« Mais puisque tu veux des questions, je te marque du sceau de Balerion. Lorsque ta main brûlera un jour où le soleil sera couché, nous t’appellerons et tu écouteras. Tu tueras qui nous t’ordonnons de nous envoyer. Je ne suis pas cruel. Voilà pour te dédommager, agent de Balerion. »
Une rage encore plus vive prenait Laedor au cœur alors que la malédiction tombait telle la lame insensible de la guillotine marquant la fin de ses illusions.
« Ce n'est pas des questions que je t’ai demandées, mais des réponses » cracha-t-il entre ses dents à l’être immatériel quelque part tout autour de lui. Mais Laedor avait bien eu certaines réponses. Il était maintenant assuré que les dieux ne complotent pas contre lui et qu’aucun maléfice ne touchait sa famille… Pas avant celui-là tout du moins. Ses ennemies étaient donc bien au chaud à la surface et qu’ils se tiennent bien prêts, car à son retour, Balerion pourrait recevoir plus d’un cadeau de sa part.
La promesse d’envoyer ces traîtres pourrir là où ils le méritent fut interrompue par un changement soudain de décors. Laedor est décontenancé en apercevant cette mise en scène, si similaire à son mariage maudit ayant emporté le dernier de ses parents. Il reconnaît aisément son père au centre de cette funeste mascarade même avant que le démon ne l’interpelle. Il est émacié, négligé et n’est plus que l’ombre de toute la grandeur qui était la sienne. Le rugissement du dragon n’est plus que le feulement d’un petit gecko.
Laedor comprend tout alors que de ses deux yeux encore bien présents, il embrasse la vaste salle de réception. Tous ces squelettes, des êtres importants de Valyria et de sa famille ne sont plus que des tas d’os calcinés, vestige de leur crémation dans la Troisième Flamme. Le démon à raison, ici ils ne sont plus rien, mais lui, il n’est pas d’ici. Son œuvre parmi les vivants n’est pas achevée et à présent qu’il voit en face la dure réalité du trépas et de son monde souterrain, il n’est pas dans son intention d’y revenir avant que sa mission ne soit achevée et sa famille hors de tout danger.
« Père ! » Le patriarche accourt vers son prédécesseur, le cœur lourd d’émotion et l’empoigne dans une virile étreinte. Son regard est brouillé par les larmes voulant s’en échapper, il les ravale.
« Non, non, Père rassure toi, je ne suis pas mort. » Il essuie rapidement les gouttelettes tombant maintenant sur ses joues humides. « Je suis ici en mission, mais je vais bien, notre famille va bien. J’ai- J’ai un fils, un héritier, il porte ton nom et la grandeur de notre lignée. Une fille aussi, elle est magnifique. J’aurais tant aimé que tu les rencontres, mais ici le plus tard sera le mieux. » Il peine à contenir l’émotion alors que le flot de mots jaillit de sa bouche. « Tu peux être en paix. » Ses mains se posent autour de ce visage amaigri alors que la barbe négligée lui picote les doigts, un sanglot s’échappe. « Je suis là pour protéger Valyria et notre famille comme tu l’as si bien fait et comme mon fils le fera. » Il ne savait bien sûr pas encore comment, ni même de quelle manière cette nouvelle malédiction allait l’affecter, mais il était déterminé et c’était déjà ça. S’il savait que rien de bon ne l’attendait dans la mort, qu’il ne survivrait pas indéfiniment, il avait au moins la certitude que leur nom allait perdurer et qu’il se battrait jusqu’à la fin pour sa famille, jusqu’à revoir son père.