT ELEVES PAR LEUR MERITE ! »

Puis, adouci, Maegon continua d’une voix douce, rien de plus qu’un murmure à peine audible dans l’acoustique pourtant remarquable du Sénat. « Nous n’infligerons pas une telle insulte à nos invalides de guerre, ni nos femmes et encore moins nos orphelins ! Lucerys, acceptes mes propos ! La saignée démographique a entraîné la friche de nos terres ! Pour éviter qu'une partie de la production céréalière, de première nécessité, ne s'effondre, une valorisation de ces fermes est nécessaire. Je propose de pouvoir mettre ces terres abandonnées sous le patronage des familles valyriennes de haut rang pouvant prouver une expérience forte et une tradition terrestre aboutie. Ces terres seraient sous l'administration de nos guerriers déchus, veuves et des orphelins qui seront adoptés par ces nouvelles familles. Nos héros seront les clients de leurs propriétaires, et le travail serait majoritairement fourni par des esclaves. Nous paierons les frais des esclaves et de la mise en place des terres en hommage à leur sacrifice. Mais leur avenir leur appartiendra qu’à eux et au service des Pères du Peuple que nous sommes ! Voici la seule solution que j’accepterai ! »

Maegon se rassit, les traits tendus et les mains crispées sur sa toge. Lucerys répondrait il ?
Voix de l'Ombre
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Echya Odenys, sénatrice de la faction mercantiliste


Installée dans sa chaire, la Sénatrice posait un regard perçant sur l’assemblée et la succession des orateurs. Après plusieurs années de séances insipides et pratiquement fantômes, le retour aux affaires courantes était un véritable bol d’air frais. Elle qui avait conquis sa place au mérite au sein de sa propre famille, elle regardait d’un air détaché mais pas moins intéressé le spectacle qui se déroulait sous ses yeux.

Depuis désormais dix années, Echya Odenys s’était solidement installée comme maîtresse absolue de la guilde des orfèvres valyriens. Sa nomination comme Sénatrice n’avait rien eu d’évident tant elle avait dû lutter face aux rivaux politiques et à la misogynie rampante des familles du Sud. Une fois solidement établie au sein de la faction mercantiliste, elle avait dû lutter contre son grand rival : Baelor Cellaeron. Le gras cochonnet lui fit d’ailleurs une mimique à laquelle elle n’accorda aucune réaction lorsqu’il descendit en premier dans l’arène, grillant la priorité à Echya et également Elaena Tergaryon. Il manquait d’élégance, et ce n’était pas nouveau. Elle n’était d’ailleurs pas vraiment surprise qu’il ait choisi d’agir ainsi. Elle aurait presque pu prendre en pitié la petite Tergaryon. Mais Echya, elle aussi, convoitait le pouvoir et la domination sur la faction mercantiliste. Pourtant, elle restait pour le moment légèrement en retrait. Assez pour rester une candidate sérieuse vers laquelle ses collègues pourraient se tourner, mais suffisamment peu pour ne pas donner l’impression de se lancer dans la bataille.

Elle les laissa s’écharper devant tout le Sénat avec un profond sentiment de consternation. Ne méritaient-ils pas tous mieux ? En particulier les marchands qui oeuvraient pour la grandeur de Valyria et pour la richesse de tous ? Devait-on vraiment avoir à souffrir cet empressement à vouloir marquer des points au vu et au su de toutes les autres factions ? Elle-même bouillonnait de rage à voir ainsi le Cellaeron puis la Tergaryon ainsi jeter aux orties les intérêts de ceux qu’ils défendaient. Baelor avait certainement vendu son scrotum au vieux Arlaeron pour un motif plus ou moins avouable. Quant à la jeune femme, Echya ne pouvait dire si elle était humaniste, naïve ou une brillante politicienne, comme son père. Cela toutefois, importait peu car les populistes soutinrent rapidement le projet par la voix de l’un des leurs. Il avait fallu l’intervention de celui qu’Echya et ses proches surnommaient Sac-à-Viande, l’honorable Daeon Gazarelys, pour qu’enfin les choses prennent un tournant intéressant. Enfin, une voix contraire s’élevait. Il était temps. Les motivations de Gazarelys-Sac-à-Viande avaient peut-être ce côté lunaire dont seuls les vrais fanatiques étaient capables, mais il n’en avait pas moins un avis intéressant. Là-dessus, l’entièreté de la Coupole se tourna vers les civilistes qui n’avaient pas encore répondu au débat. La justesse des arguments du religieux avait peut-être bien ébranlé certaines certitudes et tous attendaient l’annonce du dynaste Riahenor. Echya elle-même s’était surprise à avoir le souffle coupé. Et puis, Maegon parla et avança l’idée d’un amendement pour modifier la loi telle qu’elle était proposée. Déçue, ayant espéré que le prestige du descendant de la Fondatrice viendrait apporter son eau au moulin des opposants, elle dut se résoudre à signaler au polémarque sa volonté de prendre la parole. Se levant et plissant sa toge d’un geste élégant, Echya se mit en marche vers l’estrade avec une dignité toute spécifique à son rang et à sa réputation. Parvenue au centre de l’estrade, elle échangea quelques mots à voix basse avec le polémarque et se tourna vers l’assemblée qu’elle parcourut avec un silence désapprobateur.

« Chers amis, estimées Lumières et toi, noble polémarque. »

Sa voix était légèrement éraillée par l’âge et les épreuves, mais elle était posée et claire. Echya prenait le temps de détacher chaque syllabe pour mieux appuyer son propos.

« Alors que nos discussions s’échauffent, je tiens à profiter de ce moment pour ramener nos considérations à un niveau moins brûlant et passionné. Contrairement à ces messieurs les grands seigneurs-dragons, je n’ai pas eu l’occasion de me battre pour Valyria autrement qu’en versant de l’or et de l’argent.

Je ne suis, d’ailleurs, pas surprise de constater qu’à l’heure de la réouverture de nos routes commerciales, certains parmi nous sont déjà revenus aux affaires courantes en se vendant au plus offrant. Ceci dit, fustiger ces pauvres âmes faibles et corrompues serait une facilité à laquelle je ne me risquerai pas. Ou tout du moins, pas sans pointer du doigt l’hypocrisie de ceux qui se prétendent défendre le peuple alors qu’ils sont prêts à tous les arrangements pour parvenir à leur fin. Ces personnages doivent être considérés pour ce qu’ils sont : la honte de notre système sénatorial et des traîtres à ce peuple dont tout le monde semble se préoccuper. Et c'est pourquoi, en faisant abstraction de ces personnages odieux, qu'il me vient une question simple.

Avez-vous tous perdu la tête ?

N’oublions pas que nous sommes ici pour défendre des intérêts qui composent la République et la font telle qu’elle est. Chacun de ces arrangements affaiblit notre position et notre légitimité. Et j’ai honte, chères Sénatrice et chers Sénateurs. Oui, j’ai honte pour notre assemblée et pour nous.
»

Elle leva la main pour couper court aux protestations et huées qui commençaient à jaillir. D’un naturel autoritaire, elle ne se laissait pas impressionner par quelques orgueils mal-placés. Sans être une excellente oratrice, Echya avait un ton cassant et sonnait comme une érudite sévère apprenant l’Histoire à de jeunes nobles valyriens. Elle reprit d’un ton plus conciliant, une ombre de sourire au coin des lèvres.

« Ma position et mon mandat sont clairs. L’honneur que j’ai de représenter une partie de la classe marchande au sein de cette assemblée, je le reçois de la guilde des orfèvres que je représente. Et bien que certaines et certains en aient oublié cette réalité, je souhaite rester en accord avec ma mission et ceux qui me font confiance. Notre intégrité ne devrait pas être aux enchères, et la mienne ne  le sera pas car ce n’est qu’une trahison de la confiance des autres.

Que je n’entende pas certains me taxer d’imposture et d’opportunisme. Ma famille n’a ni dragon, ni siège attitré. On ne considère pas les miens comme une grande famille ou comme de la noblesse de terre. Ma famille est arrivée avec moi au Sénat par la force de sa volonté et de son travail. Même si je pourrais être tentée d’oublier un bref instant mes origines, je sais que je pourrais compter sur la bienveillante attention de certains pour me le rappeler immédiatement. Ce peuple qui a saigné et qui aujourd’hui cicatrise, j’en suis. Et pourtant, certains ne m’écouteront pas, aveuglés par leur volonté de pouvoir ou de bien faire.
»

Elle dévisagea tour à tour les orateurs qui s’étaient exprimés. Lucerys Arlaeron, Baelor Cellaeron, Elaena Tergaryon, Vaemor Baeriar, Daeron Gazarelys, et Maegon Riahenor. Elle les jugea d’un regard sévère, comme agacé. Elle continua à balayer l’assemblée. Maekar Tergaryon, Aeganon Bellarys, Alynera Vekaron, Vaerys Lyseon, Rhaenys Haeron, ou encore Aelora Naehrys. Elle reprit avec une ironie évidente.

« Personne ne semble s’en être ému pour le moment mais une guerre, chers collègues, coûte cher.

En moins de deux années, nous avons dû financer l’équipement de milliers de conscrits, verser des dizaines et des dizaines de soldes, et missionner tous les chantiers navals de la Rhoyne à Ellyria pour mettre sur pied une flotte capable de tenir tête à la Harpie. Nous avons ensuite dû soutenir l’économie et faire face à nos commerces qui s’effondraient alors que la Baie des Serfs nous était interdite. Nous avons dû faire fortifier en urgence Tolos qui a finalement été largement endommagée. Et maintenant, nous devrions en plus financer la reconstruction et les pauvres âmes qui ont manqué de perdre la vie ? Aussi louable cela puisse sonner, je suis au regret de  ramener certains d’entre vous à des considérations plus terrestres… et de vous annoncer que les réserves d’or et d’argent ne sont pas infinies. Le secteur commercial est exsangue, les routes commerciales sont encore désertes, la demande ne décolle pas, et les prix n’ont pas terminé leur décroissance après les niveaux mirifiques de ces dernières années.
»

Elle se tourna droit vers Lucerys, installé dans sa loge. Elle le regarda droit dans les yeux, le foudroyant d’un regard courroucé. Elle pointa un doigt maigre vers le grand héros de l’armée valyrienne. D’une voix tremblante de colère, elle l’accusa :

« Et toi, Sénateur Arlaeron, avec tes sicaires comme complices, tu as l’audace de nous en demander encore plus ?!

Que certains cherchent à s’engraisser plus qu’ils ne le sont déjà, je peux le concevoir ; nous n’avons pas tous la même morale. Mais je n’accepterais pas de céder à la dictature de la bienséance et du consensus mielleux visant à acheter le silence des masses. Nous n’avons pas les moyens d’apaiser ta conscience, Œil d’Argent.

J’invite pour ma part tous mes collègues mercantilistes à se reprendre et tous les autres à rejeter cette folie tant que nos finances ne reviendront pas à un niveau plus satisfaisant.
»

Dans un battement de toge furieux, elle quitta l’estrade et revint à sa place sous plus d’applaudissement qu’elle ne l’aurait espéré.
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Première Séance au Sénat



« Merci de nous avoir permis d’assister à ces débats, Sénateur Bellarys. »

« Je vous en prie, tous les deux, il est normal que les premiers concernés puissent contempler de tels échanges.

L’armée vous soutiendra toujours, ainsi que son humble représentant.

Profitez, mes amis. »


Laissant ses invités dans sa propre loge, Aeganon, vêtu de sa toge sénatoriale et rasé de près pour l’occasion, se dirigea vers celle de Lucerys Arlaeron, où il retrouva son compagnon Maekar Tergaryon. Après avoir salué les deux hommes, il prit place, attentif à balayer la salle de son regard d’aigle, perçant et tranchant. Il aperçut Elaena, resplendissante dans sa propre tenue, et avertit ses yeux pour éviter une remarque du frère de cette dernière, qui n’eut pas apprécié que son ami se laisse aller à ses errements ordinaires. A la place, il se contenta de lui adresser son éternel sourire en coin, conquérant et appréciateur, pour l’encourager, oubliant un instant les différences de faction pour se concentrer sur quelques souvenirs d’enfance. Qui eut cru, voici quinze ans, qu’ils se retrouveraient tous ici, les fiers fils et filles de la Valyria du Centre, éparpillés aux quatre coins de cette assemblée qui réunissait toute la péninsule. Seul son jumeau manquait à l’appel, et son cœur se serra douloureusement, tandis qu’il contemplait ce qui aurait dû être son siège. Il en avait tant rêvé, de cette première confrontation, de darder sur son aimé cette expression affectueuse et orgueilleuse à la fois qu’il avait tant perfectionné à son contact, cette douce musique de leur rivalité amoureuse qui n’était connue que d’eux, mais qui résonnait si délicieusement à ses oreilles, et la nuit au creux de son cou et de ses reins. Hélas, la confrontation tant attendue n’aurait pas lieu, ou plutôt sous une forme différente, car Jaegor Bellarys, le patriarche redouté, venait de prendre place, saluant ses voisins de la faction civiliste. Un bref instant, ses pupilles améthyste croisèrent celles de son second fils, si semblables aux siennes. Et il lui offrir son rictus caractéristique, déformation cynique de ce sourire chaleureux qui avait fait, dans l’armée et auprès des femmes, la réputation du cadet de la famille. Ce dernier, presque amusé, dévoila ses dents, comme un prédateur, et il eut l’impression, l’espace de quelques secondes, que son paternel et lui se jaugeaient, mais aussi, secrètement, se comprenaient, mus par le deuil familial et l’absence du fils et frère adoré. Ils ne s’aimaient pas. Qu’importe. Il en était un autre qui avait leur attention, et pour lui, ils étaient capables de s’entendre. Ou du moins, de faire semblant.

Et enfin, tout commença. Le polémarque appela au silence, et le silence fut. Puis, Aeganon vit son mentor monter à la tribune, son cœur se gonflant d’orgueil en observant l’éminent capitaine-général parler si puissamment, si fortement, si clairement de ce qu’ils s’apprêtaient à faire aujourd’hui. Voilà pourquoi il avait été élu par sa légion. Voilà pourquoi il était Sénateur. Voilà pourquoi il avait décidé de suivre l’Arlaeron : pour défendre les siens, et pour bâtir une Valyria plus juste, plus préparée, aussi, au pire. Ils ne seraient plus des proies. Ils avaient l’occasion de devenir des dragons, semblables aux montures que les plus éminents d’entre eux chevauchaient, en élevant leur civilisation au firmament. Quelle fierté d’être associé à de telles avancées ! Du coin de l’œil, il guetta sa propre loge, se repaissant des émotions passant sur le visage de ses invités. Oh, oui, ce jour serait grand. Et sinon, nul n’ignorerait en Valyria les noms de ceux qui avaient refusé assistance aux sacrifiés de la guerre. A cet instant, tandis qu’Oeil d’Argent achevait son discous, il se le promettait : chacun, dans cette assemblée, serait comptable de ses actes. Il y veillerait personnellement. L’intervention de Baelor Cellaeron, opportune, achevait de présenter un front uni bienvenu, entre les partisans de la guerre et l’artisan de la paix. Deux Valyria si opposées s’alliaient. Le signal était fort. Et le roué obligeait Elaena à prendre position, en pariant sur sa nature. Aeganon lui-même s’était demandé si la jeune fille aux farouches idéaux se trahirait pour tenter de prendre le rusé à contrepied, ou bien suivrait-elle, dans la surenchère ? La seconde option fut choisie. Durant toute son intervention, Aeganon ne la quitta pas des yeux, appréciant l’évolution de la petite fille d’antan qui parlait avec tant d’éloquence des pertes de sa famille. Le sang versé avait parlé … comme il l’avait parié, quelques jours auparavant, lors d’une réunion de travail auprès de Lucerys. Nombreux étaient ceux sensibles à leur proposition par le simple fait d’avoir perdu des êtres chers. Et puis, qui oserait expliquer doctement que tant de familles pouvaient crever comme des chiens, la langue pendante dans le caniveau ?

Il y en eut. Gazarelys, ou ce qu’il en restait, prononça le discours le plus ahurissant qu’il ait entendu, et il avait connu les envolées lyriques de soldats sur les genoux et une puterelle en main, à moins que ce ne soit l’inverse. Manifestement, il avait reçu davantage de gravats sur la tête que ce que les mages avaient pu dire. A moins que tellement de sable ne lui soit rentré par les oreilles qu’il avait fini par avoir le cerveau aussi éboulé que sa propre maison. Et il déblatérait, encore et encore, sur les dieux, le destin, la grandeur de Valyria. Ah, tiens, bien sûr, qui n’avait pas essayé la prière pour nourrir sa famille ! Les gueux, quels idiots vraiment ! Il faudrait sûrement donner l’astuce aux mendiants du quadrant est. A moins qu’il ne soit plus sage d’expliquer doctement aux mutilés qu’ils n’avaient qu’à serrer les dents, parce qu’il y avait pire qu’eux ? Était-ce un concours sordide ? Celui qui mourrait était-il donc le perdant d’une sinistre farce divine ? Les fanatiques étaient la pire engeance du Sénat, et si Aeganon, en de pareils instants, avaient envie de lui crier d’aller se détendre dans les établissements de Cellaeron, il se retint, non sans penser avec mesquinerie qu’en même temps, le malheureux maquereau se demanderait bien par quel endroit faire passer ses étalons : le Brisé était après tout bel et bien troué.

Une fois le supplice terminé, et que les malheureux valets ramenèrent leur fardeau inepte à sa place, la torture continua, tandis que Maegon Riahenor prenait la parole. Mentalement, Aeganon se demanda combien de temps il mettrait à trouver un moyen de parler de ses glorieux ancêtres. Trois minutes, à vue de nez. Raté. Deux minutes trente, avec en bonus la dénonciation récurrente des fondations de la République. Original, de s’en prendre à l’institution dans laquelle on siégeait, et de rappeler à quel point on n’avait pas été digne de la charge offerte par les dieux, pour s’être fait renverser à cause de sa gestion pathétique. Bigre, c’est que cela devenait un spectacle comique, le Sénat ! Comparer la destitution de familles aux souffrances des soldats de la République, il fallait être aussi fat que l’ancien capitaine-général pour l’oser, mais rien ne semblait l’arrêter, surtout pas le niveau de décibels. Décidément, après avoir fait souffrir leurs neurones face à tant de récriminations puériles, voilà que l’auguste dynaste décidait de massacrer leurs tympans comme la dernière pucelle qu’il avait chevauchée. Et … oh, le fieffé coquin ! Pardi, le Bellarys s’attendait à des récriminations immédiates alors que, sûr de lui, la descendante d’une des Triarques expliquait doctement comment s’accaparer davantage de richesses en spoliant les valyriens. Mais … non ? Enfin, était-ils tous encore sous le choc de ses braillements ? Avaient-ils perdu l’audition, ou simplement la raison après les délires de Gazarelys ? Serrant les poings et contractant sa machoîre, Aeganon darda son regard de feu sur l’assemblée, cherchant les réactions attendues, avant de terminer par ses invités ? Leur expression de choc le rasséréna un peu. Il ne fallait pas perdre ses objectifs. Ils étaient là, à quelques mètres de lui. Tous auraient dû le savoir.

Sa fureur se transforma en un dédain suprême quand Echya Odenys décida de se joindre à la danse, complétant le trio des mercantilistes. Les mouches voletaient toujours après les déjections des prédateurs de premier ordre. Elle se positionnait à l’inverse de ses deux concurrents, ce qui n’étonnerait personne. La tactique était grossière, le discours vomitif, bref, tout était parfait. Mais finalement, c’était peut-être la plus attendue. Elle n’avait pas tenté de surprendre, et sans doute n’en était-elle pas capable. Aeganon manqua lever les yeux au ciel face à la docte leçon, et une fois encore, ses yeux se tournèrent vers ses invités, qui exprimaient une rage contenue en entendant la maîtresse de guilde pérorer sur le coût des vies humaines – de leurs vies. L’attaque contre Œil d’Argent et les militaristes le laissa de marbre. Plutôt que de réagir, il affecta de regarder ses ongles d’un air chagrin, comme si tout cela n’était qu’une longue pièce qui tardait à trouver sa conclusion, et que les insultes d’Odenys lui faisait autant d’effet que sa première chaude-pisse. Alors qu’elle finissait de pérorer, il attrapa un bout de parchemin et y griffonna la seule information dont il avait besoin :

« Oui ? »

Il la passa à Lucerys, et son imperceptible mouvement de tête lui donna toutes les informations dont il avait besoin. Après toutes ces années à ses côtés comme aide de camp, Aeganon avait appris à lire entre les lignes de son front plissé, la moindre inflexion de son visage prenant l’apparence à ses yeux d’une phrase complète. Il savait ce qu’il lui restait à faire. Cela avait été convenu entre eux : au capitaine-général la glorieuse ouverture, et à son chien fidèle la mission de remettre à leur place les importuns, ou de galvaniser la foule. Il faudrait faire les deux. Mais il relèverait le défi, s’en pourléchant les babines. Il n’avait pas été choisi par un Ancien pour rien : le Bellarys était fait d’un feu ardent, qui brûlait tout sur son passage, qui était fait pour attiser les flammes, emporter les fétus de paille, et protéger son maître en allumant des contre-feux. La demande de parole fut faite. Puis acceptée. Et ce fut à son tour de se diriger vers la tribune. Arrivé devant cette dernière, il prit une profonde inspiration, balaya à nouveau l’assistance de ses pupilles de fauve, puis son sourire s’élargit, et il prit la parole :

« Estimées Lumières, honorables Sénateurs, vénérable polémarque, c’est avec émotion que je me tiens devant vous pour la première fois. Je suis, pour beaucoup d’entre vous, un inconnu, mais j’espère que, par cette prise de parole, vous me connaîtrez un peu mieux. Quant à moi, j’ai déjà énormément appris en écoutant les nobles voix qui se sont succédé ici. Alors, j’aimerai que vous vous joigniez tous à moi pour applaudir tous ceux qui ont eu le courage d’exprimer les convictions que nous avons pu entendre. »

Il joignit le geste à la parole, amusé intérieurement des expressions interloquées qui se peignaient sur le visage de certains. Il s’arrêta, et reprit son discours, une lueur que ses proches ne connaissaient que trop bien dans le regard :

« Oui, j’admire tous ceux qui m’ont tant fait grandir aujourd’hui. Et je tiens à leur exprimer tous mes remerciements. A la Sénatrice Echya Odenys, je veux offrir toutes mes félicitations, pour m’avoir montré ce qu’était la franchise. Elle nous a rappelé qu’effectuer son devoir de citoyenne de Valyria en concourant à l’effort de guerre lui avait été déjà particulièrement insupportable, et que par conséquent, il était impensable qu’elle sacrifie davantage sa fortune, et surtout celle des autres, puisque nous avons parlé tantôt d’utiliser le butin de guerre. Mais Echya Odenys a l’honnêteté de nous dire, en conscience, que voir tant de richesses qui ne lui appartiennent pas aller à ceux qui en ont le plus besoin, et pire, à la défense des frontières de Valyria et au développement des villes de notre glorieuse péninsule, lui est proprement insupportable. Comme je la comprends !

Imaginez, Sénateurs, à quel point il est douloureux de penser que de tels trésors vont servir à financer les investissements de demain, et les profits d’après-demain ! Non, vraiment, son opposition farouche est aussi compréhensible que ses évidentes lacunes économiques. Mais sans doute, elle nous l’a démontré avec détermination, qu’en tant que représentante de la guilde des orfèvres, manquer de vue à long terme est une qualité évidente pour en défendre les intérêts. Après tout, qui suis-je, modeste soldat, pour laisser entrevoir les profits évidents qui viendront des contrats à venir ? Vraiment, je salue sa prise de position si franche et intéressante, qui m’a tant appris sur son manque éclairant de lucidité et de clairvoyance. Heureusement que le Sénateur Cellaeron et la Sénatrice Tergaryon nous ont fait la démonstration éclatante de leur propre intelligence toute mercantile, et de leur capacité à choisir le meilleur.

In fine, la Sénatrice Odenys, pour nous expliquer qu’elle laisserait le reste du peuple mourir de faim, nous a aimablement rappelé qu’il n’y avait aucune noblesse en elle ou dans son nom. Je tiens à la rassurer : au vu de ses propos, nul n’oserait prétendre le contraire. »

La pique finale fut accompagnée d’un immense sourire destiné à ladite Sénatrice, tandis que la salle bruissait de murmures. Le ton doucereux des premières phrases avait laissé place, sur la fin, à l’attaque. Aeganon avait ferré l’attention du Sénat, et il n’allait plus lâcher sa proie.

« Je salue également le discours du Sénateur Maegon Riahenor, qui restera probablement dans les annales de notre noble assemblée comme un superbe exercice oratoire. Que dire de plus, face à cette pirouette acrobatique exécutée sous nos yeux, qui consiste à voir un ancien capitaine-général trahir ceux qui sont morts par ses ordres et pour Valyria ? »

Murmures appuyés dans la salle.

« En vérité, nous venons de descendre d’au moins soixante-dix pieds sous terre, tant la proposition qui nous a été faite est d’une bassesse rarement égalée. Cependant, en dénonçant l’hypocrisie régnant dans cette assemblée, le Sénateur Riahenor nous a également offert un rare témoignage d’autocritique, que nous saurons tous apprécier à sa juste valeur, je n’en doute pas. »

Quelques ricanements furent tus autant que possible.

« En tant que jeune homme un peu simple, je n’imaginais pas possible, voyez-vous, Sénateurs, de prêcher la fin d’un statut apparemment, je cite, pire que celui d’un esclave, pour après enchaîner sur un succédané qui, s’il n’en a pas le nom, en a l’apparence, le goût et … oh, mais, ne serait-ce pas exactement la même chose ?

Examinons de plus près cette remarquable idée. Ainsi donc, des valyriens qui se sont héroïquement sacrifiés pour leur patrie verraient leurs biens confisqués, puisque, je sais que cela peut surprendre ceux qui n’ont que peu passé de temps avec leurs soldats, mais nos valeureux hommes ont des femmes. Des enfants. Des cousins. Des neveux. Ce qu’on appelle communément une famille, et qui, elle, n’a pas disparue. Cette famille est le principal souci du Sénateur Arlaeron, et je partage pleinement cette noble inquiétude. Ainsi donc, ceux qui, par la perfidie ghiscarie, ont été privé d’un père, d’un frère, d’un fils, de toute une branche de leur gens, verraient donc leurs biens donnés à d’autres. Seraient obligés d’en devenir les débiteurs. Et n’en auraient plus l’usufruit … ni le fruit, puisque la propriété serait diluée.

Bien entendu, je n’oserai émettre d’hypothèse sur les noms de ces grandes familles qui centraliseraient ainsi un pouvoir usurpé et ignoble. Qui profiteraient de la détresse de certains pour leur offrir cette pomme empoisonnée dont l’odeur putride n’a pas échappé, j’en suis certain, à la vigilance de l’ensemble de cette assemblée ? Sûrement pas celui qui, après nous avoir rappelé avec amabilité qu’il vient d’une famille qui a été déjà été coupable de tels agissements, tenterait de remplir les coffres de sa famille sur le dos de nos morts ? »


Fini l’hypocrisie et les faux-semblants. Il était temps que les choses soient dites.

« Comment ne pas aborder, enfin, la leçon magistrale du Sénateur Gazarelys, qui nous a doctement expliqué qu’il n’y avait rien à lui apprendre. En effet, je n’ai rien à apprendre au Sénateur Gazarelys en matière de souffrance et de compassion. Manifestement, son empathie s’arrête à mi-cuisse, si tant est qu’il en ait été un jour pourvu. »

Les cris d’indignation se mêlèrent aux expressions d’approbation. Cette fois, cependant, Aeganon abandonna sa posture de douceur vicieuse. Son visage luisait de colère, et sa voix s’éleva avec force :

« Ce que nous avons entendu aujourd’hui est une insulte à la face de nos morts, à la face de nos dieux, à la face de Valyria toute entière.

Comment peut-on proférer de telles ignominies ? L’on veut gloser sur notre civilisation ! Parlons-en ! Notre proposition est la base d’une nouvelle Valyria, oui. Car la question qui se pose, est bien de savoir si nous voulons n’être rien de plus qu’un amas sans intérêt et sans âme, comme la cruelle Ghis, ou bien une République qui s’élève en se souciant des siens, qui promeut la grandeur de notre sang, en honorant ceux qui se sont battus pour elle ?

Chacun a fait des sacrifices. Mais tous ne se valent pas. L’honorable Sénateur Gazarelys en est l’exemple le plus frappant : une fortune se reconstruit, oui. Mais rien ne remplacera jamais un être aimé tombé sous la barbarie de nos ennemis. Tous, dans cette assemblée, nous le savons. Qui n’aurait pas sacrifié or, pierres précieuses, soieries, pour revoir un instant le visage d’un fils, d’un père, d’un frère, d’un ami, d’un fiancé, d’un mari ? Et, tous n’ont pas la chance d’être aidé par une fortune existante. Echya Odenys nous l’a dit avec élégance : il est des situations plus avantageuses que d’autres.

Oui, Sénateur Gazarelys, tu as réussi à te construire une nouvelle vie. Grand bien te fasse. Souffre que j’en attribue le mérite non pas à ta ferveur, mais aux comptoirs que ta famille possédait, aux amitiés que tu as su faire jouer, et au soutien que certains t’ont accordé.

Le fils du cordonnier qui pleure son père, a perdu son bras et est étranglé par les dettes n’aura pas cette chance. La fille du tanneur qui ne peut plus faire le mariage dont elle rêvait avec le jeune tanneur d’en face et réunir leurs deux établissements restera abandonnée. La tisserande qui est si fière de son travail ne pourra pas trouver un moyen de s’occuper de ses enfants en bas-âge et continuer son métier.

Mais que sont ces histoires, me direz-vous ? Elles sont devant vous. En ce moment même, elles vous écoutent. Elles sont dans ma loge. Elles espèrent tant de vous. Elles veulent seulement avoir la possibilité de continuer leur vie, et de voir leurs noms honorés. Elles y ont droit. Et elles le rendront au centuple. »

S’adressant aux trois figures à sa loge, qui s’étaient avancées et apparaissaient en pleine lumière, jeune fille drapée dans sa robe avec dignité, gironde et jolie, jeune homme raide et moignon replié contre son torse, femme tenant dans ses bras un paquet de langes, symbole de ses espoirs passés et, désormais, de ses difficultés à venir, il déclara :

« Mes amis ! A quoi serviront ces dons ?

Maelara Diteros, tu épouseras ton promis, et vous travaillerez d’arrache-pied pour agrandir votre bien commun, et avec ta dot, tu achèteras un esclave pour aider à tanner les peaux pour fournir les fourrures dont se pâment nos plus belles coquettes, je suis certain que bon nombre de Sénatrices et de Sénateurs avides de plaire à une dame sauront apprécier ton travail et celui de ta gens.

Araxes Todanys, tu pourras redresser la boutique de ton père, et engager un aide pour lui transmettre le savoir-faire que tu as reçu, mais que tu ne peux désormais utiliser toi-même, et ce, sans devoir te vendre pour obtenir un patronage qui t’étranglera.

Gracialys Saeremon, tu pourras continuer à exercer ton métier tout en payant une garde pour tes enfants, et peut-être pourras-tu prendre un aide dans ton atelier ? Sinon, que te resteras-tu ? Abandonner tes enfants pendant de longues journées, alors que le dernier est si jeune ? Rester avec eux, et attendre que la faim te contraigne à la mendicité, ou à un autre destin ?

Est-ce à cela que vous voulez contraindre nos veuves ? A ce destin que le Sénateur Baeriar a si bien évoqué, avec tant de sensibilité et d’intégrité ? »


S’animant, Aeganon les pointa avec virulence :

« Regardez-les ! Mais regardez-les ! Ils sont les visages du renouveau de Valyria. Ils sont notre avenir. Nous pouvons les aider à devenir grands. A nous rejoindre, peut-être, un jour. Je sais que les honorables Sénateurs issus de la Guide des Tisserands et ne me contrediront pas : Gracialys Saeremon représente un noble métier, et pourrait être une noble dame de notre Assemblée.

Allons-nous y pourvoir ? Allons-nous céder à la division, aux petites ambitions, aux promesses serpentines qui ne profitent qu’à ceux qu’elles engraissent ? Aux imprécations stériles qui préfèrent attendre, plutôt que d’agir ? »


Sa voix tonna :

« Pour ma part, j’ai choisi. Comme les Sénateurs Cellaeron et Baeriar, comme la Sénatrice Tergaryon, dont j’applaudis encore une fois la hauteur de vue, la dignité, mais aussi la finesse d’avoir vu tous les aspects de cette loi, qui réparera le passé comme elle pavera notre avenir, sans compromission ni volonté de tirer un abject parti de la détresse de notre noble peuple.

J’ai choisi la grandeur de Valyria. J’ai choisi la grandeur de nos villes. J’ai choisi la grandeur de son peuple. J’ai choisi la prospérité de son économie.

Et je refuse d’entendre que cette proposition dénature la République. Elle l’honore. Je refuse d’entendre que cette proposition abaisse notre peuple. Elle lui permet d’accéder à des positions dont certains n’osaient rêver. Je refuse d’entendre que cette position nuirait à notre économie. Elle lui profitera au centuple, car elle libérera les énergies, permettra à nombre de valyriens de s’établir, améliorera ses infrastructures, et ainsi facilitera notre commerce, tout en amenant de nouveaux clients à nos guildes, à savoir ces travailleurs qui investiront le fruit de leur labeur dans les splendides créations de nos artisans, dans les merveilles importées par nos marchands.

Il n’est pas lieu de se demander à qui profite cette loi. Elle profite à tous. Elle profite à Valyria. Elle est l’âme de notre peuple, si inventif, si vigoureux, si prompt à se relever. »


D’une voix vibrante, où perçait la détermination, il acheva :

« Sénateurs, Sénatrices. Votez pour ceux qui ne sont pas ici pour se défendre. Votez pour ceux qui, tremblant, attendent votre verdict. Votez pour ceux qui enrichiront Valyria, plutôt que de grossir les rangs des déshérités, des malcontents, des fauteurs de troubles poussés par la faim et la misère. Votez pour eux. Et votez pour vous.

Votez pour Valyria.

Estimées Lumières, honorables Sénateurs, vénérable polémarque, je vous remercie. »
Voix de l'Ombre
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Séance au sénat

Édit de consolation valyrien




Taecegor Noheneos n’était pas un débutant en politique, et même lui devait convenir – en son for intérieur, bien sûr – que cette séance sortait de l’ordinaire. Oh, bien entendu, il y avait déjà eu de nombreuses séances échaudées par des propositions ou des discours brûlants, mais jamais auparavant la coupole n’avait connu une ambiance si électrisée en si peu de temps. Il se doutait que les enjeux étaient immenses, mais ne s’était pas attendu à une telle tension dans les rangs de l’assemblée. A plusieurs reprises, durant les discours du mutilé Daeron Gazarelys, d’Echya Odenys,de Maegon Riahenor et d’Aeganon Bellarys, il avait vu les Lumières capter son regard, à chaque fois avec une lueur inquiète plus forte. Arraxios Maerion avait sciemment froncé du nez lorsque son collègue de jadis, défendeur avec lui des idées religieuses, avait mené une charge contre son allié Arlaeron. Et Valerion Qoherys s’était à moitié étouffé lorsque trois des sénateurs mercantilistes étaient intervenus, démontrant publiquement la puissance des courants qui malmenaient l’intégrité de leur faction.

Le polémarque ne souhaitait pas perdre le contrôle de la séance et il pouvait voir que ce risque, toujours existant dans son métier, était cette fois bien réel. Maegon Riahenor semblait prêt à jaillir hors de son siège, cherchant sans succès à capter le regard du polémarque pour requérir un droit de réponse que le maître de séance ne lui accorderait pas. Il soupçonnait le Riahenor, dans sa verve tout dynastique, de vouloir remettre de l’huile sur le feu. Il n’avait pas d’autre option que d’interrompre la séance. La solution ne lui plaisait pourtant pas. Les esprits étaient trop échauffés et cela ne donnerait rien de bon. Ce fut alors qu’il remarqua un sénateur qui lui faisait signe et, lui aussi, voulait s’exprimer. Il reconnût là Jaeron Dalitheos, doyen de l’assemblée du haut de ses 88 ans. Il avait l’air d’un petit homme fragile, sans cheveux, aux dents depuis longtemps disparues et qui était notoirement connu pour être sourd comme un pot.

« Du calme, Sénatrices, Sénateurs ! Du calme, je vous en prie ! La parole est à toi, Sénateur Dalitheos ! »

Tandis que l’assemblée bruissait encore des remous provoqués par les discours précédents. Le polémarque était ravi. L’arrivée du doyen allait forcément calmer les esprits. Aidé de son fils, Jaeron Dalitheos entama la longue descente depuis son siège jusqu’au centre de la coupole, puis, enfin, la montée, lent et précautionneuse, sur l’estrade. Au fur et à mesure du temps qui passait, la tension dans la salle semblait décroire. Il avait fallu bien cinq minutes au vieil homme pour atteindre sa position, ce qui avait exaspéré tout le monde mais avait au moins eu le mérite de calmer les esprits. Lorsqu’il débuta son discours de sa voix chevrotante, il se mit à moitié à trembler et le polémarque qu’il ne rende l’âme subitement, là, sur son estrade, pof. Mort comme les oiseaux qui percutaient parfois la coupole au-dessus de leurs têtes. L’estimable polémarque se mit à imaginer le vieux sénateur, tel un bestiau séché net. Il se racla la gorge pour ne pas laisser un rire nerveux l’envahir alors que le vieil homme peinait à se faire entendre de sa voix désormais fluette.

« Mes chers amis, sire polémarque et mes estimées Lumières, je voudrais débuter par remercier le Sénateur Riahenor d’avoir été le seul parmi vous à parler avec suffisamment de hauteur pour être audible dans cette grande salle. Et je dois saluer sa sagesse lorsqu’il mentionne que notre peuple s’est… heum. Ah. Pardonnez-moi. Oui, que notre peuple s’est élevé à la seule force de ses mains.  N’est-ce pas ?

Je voudrais vous dire que je suis d’accord avec le Sénateur Riahenor, que je sais profondément attaché à nos valeurs démocratiques, lorsqu’il dit que nous devrions accompagner ce peuple, nos enfants, vers de meilleurs jours. Je confesse ne pas avoir tout compris, mais je remercie également aussi le jeune Sénateur Arlaeron, que j’ai vu faire ses premiers pas dans notre Sénat, pour son intervention.

Songer à combler nos pertes en distribuant de l’argent, voilà qui est un digne geste et je suis fier de voir qu’un brave officier comme on a dit tant de bien a su rejoindre la faction civile pour promouvoir cette idée au nom de notre armée. N’est-ce pas ?

Je suis fier de faire partie de cette assemblée depuis soixante-deux ans et s’il est évident que cette séance démontre notre passion en la démocratie, elle révèle aussi la pluralité de nos belles idées. J’espère donc que nous pourrons rapidement heu…
»

Semblant brouter – impossible de le décrire autrement – le vieil homme s’interrompit, jetant un regard vide sans vraiment chercher à savoir ce qu’il cherchait à voir. Il resta immobile durant deux longues minutes. Le polémarque en était à se demander s’il allait de nouveau compter jusqu’à 300, comme lorsqu’il était descendu sur l’estrade centrale, ou s’il était mort et que personne ne s’en rendait encore compte. Il s’efforçait de garder un masque parfaitement opaque, ne laissant passer aucune émotion. Il jeta un regard aux Lumières qui s’agitaient sur leurs sièges, légèrement mal à l’aise. Et puis, comme si une soudaine énergie avait trouvé son chemin, le vieux sénateur s’agita de nouveau.

« Je vois que nous en avons déjà dit beaucoup, et j’imagine que vous devez être impatients de passer au vote. Ahhh, jeunesse inconstante, n’est-ce pas ! Merci pour votre attention, oui. »

Quelques applaudissements un peu interloqués résonnèrent et le vieil homme débuta sa longue ascension vers son siège. Anticipant une remontée au moins deux fois plus longue que la descente, et ne se voyant pas perdre dix minutes de sa vie déjà chargée, l’auguste polémarque revint sur la scène, et toisa du regard l’ensemble de l’assemblée. Il leva cérémonieusement ses mains, comme pour capter toute l’attention de son auditoire.

« Il semble que cette assemblée soit globalement consensuelle sur ce sujet, malgré quelques avis exprimés de manière cinglante. Au nom du peuple que vous représentez, et au nom du Conseil que vous contrôlez, je vous remercie pour vos interventions. Au vu de la houle soulevée par vos débats, je prends la décision de suspendre la décision pour deux heures. Sénateur Lucerys Arlaeron, tu pourras m’indiquer si ta proposition est amendée, et en quels termes si tel est le cas, à l’issue de cette suspension. Nous laisserons ensuite un défenseur de la proposition nous présenter les amendements et conclure avant de passer au vote. Vous avez, comme la coutume le permet, la possibilité de vous rencontrer en sortant d’ici, ou bien d’échanger des billets pour mieux conserver l’anonymat de vos échanges. Soyez tous présents à l’heure dite, et que la sagesse des dieux vous guide. »


Note aux participants


Afin de vous permettre de finaliser vos discussions et d’essayer d’influencer les débats, nous vous proposons un court intermède pour régler vos affaires par missives.  What a Face

Cela dans le but d’être rapide et tout de même pris en compte dans la proposition de vote finale.

Nous visons une date butoir du vendredi 30 octobre 2020 à 20h pour cette suspension de séance, adaptable selon l’activité qui résultera de vos négociations (ou non) en coulisses. Nous prendrons contact avec @Lucerys Arlaeron avant la relance du sujet pour confirmer de possibles amendements. Il n’est plus permis de répondre dans ce sujet avant la relance.  Première Séance au Sénat - Edit de Consolation Valyrien 3282246142

D’ici là, bonne magouille et à très vite !  Première Séance au Sénat - Edit de Consolation Valyrien 4077433769

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Première Séance au Sénat
Cela faisait déjà plusieurs semaines que le jeune guerrier portait la toge de sénateur mais, avant de marcher dans les couloirs du Sénat en direction de l'hémicycle, avant ce jour où la proposition de loi allait faire l'objet d'un réel débat, il ne s'était jamais vraiment rendu compte de l'ampleur du rôle qui était désormais le sien. Discuter d'une proposition de loi avec son ami et son supérieur était une chose, car il s'agissait d'un cercle privé mais, à présent, devant toutes ces tribunes débordantes de vie, il réalisait que rien au monde ne l'avait vraiment préparé à  ce jour. Il l'avait voulu, il avait fait le choix d'enfiler cette toge mais, en ce jour, alors que les tribunes se remplissaient, faction après faction, Maekar se surpris à vouloir troquer cette houleuse discussion contre n'importe quel discours aux troupes la veille d'une bataille majeure. Il aurait tout donné pour se sentir engoncé dans son armure, sa fidèle lame au creux de sa main mais, alors que les discussions débutaient déjà, il chassa ces pensées en laissant son supérieur ouvrir le bal. La proposition pouvait se résumer en quelques simples mots : reconstruire ce qui avait été brisé.
Bien entendu le jeune général ne se faisait aucune illusion car, comme son propre père, chaque sénateur et chaque faction veillait sur ses propres intérêts avant tout. C'était la raison pour laquelle, lorsque le sénateur Cellaeron leva la voix pour mettre en avant son économie fragilisée par la guerre, le tergaryon ne fut guère surpris d'entendre ces mots qui, pourtant, lui faisaient mal aux cœurs. Maekar ne pouvait s'empêcher de penser aux vies brisées plus qu'à l'économie mais...Non, Maekar ne pouvait se permettre d'être indigné par de tels propos, car rares étaient ceux à avoir un sens de l'honneur similaire au sien.
Il ne quitta évidemment pas sa sœur des yeux quand ce fut à son tour de prendre la parole, ses pupilles brillant d'une fierté dissimulée alors que sa protégée faisait son entrée dans un monde qui n'avait jamais été le sien, tout comme lui. Certes elle n'avait pas l'expérience de ses collègues et confrères mais elle avait le courage nécessaire pour se lever, pour se faire entendre et c'était tout ce dont elle avait besoin pour la suite. Elle était devenue grande et belle, s'en rendait-elle seulement compte ? Il chassa cette question de son esprit alors que les autres sénateurs se faisaient connaître, tour à tour, la palme du ridicule revenant largement à la sénatrice Odenys. Pensait-elle vraiment que se défendre derrière l'économie suffirait ? Espérait-elle que prendre Lucerys et ses deux subordonnés à parti serait la solution ? Maekar fut forcé de se faire violence, pour retirer le sourire qui menaçait d'éclairer son visage, avant que son meilleur ami ne prenne la parole.

Aeganon avait toujours eu plus de verve que lui, une plume et des mots plus piquants. C'était dans ces moments-là qu'il aurait aimé ressembler davantage à son ami, sur ce point, mais cela ne servait à rien de se pencher trop longtemps sur ce point. Ils étaient différents mais complémentaires : c'était tout ce qui importait. Aeganon magna les mots et la moquerie comme lui seul savait le faire, jusqu'à ce qu'une pause soit établie avant la conclusion finale qui – et il le savait – reviendrait à Maekar. Il ferma donc les yeux pendant cette courte pause, repassant dans sa tête le fil de la conversation, triant ses pensées une à une jusqu'à ce que, finalement, la parole soit de nouveau donnée aux militaristes. La carrure massive et puissante du guerrier se dressa de son siège, s'avançant à la vue de tous alors qu'il prit une posture rigide et inflexible, balayant l'assemble d'un regard d'une rare calme compte tenu de la situation.
Il n'était pas là pour émouvoir son auditoire mais pour le réveiller et le pointer dans la bonne direction, comme un soldat pointerait sa lance vers la cible visée. Il resta donc là un instant le temps que le silence revienne et, au bout de quelques poignées de secondes, brisa le silence avec la voix rauque et puissante qui avait fait sa réputation dans toute l'armée de Valyria.


« Estimées Lumières, nobles Sénateurs, je tiens tout d'abord à tous vous remercier pour votre participation. C'est avec humilité et respect que je me présente devant vous car, je vous le dit, c'est à nous que revient de décider du futur de notre glorieuse République. »


Les épaules droites, le torse bombé et la tête haute, il passa son regard dans chaque rangée de l'hémicycle car il aimait croiser le regard de tous les hommes et les femmes à qui il s'adressait, plutôt que de les considérer comme une masse compacte et uniforme. Il n'aimait pas en faire des tonnes quand il s'agissait de discours mais cela ne voulait pas dire qu'il n'était pas doué dans ce domaine, il avait largement eu le temps de pratiquer sur le terrain. Il se fichait pas mal de la gloire, mais d'autres y accordaient de l'importance et c'était tout ce qui comptait, pour lui.


« Cette guerre nous a tous touchés à différents niveaux. Nos terres ont été ravagées, notre économise grandement mise à mal mais, de tous ces pertes, il en est une qui surpasse tous les autres. Certains de nos frères, nos pères et nos fils ont effectués le sacrifice ultime afin de protéger notre démocratie, afin de défendre les valeurs de notre glorieuse Valyria, et il est impensable que l'ampleur de ce sacrifice  soit tue par avarice.  »


Le terme était un peu fort mais c'était volontaire. Il n'était pas ici pour sa maîtrise de la plume mais le côté percutant et terriblement direct de son point de vue en matière de prise de décision. Il savait manier la langue de bois, mais reconnaissait aussi l'importance et l'efficacité d'une approche plus directe. Alors oui, avarice fut le mot choisi car c'était tout ce qui lui venait à l'esprit, face aux différents discours de ses nouveaux confrères.


« Nous sommes les garants de la démocratie, de la grandeur de Valyria, n'êtes-vous pas d'accord ? Alors demandez-vous ceci. Si nous abandonnons les soldats brisés et les orphelins de guerre, si nous crachons à la figure de ceux qui ont tout sacrifié pour la sécurité de leurs concitoyens, qui défendra Valyria lorsqu'un nouvel ennemi nous montrera les crocs ? Vous ? Car ne nous y trompons pas, cette victoire contre la harpie ne fera qu'attirer davantage l'attention sur notre bien-aimée République. »


Il ne fallait pas avoir eu une éducation prestigieuse pour savoir qu'un chien battu et rejeté vers son maître avait peu de chances de vouloir revenir vers ce dernier. Pourquoi un soldat voudrait se battre, si jamais la guerre revenait aux portes de Valyria, et risquer sa vie en sachant comment ses camarades avaient été traitées à la fin de la précédente guerre ? Les dragons étaient de formidables armes de dissuasion massive, mais les armes restaient le plus gros des forces de Valyria. Il fallait donc les ménager, et non pas les laisser dépérir


« Il en va de notre honneur, de notre intégrité, de notre avenir, et non pas de faiblesse ou d'assistanat, que de reconnaître la souffrance de nos défenseurs. Il s'agit de reconstruire notre République, plus forte, plus déterminée que jamais à surmonter tous les obstacles sur notre route. »


Prenant une courte pause, laissant aux autres sénateurs l'opportunité de prendre conscience du rôle qui était le leur, aujourd'hui, le Téméraire brisa à nouveau le silence en réexpliquant les points de la proposition des militaristes.


« Comme indiqué par mon estimé collègue, le sénateur Arlaeron, notre proposition loi est articulé de la façon suivante :
Les veuves de guerre seront logées et une  dot leur sera assurée si elles viennent à se remariées.
Les orphelins de guerre seront incorporés à notre glorieuse armée, à titre gracieux. Ils seront, de ce fait, considérés comme des pupilles de la nation pour laquelle leurs pères ont sacrifié leurs vies, jusqu'à leur majorité et une dot leur sera également accordée.
Les invalides de guerre recevrons une rente de l'état, pour leur sacrifice et leur souffrance, proportionnelle à leur incapacité. Pour les plus démunis d'entre eux, un logis leur sera fourni. De plus, nous demandons également la création de domus de vétérans dans chaque cité majeure de notre glorieuse République.
Pour finir, les villes ravagées par la guerre seront reconstruites et renforcées, afin que nos concitoyens ne connaissent plus jamais de telles souffrances.


Il n'y aura aucun compromis. Car cette loi n'est pas là pour nous enrichir. Elle est là pour le bien de Valyria, des valyriens, et des villes valyriennes. Elle est celle que beaucoup ont rêvé, ici, de déposer, et que nous rendons possibles : la promesse d'un avenir meilleur, pour l'ensemble de notre République, et pour toutes ses composantes, que ce soit notre peuple, notre armée, notre économie, nos constructions, et nos temples. »



Rien de nouveau, tout avait déjà été expliqué mais un rappel était nécessaire, car les détails avaient pu être perdus dans ces discussions houleuses. Mais le temps de ces discussion était révolu, Maekar fit d'ailleurs un pas en avant et, avec froideur et fermeté, rappela aux sénateurs la responsabilité qui était la leur.


« L'avenir de notre République est entre vos mains, à présent. Votez. »
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Séance au sénat

Édit de consolation valyrien




Loi adoptée !


Première Séance au Sénat - Edit de Consolation Valyrien Vote_111
Après les différentes prises de position et le discours de clôture par Maekar Tergaryon, le Sénat s'est prononcé sous le regard attentif des Lumières de Sagesse.

  • La faction militariste, emportée par la renommée de Lucerys Arlaeron, le charisme d'Aeganon Bellarys et la synthèse de Maekar Tergaryon, a bruyamment manifesté son soutien à la résolution et l'a intégralement soutenue. Lucerys est apparu comme un chef capable de faire imposer sa volonté à Valyria et a confirmé sa réputation de chef politique subtil et implacable. Aeganon Bellarys et Maekar Tergaryon ont, tous deux à leur manière, su attirer l'attention sur leurs capacités à intervenir dans la politique valyrienne tout en soutenant leurs intérêts. Si certains ont pu être heurtés par la véhémence du Bellarys, ils ont trouvé en le Tergaryon un élément intéressant dont la posture, jouée ou non, témoignait d'une tentative de prise de hauteur.
  • Déchirée par ses luttes internes et ses propres intérêts, la faction mercantiliste a majoritairement soutenu la proposition, notamment grâce aux interventions de Baelor Cellaeron et d'Elaena Tergaryon. Le discours furieux d'Echya Odenys lui a coûté une partie de son influence au Sénat, mais elle a trouvé un écho très favorable dans une partie de la faction mercantiliste et dispose désormais de véritables fidèles. En défiant Baelor Cellaeron devant ses pairs, Elaena Tergaryon a prouvé à l'intégralité du Sénat qu'elle n'était pas une plante verte assurant l'intérim pour le compte de son père mais bien une étoile montante de Valyria.
  • La faction religieuse a connu ses propres dissensions. Si les consignes d'Arraxios Maerion, Lumière et ancien membre de la faction, étaient de soutenir le général Lucerys, le désormais redouté Daeron Gazarelys - alias Cul-de-Jatte - a su dévoyer une partie importante de la faction contre ce projet. En s'opposant frontalement au Maerion, il a grandement gagné en influence au sein de la faction et en son dehors.
  • Malgré ses tentatives d'ouverture, Maegon Riahenor n'a pas été écouté par ses confrères militaristes qui ont campé sur leurs positions et n'ont pas amendé leur proposition initiale. Si son discours plein de verve a séduit une partie de la faction civiliste, qui se rangera désormais systématiquement derrière lui, il n'a pas pu empêcher la loi de passer. Gênés de devoir voter contre une loi qui aurait pu être proposé par leurs rangs, les alliés de Maegon ont préféré s'abstenir que de voter contre, de peur de représailles populaires. Seuls les plus fidèles alliés du Dynaste l'ont soutenu dans son opposition ouverte à l'édit de consolation.
  • Vaemor Baeriar, de son côté, a confronté la position des populistes, toujours heureux de pouvoir passer pour les alliés du peuple en lui accordant ce qu'il désire. Il apparaît désormais comme une figure de proue potentielle de la faction populiste.

La répartition des votes est donc la suivante :
Première Séance au Sénat - Edit de Consolation Valyrien Vote_110

Les conséquences du vote sur le jeu



  • Les troupes valyriennes ont une légère préférence et loyauté pour leurs officiers au Sénat que pour le reste de l'appareil régalien de Valyria.
  • Le peuple est satisfait de cette proposition considérée comme juste et considère les sénateurs de l'armée comme des hommes bons et justes.
  • Le secteur mercantile fait grise mine à cette nouvelle qui va coûter cher à la République. En représailles, les marchands ont augmenté leurs prix à destination des troupes et l'efficacité de la chaîne d'approvisionnement a momentanément baissé.
  • Les artisans, notamment de la construction, sont ravis des nouvelles de la reconstruction et de la fortification des villes du Nord. S'ils ne peuvent se fâcher ouvertement avec les marchands, ils sont pour la plupart ravis, faisant eux-mêmes parti du peuple meurtri défendu par la loi.
  • Lucerys Arlaeron et Maegon Rihaenor, son plus symbolique opposant dans cette séance, font désormais office de poids lourds de la politique valyrienne et chacune de leur décision sera désormais observée de près.
  • Elaena et Maekar Tergaryon intriguent du fait qu'ils rapportent chacun un siège à leur famille. Si la prestation d'Elaena a attiré l'attention par le courage qu'il lui a fallu pour prendre la parole, beaucoup s'accordent à dire qu'elle a été prise de vitesse par un Baelor décidément rapide. Les plus vieux fidèles de son père s'accorderont désormais pour l'aider au mieux, préférant la jeune prodige à ses vieux concurrents qui seront imperméables à leurs suggestions.
  • Ce dernier, justement, s'est établi comme un candidat sérieux et très identifié par le Sénat comme pouvant succéder à Vhaegon Tergaryon à la tête de la faction mercantiliste.
  • Aeganon Bellarys suscite parmi ses pairs des réactions diamétralement opposées : certains louent ses talents d'orateur qui serviront brillament les intérêts de l'armée, d'autres pourfendent sa façon de s'adresser aux autres sénateurs et qui ne contribuent nullement à la sérénité des débats.
  • Au terme de la séance, le polémarque a annoncé que le mandat de la Lumière de Sagesse Arraxios Maerion arriverait bientôt à son terme.
  • Jaeron Dalitheos a sans doute perdu le peu d'influence qui lui restait. Il n'aura désormais pas d'autre rôle que celui de doyen de l'assemblée en attendant que Balerion le rappelle - au plus vite - à ses côtés.
  • Rise of Valyria va pouvoir se vautrer dans les memes pour au moins six mois.


Le mot de la fin


Bravo à toutes et à tous pour cette première séance superbement menée. C'est une véritable réussite pour Rise of Valyria à laquelle vous avez tous contribué avec talent.

Merci pour vos plumes et on se retrouve très bientôt pour la suite de nos aventures  Première Séance au Sénat - Edit de Consolation Valyrien 704899288

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