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Troisième Séance du Sénat - Les Trois Coups
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Voix de l'Ombre
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Les Trois CoupsTroisième séance du Sénat



Pour la première fois depuis des mois, les portes de Drivo étaient grandes ouvertes. Le complexe capitolin qui était à la fois le cerveau et le cœur de la République valyrienne sortait enfin de la terrible léthargie dans laquelle il avait été précipité par le meurtre de Lucerys Arlaeron plus d’une année auparavant.

Les élites valyriennes, pratiquement seules tolérées dans le saint des saints, renouaient avec une tradition que la dernière crise avait bien manqué de faire disparaître pour de bon. L’ensemble des aristocrates, des marchands et des politiciens de Valyria en avait parfaitement conscience. On se retrouvait après des mois de conflit larvé, où le moindre incident faisait alors craindre un risque d’embrasement et imaginer l’inimaginable : une guerre civile entre Valyriens qui n’aurait ravi que les ennemis de la République, de Ghis à Andalos.

Fort heureusement pour le monde, les élus d’Arrax s’étaient montrés plus sages qu’ils n’y paraissaient. La crise tant redoutée avait été contenue et si plusieurs événements restaient dans toutes les mémoires comme autant de moments où l’Histoire aurait pu basculer, il n’en avait rien été. En ce jour glorieux du premier mois de la mille soixante-huitième année depuis la Fondation de Valyria par les Dynasties, la cité retrouvait sa pompe sénatoriale et son peuple refaisait un peu plus corps. Étrangement, la première armée – dont le rôle était avant tout la protection de Drivo – n’était pas visible, ses soldats ayant reçu l’ordre de rester dans leurs casernes. Le maintien de l’ordre était assuré par les nombreux fonctionnaires de la République et du Sénat qui se retrouvaient à canaliser le flux important de visiteurs qui retrouvaient leurs marques dans un bâtiment qui avait été fortement déserté depuis le trépas d’Œil d’Argent.

Pour l’occasion, les vastes halls de marbre et d’ébonite étaient décorés de vastes tentures multicolores et de bannières proclamant haut et fort les couleurs de la République de Valyria. Parmi les visiteurs, on retrouvait logiquement les grands clans de la capitale : les familles des Lumières, les trois dynasties, les grandes familles les plus influentes et les plus riches, ainsi que les marchands et négociants les plus puissants, les religieux d’envergure et quelques représentant du corps des Mages et bien d’autres encore. Parmi les invités, on trouvait également plusieurs ambassadeurs des nations amies de Valyria. Ibben avait envoyé le prince héritier du roi-dieu Morgen, en attendant qu’un ambassadeur soit formellement nommé à la capitale. L’archipel des Îles d’Été et le souverain de Jahla étaient représentés par Malthar Xoraq. On y trouvait aussi les émissaires des cités rhoynares entretenant de bons rapports avec Valyria. Garin Rosayan représentait Chroyane et la princesse héritière de Sar Mel, la nièce de Myssaria Oyan Cellaeron, représentait sa mère et sa cité. Également présents, des représentants de plusieurs cités du royaume de Sarnor venus renforcer l’ambassadrice du Haut-Roi lui-même, Amaya Huzhor. Invitées par politesse diplomatique mais sans réelle volonté de leur donner une quelconque dans la journée, les ambassadrices de Ghis et Yi-Ti, Vastraya Amasis et Ashina Kuwa, se trouvaient en retrait, conversant entre elles.

Les notables étaient nombreux et pourtant, la plupart des regards se tournaient un moment ou l’autre vers Aeganon Bellarys, capitaine-général par intérim des armées valyriennes. Il n’avait fait aucun secret de sa volonté de sécuriser davantage de pouvoir pour la faction militariste dont il était le leader incontesté, ayant fermement mais subtilement effacé en quelques semaines l’influence Arlaeron, jadis prépondérante sur les armées. Aujourd’hui, il n’était pas la seule tête des hommes de guerre de Valyria, bien sûr, mais il était la plus publique, la plus ambitieuse et la plus efficace, disaient ses partisans. Si officiellement on ne disait que du bien des grands hommes qui le secondaient, comme Maekar Tergaryon, Laedor Arlaeron, Jaehaeganon Maerion et Maegon Tergaryon, il était évident que la réalité était un peu différente. La plupart des officiers qui disposaient d’un mandat sénatorial décerné par l’armée pour représenter ses intérêts au Sénat étaient loyaux à celui qui avait toujours clamé protéger l’héritage de Lucerys Arlaeron. Malmener quelque peu des institutions complices et trop passives pour avoir empêché un tel sacrilège était vu par les soutiens d’Aeganon Bellarys comme un mal nécessaire. Et encore, ils étaient peu nombreux à ouvertement considérer que c’était un « mal ». Il n’y avait nul doute que cette séance avait un seul objectif pour l’héritière de Lucerys : formaliser sa stature d’homme politique et convaincre ses soutiens de sa pertinence à se faire confirmer comme commandant suprême des armées de Valyria. Le poste était d’autant plus important que les armes au service de Valyria n’avaient jamais été aussi nombreuses, avec la création de quatre nouvelles armées entières à la suite de l’élection de Baelor Cellaeron comme Lumière de Sagesse. Sa proposition de loi pour instaurer la création d’un état d’exception dans lequel Valyria serait transformée en oligarchie autocratique avait curieusement peu choqué et était d’ores et déjà annoncée comme l’une des grandes mesures dont le vote s’annonçait une formalité tant la campagne du Bellarys, menant séduction et coercition, avait été efficace. Il se murmurait d’ailleurs qu’il y avait eu des mouvements de troupes suspects dans les campagnes ces dernières semaines, beaucoup misant sur une utilisation abusive des ordres de déploiement des armées pour matérialiser le pouvoir la pression exercés sur les Sénateurs ciblés.

Moins apprécié mais tout aussi scruté, la Lumière de Sagesse Valerion Qoherys comptait parmi les grands personnages dont le nom était sur toutes les lèvres. Personne n’avait oublié sa proposition d’abolir la République pour une autocratie centrée autour de lui. Les rares soutiens qui lui étaient restés fidèles rasaient les murs, se fondant dans la masse ou discutant entre eux légèrement à l’écart. De folles rumeurs avaient circulé sur le compte du Qoherys, certains imaginaient qu’il serait arrêté et démis de ses fonctions, que toute cette séance n’était qu’une vaste fumisterie pour l’attirer au Sénat qui serait en réalité un tribunal exceptionnel qui le jugerait pour sa trahison. D’autres supputaient, pour ces mêmes raisons, qu’il n’assisterait pas à la séance ce qui, de mémoire de Valyrien, n’était jamais arrivé. Les Lumières de Sagesse ne manquaient jamais volontairement une séance du Sénat.

On regardait aussi avec un intérêt important vers les représentants des trois dynasties. Leur apparition dans un front uni avait fait un immense effet lorsque la foule avait marché sur le Sénat, protégé par une première armée aux intentions incertaines. Il semblait que l’union sacrée avait fait long feu car personne ne pouvait douter que les Riahenor et les Vaekaron ne s’adressaient guère trop la parole, tandis que les Lyseon se sentaient un peu piteux et baissaient la tête. Parmi les absents notables, on pouvait noter la toute nouvelle Magister du Collège des Mages, pas invitée par un Sénat encore incertain quant à son compte et par un frère Sénateur avec lequel les relations étaient tendues.

Ce retour en grande pompe de la vie politique d’avant-crise, certains disaient même d’avant-guerre, était suivi de près par le bouclier de l’ordre politique valyrien. Garant des institutions, engoncé dans une tenue qui rappelait par chaque matière, couleur et détail de son habit traditionnel, Taecegor Noheneos de Rhyos, Polémarque du Sénat, accueillait les Sénateurs et les Lumières à l’entrée de l’assemblée, ayant un mot pour chacune et chacun d’entre eux. La séance s’annonçait critique et ferait date dans l’Histoire de la République. Ils se devaient d’être à la hauteur de l’importance de l’événement, et lui plus que tout autre. Les portes avaient ouvert dès le matin, mais l’affluence était telle qu’il avait fallu plusieurs heures avant que la vaste salle sous la coupole vitrée qui se tenait dans l’ombre de l’immense tour des Lumières ne soit remplie alors que six cents élus convergeaient vers elle. Lorsqu’on lui indiqua que l’ensemble des membres du Sénat se trouvaient dans la pièce, Taecegor ordonna que l’on fît fermer les portes et frappa trois coups espacés pour attirer l’attention du public qui conversait, comme s’il se retrouvait après de longues séparations, après une saison de chasse ou de festivités en dehors de la capitale. De sa voix de stentor qui portait si bien dans le Sénat, le Polémarque ordonna que chacun regagnât sa loge et invita les Lumières à s’installer, siégeant de manière à être répartis le long de l’estrade circulaire.

« Très estimées Lumières de Sagesse, honorables Flammes de Vérité, nobles invités ! tonna le Polémarque. Je vous invite à faire silence dans l’assemblée pour que nous puissions ouvrir cette séance sénatoriale sous le regard des Dieux et des Hommes. Vous êtes réunis ici aujourd’hui pour honorer votre mandat et servir Valyria, son peuple et ses Dieux. Votez en conscience et votez juste. Parlez avec votre cœur et au nom de la République. J’annonce l’ouverture de cette séance extraordinaire du Sénat. »

Les formules protocolaires étaient posées. L’Histoire se mettait en marche. Le Sénat était désormais en séance active. L’assemblée bruissa d’applaudissements polis, comme il convenait de saluer le retour au processus républicain.

« Je rappelle que cette séance a pour objet l’étude de réformes de la République dans son fonctionnement et sa raison d’être. Plusieurs motions ont été déposées par l’assemblée et celles-ci seront examinées une à une avant d’être soumise au droit de réponse et puis au vote. Les déposants ont été tirés au sort et c’est l’estimé Sénateur Maegon, de la dynastie Riahenor, qui a été choisi par les Dieux pour ouvrir cette séance. Avance-toi et rejoins-nous au centre, Sénateur. Valyria t’écoute ! »



HRP:
Maegon Riahenor
Maegon Riahenor
Seigneur-Dragon

https://rise-of-valyria.forumactif.com/t1444-maegon-riahenor-fea
Les Trois CoupsThe drumbeat. The drums are coming closer and closer.


Une fois n’était pas coutume, Maegon avait été un des premiers à fouler de son pas impérieux le sol de marbre du Sénat. Son sourire plein de morgue ne détonnait en rien de ses habits. Vêtu à la toute dernière mode antique, sa grande toge plissée suivait un style complexe et il avait attaché ses long cheveux d’or pur en une fine natte martiale. Le message était d’une simplicité élégante : le dynaste Riahenor tout autant que son sénateur s’adresserait à ses pairs aujourd’hui. Nul ne pouvait le nier alors que sa famille s’avançait, non pas à ses côtés, mais derrière en une interminable succession presque généalogique. Nul ne brillait par son absence. La noblesse la plus pure ne pouvait se cacher sous de vulgaires excuses pour ne pas assister à un tel évènement.

Rapidement installé à sa loge, entouré des siens, le dynaste observait les arrivées des uns et des autres. Alliés de longue date comme de circonstance, ennemis séculaires ou haine passagère, tous recevaient le même regard impénétrable et le visage de marbre. À la seule éternelle exception de ses pâles lèvres à jamais retroussées par la grâce des Dieux. Maegon jubilait. Non par pour ces victoires à venir, bien qu’il escomptait bien vaincre, mais pour être parvenu jusqu’à cet instant précis. Dur fardeau et pari risqué de se tenir tant que dynaste pour défendre les institutions alors moribondes d’une république ad vitam æternam honnie. Pourtant tel était l’exploit des siens. La fidélité ambivalente les avait empêchés de se retourner pour mieux mordre dans la chair avariée de l’autorité en déliquescence. Il n’était pas seul accompagné de rares électrons libres tels que Daera Melgaris qu’il gratifia d’un rictus amer, presque apparenté à un sourire.

Voir le Sénat ainsi rassemblé exaltait son cœur. Fini le pouvoir croupion institué par l’armée au nom d’un homme disparu dans les flammes de Balerion. Disparues les manigances d’un homme tellement empêtré dans sa suffisance qu’un simple échec de sa main droite l’avait mis à terre. Maegon observait là le changement d’une vie, une révolution séculaire. L’occasion de nettoyer à jamais l’opprobre jeté par les Verts sur leurs dynasties, mais également d’en tirer profit. Ce fut avec une fierté à peine voilée qu’il se leva lorsque le Polémarque l’invita, comme de droit. Premier parmi les pairs, il s’avança et embrasa d'une œillade la foule. Sa morgue disparut, évanescente face aux mots que sa langue porterait. Alors le geste grave, le regard fier, il ramena sa verve jusqu’en pleine lumière :

"Je me tiens devant vous en toute humilité. Le cœur lourd, j’ai vu la mort d’un brave transformer nos plus intègres citoyens en loups affamés, du moins je croyais qu’ils l’étaient. Au nom d’une sécurité, et celle de leur soif de pouvoir, une poignée d’entre nous s’est arrogé l’imperium et l’ont exercé avec une poigne sans précédent au point de marché sur notre propre cité. D’autres ont essayé d’arracher leur part de la carcasse pourrissante de notre république. Autocrates et dictateurs s’opposaient sous l’inaction attention de nos Lumières de Sagesse, dépassées, mais non coupables devant l’audace de leurs pairs."

Maegon croisa le regard de Baelor Cellaeron et hocha presque respectueusement la tête. Il fit de même avec chacun des Lumières, tout en ignorant royalement Valerion Qoherys. Baissant le menton, le dynaste soupira discrètement avant de lever les yeux devant son auditoire :

"Du fond du gouffre, j’ai crié. Des profondeurs tyranniques se sont élevées d’autres voix. Celles de l’amour de notre système, de la démocratie ne pouvait se taire. La raison a ramené la lumière sur ces abysses apeurées. Paix et réconciliation, tel est l’espoir de ce jour béni des Dieux. À quel prix…"

Embrassant l’immense salle, preuve ultime de la toute-puissance valyrienne, Maegon releva le menton et observa le vide, comme plongé dans ses pensées :

"Les dieux ont posé leur regard sur les élus pour gouverner. Ces mêmes élus ont accepté de partager ce fardeau, car leurs pairs et frères étaient fin prêts et le réclamer dans une candeur presque enfantine. La réussite valyrienne a toujours été celle de l’écoute et du changement. Les traditions, pourtant, demeurent, les dynasties aussi. Elles veillent, prêtes à protéger les institutions, parées à sauvegarder l’héritage du bouleversement. Lorsque cela s’avère nécessaire, elles savent oublier leurs rivalités et le passé pour se réveiller."

Maegon laissa l’écho de sa voix disparaître au moment où il avait accentué le dernier mot dans un registre plus grandiloquent. Tous se rappelaient l’intervention bienvenue des dynastes pendant la marche sur le Sénat. Un bain avait été évité ce jour-là, Maegon en était sûr. Avec un sourire contrit, comme désolé de s’être imposé alors, il reprit :

"Nous gouvernons pour ceux qui en sont incapables ici-bas. Notre devoir est de guider et diriger le peuple. Sa marche contre ses propres représentants montre qu’il serait pourtant bon parfois de l’écouter attentivement. Le murmure de la rue, bien peu peuvent se targuer de l’entendre et de le comprendre. Pourtant, il existe quelques exceptions, élevées parmi la masse ignorante et néanmoins jugées dignes de siéger parmi nous. Ces hommes et femmes connaissent ses besoins et pas seulement ses désirs. Véritables tribuns, ils sont à même de conseiller nos dirigeants sur ces questions triviales et d’appeler au verdict du Sénat lorsque nécessaire. Je propose qu’un rôle d’elēni hengeralbar soit attribué à un de membres de la plèbe digne de siéger ici sous ces devoirs et droits consacrés à l’instant."

Maegon marqua une longue pause avant de reprendre :

"Ce n’est pas tout, Sénateurs. Si votre sagesse reconnaît mon souhait comme juste, il se trouve déjà parmi nous une personne digne d’endosser ce titre."

Il se tourna vers un siège bien particulier, le visage de marbre.

"Daera Melgaris. Lève-toi, je te prie. Nous nous opposons en bien des sujets et je condamne certains de tes gestes. Pourtant, je salue ta dévotion à notre république et à l’ordre. De par le titre dont t’affuble le peuple, tu as mon soutien si cette proposition devait être acceptée."

Le dynaste et sénateur retourna à sa chaire puis avec un dernier regard, il conclut :

"N’oubliez pas : l’écoute est le changement."


Alynera Vaekaron
Alynera Vaekaron
Mīsio Lentor

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Les Trois CoupsTroisième séance du Sénat


Ainsi, la Fortune avait décidé de lui faire franchir, à nouveau, le seuil du Sénat… Que les desseins des Quatorze pouvaient être cyniques ! Ce jour-là, cependant, Alynera Vaekaron ré-enjambait le seuil mythique de Drivo d’une noblesse irréprochable. Elle n’était plus la jeune veuve esseulée, unique survivante de l’hécatombe des siens, tombée par le jeu du sort sur le grand échiquier valyrien, mais une épouse anoblie par sa déesse patronne. Mère de deux fils, tous deux promis à de terrifiants avenirs — l’un dans le sacerdoce divin, l’autre béni par un Ancien —, elle avait gagné son droit à représenter son époux sur le siège familial. Ces derniers jours, elle avait longuement prié afin que la fièvre de Ragaenor retombe. La perspective de retrouver son ancienne cure, celle de bien des maux, lui avait été intolérable. En la Tour, la béance soudaine de ce siège soulignait davantage la guerre entérine déchirant l’oncle et le neveu. Certes, Maelor était le seul homme de la dynastie en mesure de le remplacer mais lui offrir cette chance, inouïe, était nourrir une potentielle nouvelle querelle de légitimité. Cette petite plaisanterie ne leur était pas permise. Aussi la veille, tard dans la nuit, il avait été tranché que Maelor, privé de son dragon, ne pouvait paraître à Drīvo Perzo. En maintenant son autorité, Alynera, pour la première fois, prenait officiellement position en faveur de son époux. Et si il était difficile d’appréhender quelle serait la réaction de ce dernier, qui de Maelor — mâle, mais rival — ou Alynera — alliée, mais femme — était le plus indigne, la Mīsio Lentor possédait désormais bien trop de crimes à son actif pour s’en soucier réellement.



Elle était arrivée parmi les derniers dans l’hémicycle, contenant par ce choix une effusion de commentaires inappropriés sur son retour inattendu. C’était également, dans ce temple sacro-masculin, une manière discrète de jouer de sa condition féminine. Reconnue pour son goût pointu vestimentaire, elle avait drapé sa large palla, vêtement féminin imitant au mieux ces autres toges lui étant interdites, au goût des premiers âges de la République. Mille ans de retard, n’est-ce pas ce qu’ils aimaient tous susurrer pour se moquer des anciens Triarques ? Cette sobre pompe était épinglée d’un artéfact silencieux, une agrafe en bronze émaillé formée délicatement par quatorze disques. Lesquels semblaient se consumer par autant de Flammes rougeoyantes lorsqu’elle se mouvait. Ainsi, au milieu de ce qui avait un jour formé la solennelle faction religieuse, à quelques mètres de Jaehaegaron Maerion, chef auto-proclamé depuis la mort subite de son père, nul ne pouvait se tromper : les Vaekaron portaient la voix des Temples. La séance seule laisserait entrevoir si alliance ou lutte politique était à attendre entre les deux familles — si autrefois Arraxios et Alynera les avaient unies, nul n’était assez fou pour croire Ragaenor capable de ce qu’il avait été le premier à qualifier d'abjecte ineptie.



Lorsque le Polémarque, Taecegor Noheneos, frappa les trois coups d’ouverture, elle prit place. Aussitôt, la majestueuse coupole fut remplacée par une chape de plomb. L’écho des milliers de mots, aussi bruyants qu’un jour de festin, sembla comme n’avoir jamais existé. Grands Dieux qu’il était temps ! Les motions annoncées, quelques semaines en amont, avaient été une déception sans précédent — quoique non surprenante. Peu de Sénateurs avaient proposé, ou avaient eu l’audace suffisante, des motions ayant un réel impact sur la réforme annoncée de la République. À croire que tous, déjà, s’étaient adonnés aux gracieux cadeaux et promesses des familles militaires et de leurs sbires… S’enfonçant dans son siège de marbre, fermement droite, les bras sur ses accoudoirs, Alynera écouta attentivement les paroles d’ouverture.



« Je rappelle que cette séance a pour objet l’étude de réformes de la République dans son fonctionnement et sa raison d’être. Plusieurs motions ont été déposées par l’assemblée et celles-ci seront examinées une à une avant d’être soumise au droit de réponse et puis au vote. Les déposants ont été tirés au sort et c’est l’estimé Sénateur Maegon, de la dynastie Riahenor, qui a été choisi par les Dieux pour ouvrir cette séance. Avance-toi et rejoins-nous au centre, Sénateur. Valyria t’écoute ! »



Observatrice silencieuse, elle déposa un regard secret sur son parent. Inaugurer une séance représentait un grand honneur, dont le descendant de Rhaenys rayonna sans rougir. Les fils de la destinée étaient justes cependant car, de tous, peut-être était-il réellement le seul dont les desseins républicains ne s’étaient jamais écartés du droit chemin. Des mois durant, alors que Valyria craignait une guerre civile, il avait était gardien de leurs lois et de leurs préceptes. Quand les autres s’étaient fourvoyés dans l’ignominie et le parjure et qu’il aurait été aisé de s’adonner à la même traitrise, les Lumières éclairant le chemin à emprunter, sa volonté première n’avait pas fléchie. Le Seigneur Baelor Cellaeron avait, certes, remporté la première manche mais à l’épreuve de la vertu il sortait le grand perdant. 



« Je me tiens devant vous en toute humilité. {…} Je propose qu’un rôle d’elēni hengeralbar soit attribué à un de membres de la plèbe digne de siéger ici sous ces devoirs et droits consacrés à l’instant. {…} Il se trouve déjà parmi nous une personne digne d’endosser ce titre. Daera Melgaris. Lève-toi, je te prie. Nous nous opposons en bien des sujets et je condamne certains de tes gestes. Pourtant, je salue ta dévotion à notre république et à l’ordre. De par le titre dont t’affuble le peuple, tu as mon soutien si cette proposition devait être acceptée. »



Contrairement à ses pairs, son regard millénaire ne se tourna pas vers ladite « Lumière du Peuple. » Il demeura droit vers la tribune. Affubler était un verbe bien trop correct pour évoquer le surnom qui lui avait été attribué : Maegon aurait mieux fait d’en choisir un autre. Il ne faisait aucun doute qu’Alynera n’appréciait que très peu la popularité montante de cette fille perdue. Quoi, des lauriers pour avoir ouvert ce qui aurait été, sans son intervention secrète, un bain de sang fratricide ? C’était d’un ridicule grotesque, aussi grotesque que ce qu’on pouvait entendre depuis quelques jours. Jaekar Velthenon aurait fait de cette putain son hétaïre. Il n’y avait cependant guère de surprise à ce qu’un bâtard de second rang, fils d’un homme qui n’osait plus paraître en public sans se draper dans l’ombre des murs, cherche sa fortune ailleurs… même dans les draps d’une vulgaire marchande. Des mois plus tard, elle ne pouvait oublier le moment où cette dernière avait posé sa main, sans permission, sur celle sacrée de son oncle-époux. La mâchoire encore rigide de cet affront protocolaire, elle observa le Riahenor. Il avait peu défendu sa motion, probablement assuré de sa majorité. Une assurance qu’elle ne partageait guère tant les serres des militaires s’étaient assurées d’étouffer tout mouvement contestataire au leur. Par ailleurs, sa petite protégée n’avait pas même daigné participer à la loterie…  S’abroger la défense du petit peuple, mais ne rien faire pour l’aider : n’était-ce pas la preuve de toutes ses basses intentions ?



Lorsque son tour de voter vint, elle se contenta d’acquiescer en faveur de ladite motion et pour la Melgaris d’un grand mouvement du front.

« Sous réserve d'une motion plus détaillée, notamment sur la modalité d'élection, la durée d'un poste et la renouvelabilité d'un poste d'Elēni hengeralbar le sénateur Riahenor a la voix de mon époux. »



Les Dynastes avaient déjà parlementé de tout cela entre eux, de longues heures durant. Ils n’avaient été que très peu d’accord sur les tenants et les aboutissants, mais désormais d’une même unicité ils ne pouvaient se désolidariser. De plus, la séance serait bien longue et les combats à venir féroces. L’absence du Jentegon I Aegenka, et de ses bannières aux trois dragons d’or, ne lui avait pas échappé. Depuis son entrée dans les lieux, elle ne pouvait empêcher cette petite voix qui se questionnait inlassablement : finalement, les soldats incorruptibles avaient-ils eu un prix ? Les sens aux aguets, tels ceux d’Yraenarys, elle se tenait prête pour le prochain coup d’Aeganon Bellarys... ou des Lumières.

Vous êtes réunis ici aujourd’hui pour honorer votre mandat et servir Valyria, son peuple et ses Dieux sonnait déjà comme une douce illusion.


Résumé du post :
Daera Melgaris
Daera Melgaris
La Lumière du Peuple

Les Trois Coups
Troisième séance du Sénat


Il y avait quelque chose d'infiniment majestueux au Sénat ; dans son marbre si solide, à ses dorures honorant les dieux veillant sur Valyria, à ses marches à gravir pour arriver au sommet et observer le monde à ses pieds. Cependant, rien n'égalait la vue du Sénat se remplissant des sénateurs et des membres nobles des différentes grandes familles ; la richesse de leur tenue, les différentes couleurs chatoyantes au vent comme le drapeau d'une guerre non-consommée, le rouge s'affrontant au bleu, le bleu au jaune et ainsi de suite. Le Sénat était le lieu de tous les retournements ; bon comme mauvais, il était le siège de toute son existence et la raison d'être et de vivre de la plupart des gens qui s'y précipitaient aujourd'hui. Devant les lourdes portes, en face des marches, le peuple accourait pour voir les grandes figures politiques du moment entrer dans l'immense édifice qui surplombait la place. Dans la foule, Daera pouvait voir enfant comme vieillards, les yeux suspicieux parfois, interrogateur souvent et rempli d'espoirs pour la plupart. Tous attendaient de ce moment un tournant majeur dans les institutions de Valyria, tous voulaient croire à un renouveau de la société qui les avait trahis, il n'y a pas si longtemps que ça. Elle savait ce que cela faisait d'être parmi la plèbe et d'observer ces gens entrer pour changer l'Histoire d'une nation, elle savait ce que cela faisait d'être impuissant alors que l'avenir de tout leur empire étaient entre les mains de quelques-uns. Aujourd'hui, néanmoins, Daera était actrice de ce changement, elle représentait tous ces gens dans cette session extraordinaire qui allait sûrement durer des heures, mais la République ne s'était pas construite en un jour. Accompagné d'une domestique qui portait les parchemins de son discours et pour retranscrire les discours qui allaient être prononcés aujourd'hui, Daera franchit les escaliers menant vers l'enceinte sous les cris de quelques-uns la reconnaissant sous le surnom qu'elle avait acquis suite à son esclandre dans les rues de Valyria. La lumière du Peuple entrait au Sénat. Le nom lui donnait une responsabilité en plus, une lourdeur au cœur un peu plus grande.

Daera avait soigné son arrivée, sa coiffure, parsemée de tresses qu'elle avait relevé en un chignon tout en laissant une partie de ses cheveux flotter librement dans son dos, mettait en valeur sa chevelure brune qui lui tombait jusqu'au creux des reins. Elle n'avait pas voulu être dans l'extravagance, elle voulait se présenter à la lumière de son nouveau surnom et faire honneur à ses origines modestes. La toge était enroulée autour de son corps comme un costume collait à son comédien. Elle incarnait le Sénat du moins, c'était ce qu'elle aimait se dire alors qu'elle franchissait le seuil de l'hémicycle. Le vêtement n'était pas adapté aux courbes féminines alors le peu de femmes présentes avaient dû l'adapter pour passer inaperçue. En entrant, personne n'osa lui faire de commentaires déplacés et s'ils le firent, ce fut à l'abri de ses oreilles ; c'était un effet secondaire de sa petite manifestation, on ne la regardait plus d'un air amusé comme on regarderait un animal exotique lentement s'étouffer, mais plutôt comme une adversaire tenace ou une alliée dans certains cas. Elle ne jeta de regards à personne en particulier, saluant les gens qui venaient à elle pour se présenter ou pour discuter de sa future motion. Elle pouvait sentir les regards curieux être posés sur elle à chaque geste qu'elle faisait, elle savait déjà que même sans avoir ouvert la bouche, elle avait des ennemis ; des gens qui détestaient ce qu'elle avait accomplis ce jour-là, des gens qui la jalousaient d'avoir pu franchir des pas alors impossible à franchir pour des gens comme elle. Elle trouva alors son siège et attendit patiemment que le Polémarque débute la Séance, trépignant d'impatience tout en parcourant la salle des yeux.

« Je rappelle que cette séance a pour objet l’étude de réformes de la République dans son fonctionnement et sa raison d’être. Plusieurs motions ont été déposées par l’assemblée et celles-ci seront examinées une à une avant d’être soumise au droit de réponse et puis au vote. Les déposants ont été tirés au sort et c’est l’estimé Sénateur Maegon, de la dynastie Riahenor, qui a été choisi par les Dieux pour ouvrir cette séance. Avance-toi et rejoins-nous au centre, Sénateur. Valyria t’écoute ! »



Au moment où le Polémarque avait frappé trois coups, l'assemblée était devenue silencieuse et à part le bruit des tissus se pliant pour se poser sur le marbre millénaire, personne n'avait mouché. Le doux son de la démocratie était en place, sa senteur devenant de plus en forte à mesure que la solennité de l'ouverture de la session se faisait sentir. Ses pupilles se posèrent un instant sur les Lumières présentes, elle savait que certaines d'entre elles s'étaient senties insultées de l'usurpation dont avait fait preuve le Peuple pour la désigner en tant que Lumière de manière non-officielle. Son regard se posa particulièrement sur son futur beau-père, cet homme qui allait devenir sa famille qu'il le veuille ou non. Tous dans cette salle étaient au courant que les deux bâtards de Valyria s'alliaient pour devenir mari et femme en face des Dieux. La nouvelle avait fait ricaner certains, mais tous de manière nerveuse car que pouvait apporter cette alliance sinon des joueurs rusés en plus dans le jeu ? Elle finit par détourner le regard, un regard qui se posa sur une chevelure blanche décorée d'une agrafe en bronze. Alynera Vaekaron était présente pour représenter son mari, la Princesse de Valyria regardait l'assemblée comme une reine observait son peuple. Daera pouvait encore sentir la main de son oncle-époux sur la sienne, noué d'un ruban bleu. Le souvenir la faisait encore brûler d'une rage à peine dissimulée. Elle détestait avoir été utilisée pour remettre les dynastes au cœur des discussions politiques.

« Daera Melgaris. Lève-toi, je te prie. Nous nous opposons en bien des sujets et je condamne certains de tes gestes. Pourtant, je salue ta dévotion à notre république et à l’ordre. De par le titre dont t’affuble le peuple, tu as mon soutien si cette proposition devait être acceptée. »



Elle regarda Maegon Rhiaenor s'avancer sous les yeux de ses collègues. Comme toutes les propositions de réforme, elle l'avait étudiée avec attention. Elle s'entendait sur peu de choses avec l'orateur qui lui faisait place, mais elle avait trouver sa proposition étonnement proche de ses propres idéaux, ce qui avait le mérite de lui faire oublier pendant un court instant comment il l'avait utilisé sur les marches du Sénat pour servir ses propres intérêts. Elle ne devait jamais oublier avec ce sénateur que rien ne venait gratuitement et elle avait peur de découvrir qu'elle serait l'addition à la fin. Elle sentit son visage brûler au moment où Maegon la désigna franchement, comme une vague, toutes les têtes se tournèrent vers elle pour l'observer et la jauger. Elle se doutait de la proposition de Maegon, ce poste était honorable, mais aussi un moyen de lui rappeler qu'elle lui serait à jamais endettée si jamais la motion devait avoir l'approbation du Sénat. Elle ne flancha pas face au regard des uns et des autres, se contentant d'observer son collègue en face avant d'observer l'assemblée dont les regards étaient partagés. Si certains semblaient approuver la motion de Maegon et donc la possible nomination de Daera, d'autres étaient plus hostiles. Elle posa ses yeux sur la première qui allait prendre la parole, la Princesse de Valyria. Avec une voix claire et forte, elle venait d'être approuvée par celle-ci. Daera hocha la tête avant de se lever à son tour pour répondre à celui qui venait de la désigner devant toute l'assemblée.

« Collègue, tu m'honores de ton soutien et je t'en remercie. Le sénateur Riahenor possède ma voix pour cette motion. Si les Dieux ainsi que mes collègues m'en trouvent digne je serais honorée de prendre ce poste.»





Résumé du post :
Maerys Qohraenos
Maerys Qohraenos
Prêtresse

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Les Trois Coups Troisième séance du Sénat

Drīvo Perzo – Sénat & An 1068, fin mois 1

La quasi guerre civile évitée de justesse avait fait frémir le sang du noble sénateur Qohreanos. Que l’on ose humilier et être à deux doigts de luncher sa sœur, avait déclenché l’ire de l’enfant d’Elyria. Le sénateur avait ragé de longues journées dans ses appartements du sénat et n’avait fait qu’un bref séjour au Sanctuaire pour converser avec sa sœur et Grande Prêtresse de Tyraxès. Face à l’indulgence de cette dernière, l’homme restait intraitable. Le peuple devait être tenu et en cela, il rejoignait ces hommes de l’ancienne faction militariste. Et pourtant, il prêchait la paix dans le tout Valyria, voyant en ce tumulte un frein au commerce. Sénateur de l’ancienne faction mercantiliste, proche, très proche d’Echya Odenys, il prit grand soin de se ranger au plus près des pensées de la cheffe de la puissante guilde des orfèvres tout en gardant un pied dans toutes les mouvances pouvant servir la grandeur qu’il espérait pour sa famille. Alors observateur, il attendit comme un vieux lion que d’autres scelles le sort de toute cette agitation et le salut de Valyria vint des dynasties. L’homme n’avait pas manqué de serrer les poings face aux paroles de Maegon Riahenor et des autres à l’égard d’Echya mais il n’avait pas bougé d’un cil, préférant préserver ses arrières.

Finalement, le calme revint à Valyria et il était désormais temps que Drivo retrouve le chemin de la vie et des échanges. Répondant à l’appelle d’une troisième séance, l’homme quitta ses appartements pour rejoindre le lieu sacré d’un pas alerte. Malgré son âge avancé, Taedar était encore bien vivant. Son regard perçant, observa tout ce qui se passait autour de lui. Evidemment, il nota que la première armée brillait par son armée et un profond soupire s’échappa d’entre ses lèvres pincées. La marche sur le sénat avait encore des conséquences bien visibles ce qu’il déplorait au plus haut point. L’homme ne fit pas son entrée parmi les premiers mais n’attendit pas non plus d’être le dernier. Rejoignant sa place au milieu du clan mercantiliste, il posa un regard sévère sur celles et ceux qui avaient fait le choix d’inviter dans leur loge familiale des proches. Quant bien même la séance était ouverte, jamais il n’aurait fait venir le moindre membre de sa famille, pas même sa sœur Grande Prêtresse ou son fils seigneur-dragon. Mais là n’était pas le plus problématique à ses yeux. La grâcieuse silhouette d’Alynera Vaekaron attira ses prunelles sombres, signe de son sang mêlé. Que la dame soit présente à la place de son oncle-époux était un très mauvais signe sur la situation de Tour Vaekar aux yeux du Qohraenos. Un signe qui l’obligerait à se pencher une nouvelle fois sérieusement sur qui prendrait un jour sa place parmi les hommes de sa famille. Silencieusement, il inclina sa tête en signe de respect à l’égard de la dynaste et pria pour que l’Erudit se remette rapidement de sa fièvre et revienne promptement au sénat. Drivo n’était certes pas le lieu le plus approprié pour une femme des dynasties. Du moins là était son intime conviction. S’adossant contre son siège, il écouta sans mot dire les paroles du doyens et ne se redressa dans son siège que lorsque Maegon Riahenor fut appelé à présenter ou plus exactement à défendre sa proposition devant ses collègues sénateurs et sénatrices. L’homme parlait bien, c’était une évidence mais le Qohraenos semblait rester un peu sur sa fin en l’écoutant. Il avait connu l’homme plus…. Incisif, plus éloquent. Mais son intérêt fut piqué au vif lorsque le dynaste s’avança à proposer un nom pour ce nouveau poste qu’il proposait à la création par le vote qui était réclamé lors de cette séance extraordinaire. Instinctivement, le sénateur Qohraenos se tourna tour à tour vers Elaena Tergaryon et Echya Odenys. Si la deuxième avait donné quelques consignes, la première s’étai rangée parmi les militaristes à la suite de l’assassinat de Lucerys  Arlaeron créant un schisme parmi les mercantiliste.  Inspirant profondément, il attendit que vienne son tour pour prendre la parole.

Lorsque l’homme se leva, la dynaste Vaekaron et la sénatrice Melgaris avaient déjà toutes deux donné leur vote en faveur de la proposition de Maegon. Une proposition que le sénateur avait du mal à juger tout comme la réaction de la sénatrice Daera. Ainsi donc le dynaste voulait donner un peu de pouvoir au peuple. C’était là quelque chose d’assez surprenant. Mais soit, pour que ces êtres sans éducation rentre dans le rang, il fallait leur donner quelques miettes à se mettre sous la dent, pourquoi pas après tout.

« Cher sénateur Maegon Riahenor, ta proposition est intéressante, c’est indéniable. Malgré tout, depuis le temps que je siège sous le regard des Quatorze et du peuple de Valyria, je t’ai connu des discours bien plus convaincants que cela. Espères-tu que nous allons voter en faveur de ta proposition alors que certains éléments mentionnés par Dame Alynera Vaekaron au nom de son époux nous sont encore inconnus ? Ma voix ne te sera pas acquise sans condition. » commença par affirmer le sénateur Qohraenos d’une voix forte. L’homme n’était peut-être pas seigneur-dragon ou dynaste mais il n’était homme non plus à souscrire à tout et n’importe quoi alors qu’il lui échappait encore certains données. Laissant un  court silence envahir la salle, il observa tout autour de lui les possibles réactions des autres sénateurs et notamment ceux de son clan présent ou passé. Puis s’éclaircissant légèrement la voix, il posa un regard sévère sur celui qui certes était un descendant de fondateur mais qui n’en demeurait pas moins un cadet.

« Concernant la personne qui pourrait être à ce poste si sa création venait à être approuver par nos votes, je trouve que tu t’avances un peu vite en proposant la sénatrice Daera Melgaris. Je ne crois pas que sa possible nomination en tant qu’Elēni hengeralbar soit l’objet de nos discussions ce jour-là. Je t’ai connu plus prudent que cela. D’aucun pourrait t’accuser de chercher à influencer les votes en proposant dès à présent un nom…

Mais puisque tu nous as amené sur ce terrain, ce nouveau rôle ne serait pas trop important pour ses frêles et jeunes épaules ? La sénatrice est encore jeune, je ne voudrais qu’elle en viennent à se tuer à la tâche avec ce nouveau devoir en plus de ses devoirs premiers de sénatrice. »
ajouta le homme qui évidemment ne voulait pas d’une femme à ce poste. Devoir composer avec des sénatrices étaient déjà parfois compliqué alors nommer l’une d’elle tribun du peuple, voilà que le Riahenor devenait ridicule.

« Cher collègue, tu parles d’hommes et de femmes venant du peuple s’étant élevés au-dessus des autres et devenant dignes d’être nommer à ce poste et je te rejoins sur ce point. Nous connaissons d’autres noms que celui de la sénatrice Melgaris qui sont tout aussi méritant comme des familles de la guilde des Tisserands ou celle de la guilde des maitre-verriers. Dame Alynera Vaekaron ou la famille Maerion ne me contrediront… » L’homme marqua un nouveau silence lui permettant de porter son regard sur l’épouse de l’Erudit et sur le couple Maerion que formait le sénateur Jaehaegaron Maerion et sa sœur épouse Daenerys Maerion présente à ses côtés dans la loge familiale.

« C’est pourquoi et je conclurai sur ces mots, je donne ma voix au sénateur Riahenor sous réserve d'une motion plus détaillée et à l’unique condition que le nouveau Elēni hengeralbar qui sera élu ne siège pas déjà parmi nous. » Sa conclusion était sans appel et sa condition non négociable. Taedar Qohraenos le savait, en donnant sa voix au dynaste, il allait contre la position si ce n’était connue au moins supposée d’Echya Odenys qui d’ailleurs semblait rester muette sur le sujet. Mais lors de cette séance extraordinaire, l’homme semblait aussi chercher de potentiel nouveau allié pour augmenter son influence personnelle et celle de sa famille à Valyria. Il était plus que temps que les Qohraenos sortent du périmètre du Nord de la République. Son séant retrouvant le contact de son siège, le frère aîné de la Grande Prêtresse de Tyraxès attendait avec une certaine impatience la réaction des autres sénateurs et sénatrices.




HRP:
Rhaenys Haeron
Rhaenys Haeron
Sénatrice

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Les Trois Coups Troisième séance du Sénat

Drīvo Perzo – Sénat & An 1068, fin mois 1
Les doigts s’agitaient doucement sur le bord de l’accoudoir, la respiration se faisait calme mais les battements du cœur trahissaient l’importance que ce jour revêtait pour tout un chacun dans l’enceinte politique sacrée de Drivo. De longues lunes s’étaient écoulées depuis l’assassinat de Lucerys Arlaeron qui avait plongé la capitale dans un profond tourment avant de se propager rapidement au reste de la péninsule, comme s’il ne s’était agit que d’une gangrène. Suspicion. Zèle. Régime d’exception. Les factions étaient devenues des couleurs en faveur de la guerre, d’une paix ou d’un seul et unique dirigeant avant que cette nouvelle physionomie ne finisse par disparaître à la suite de la massive contestation du peuple. Et il avait fallu que de nombreuses autres lunes s’écoulent pour qu’enfin les portes de Drivo s’ouvrent pour qu’à nouveau la tradition sénatoriale renaisse de ce brasier qui avait été proche de la consumer. Entourée de ses confrères mercantilistes, peu importait le siège sur lequel la sénatrice posait son regard elle retrouvait ce qu’elle avait découvert au sortir de la guerre, lorsqu’elle était entrée pour la toute première fois à Drivo : les quarante sénateurs issus de la noblesse ; ceux qui s’étaient distingués de leurs concitoyens ou avaient acheté leur siège ; les militaires ; ceux présents au bon vouloir des sénateurs ou encore du Conseil des Cinq.

De tous les hommes présents et de la poignée de femmes qui siégeaient, tous avaient revêtit leur plus beaux atours sénatoriaux pour l’occasion. Chaque tissus, chaque couleur reflétait les personnalités et les richesses de chacun. Du sénateur valyrien aux ambassadeurs provenant des différents pays essosis. Vêtue d’une laticlave aux bandes pourpres, Rhaenys s’était employée à faire honneur à son statut en saluant en premier lieu les Lumières et ses alliés politiques puis les autres notables avant d’approcher les différents ambassadeurs. Mais les salutations faites, le temps s’était rapidement tourné vers le sérieux tant les sujets seraient nombreux à être abordés au cours de cette séance. Quelles propositions seraient votées en l’état ? Combien d’entre elles feraient l’objet de discussions sur le fond avant d’être à nouveaux soumises au vote ? Si la faction mercantiliste avait fini par se rassembler autour d’un seul et même visage, qu’en serait-il des militaristes ? Avec Aeganon Bellarys, Maekar Tergaryon, Laedor Arlaeron, Jaehaegaron Maerion et Maegon de Tergaryon il était aisé possible de ne plus savoir où donner de la tête en termes de leader. Un leadership de l’homme le plus connu des orgies, devenu oppressant avec des mouvements zélés de troupes. Dans tout les cas, il était certain de cette séance ne serait pas de tout repos.

Lorsque les yeux pers de Rhaenys Haeron captèrent la présence du Polémarque de Drivo, cette dernière calma le mouvement de ses doigts et se redressa légèrement sur son siège. L’ordre de fermer les portes de la grande salle fut donné et lorsque les habituels trois coups retentirent, les conversation cessèrent pour laisser la voix de Taecegor Noheneos ordonner à chacun de regagner leur loge avant d’inviter les Lumières à prendre place. Prenant une profonde inspiration, elle écouta les formules protocolaires être énoncées, applaudissant poliment au côté de ses collègues mercantilistes avant de se concentrer sur la suite lorsqu’il fut demandé au sénateur Riahenor de s’avancer au centre de l’assemblée. Les mots utilisés par le dynaste étaient à l’image de l’homme, intelligents et impactant, rappelant ce que la mort du capitaine-général avait entraîné. Pour mieux présenter l’idée avec laquelle il s’était levé de son siège pour s’avancer devant les autres sénateurs. La marche du peuple vers Drivo, menée par Daera Melgaris et d’autres, avait eu le mérite d’obtenir la fin du couvre-feu et avait servit de rappel de l’existence d’un peuple plus souvent utilisé que mis à profit pour ce qu’il pouvait apporter. Choisir un membre du peuple et le faire siéger au Sénat pouvait avoir plusieurs facettes : reconnaître l’importance de la communauté, apporter un vent de fraîcheur mais aussi un pion sur un échiquier bien trop grand.

Les mains de Rhaenys se refermèrent sur le bord de son siège, pressant quelques secondes ses doigts dessus avant de les poser sur ses cuisses, expulsant doucement l’air qu’elle venait d’inspirer : le nom de la sénatrice Melgaris venait d’être proposé pour le rôle d’Eleni hengeralbar. Pourquoi Jaekar s’était-il soudainement pris d’une envie d’épouser une femme qui n’était pas issue de la noblesse ? Pourquoi avait-il fallu qu’il choisisse une sénatrice qu’elle respectait ? Le Riahenor quitta le centre de la pièce et le vote débuta. Alynera Vaekaron vota contre. Daera Melgaris en fit de même. Le sénateur Qohraenos fut le premier à porter sa voix en défaveur de la proposition -soulignant l’absence de détails- puis ce fut au tour de la sénatrice de Tolos.

- La marche populaire à laquelle la sénatrice Melgaris a participé nous a rappelé à quel point nos décisions n’impactaient pas uniquement chacun d’entre nous ici mais bien tous les valyriens, de nos vénérés Cinq au forgeron et le plus jeune enfant. L’élection d’un des nombreux citoyens peuplant nos cités est une proposition rafraîchissante pour nous rappeler les problématiques du quotidien que nous devrions résoudre. Mais comme l’ont soulevé la sénatrice Vaekaron et le sénateur Qohraenos : d’importantes modalités nous sont encore inconnues. De fait, je vote contre en considérant que -malgré les compétences et l’esprit de la sénatrice Melgaris proposée par le sénateur Riahenor- si une telle élection devait avoir lieu, elle ne devrait concerner que ceux n’ayant jamais mis un pied à Drivo… quitte à ce que l’heureux élu puisse bénéficier d’un soutien éclairé dans les premiers temps de sa prise de fonction, dit-elle, regardant chacun de ses collègues avant d’observer un instant le dynaste et d’adresser un discret hochement de tête respectueux à la marchande.





HRP:
Valaena Cellaeron
Valaena Cellaeron
Sénatrice

Les Trois Coups Troisième séance du Sénat

Drīvo Perzo – Sénat & An 1068, fin mois 1

L’immense verrière circulaire éclairait chaque recoin du Sénat ce jour-là, chaque morceau de marbre, chaque dorure. Accueillir cent quarante sièges impliquait nécessairement une construction imposante, mais Valaena aimait à croire que ce n’était pas là la première fonction de la monumentale architecture des lieux. Au fond, tout était conçu pour que les hommes qui pénétraient en ces lieux ressentent le poids de leur devoir, écrasés par la majesté de l’institution.

Valaena appréciait le Sénat pour cette raison. Pourtant, et malgré le peu de jeunes femmes présentes comme elle, la jeune Cellaeron se sentait parfaitement à sa place ici, comment aurait-elle pu ne pas l’être ? En tant qu’héritière d’une des plus grandes familles de Valyria, elle avait été préparée dès le plus jeune âge à ne pas plier sous le poids des responsabilités et à connaître sa valeur. Lorsque son père, Baelor avait été élu Lumière de Sagesse, la jeune femme s’était trouvée précipitée dans un tourbillon de nouveaux devoirs pour lesquels elle avait été préparée pendant des années. Si ces lieux illustres pouvaient en écraser certains par leur grandeur, ce ne serait pas son cas. Et malgré cette confiance toute naturelle en elle, elle avait été incapable de fermer l’œil de la nuit. Ce serait sa toute première séance, elle serait nécessairement scrutée en prenant la suite du grand Baelor Cellaeron et tout devait être parfaitement maîtrisé. Elle arrivait parmi les premiers, désireuse de prendre place rapidement pour ouvrir l’œil et observer finement tout le défilé des arrivées, tentant de deviner des intentions derrière les apparences.

Il régnait à Valyria comme un murmure étouffant depuis que le pire avait été évité, comme si chacun demeurait dans l’attente du sang qui n’avait pas coulé. Valaena avait décidé de rester en retrait jusqu’à la séance de ce jour. Une séance qui portait à la fois bien trop et bien trop peu d’espoirs. Certains y voyaient l’occasion de révolutionner la République dans son entièreté, Valaena restait dubitative. Elle pensait intimement que le fonctionnement du Sénat tel qu’il était empêchait les bousculades dont la République avait vraiment besoin, mais elle s’abstenait bien de tenir de tels propos à voix haute, en dehors peut-être de son père qui, elle le savait, partageait sa même ambition, si ce n’était plus.

Les trois coups traditionnels atténuèrent instantanément le brouhaha et la jeune héritière se redressa sur son siège, détachant ses yeux de la gracieuse et tout aussi intransigeante dynaste Alynera Vaekaron qui avait fait son apparition quelques instants plus tôt en attirant sur elle plusieurs regards. Aussitôt, la voix du Polémarque résonna sur la pierre antique, appelant au centre Maegor Rhiahenor pour formuler sa première proposition. Les jeux commençaient.

La jeune Cellaeron risqua un regard discret vers son père, la Lumière de Sagesse pendant que Rhiahenor s’embarquait dans un registre tantôt dramatique, tantôt grandiloquent avant d’amener enfin le fond de sa proposition. Qu’un membre du peuple puisse siéger et conseiller les dirigeants sur les affaires populaires était en soi une idée plutôt judicieuse. Si les récents évènements avaient pu leur apprendre quelque chose, c’était qu’il ne fallait pas sous-estimer la force d’un peuple en proie à la détresse et à la colère. Qu’une personne se fasse le messager et l’intermédiaire pour ces hommes et femmes exclus du Sénat ne posait pas de difficulté à Valaena qui se préparait à offrir sa voix en faveur de cette proposition. Mais alors qu’elle attendait que le Rhiahenor poursuive son discours, elle fut surprise que le seul détail fourni repose sur la personne qu’il conviendrait de nommer.

Valaena posa son regard sur Daera Melgaris comme le reste de l’assemblée. Beaucoup avait une opinion bien tranchée à son sujet, mais la Cellaeron quant à elle n’avait pas encore décidé de quel côté elle se rangerait la concernant. Il n’y avait chez elle aucune haine viscérale pour celle qui avait bien vite usurpé son surnom de Lumière du peuple, simplement une grande curiosité. Quand elle la fixait, Valaena se demandait quel rôle Daera serait prochainement amenée à jouer. Elle pouvait pressentir qu’il émanait déjà d’elle une certaine forme de pouvoir et n’était pas encore sûre de vouloir s’en faire une ennemie pour le moment.

Alors que les premières voix s’élevèrent en faveur de la motion, Valaena réfléchissait, le regard dans le vide. Elle trouvait étonnant de n’avoir aucun détail sur la désignation ou l’élection de l’elēni hengeralbar, de ses droits et responsabilités concrètes ou même de la durée de son mandat. Et tandis qu’elle se préparait pour sa propre prise de parole, les premières contestations émergèrent et des questionnements similaires aux siens vinrent confirmer ses craintes. Elle hochait de la tête en écoutant la sénatrice Haerion et quand son tour fut venu, son opinion était définitivement tranchée sur la question.

« Peu d’entre nous ici s’opposeront à l’idée de donner une voix au peuple après les évènements dont nous avons récemment été les témoins. Si cela me paraît judicieux d’élire une personne issue du peuple pour conseiller nos dirigeants sur ses problématiques et afin de porter sa voix, j’estime qu’une désignation immédiate d’une sénatrice apparaît prématurée. Le sénateur Rhiahenor nous a gratifié d’un long discours qui aurait néanmoins bien mérité d’être allongé sur les modalités concrètes liées à un tel rôle. En l’absence de précisions indispensables sur l’exercice et l’élection de l’elēni hengeralbar, nous ne savons pas en réalité ce pour quoi nous votons, il est regrettable que cette proposition pourtant intéressante ne soit en réalité pas aboutie. Je rejoins les observations de mes prédécesseurs et vote également contre cette proposition telle qu’elle est formulée en l’état ».

Valaena chercha le regard de son père, non pas pour y trouver une quelconque approbation paternelle, mais simplement pour s’assurer qu’ils étaient bien sur la même longueur d’onde.






HRP:
Maegon Tergaryon
Maegon Tergaryon
Sénateur

Certaines séances du Sénat étaient infiniment dispensables. Pas celle-ci. Celle-ci resterait immanquablement dans tous les récits présents et futurs de la chronique de la République. Et Maegon Tergaron y était. Il n’était pas arrivé parmi les premiers, comme les bons élèves. La politique n’était pas une affaire scolaire. Ceux qui en respectaient absolument les formes pour donner l’impression qu’ils les maîtrisaient ne cherchaient qu’à donner des gages. Le maître des Tergaryon, lui, officiait dans ce marécage depuis presque dix ans. Sénateur puissant quoique placide, il constituait l’une des têtes du Dragon Tergaryon, une tête dormante, une tête à la traine, une tête qui suivait. Encore récent était le temps du réveil. Tapis dans l’ombre, les secousses terribles qui menaçaient sa famille, branche aînée et secondaire, l’avaient contraintes à sortir de la torpeur.

Il ne s’en plaignait pas, son sommeil n’était pas de ces sommeils lourds et profonds où tout s’oublie dans le néant des rêveries agréables. C’était bien plus un coma, une prison et une entrave de laquelle il voyait, entendait, sans pouvoir agir. Une formidable puissance contenue dans un enclos étriqué et qui ne demandait qu’à sortir. Une puissance froide, implacable, nourrie par la volonté de puissance.

Maegon ne s’avouait pas à lui-même qu’il y avait autre chose, une rage canalisée contre cette branche secondaire, qui, par Maekar, avait réveillé la tête de la branche aînée en s’associant avec Aeganon. Le Tergaryon se réjouissait d’ailleurs du sentiment de danger que ce général ambitieux suscitait. Valyria n’était pas un système qui favorisait les parvenus et les ambitieux. Elle pouvait offrir parfois à un opportuniste la chance préparer sa descendance à occuper les plus hautes fonctions. Elle valorisait le travail patient des lignées sur les appétits individuels. En d’autres termes, à Valyria, le pouvoir arrêtait le pouvoir et c’était très bien ainsi.
Une fois confortablement installé dans sa loge, Maegon observait les derniers sénateurs qui arrivaient. Il le leva pas les yeux vers cette coupole totalement monstrueuse, symbole de l’orgueil d’une civilisation supérieure. Tout ceci n’était qu’un gigantesque théâtre, et les sénateurs des saltimbanques de luxe. Telle était la civilisation, un assemblage de codes tous plus absurdes les uns que les autres, mais tellement plus gratifiant pour l’esprit humain que de tout régler à coup de massue dans un champ. Imaginait-on une grande civilisation dont la chronique était une sombre histoire de vache crevée, réglée à coup de pierre dans la caboche par deux sous-hommes  aussi hirsutes que puants constituant le chainon manquants entre l’homme et le Dothraki ? Impensable. Il fallait des coupoles, il fallait des Sénats, il fallait des discours, il fallait des votes, en d’autres terme, il fallait s’emmerder pour être civilisé.
Autant dire que lorsque ce fut Maegon R qu’on appela à la tribune du Sénat en premier, Maegon ne fut jamais autant civilisé qu’en cet instant.

Le militariste se demandait bien à quel point son homonyme allait tomber dans le pathos, l’exagération et l’invective tout en faisant une obscène danse du ventre à Daera. Encore que sur ce dernier point, il ne pouvait pas lui en vouloir, lui-même avait bien dansé, mais il avait eu la pudeur de le faire dans le privé de son bureau sénatorial. Les plans, qu’il soit cœurs, culs ou politique ne se montraient pas à tous les passants. Et la façon dont on se servait des ficelles comptait infiniment moins que la taille.
Il démarra. Maegon écoutait chaque mot, il s’imprégnait, comme un martyre, de la douleur de devoir disséquer tant d’inepties pour pouvoir, plus tard, y répondre. La mécanique était simple, serait-elle efficace ? La dynaste Vaekaron se contenta de soutenir. Daera, naturellement, ne pouvait pas voter contre un cadeau qu’on lui faisait. Le sénateur Qoheranos commença cependant à mettre un petit grain de sable dans la machine. Il acceptait la proposition si l’impétrant n’était pas issu de leurs rangs.

Il fut surpris que Rhaenys se contenta de prétexter le seul vide de la proposition pour la refuser. La même chose ne surprit pas de la part de la progéniture de Baelor. Jetée comme une enfant au milieu des loups, elle avait raison de ne pas chercher à se faire remarquer. De toute évidence, chacun attendait, sur cette première proposition, de voir comment les choses allaient se dérouler. Tel n’était pas l’état d’esprit de Maegon Tergaryon. Assurément, cette séance du Sénat était pour lui trop décisive pour jouer le confort. La guerre des Maegon se jouait ici, et maintenant. Lorsqu’on l’appela, il se leva tranquillement, avançant d’un train de sénateur vers la tribune avec un léger sourires. On voulait qu’il porte le premier coup ? Défi relevé.

-Estimées Lumières de Sagesse, vénérable Polémarque, chers collègues sénateurs,
Chacun d’entre nous est assurément pénétré par le sentiment que cette séance du Sénat n’est pas tout à fait une séance ordinaire. Sous cette coupole…


Dit-il en levant les yeux et les mains vers le colossal sommet de l’édifice.

-…se tient aujourd’hui un moment particulier de l’histoire de la République comme il y en a peu eu. Vénérable polémarque, tu l’as rappelé toi-même, cette séance est extraordinaire. Elle ne l’est pas que du point de vue de la simple procédure. Elle l’est, et tu l’as rappelé, par l’objet même de sa convocation qui consiste à améliorer durablement le fonctionnement de nos institutions abimé par la folie meurtrière d’une main qui a frappé d’un poignard bien réel, l’un de ses hommes les plus loyal, qui plus est en plein milieu d’une cérémonie de mariage, qui est aussi bien un serment fait devant les Dieux qu’une occasion de liesse et de joie pour tous les valyriens. La République a donc été mise à mal non seulement par un meurtre, mais aussi par un blasphème qu’hélas, la justice des hommes ne pourra jamais réparer. Ma foi en Arrax est assez grande pour savoir qu’en ses états célestes, un procès terrible attend ceux qui ont ainsi fait couler le sang de Lucerys Arlaeron.

Le sénateur marqua une courte pause avant de reprendre.

-Nous avons donc été convoqué ici afin de faire notre devoir, après les épreuves que la République a traversées. Nous avons été convoqués ici pour recoudre l’étoffe déchirée de la tunique de notre Etat et dont les dégradations ont laissé notre peuple ainsi que notre armée dans un très grand tumulte. Nous avons été convoqués ici parce que les Dieux, qui nous ont fait d’incommensurables cadeaux afin de nous élever au-dessus de tous les autres hommes, nous jugent. Nous avons été convoqués ici parce que le peuple de Valyria est inquiet pour son avenir. Nous avons été convoqués ici parce que nos soldats se demandent si ceux qui, demain, peuvent leur ordonner de consentir au sacrifice suprême de leur vie pour la patrie, commanderont avec justesse et équité. Nous avons été convoqué ici parce que les marchands, artisans et travailleurs de Valyria, ceux qui, par leur industrie, ont financés, pensé et finalement érigé à la sueur de leur front cette auguste coupole sous laquelle nous débattons, ne savent plus si demain, ils pourront à nouveau prospérer. Voilà pourquoi nous sommes là ou en tout cas, voilà pourquoi, moi, je suis là.

Cette fois-ci, Maegon tourna la tête vers…Maegon.

-Malheureusement, le dynaste Riheanor, comme d’habitude, n’a discouru qu’avec acrimonie. Alors que nous avons tant besoin de calme, tant besoin de nous retrouver entre valyriens pour affronter les défis gigantesques qui vont se poser aux hommes qui ont la charge du gouvernement de la République face aux ennemis du dehors qui épie la moindre de nos faiblesses, le dynaste Riehanor a trouvé bon encore une fois de jeter l’opprobre sur toute une partie de cette assemblée, sur les Lumières de Sagesse et sur l’armée. Lui donnant ainsi l’occasion de nous vendre l’idée frelatée que c’est grâce à lui que le pire a été évité, qu’il a sauvé une République. En d’autres termes, il n’a fait que répéter ici dans cette sainte assemblée, le discours d’une incroyable violence qu’il avait dit sur le parvis quelques mois auparavant. Le dynaste Riehanor ne sait brandir que les mots de purge et de vengeance auréolé de la pompe dynastique confectionné pour lui par quelques courtisans.

Il détourna le regard du dynaste pour se replonger dans la masse de l’assemblée.

-Ne doutez pas, collègues, que lorsque le dynaste Riehanor utilise le Nous, c’est un Nous de Majesté. Ce Nous monarchique qu’il souhaiterait prononcer autre part que dans son privé, et pour autre chose que diriger ses affaires familiales.

Le sénateur Tergaryon soupira, comme déçu.

-Lorsqu’il s’agit de faire autre chose que de vouloir rouvrir les plaies ouvertes par des événements tragiques, à quoi cette assemblée a-t-elle le droit ? Au vide. Dès lors que l’on a épuisé les reconstructions fallacieuses des événements, dès lors qu’on ne peut plus blâmer quiconque, dès lors qu’il n’y a plus une tête à couper, le rien perce, et gicle comme le pus d’une mauvaise blessure à la bouche du dynaste pour venir tacher le sol sacré du Sénat. Voyez à quoi sont contraints nos collègues, vénérable Polémarque ! Tous votent en soulignant le flou complet dans lequel ils se trouvent et comme je les comprends.

Le Tergaryon reprit son souffle un court instant. Avant de hausser les épaules, paumes tournées vers la coupole.

-Je ne redirai pas ce qu’on dit mes collègues sur l’absence totale d’information dans la présentation de la motion, sur son objet, sur les modalités de désignation et le reste. Je prends sur moi, Estimées Lumières de Sagesse, vénérable polémarque et chers collègues de Sénateur, une tâche qui pourrait paraître incommensurable.

Il marqua une pause, laissant un peu de suspens, avant de déclarer le plus calmement du monde.


-Prendre la proposition au sérieux.


Il fit ensuite un avec sa main pour désigner les civilistes et les populistes.

-Car, en dépit des critiques que je peux formuler à l’égard de l’attitude du dynaste qui porte la proposition, je ferai moi-même insulte à cette assemblée en n’oubliant pas que derrière l’indigence de celle-ci se trouvent des sénateurs sincères qui veulent discuter et trancher sur des inquiétudes légitimes qu’ils ont sur la prise en compte du peuple. Il n’y a aucune raison qu’ils se fassent voler cet espoir. Ni par une proposition vide, ni par les calculs cyniques et les petits arrangements tactiques de quelques charognards.

Il garda son attention sur le banc civilistes et populistes.

-Le principe même d’un tribun du Peuple est-il bon pour la République ? Voilà la question que j’entends poser et à laquelle je compte répondre. Je m’adresse aux collègues qui voudraient soutenir la proposition du dynaste Riehanor en pensant que le peuple est ici méprisé, que personne ne le défend et qu’il y aurait donc un besoin particulier de se faire l’échos de ses « revendications. ». Mes chers collègues, je voudrais vous convaincre que vous apporteriez là une mauvaise réponse à une très bonne question. Finalement, on entendrait nommer un Tribun du Peuple sans même réfléchir à ce qu’est ce Peuple qui devrait avoir un tribun.

Maegon enchaina ensuite.

-Dites-moi, collègues, un petit marchand, n’est-il pas du peuple ? N’y a-t-il pas pourtant déjà des sénateurs qui sont sensibles à ce qu’il puisse prospérer et à ce que son commerce jouisse des conditions favorables, au-dedans et en dehors de Valyria ? Et le soldat du rang ? N’est-il pas du peuple ? N’ya-t-il pas pourtant, déjà, des sénateurs qui sont sensibles à ce que sa solde soit payée, et à ce qu’il ne soit pas envoyé inutilement à la mort ? Et l’homme pieux ? Celui qui, quoiqu’il ne soit pas du clergé, souhaite que les Dieux ne soit pas mis à l’écart de sa vie, ni de celle de l’Etat, n’est-il pas lui aussi du peuple ? N’y a-t-il pas, déjà, des sénateurs sensibles au respect des choses les plus sacrées ?

Maegon, à chaque exemple, avait désigné de la main la faction correspondante. Avant de reprendre.

-Même l’exclu, le paria, l’indigent, celui qui n’a plus ni bien ni famille et qui lutte pour manger à sa faim voit les échos de sa souffrance raisonner ici. Et nul ne nie sa misère, nul ne nie ses problèmes bien qu’il existe des divergences sur la façon d’améliorer sa vie.

Maegon, leva légèrement le doigt, avec cette fois-ci un ton inquiet.

-Prenez garde, mes chers collègues, à ce que, sous prétexte de la défense du peuple, qui est divers et dont la diversité des métiers, des talents et des vocations qui s’expriment dans la Cité font sa force, on ne vous engage pas dans une voie dangereuse, qui consiste à défendre la Foule, qui, elle, est uniforme, bien compacte, sans discernement et sans attache aucune vis-à-vis de ce qui fonde Valyria et la République.

Car, et je le dis avec gravité, derrière ce nom de Tribun du Peuple, c’est bien un Tribun de la Foule qu’on vous demande en réalité de créer. Une personne qui se parera de la légitimité fictionnelle de représenter le Peuple et lui fera bien dire ce qu’elle veut. A moins, et c’est la seule solution, que ce Tribun ne soit élu par l’ensemble du Peuple, ce qui, alors, ouvrirait la porte à un danger encore plus grave, celui de la démagogie. Pour plaire à telle ou telle humeur du moment, et venir ici parader sous cette coupole, n’importe quel fou capable de haranguer la plèbe viendrait ici comme une tornade balayer presque dix siècles d’une République qui a porté aux plus hauts sommets de la matière et de l’esprit la race valyrienne. C’est la voie ouverte à la tyrannie de la pire espèce, celle de la masse et du nombre instrumentalisée au profit d’un seul.

Je n’ai nul désir que la République soit jetée en pâture, que ce soit à une personne qui est déjà parmi nous, ou à un inconnu qui vaque encore à ses occupations en dehors de ses murs.


Il était temps de conclure.

-Bien des valyriens pensent que notre République est inutilement compliquée, bien des gens pensent que ce Sénat n’est qu’un rassemblement de palabreurs. Certains voudraient nous jeter dans l’abyme de l’absolutisme dont nous avons déjà connu les affres cependant que d’autres voudraient ouvrir les portes aux démagogues de tout poil parce qu’ils comptent, avec cynisme, sur le mensonge qui veut qu’on gouverne un peuple davantage par ses vices que ses vertus. Je fais, moi, le pari opposé.

Je crois que précisément nos institutions sont notre force, parce qu’elles empêchent la volonté d’un seul comme le règne du nombre. Parce que oui, nous devons discuter, trouver des compromis, et donc, prendre en compte l’ensemble des intérêts de l’Etat comme des gens qui vivent dans ses frontières. C’est oublier trop rapidement que le fondement des libertés publiques que la République a institué c’est précisément celle de ne pas être pris en otage par un monarque ou par un tribun, et ainsi confier à ceux qui en ont la charge de ne pas considérer que le gouvernement des hommes ne serait que l’administration des choses. C’est pourquoi je vote résolument contre la proposition du dynaste Riehanor.
Jaehaegaron Maerion
Jaehaegaron Maerion
Sénateur

Les Trois CoupsTroisième séance du Sénat

Drīvo Perzo – An 1068, mois 1

Enfin, le jour sacré était arrivé. Après des mois de latence, l’auguste organe de la haute race valyrienne allait enfin pouvoir être réuni. C’était déjà là un signe de puissance contre ceux qui s’étaient proposé de marcher dessus, en négligeant des siècles d’histoire avec eux, la tradition républicaine et valyrienne.

Pour cette exceptionnelle séance, Jaehaegaron et sa sœur-épouse, Daenerys, s’étaient paré de la plus respectable et élégante manière de se vêtir. La mort du patriarche pesait encore dans l’esprit du Seigneur-dragon, à qui déjà incombait la résolution des devoirs pour lesquels il avait été préparé toute sa vie durant. Il n’y avait pas eu de jubilation particulière, si ce n’est le sentiment d’être libéré du carcan paternel, qui à mesure que les jours passaient, prenait sa place dans l’esprit du sénateur Maerion. Cette disparition était aussi éminent un sujet politique pour qui s’intéresse à la vie de la noble cité de Valyria. N’oubliant jamais que l’influence de sa famille était en berne depuis l’échec d’Arraxios à son renouvellement en tant que Lumière de Sagesse mais aussi la chute de leur réseau clandestin, Jaehaegaron avait préparé cette séance historique dans l’unique but de réaffirmer la position familiale au sein de ce grand ordre cosmique.

Par Arrax, il était déterminé et prêt à tous les regarder droit dans les yeux, le défi brûlant au fond de ses prunelles. Jaehaegaron était un homme du Sud, pour qui l’Armée et les Dieux étaient tout ce qu’il pouvait exister de plus sacré dans ce monde si bas et si profane. Le Sénat était un organe à la perfection qu’aucun autre appareil civilisateur ne pouvait égaler. Il était la civilisation par excellence. Le vote, le discours, le débat, les tractations et les complots. C’était à la fois la richesse de la République et le tombeau de bons nombres des hauts personnages de l’histoire. Seul le plus fort est en droit de gouverner. Voilà ce qui dictait la marche politique du sénateur.

Accompagné par son épouse, le sénateur Jaehaegaron arriva au Sénat, non parmi les premiers ni les derniers. Il avait choisi de convoyer par les rues de la capitale valyrienne jusqu’au complexe draconique, de manière à paraître accessible en restant toutefois sous bonne garde.  Arrivé au plus haut sommet de la République, le sénateur salua quelques uns de ses honorables collègues avant de rejoindre la salle des séances où, il l’espérait, les Dieux siégeraient eux-même pour participer à la protection du peuple valyrien. Jaehaegaron eut quelques attentions particulières pour chacun des grands prêtres qui étaient venu assister à cette séance extraordinaire. Il eu le plaisir de constater qu’ils étaient assis non loin de Dame Alynera Vaekaron, que le sénateur salua promptement avant de prendre définitivement place.

Bientôt le Polémarque du Sénat sonna les trois coups protocolaires et le silence fit sa loi parmi l’assemblée. Tous étaient là, des Dynastes aux sénateurs les plus méconnus de la société valyrienne. Les Lumières de Sagesse siégeaient fièrement, comme pour rappeler leur rang. Un tirage au sort eu lieu, sous le regard des Grands Dieux, et ce fut au dynaste Riahenor de prendre en premier la parole. Sa proposition était d’une folie pure pour qui était assez raisonnable pour voir dans la plèbe des gens miséreux aux considérations hasardeuses, suivant plus leur humeur que la loi de la raison et de l’esprit. Cela, oui, le sénateur n’avait cessé de le répéter à qui voulait bien l’entendre. Jaehaegaron espérait assister au meurtre dans l’œuf d’un tel poison.

Quant vint le tour de parole de la sénatrice Qohraenos, le désormais patriarche Maerion fut surpris de voir le nom de sa famille évoquée pour défendre une telle proposition. Il ne le prit pas pour une offense non, car il estimait assez ses collègues pour se retenir d’entretenir de la rancœur envers eux. Les Maerion ne voulaient pas être associé à une telle entreprise de déliquescence du rôle et de l’autorité du Sénat. Selon lui, cela étant entendu.

Au fur et à mesure que le tour de parole passait et que les sénateurs étaient appelé à s’exprimer, la proposition du dynaste Riahenor était largement piétiné, ce qui laissait deviner au coin des lèvres du Maerion, un léger sourire de satisfaction. Même si, à son grand regret, le fond du problème n’était jamais véritablement abordé. Il souria en se retournant vers Daenerys, lorsque la sénatrice Cellaeron s’y opposa elle aussi.

Et vint le tour de l’impressionnant sénateur Tergaryon. En un temps record, il captiva l’attention de tout l’hémicycle et démonta point par point la proposition du dynaste Riahenor. Jaehaegaron, devant la justesse des mots qui était prononcé par l’orateur, ne pouvait qu’acquiescer ce qu’il disait avec une telle ferveur. Comme bon nombre des partisans de l’échec de cette proposition, le Sénateur Maerion s’empressa de verbaliser son approbation.

« Estimé Sénateur Jaehaegaron Maerion, avance toi. La parole est à toi », clama alors le Polémarque dès lors que le silence était de retour dans l’assemblée. Le jeune officier, sortit victorieux de la guerre contre Ghis avec ses pairs, qui avait vu son mariage entaché par l’assassinat de Lucerys Arlaeron et avait récemment vécu le départ prématuré de son père pour les strates célestes où règne en maître, le Seigneur de tous, Arrax, était désormais l’unique attention de tout l’hémicycle sénatorial. D’un pas assuré, celui-ci s’avança et salua d’un regard le Polémarque ainsi que chacune Lumière de Sagesse avant d’embrasser d’une œillade toute l’assistance.

« Très estimées Lumières de Sagesse, vénérable Polémarque, mes frères et sœurs sénateurs.
Aujourd’hui est un jour précieux et historique car les Grands Dieux nous font l’honneur de siéger parmi nous et d’assurer à nouveau notre protection. Veillons à accueillir comme il se doit leur grâce et leur renouveler notre attachement fidèle.
»

Le sénateur sourit à l’assemblée, s’attardant sur les sénateurs religieux parmi lesquels il siégeait.

« Mes chers collègues, nous venons d’assister à un discours où chaque mot, chaque phrase a été pesé et pensé pour exprimer une justesse d’esprit et une vérité indéniable. Le Sénateur Tergaryon peut s’estimer être le bienfaiteur de cette assemblée car il a mis au jour ce qui n’est pas dit et bien caché par les hardis défenseurs de cette proposition malsaine et décadente. L’ébranlement que nous avons vécu, où le peuple même pour qui, je le rappelle à ceux qui auraient oublié, le destin est de servir à la grandeur et à la prospérité de Valyria et de ses Dieux a osé foulé le sol sacré du Sénat sur le ton du défi et de l’insubordination. Le pire crime contre l’autorité et l’ordre établi par Arrax lui-même aurait été celui de les mener. Mais non, car le malin perfide ne s’arrête jamais tant qu’il n’a pas la tête coupée. Il aura fallu que cette proposition naisse dans l’esprit de nos détracteurs, soit déposé sur le bureau du Sénat et présentée comme la solution aux maux de la République, qui je ne le nie pas, sont inquiétants et profonds. »

Le partriarche Maerion s’arrêta un instant. Tout en parlant celui-ci avait fixé du regard la faction civiliste et notamment la sénatrice Melgaris pour laquelle il entretenait une certaine antipathie particulière.

« Comme le Sénateur Tergaryon l’a très justement souligné, le Tribun du Peuple ne pourrait être qu’en vérité le Tribun de la Foule, allant et venant, souillant le sol sacré de cet auguste organe, déclamant quelques humeurs du peuple lesquelles, pour nos collègues civilistes, devraient dicter la politique de notre cité. Laissez-moi vous dire mes frères que jamais nous n’avons fait prospérer notre République et notre race en suivant les conseils, que dis-je, les caprices d’un parvenu de la basse engeance. Les Seigneurs célestes, dont Arrax est le plus haut, ont ordonné l’institution du Sénat comme un gage d’excellence de l’autorité et du pouvoir, pour qu’il serve tous et la République et que pour que tous concourent à ce que sa volonté soit Loi et Justice. Le Seigneur des Dieux ne nous a pas purifier et élevé si haut pour que nous nous amusions à voler au dos de nos dragons et que nous virevoltons tels des papillons d’orgies en orgies. »

Jaehaegaron s’arrêta à nouveau en fixant cette fois l’assemblée entière, la parcourant du regard tout en déclamant la suite de son discours.

« Non. Notre rôle, mes frères et sœurs, est d’honorer le mandat divin qui nous a été confié, celui de tenir le gouvernail de la République. Nul ne pourrait être un bon marin s’il déchire la toile de ses voiles de son propre vaisseau. Les populistes qui tiennent tant à la proclamation de cette motion n’ont pas conscience du poison qu’ils veulent administrer à la race valyrienne. Élire un Tribun du Peuple, c’est participer en conscience à la déliquescence de la République et cela devrait être considéré comme un crime de haute-trahison. Tribun ou monarque, la personnalisation du pouvoir est le premier pas vers le gouffre immense et sans fond qui attend la République si elle emprunte cette voie.

Nous n’avons pas nos Dieux pour faire comme les autres peuples. Nous avons des Dieux pour nous guider. Nous n’avons pas de Sénat pour faire comme les autres civilisations, nous sommes la civilisation par excellence. Nous ne devons pas nous égarer mais nous raccrocher à la puissance des Dieux, qui sont le sel de l’éternité de ce monde et qui aujourd’hui siègent avec nous. Fils et filles d’Arrax, rappelez vous que le Sénat a affronté milles et une crises sans jamais chuté car votre Père était là pour nous soutenir, petits pauvres comme grands seigneurs.
 »

Le Maerion souhaitait rappeler à tous l’ordre des choses et à quel point cette proposition était à l’encontre de tout ce qu’il y avait de plus sacré parmi le monde. Il espérait que ces mots allaient pouvoir toucher le cœur de celles et ceux qui avaient encore une dévotion sincère envers les Dieux de la Cité.

« Le sort du peuple et par extension les affaires de la République sont les priorités de chacun d’entre nous. Je crois fermement, et cela n’a d’égale que ma dévotion aux Grands Dieux, en la justesse et l’efficacité de nos institutions. Notre préoccupation est d’assurer sécurité et prospérité à tous. Cela ne peut être fait qu’en respectant un ordre bien précis auquel celui qui s’estime assez fort pour déroger est un fou malheureux. Que cette séance ne soit pas un précédent qui ouvre la voie à la déliquescence de l’autorité sénatoriale et à la décadence de notre civilisation. Pauvres et petits, grands et majestueux, tous nous sommes sujets de la justice et de la miséricorde divine. C’est avec cette fervente conviction, que je vous appelle à vous joindre à vos frères et sœurs, et à voter comme moi, contre cette motion, en dépit de tous les parures bienfaisantes dont elle se drape et qui ne sont que mensonges et poisons pour notre République. »

Laedor Arlaeron
Laedor Arlaeron
Lames d'Argent

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Résumé du vote:
Maekar Tergaryon
Maekar Tergaryon
Sénateur

Les trois coups Troisième séance du Sénat

   
Drīvo Perzo – An 1068, mois 1



Valyria se reveilla comme à son habitude. Son regard bienveillant et protecteur tourné vers le Sénat. Une cité si enviée par ses ennemis, elle demeurait là éternelle et rayonnante. Ses enfants en ce jour venaient lui rendre hommage. L’effervescence était pourtant plus importante que d’ordinaire. Le parvis du Sénat fut très vite grouillant de monde, on remarquait très nettement défiler bon nombre de personnalités, de familles. Une procession qui signifiait pour tous citoyens qu’un événement très particulier allait se dérouler. Les badauds fixaient de loin les allées et venus. Chacun allait de son petit commentaire sur tel ou tel figures politiques. L’ouïe du général ainsi ne manqua pas d’entendre l’opinion publique. Les grondements, et les cris de protestation étaient bien loin désormais. Le calme s’était enfin instauré.

Cependant il se pourrait que ce dernier soit de courte durée avec les réformes à venir dans l’hémicycle. Le Tergaryon était ainsi arrivé, retrouvant sa place qui lui était décernée après de vifs exploits au service de la République.
Il faisait parti des premiers, prenant le poul de la salle avec curiosité.

La séance débuta sous de bonnes auspices. Les membres de l’hémicycle à présent réunis, le Polémarque annonça de sa voix forte et solennelle que la séance pouvait désormais commencer. Trois coups sont assénés, immuable rituel que tous sénateurs connaissaient.
Par son intervention, les chuchotis moururent presque aussitôt attendant fatidiquement le discours du premier nommé. Maegon Riahenor.

Le général écouta attentivement les interventions qui se fit dans le plus grand respect de la république. Malgré certaines envolées lyriques, le débat semblait sain. Et beaucoup avait à rediscuter de la proposition. Maegon Tergaryon ainsi que Jaehaegaron Maerion furent les plus « virulent » dans leur propos. Cependant l’originaire d’Oros ne pouvait qu’acquiescer aux dires de ces pairs. Il ne fallait pas écouter, se laisser endormir à cette proposition bien trop en contradiction avec l’identité même de la République de Valyria. Le dynaste gagnerait en influence, et ne semblait comme pour beaucoup, servir que ses propres intérêts. Quand vint l’instant pour lui de prendre la parole, Maekar tenta de capter l’auditoire, posant ses yeux sur ces différents visages. Le Tergaryon s’adressa tout d’abord au Polémarque  le remerciant pour finalement commencer à son tour son propos.


« Chers collègues, comme l’ont si bien, souligné mes prédécesseurs nous avons la lourde charge aujourd’hui de nous opposer ou non à cette proposition. Une mission qui nous a été donnée depuis bien longtemps et que nous honorons comme nous honorons nos dieux dans nos processions, dans notre vie de tous les jours.  Cette république a bien connu des tourments, des tragédies. Mais elle a su sortir encore plus grandi. Voyez-nous actuellement tous rassemblés ici nous penchant sur les affaires de la République. Ne perdons pas de vue ceci. Notre unité n’est que possible que par cette réunion. Elle fait de nous, Valyria, Valyria la grande. Nous avons à cœur et corps de protéger notre essence, ce qui fait de nous les enfants de la flamboyante. Permettons ainsi une critique quand cela est nécessaire. Prenons le temps de réfléchir à cette question. »

Il espéra que ces mots de soient pas vain.

« Chers collègues, frères et sœurs de Valyria si vous chérissez notre patrie, notre identité. Je vous enjoins alors de prendre en considération les paroles qui ont été prononcées jusqu’à lors d’examiner la vocation que certains se prêtent, de peser ce qui est en faveur de la république. Soyons ce roc, qui défend les institutions, Soyons ce feu du renouveau pour qu’aucun ne soit oublié. »

Il prit un instant une pause, s’annonçant à l’entièreté de l’assemblée, d’un ton calme.

« Cette proposition demeure comme certains l’ont mentionnée mis en place bien trop rapidement. Il y a quelques  d’aspects qui restent encore dans l’ombre. Par ce fait ma voie n’ira pas à la proposition du Sénateur Riahenor. » expliqua ce dernier avant de retrouver son siège, annonçant la fin du débat.
 


 

   
Voix de l'Ombre
Voix de l'Ombre
Admin

Les Trois CoupsTroisième séance du Sénat



Peu à peu, les mains se levèrent et les intentions de vote furent connues de tous. Comme attendu par les prises de décision de leurs têtes d’affiche, le tout sous le regard bienheureux de Baelor Cellaeron, la faction mercantiliste, forte de 33 membres vota contre la proposition Riahenor à l’unanimité. L’influence d’Echya Odenys ayant largement décliné au cours des derniers mois, la domination d’influence des Tergaryon et des Cellaeron avait fait le reste. C’était un coup dur pour la proposition de Maegon mais ce n’était guère surprenant tant les tensions avec les marchands et négociants avaient été vives. Les accusations et le caractère de Maegon, notamment lors de la grande marche organisée par sa faction, n’avaient guère aidé.

33 contre.

Sans surprise, la faction civile avait voté dans son ensemble derrière son chef incontesté. 24 voix allaient à la proposition qui n’avait guère besoin de plus de détails. L’écart s’était réduit, mais les opposants étaient encore très nombreux et ils avaient déjà presque fait la moitié du chemin pour emporter la majorité à 70 voix.

33 contre. 24 pour.

Les populistes étaient assez étrangers au succès politique sous la coupole du Sénat. L’occasion était trop belle pour ne pas tenter le coup. Les 23 Sénateurs votèrent tous pour la proposition, espérant pouvoir attraper un peu de pouvoir au nom du peuple qu’ils clamaient représenter mieux que quiconque.

33 contre. 47 pour.

L’avance était maigre, mais elle était là. Écrasée par l’influence dominante de son leader Aeganon Bellarys, la faction militariste se leva comme un seul homme pour voter contre. Aeganon était resté silencieux, se contentant d’une brève intervention pour dire qu’il respectait immensément celui qui avait commandé les armées valyriennes à la victoire aux côtés de feu Lucerys Arlaeron. N’empêche, il votait contre, et ses alliés avec lui, soutenus par les votes d’opposition des relais de l’influence d’Aeganon : Maekar, Laedor ou encore Jaehaeganon. C’était le premier groupe au Sénat et il comptait 35 membres.

68 contre. 47 pour.

Les opposants étaient d’ores et déjà en train de célébrer leur victoire et la défaite de ce dynaste qui s’imaginait réformer la République en sa faveur. Certains disaient que c’était une question de principe, on ne pouvait laisser gagner les vieilles familles. D’autres préféraient simplement garder la situation dans un statu quo qui leur garantissait le maximum d’influence. La décision finale reposait sur les religieux, sur lesquels les Vaekaron exerçaient une influence certaine. Cependant, les Maerion étaient aussi influents dans l’affaire car Arraxios, récemment assassiné, était leur chef de file. Il ne fallait que trois voix aux opposants pour empêcher le plan de Maegon et la nomination de Daera à ce poste de Tribun du Peuple. Ils ne furent pas trois, mais six. Le reste de la faction, largement convaincu par les temples auprès desquels les Vaekaron exerçaient une influence importante, avait voté pour. Ce n’était hélas pas suffisant.

74 contre. 66 pour.

Le vote n’avait pas abouti. Aucun commentaire ne fut émis, ni des Lumières, ni des autres Sénateurs. Le silence avait accueilli cette décision du Sénat valyrien. Il y avait dans l’air un certain contentement de la part des deux factions qui s’étaient opposées frontalement. Le reste de l’assemblée baignait dans une forme de consternation attendue. La réforme n’arriverait pas. L’alliance de l’ancienne faction rouge tenait bon, car personne n’avait essayé de la défaire. Leurs liens s’étaient visiblement raffermis avec ces accusations et les tentatives des autres factions de leur faire porter le chapeau de leurs errements. Le Polémarque entérina la décision des Sénateurs.

« 74 voix contre, 66 voix pour. Les contre l’emportent. La proposition du Sénateur Riahenor n’est pas adoptée ! Merci Sénateur, tu peux rejoindre ta loge. »

Il n’y avait pas de temps pour ergoter car le travail démocratique devait se poursuivre à grand train. Le polémarque annonça la suite.

« Honorables membres du Sénat, la prochaine oratrice à vous présenter une motion sera la Sénatrice Alynera Vaekaron ! Avance-toi et rejoins-nous au centre, Sénatrice. Valyria t’écoute ! »




HRP:
Daenerys Maerion
Daenerys Maerion
Dame de Castel Maerion

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Les Trois Coups Troisième séance du Sénat

Drīvo Perzo – Sénat & An 1068, fin mois 1

Partie du Castel familiale, Daenerys Maerion avait revêtu ses plus belles toilettes. Coiffée avec quelques perles dans les cheveux, elle portait surtout la fibule que lui avait offert la dynaste Alynera Vaekaron. La jeune femme n’avait pas choisi le bijou à la légère. Elle le savait, elle se rendait à une séance du sénat où cette dernière représenterait son oncle-époux. On disait Ragaenor en mauvaise santé et incapable de se rendre à Drivo. C’était pour cette raison que la Princesse devait reprendre son rôle de sénatrice et siéger parmi les autres sénateurs. Aux bras de son frère-époux, la dame marchait vers Drivo la tête haute. La Maerion regardait droit devant elle et adressait quelques sourire à des amis de la famille et alliés politique de son époux. Elle chercha du regard le Tergaryon mais ne le trouva pas à l’extérieur. Il devait être déjà à l’intérieur de la sainte institution qu’elle ne tarda pas à pénétrer elle aussi. La dame posa un regard admiratif sur la grande salle. C’était pour elle un honneur et une grande joie de se retrouver au cœur de l’institution politique de la République. Guidée par son époux, elle alla prendre place dans la loge sénatorial des Maerion. Non loin d’eux, d’autres nobles et finalement les pupilles de la jeune femme se posèrent sur quelques visages familiers. Elle retrouva évidemment les sénateurs Tergaryon en les personnes de Maegon et Maekar, mais aussi le jeune sénateur Laedor Arlaeron, frère-époux de celle qui était son amie aux yeux de tous, Voix d’Argent. Et le plus important, elle distingua parmi les dynastes présents le visage de sa mentor Alynera Vaekaron. La jeune femme lui devait beaucoup et ferait tout pour être digne de son enseignement.

Assise à côté de son époux, elle se redressa dans son siège lorsque le Polémarque commença à parler. Il y avait quelque chose de solennel dans sa voix, d’immuable aussi. Étrangement, même si elle faisait parti d’une des familles les plus anciennes de Valyria, Daenerys Maerion se sentait toute petite. Elle sen sentait si vulnérable parmi tous ces sénatrices et sénateurs. Ils avaient tant de pouvoir, bien plus tangible que ce qu’elle pourrait un jour avoir. Daenerys avait beau être une Maerion, elle touchait du doigts un mur invisible et comprenait désormais à quel point le jeu politique des alliances avait son importance. « Merci. » souffla discrètement la jeune femme à l’oreille de son époux alors que le premier sénateur, Maegon Riahenor se levait pour exposer sa proposition. Portant toute son attention sur ce dernier, elle l’écouta parler puis les autres sénateurs qui tantôt donnaient leur voix au sénateur, tantôt s’y opposaient avec plus ou moins de force. Silencieuse, elle regarda finalement son frère-époux se lever et exposer lui aussi des arguments virulent à l’égard du dynaste. Si la dame comprenait l’opposition de son époux, elle trouvait les mots choisis durs. « Ainsi voilà comment les sénateurs se parlent à Drivo ? Était-ce donc si obligé d’être aussi désagréable à son égard ? Des mots moins tranchant auraient peut-être pu être tout aussi efficace, tu ne crois pas ? » demanda Daenerys Maerion à son époux qui voulait apprendre le plus possible de cette séance si particulière.

Puis, vint le temps où une nouvelle proposition de loi devait être présentée. Celle de Maegon Riahenor avait été rejeté avec une courte avance. Daenerys était curieuse de voir ce que allait donner la prochaine. La prochaine, c’était Alynera Vaekaron qui allait la portée devant ses collègues et leurs invités. Touchée par les Quatorze de pouvoir voir sa mentor agir, elle lui offrit un discret mais sincère signe de tête en signe de soutien.

Alynera Vaekaron
Alynera Vaekaron
Mīsio Lentor

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Les Trois CoupsTroisième séance du Sénat


Seule dans sa loge, illustre sans royaume, perdue au milieu des puissants, Alynera s’était efforcée d’écouter chaque sénateur avec une précaution infinie. Aucune omission ne lui était permise, aucun fait dissimulé derrière la pompe rougêatre. 71 contre 64. Elle se savait, par deux fois, désavantagée et peu encline à gagner sa propre manche.



« Le Sénateur, mon oncle-époux, n’ayant pu se joindre à vous, je m’exprimerai exceptionnellement en son nom. Et quoique mon éloge profane vienne interrompre ses mystères sacrés, j’implore Tyraxès de ne permettre que mon intervention ternisse l’éclat des vertus que je célèbre. »



Comme la coutume le souhaitait, ses longues paupières féminine chastement baissées, elle salua respectueusement tour à tour les Cinq du Conseil. Cette réforme du Sénat c’est Ragaenor qui l’avait souhaitée. Le Misio Tembyr seul avait permit d’ouvrir la voie aux négociations politiques, d’entériner la voie du renouveau… Des mois plus tard, pourtant, de ces effusions de liesse partagées il ne demeurait pas grand chose. Un vague souvenir, tout au plus. Et, mis à part les Dynastes, le Seigneur Tergaryon, et Jaegaenaron Maerion peut-être, ils étaient tous revenus à leurs positions d’avant la crise civile. Bien entendu le Seigneur Bellarys brillait par sa motion cynique, teintée d’une audace démagogue quoique, en cela, elle lui ressemblait bien…



« Vénérables sénateurs ! »



Sa voix résonna sous la grande coupole de verre dans un écho assuré.


« Ne vous a-t-il pas semblé étrange, n’êtes-vous point interloqués, de ne pas voir la première armée garder Drivo Perzo en cette journée de réforme ? Suis-je donc la seule à me questionner de cette absence, sans état depuis huit cent quarante neuf ans ? Certes, d’aucuns diront que, ces derniers mois, la loi martiale nous a protégé de troubles assassins… Mais que dire, que dire, en un jour comme celui-ci, où, inexplicablement, elle nous prive de l’assurance pérenne de notre République ? Que font donc les garants de notre Institution ? Pourquoi moi, simple mère, citoyenne parmi toutes, ai-je le devoir de nous mettre en garde ? Quand vous tous, déjà, vous êtes exprimés… pourquoi doit-il me revenir de vous arracher à la séduction d’un siècle pervers ? »



D’un geste calme, les paumes croisées devant elle, les coudes le longs des cotes, elle fit un grand et lent demi cercle afin d’observer les loges. Après La Grande Marche, son influence s’était fortement accrue auprès des nobles. Ils voyaient en elle l’assurance d’une paix possible, conciliaire, entre les branches dynastiques et le reste de l’aristocratie. Pour autant, même de manière exceptionnelle, sa place n’était plus  — si elle ne l’avait jamais été — dans l’hémicycle. Elle-même détestait revenir dans le cœur de cette résonance funeste d’un testament pour lequel, deux ans auparavant, le Sénat avait bien failli se déchirer. 



« Rappelons-nous ces temps de division et de trouble où un schisme nouveau menaçait les fondements de notre Loi, où la magnanimité des Lumières, tranquille spectatrice des scandales qui se multipliaient, était impuissante face à la montée de trois couleurs fratricides. Alors que nous gémissions sur les maux de la République, Jaunes, Rouges, Bleus, nous vîmes les orages de pluie se former autour de nous avec la crainte qu’ils vinssent éclater sur nos têtes. Ah, rarement, l’ennemi avait percé aussi facilement nos remparts de lave ! Furtivement un assassin masqué au zèle impatient, inquiet, impétueux, de celui qui ne fait que troubler, renverser et détruire, a semé l’ivraie dans le champ du père de famille ! Loup ravisseur, il a profité de la dispersion des bergers pour s’élancer en notre bercail ; dans l’ombre, il mit ses efforts pour éloigner les moutons de leurs pasteurs légitimes et leur faire entendre des voix étrangères… Laisserons-nous donc son zèle éclater ? Laisserons-nous sa voix, plus forte que le tonnerre, faire vaciller les Flammes de notre Cité ? ! »



Sa voix marmoréenne, à l’accent janséniste, demeura en suspens un bref instant. Elle s’était exprimée avec le fiel du Grand Prêtre d’Arrax, dont elle était pétrie des pensées et des discours depuis de longs mois désormais. Nul doute que Ragaenor aurait eu un propos bien différent, lui qui était si patient, si imperturbable et si éloquent. Rarement son absence ne s’était fait autant sentir car, quoiqu’ils pouvaient partager des traits communs, elle ne possédait certainement pas son intelligence accablante. 



« Pardonnez ma franchise, et ma sincérité… Qu’il est difficile de conserver, dans un rang élevé, des sentiments d’humanité et de bienséance ! »



D’une main modeste, elle prit soin de réajuster sa palla sur son front. Elle n’avait pas bougé d’un iota, mais le monde était un théâtre constitué de règles simples. Ce geste, banal, anodin, discret, venait renforcer l’élévation de ses dernières paroles. 



« Il nous revient de nous assurer que, jamais, lui, ou autre fauteur néfaste, mette à sac notre Loi. Nous devons pouvoir sortir d’ici, ce jour, et dire à nos fils, mères, femmes, filles et clients "cela ne se passera plus." »



Sa main gauche montrait fermement les grandes portes, désormais closes, où, derrière, des milliers de Valyriens attendaient d’eux des décisions aussi incisives que décisives.



« Populistes. Civilistes. Militaristes. Religieux. Mercantilistes. Nous nous affrontons tous les uns contre les autres, quand nous devrions ré-unir nos forces comme le soir de La Grande Marche. Nous sommes en guerre. La main assassine de Lucerys Arlaeron est toujours tapis dans l’ombre. Et que dire de cette autre main, la même peut-être, ayant ordonné le retrait de notre protection ! D’aucuns dans la faction militariste ont tant d’emprise et de ramifications que personne n’a osé relever cette absence qui constitue, pourtant, un amendement suprême à notre droit. Sénateurs, du même élan fraternel, nous devons nous élever contre notre ennemi commun qui rôde encore. 

Les Dieux nous ont donné la charge de veiller sur cette terre, dont les fils des Fondateurs en ont la protection éternelle. Il y a sept lunes, vous avez confié aux Enfants des Dieux le rôle de Protecteurs de notre Institution. Aux côtés des Temples, Ils ont été les seuls à mettre un terme à l’hémorragie purulente qui amenuisait notre Cité. Aucune force ne leur a été nécessaire, ils n’ont eu besoin ni d’armes, ni de dragons pour maitriser le peuple et assurer ainsi la sauvegarde du Sénat d’un bain de sang fratricide. »



Ce jour-là, lorsqu’ils étaient parus même le Jentegon I Aegenka avait rangé ses glaives dans leurs fourreaux et le peuple les avait accueilli avec une ovation n’ayant de miroir que le  dernier Triomphe. Bien entendu, Alynera savait que l’armée avait été envoyée pour une raison légitime, tout comme Maegon Tergaryon n’avait jamais réellement menacé la foule du feu de son dragon. Cependant c’est ce qu’avait retenu, ou déformé pour mieux l’avantager, le peuple. Les Rouge s’amusaient depuis le début de la séance à déformer la situation à leur avantage, dissimulant leurs propres entorses derrière une majorité assurée, elle n’allait pas se priver d’user de leur propre stratagème.



« "Les caprices de la basse engeance." Ce sont les mots exacts, je crois, du Sénateur Maerion. Ces caprices, pour tant qu’ils en soient réellement, sont autant de vents contraires que nous ne pourrons jamais appréhender ou contrôler. Le peuple a l’humeur immuablement changeante pour tous… hormis trois familles. Si vous pensez réellement, comme vous le clamer dans vos discours, que les Dieux nous guident et que, par conséquent, il est de notre devoir de nous rapprocher d’Eux vous comprenez tout autant qu’il est nécessaire de créer un régime d’exception constitué par les chefs des familles fondatrices. »



Nous réformerons notre République, pour en refaire l’incarnation de son ambition première : une nation où tout citoyen est égal, une nation qui ne reconnaît comme supérieur que les dieux, une nation dont nous pourrons tous dire, au jour de notre mort, que nous l’avons servie non pour notre propre ambition, mais pour honorer nos pères et ceux qui l’ont fondées !, leur avait-il dit. Ils avaient acclamé. 


« Ceci n’est pas un retour de la Triarchie comme certains ont voulu, révoltement, le penser. Ceci est une proposition placée entre vos mains. La République, en cet état, a montré ses limites. Nos Lumières n’étaient pas en mesure de nous protéger contre une guerre civile. Elles n’étaient pas non plus en mesure de restreindre la volonté des démagogues. Et comment pourrions-nous les en blâmer quand, jamais auparavant, nous avions eu à subir une telle crise ? Nous avons pu entendre, plus tôt, le Sénateur Tergaryon prononcer, très justement, ces mots : "nos institutions sont notre force, parce qu’elles empêchent la volonté d’un seul comme le règne du nombre." Il avançait que nous discutions, trouvions des compromis, prenions en compte l’ensemble des intérêts de l’État… mais quand avons-nous fait ça lorsque les factions étaient trop occupées à se monter les unes contre les autres ? Quand avons-nous respecté cette sacralité démocratique lorsque nous étions prêts à mettre à sang la Cité toute entière ? Par quels moyens pouvons-nous nous assurer que nous serons capable d’agir différemment lorsqu’une prochaine déferlante viendra nous porter préjudice ? D’ordinaire, nous pourrions répondre, sans réfléchir, que le Jentegon I Aegenka nous protégera comme il l’a toujours fait… Mais où est-il ? !



Longtemps les Dynastes se sont tus. Mais, en tant de crise profonde, il leur revient, à eux Enfants des Dieux, qui portent la Destinée de cette Cité en leur sang-magie, d’assurer la protection de Valyria par la magie, le feu et la foi. Nous avons réussi à trouver un terrain d’entente : Lyseon, faction militariste ; Riahenor, faction civiliste ; Vaekaron, faction religieuse. Ce protectorat doit permettre d’apporter un soutien au Conseil des Cinq, de le renforcer afin de s’assurer que la démagogie ne puisse le soumettre à ses propre vœux. Le régime d’exception devra être voté au deux-tiers par le Sénat dès lors qu’un évènement majeur bouleverse et menace son fonctionnement. La durée du mandat est à voter ce jour, par vous, et devrait être renouvelable par vote majoritaire tant que la crise persiste. Les Fondateurs auraient un pouvoir égal à celui de Sylvio Õno. Ils arbitreront les décisions afin d’éviter tout nouveau débordement favorisant ainsi une alliance du Sénat, au Magister, aux Temples et au Peuple.
»



Ses paumes étaient devenues moites, mais elle les pressa un peu plus l’une contre l’autre. Elle ne nourrissait aucun attrait pour clamer de longs discours devant des centaines de personne. La grandeur antique de l’hémicycle même ne lui inspirait aucune confiance — peut-être parce qu’elle avait failli coûter la vie aux siens —, mais avait fait son devoir d’épouse. Des trois dynasties, les Vaekaron s’étaient le plus aisément adapter au changement. Ils ne nourrissaient pas un attrait dévorant pour le pouvoir autre que celui que donnait la connaissance parfaite du monde et de ses savoirs. Un court moment elle observa la coupole zénithale, confrontant la violine de ses yeux à la puissance de la lumière divine. Les agnostiques tentaient de lui faire perdre de sa superbe, mais l’ombre d’Aegarax n’était jamais loin… Elle mémorait qui avait offert l’Initiation magique aux quarante familles. Et ce qui avait été donné pourrait être repris : entendre ou taire cette réalité, le choix était leur. 



« Cet épuisement de notre système a également était souligné par un autre Sénateur. Le Seigneur Aeganon Bellarys. Il propose lui aussi un régime d’exception. Si tu l’acceptes, noble Polémarque, je crois qu’il serait bon que ses desseins soient présentés maintenant. »



Sa voix était neutre, cependant par desseins elle entendait bien mettre en garde le danger que représentait ladite motion. 



« Par le sort, les Dieux m’ont choisie pour vous présenter la deuxième motion de cette journée, mon souhait sincère est que l’assemblée puisse mesurer côte à côte ces propositions similaires quoiqu’aux volontés éminemment différentes. »



Cette proposition n’était pas une gentillesse insensée de sa part. Derrière son air résigné, elle attendait bien que les Militaristes, derrière le Bellarys, se gaussent ouvertement d’accabler sa proposition.



« Pour finir, Sénateurs, je vous demande, bien obligeamment, de prier pour le rapide rétablissement de mon oncle-époux. Je vous remercie. »



Parfois, quand tout était perdu, la salvation de le République même, il fallait savoir remettre quelques vengeances à plus tard. Le premier châtiment serait admonesté dès le lendemain, dans la plus grande intimité d’un monde feutré. Pour l’heure, elle retourna humblement à la loge qu’elle empruntait.


Résumé du post :
Daera Melgaris
Daera Melgaris
La Lumière du Peuple

Les Trois Coups
Troisième séance du Sénat

Daera n'était pas déçue du rejet de la proposition de Maegon, la plus grande légitimité qu'elle pouvait avoir, elle la tenait du Peuple qui lui avait donné le surnom de "Lumière". Cette nomination était bien plus importante à ses yeux que celle qu'elle aurait pu avoir du Sénat. Surtout, une partie d'elle appréciait de voir la mine faussement sereine qu'arborait le sénateur, il avait perdu la première bataille, mais elle n'était pas assez naïve pour croire qu'il pensait avoir perdu la guerre. Malgré tout, cela faisait un coup à son autorité et sa puissance, le Sénat était divisé le concernant, et même l'influence de sa famille n'avait pas pu lui faire avoir les quelques votes qui manquaient pour faire passer cette réforme. Elle jeta un regard discret à l'autre Maegon, celui qui avait fait un plaidoyer qui avait sûrement compté dans le vote de chacun et qui devait se réjouir de la défaite de son homonyme. C'est Alynera Vaekaron qui allait prendre la parole au nom de son époux, Daera avait hâte de voir ce qu'elle avait sous sa manche pour le Sénat.

Il était toujours intéressant de voir comment un événement était toujours interprété de manière différente selon les différents acteurs et témoins de celui-ci. C'était un phénomène récurrent dans l'Histoire, on pouvait lire deux chroniques d'une même époque et ne pas y voir les mêmes détails ou paroles selon les auteurs. La première leçon qu'on apprenait en politique était donc de falsifier l'Histoire, de devenir un fossoyeur de la vérité en la modelant selon ses besoins politiques. C'était différent néanmoins, de la voir être tordue devant ses yeux et devant un Sénat entier qui avait été présent durant la Grande Marche. Elle n'avait jamais discuté avec Alynera Vaekaron et pourtant en cet instant, elle ne pouvait pas les trouver plus différentes l'une de l'autre. Assise, elle pouvait voir comme chacun de ses gestes étaient là pour feindre la modestie ou rappeler la grandeur dans un spectacle qu'elle trouvait de mauvais goût. Daera jeta un regard autour d'elle et croisa certains qui étaient loin d'être dupes face au spectacle de la femme du sénateur. La proposition de la dynaste était similaire à celle de Bellarys qu'elle observait, les traits tendus. Pourtant à bien des égards, elles étaient aussi très différentes puisque sous la beauté d'Alynera se cachait en vérité un nid de serpents qui ne tient qu'à une chose ; étouffer la République.

« Dame Vaekaron c'est un sinistre constat que tu nous dresses de notre République. Ainsi, elle serait un bâtiment sur le point de s'écrouler à l'imminence d'une guerre à venir ?» Elle prit une pause dramatique et regarda vers le ciel avant de reposer les yeux sur l'assemblée 

« Je ne vois pas de guerre quand je regarde dans le ciel, je ne vois pas les maisons brûler, je n'entends pas les chants de guerre déchirer le silence solennel de cette Séance et je ne crois pas avoir vu en arrivant au Sénat, les corps des enfants de la République sur le parvis. Je ne nierais pas que la République a été ébranlée mais je me dois de rappeler à mes collègues que la République a tenue

Elle appuya sur ce dernier mot en observant l'assemblée, ne quittant jamais des yeux son audience.



« Ce serait trompeur de croire que les citoyens ont manifesté devant le Sénat pour acclamer quelques membres de familles illustres, ce serait oublié leur but premier ; demander des comptes à leur mère, la République. Dans la foule, ils ne scandaient pas les noms des Sénateurs mais bien qu'ils ne resteraient pas silencieux face à la tyrannie d'un. Leurs voix se déchiraient en criant les mots "démocratie" et "liberté". Ce serait pervertir le but de cette marche que de déclarer que celle-ci n'a été déclenchée que pour la gloire de certains qui se sont simplement servie de celle-ci pour leurs propres intérêts en oubliant que le Peuple n'oublie jamais l'Histoire. Le Sénat, je l'espère, non plus. »

Sa voix était claire et résonnait dans le bâtiment qui rendait ce discours encore plus important après tout il incarnait la République lui-même et comme elle, il était solide et ne céderait pas face à l'avarice de certains membres du Sénat.



« Je ne serais pas de ceux qui agitent les mots "guerre" et "destruction" dans une vaine tentative de pouvoir avoir plus de pouvoirs. Je ne serais pas de ceux qui feront vivre mes concitoyens dans la peur d'un conflit qui n'est même pas à notre porte. Je ne serais pas de ceux qui abusent de ces mots pour lentement nous diriger vers la tyranie et la fin de la démocratie car c'est ce qui risque d'arriver en donnant tant de pouvoirs à certains membres de notre Sénat ; pouvons-nous prendre le risque de voir disparaître la démocratie et par la même occasion le Sénat à chaque fois que quelqu'un agitera un drapeau dans le ciel en criant "guerre" ? Je ne suis pas prête à prendre ce risque. »

Elle se prit une légère pause avant de regarder la nièce-épouse du Sénateur Vaekaron et de regarder les Lumières, le Polémarque, l'Assemblée entière. Elle voulait que ses mots pèsent sur cette assemblée pour qu'ils se rendent compte du danger d'une telle proposition.

« Je vote contre cette proposition et prie pour la santé du Sénateur Vaekaron.»


Résumé du post :
Maegon Riahenor
Maegon Riahenor
Seigneur-Dragon

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Les Trois CoupsThe drumbeat. The drums are coming closer and closer.


Passé au front était une déveine, Maegon le savait bien. Malgré la fierté tirée d'être le premier au front, le dynaste connaissait parfaitement les risques des sections d'assaut. Les épaules serrées et le visage de marbre, il observa avec platitude la ronde des politiciens. La première à se lever fut une dynaste, la seconde en termes d'importance il allait de soi, mais qui supplanter pourtant les autres modestes familles aristocratiques. Maegon écouta d'une oreille distraite le discours d'Alynera. Il n'aimait pas cette enfant aussi divin soit son sang. Elle n'avait rien fait que de s'attirer les foudres des dieux pour se retrouver à cette place. Le lourd poids des responsabilités lui monterait aisément à la tête. Qui plus est, il était assuré de son soutien. Avec un sourire satisfait, Maegon allait pour la saluer poliment de la tête lorsque la langue infâme des femmes frappa. sous réserve d'une motion plus détaillée... L'idiotie des mots percuta le dynaste de plein fouet dont le visage s'assombrit.

Peste de cette femme ! De toutes les mégères, il comptait sur Alynera pour contrôler les caquètements propres à son sexe. La figure de cire toute bonne à exciter le sens des hommes et la jalousie de ses pairs aurait dû rester à se faire arracher les mamelles par ses bambins insipides. L'énormité de ses propos ne semblait même pas atteindre la belle idiote tandis qu'elle se rasseyait. Amer, Maegon effaça le sourire de son visage et se contenta de la regarder froidement. Sans surprise, ses adversaires se déchaîneraient sur les détails manquants à sa proposition. La sottise d'Alynera leur offrait une victoire sur un plateau d'or. Ainsi ce fut sans surprise que Maegon vit défiler son homonyme bien moins gracieux et ses soudards à la barre. Leurs arguments étaient bien pauvres. Bien triste République qui s'enfonçait dans les méandres de la médiocrité parce quelques bras armés confondant leur biceps à leur cervelle atrophiée. D'humeur sombre, le dynaste accueillit le résultat du vote avec un léger sourire satisfait. Malgré la défaite, la faveur du Sénat s'exprimait. L'issue n'était pas celle qu'il désirait, mais Maegon saurait user de sa défaite pour rebondir.

À peine assis, Maegon écouta avec attention la prise de parole de la sotte. Beaucoup se plaisaient à critiquer les emphases du dynaste et sa soif sans limites de pouvoir ou de vouloir rétablir le pouvoir de la Triarchie. Il avait trouvé en Alynera une maîtresse de la grandiloquence qui n'avait rien à envier au Grand Prêtre d'Arrax. Peut-être se retrouvaient-ils en tête non pas pour rendre hommage à Meleys, mais bel et bien à Tessarion. Qui sait quels sombres pamphlets s'étaient écrits dans leur esprit dérangé par la déesse. Pourtant, le dynaste soutiendrait bien évidemment Alynera. Tout du moins le nom qu'elle portait. Le Sénateur regarda longuement Daera avec un léger sourire. Tout chez la Sénatrice criait à la volonté de s'opposer aux dynastes. Leur alliance contre nature l'étonnait autant qu'il l'amusait. Lorsque l'écho de l'opposition de Daera s'éteignit sous le haut dôme du Sénat, Maegon se leva.
Et se tourna vers Maegon.

"Voilà de terribles paroles de la Sénatrice Vaekaron, une triste vérité vécue par chacun. De l'assassinat de Lucerys Arlaeron aux troubles causés par quelques têtes brûlées à l'autre bout du monde connu, voilà une image sanglante que laisse notre peuple. Parmi vous, j'entends des voix s'élever. Seriez-vous tous les envoyés de Balerion ? Votre souffle est aussi mortel que l'ennui. Ressassez tant qu'il vous plaît la mort et le sacrifice pour vous satisfaire du pouvoir. Quel désir avez-vous donc d'une patrie aussi belle que rebelle s'il n'en reste que des cendres ? Les médailles n'ont pas de revers et ceux qui nous nourrissent aujourd'hui ne sont pas tombés pour nous voir souiller leur mémoire. Les parangons de la vertu et de la justice ont saisi l'occasion de faire respecter l'ordre pour défaire les fils d'un crime odieux. Après une marche populaire, une révolution collégiale et six mois de tyrannie quel est donc le résultat ?"

Maegon se détourna de la faction militariste.

"Eh bien le meurtrier court toujours."

Cette fois ci, le dynaste se tourna vers Alynera qu'il salua enfin de la tête.

"La guerre et ses acteurs ne sont rien d'autre qu'un moyen de briller d'une flamme aussi courte qu'intense. À quoi bon ? Les bras armés ne cesseront jamais de venir jusqu'à nos portes, jusqu'à ce que les os de leurs ennemis se brisent sous leurs bras, nos champs soient aussi salés que leur verve et nos dragons écrasés. Pour des siècles de grandeur, trois mots doivent résonner : poïétique, action et résilience ! Par nos grandes oeuvres, nous montrerons au monde ce que nous sommes : les envoyés divins de notre Père, destinés à régner par la grandeur plutôt que la violence. La Sénatrice Vaekaron souligne avec délicatesse le factionnalisme causée par la mort de Lucerys. Et je vous le dis : du cercueil de l'homme qui a péri martyr, de ses idées sort une pensée d'union ! De ses lèvres glacées sort un cri d'espérance. Maintenir cette union, réaliser cette espérance, pour la patrie, pour la justice, pour la conscience humaine, n'est-ce pas le plus digne hommage que nous puissions lui rendre ?"

Maegon ne daigna pas regarder Daera tandis qu'il reprenait la parole après une longue pause :

"Sénatrice Melgaris, ta fougue m'étonne. Où est donc le calme dont tu faisais preuve sur le parvis pour ne pas respecter le souhait de ta collègue de laisser s'exprimer le Sénateur Bellarys ? Malgré tout, tu élèves des mots justes : un régime d'exception se doit d'être restreint. S'il est nécessaire, tout être fait pour empêcher un autocrate et ses épigones de faire marcher leurs hommes sur la ville. Aussi j'ai hâte d'entendre ta proposition Daera.

Maegon se tourna vers l'ensemble :

"La dynastie Riahenor soutient la proposition de la Sénatrice Vaekaron !"

Puis il retourna s'asseoir.




HRP:
Helenys Grafton
Helenys Grafton
Ambassadrice

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Les Trois Coups Troisième séance du Sénat

Drīvo Perzo – Sénat & An 1068, fin mois 1

Derrière chacune des interventions des sénateurs présents dans l’hémicycle, les alliances nouvelles et passées se montraient au grand jour. Si Taedar Qohraenos s’était exprimé dans une ligne qui se voulait plus respectueuse son ancienne faction, il avait quelque peu délaissé les consignes de vote transmise à demi-mot par Echya Odenys. Face à tant de projet, à tant de changement, l’homme ne voulait pas se sentir piéger dans un carcan que li avait confectionné pour lui la cheffe de la guilde des orfèvres ou même les Tergaryon et ceux proche de la Lumière de Sagesse Baelor Cellaeron. Ainsi se jouerait l’avenir des siens, la sauvegarde de la religion et l’intégrité du respect dû aux Grand Prêtres. Le sénateur Qorhaenos s’était exprimé en laissant un porte ouverte au sénateur Maegon Rihaenor. Il n’était pas aussi ostensiblement contre sa proposition mais ne voulait pas non plus donner un avis favorable sans garanti. D’autres furent plus virulents et si certains votèrent pour la proposition du dynaste, ce fut finalement le « Non » qui l’emporta d’une courte avance. Un peu soulagé, Taedar s’enfonça légèrement dans son siège en attendant que le prochain sénateur ou la prochaine sénatrice en l’occurrence ne s’avance pour exprimer et expliquer sa proposition.

Voir Alynera Vaekaron s’avancer fit immédiatement réagir le sénateur du Nord de la péninsule. Les Vaekaron avaient toujours été proches des temples et ces derniers temps, le Grand Prêtre d’Arrax semblait avoir leurs faveurs comme celles des autres familles des fondateurs. L’homme fronça légèrement les sourcils en opposition à cet état de fait. Que les familles dynastes puissent favoriser un temple plutôt qu’un autre le révulsait au plus haut point. Eux les dignes enfants des Quatorze ne devaient pas s’abaisser à un tel comportement. Malgré tout, les premières paroles de la dynaste sonnaient comme un espoir, brillaient comme une douce lueur dans les Ténèbres. Elle s’en remettait à Tyraxès et ce simple geste toucha en plein cœur le frère de la Grande Prêtresse. Ainsi, malgré les agissements du peuple lors de la Grande Marche, elle n’était pas totalement oubliée. Si l’homme ne montra pas tout de suite de signe d’approbation, il écouta avec un intérêt renouvelé les paroles de la misio lentor de Tour Vaekar. Elle n’avait certes pas la verve de son époux, mais elle avait son style, teinté de l’influence toujours plus grandissante du Grand Prêtre d’Arrax. Un bémol qui pourrait lui coûter cher, très cher.

Au fur et à mesure que la dynaste avançait ses arguments, si le ton dérangeait quelque peu le sénateur, le fond du discours trouvait un écho dans l’âme superstitieuse et profondément conservatrice du Qohraenos. Evidemment, certains pourraient dire que les Qohraenos pourraient bien se garder de tenir tel discours lorsque l’on pouvait voir le nombre important de mariage non incestueux dans leur famille et la place que tenait les femmes. Mais il fallait savoir remettre le temple au cœur du village et si les femmes de la famille pouvaient se targuer d’avoir une place privilégié, c’était à n’en pas douter parce qu’ils n’avaient tout simplement pas le choix. Avec une descendance appauvri en semence mâle, il fallait bien faire quelques concession et reconnaitre qu’elles étaient parfois tout à fait capable. Mais le chef de la famille voyait surtout le caractère tout à fait exceptionnelle de sa famille et ne voulait pas que cela devienne une généralisation. Et en parlant de tradition, la place des Dynasties en était une que les dragon vert avaient saccagé allègrement. Il était plus que temps effectivement de ramener sur le devant de la scène les familles dynastes et les temples.

Lorsque la Dame eut terminé son discours et qu’elle demanda à ce que l’on prie pour le bon rétablissement de son oncle-époux, le sénateur Qohraenos baissa respectueusement la tête. Evidemment, il prierait pour que Ragaenor Vaekaron se rétablisse rapidement autant pour la santé de l’homme, la stabilité de la dynastie Vaekaron et pour ne plus voir le doux visage d’Alynera sous la coupole du sénat. Puis il releva la tête et se prépara pour donner son expression de vote. Avant lui, d’autres allaient s’exprimer et parmi eux, le dynaste Maegon Riahenor, la sénatrice Daera Melgaris ou encore la sénatrice Rhaenys Haeron. La première à prendre la parole fut la sénatrice Daera Melgaris. Les propos qu’elle tint laissèrent l’homme perplexe. Comment pouvait-elle accuser la dynaste de parler de guerre alors que les premier à clamer l’existence d’une guerre se trouvaient être les principales opposants aux dynasties et en première ligne Maegon Tergaryon, Aegamon Bellarys dont la proposition semblait bien similaire à celle de l’époux d’Alynera et les autres militaristes. Puis vint Rhaenys Haeron qui vota contre la proposition tout comme Daera Melgaris d’ailleurs. Dès trois premiers sénateurs et sénatrices à prendre la parole, seul Maegon Rihaenor vota pour ce qui était assez attendu de sa part. Néanmoins, le Qohraenos apprécia les arguments du descendant de Riahenys.

« Ce n’est pas médire que de dire que la République fut au bord du gouffre. Elle a certes tenue, mais je ne crois que cela fut grâce à l’action du peuple qui te surnomme la « Lumière. » ni à tous ceux que tu semblais guider pour marcher sur le Sénat… sénatrice Daera Melgaris. » tonna d’une voix forte le sénateur Qohraenos après être arrivé à la loge dédié aux orateurs. « Si je me rappelle bien, ce fut ceux qui se voulaient pacifistes qui se montrèrent les plus cruels et violent à l’égard d’une femme qui se trouvait à leur côté par bonté et pour s’assurer de leur sécurité par sa simple présence parmi eux : la Grande Prêtresse de Tyraxès. » poursuivit l’homme dont la colère à l’encontre de celle qui n’avait pas bougé d’un pouce pour calmer la foule n’était toujours pas retombé. « Dois-je rappeler à tous, ici présents, que le calme n’est revenu que lorsque les familles dynastes se sont montrer ? Ce sont simplement les faits, que cela plaise ou déplaise. » ajouta l’homme d’une voix forte et posé. Oh Taedar ne vociférait pas contre la dame, elle n’était de toute façon pas assez digne, elle, la fille d’une femme de petite vertu dont l’âme arriviste et ambitieuse avait préféré le sang bâtard d’une Lumière de Sagesse à celui d’un honnête travailleur. « Ta mémoire semble te faire défaut, sénatrice Melgaris… si jeune… si vite après avoir entendu un discours, serait-ce là quelques signes d’une maladie cachée ? Devrions-nous prier les Quatorze pour que tu retrouves l’entièreté de tes capacités mentales ? » questionna l’homme d’un ton chafouin. L’homme leva un court instant les yeux vers le haut de la coupole de verre puis reposa ses prunelles sur la sénatrice. « Je ne crois pas avoir entendu la sénatrice Alynera dire que sa proposition donnerait plus de pouvoir aux familles dynastes. De mémoire, « Ils arbitreront les décisions afin d’éviter tout nouveau débordement favorisant ainsi une alliance du Sénat, au Magister, aux Temples et au Peuple. », voilà les dires de Dame Alynera, nul propos de tyrannie là-dedans.

Quant à la guerre, les premiers à parler d’une guerre prochaine, notamment contre Ghis, ne sont pas, me semble-t-il les dynastes mais bien d’autres sénateurs ici présents. »
L’homme se tourna alors vers le clan Tergaryon pour accompagner ses propos. Puis il porta toute son attention sur la dynaste Vaekaron. Car après tout, c’était bien elle qui devait avoir le plus son attention.

« Dame Alynera Vaekaron, épouse du sénateur Ragaenor Vaekaron, je gage que Tyraxès a béni tes propos. De plus, saches que les miens prient les Quatorze pour que Balerion s’éloigne de ton oncle-époux. » commença par dire le sénateur Qohraenos. « En ce qui concerne l’absence de la Jentegon I Aegenka, je doute que tu sois la seule à l’avoir noté. Je gage qu’un bon nombre d’entre nous l’a remarquée et je demande aux membres de l’armée ici présent une explication à ce sujet après cette séance. Comme l’a justement dénoncé Dame Alynera Vaekaron, il s’agit là d’un manquement grave à son devoir de protection de Drivo. » ajouta l’homme qui marquait un premier soutien aux propos tenus par celle qui avait occupé le siège sénatorial de la famille Vaekaron. « Comme tu l’as justement dis, longtemps les Dynastes, à l’égale des Quatorze se sont tus. Et nous voyons où cela peut nous mener. Je ne tiens pas à revivre ces jours de hautes tensions. Le désordre n’est pas bon pour Valyria que ce soit pour la quiétude de nos enfants que pour les finances. » finit par lâcher le sénateur Qohraenos en posant un regard appuyé sur les membres de la faction mercantiliste, Echya Odenys et les marchands présents dans l’assemblée.

« C’est pourquoi, afin de nous préserver à l’avenir d’un tel désastre et pour préserver l’économie entière de Valyria… sous le regard de Vermax la voyeuse et de Tyraxès la sage, je vote POUR la proposition que nous présente en ce jour Dame Alynera Vaekaron au nom de son époux le sénateur Ragaenor Vaekaron. » Sa voix et sa détermination claquèrent dans l’enceinte sacrée de Drivo. Puis l’homme inclina la tête en direction des Lumières et du Polémarque dans un premier temps puis en direction d’Alynera Vaekaron avant de rejoindre sa place.



Résumé:
Maegon Tergaryon
Maegon Tergaryon
Sénateur

Lorsque la proposition du dynaste fut rejetée, Maegon Tergaryon resta de marbre, assis confortablement dans sa loge, les bras croisés, il comptait et projetait. Il s’en était fallu de peu. Son regard se tourna lentement vers les religieux et plus particulièrement vers Jaehaegaron. Le maître des Tergaryon ne pouvait que se féliciter d’avoir vu dans le nouveau patriarche des Maerion le point de bascule, et ce, avant tout le monde. Pour autant, il pensait que le fils d’Arraxios entrainait avec lui plus de sénateurs. Manifestement, il avait sous-estimé l’influence des Vaekaron sur la bande des exaltés.

La mission chez les Targaryen n’avait pas, c’était le moins qu’on puisse dire, suscité de bonnes relations avec la galinacée farcie à l’encens qu’on appelait Alynera Vaekaron. Le sénateur militariste lui témoignait un ostensible mépris. Plus il fréquentait ces dynastes, plus il se sentait une filiation historique avec les Dragons Verts. Si leurs ancêtres étaient à moitié aussi pathétique que les exemplaires abâtardis qu’il avait en face de lui, Maegon Tergaryon se demandait alors comment la Triarchie avait pu durer aussi longtemps.

Plus on avançait, plus le jeune sénateur se disait que les Riahenor étaient en réalité, contrairement à ce qu’il avait cru au départ, les plus équilibrés de la bande. Obsédé par la vengeance et le sang, assurément, Maegon Riahenor l’était, mais dans son cas, on pouvait être sûr qu’il n’était pas complètement manipulé par le Grand Prêtre d’Arrax. Il était trop orgueilleux pour être manipulé par un autre que lui-même. Tandis que la Princesse Vaekaron suintait les élucubrations illuminées de ce fanatique.

D’ailleurs, une fois qu’elle eut fini de parler, Maegon leva mollement la main, faisant signe au Polémarque qu’il avait une objection d’ordre règlementaire. Il expliqua rapidement que la requête d’Alynera de faire s’exprimer Aeganon pour présenter sa motion en même temps que la sienne était irrecevable et contraire aux usages du Sénat. Le Polémarque lui donna raison, naturellement. Placidement, Maegon voyait bien là une manœuvre malhabile pour tenter de se gagner les faveurs des militaristes.

La surprise vint cependant du sénateur Qohraenos. Mais que racontait ce vieux fou ? Ne voyait-il pas que par la bouche d’Alynera, c’était la volonté de l’ennemi de la Grande prêtresse de Tyraxès qui s’exprimait ? Ne se souvenait-il pas que, bien loin des Dynastes, c’étaient Laedor, Maekar et lui-même qui avaient mis sa parente en sureté et que c’était Maegon qui avait bravé la foule contre Daera ? Ces Qohraenos avaient la mémoire bien courte. Pas Maegon.

Finalement, la seule qui faisait ce qu’on attendait d’elle, en plus du Riahenor, c’était Daera. Son discours parfaitement démagogique convenait très bien à son positionnement. Il ne fut d’accord qu’avec son vote final. Finalement, ce fut son tour, de nouveau il se leva, de nouveau, il se traina jusqu’au parterre. Il commença, d’un air blasé.

-Estimées Lumières de Sagesse, vénérable Polémarque, chers collègues sénateurs... Je dois vous avouer que je suis bien perplexe face à la proposition étrange de l’épouse du sénateur Vaekaron. J’ai beaucoup de mal à croire qu’un homme savant et dont le jugement est connu et respecté de toute la République ait pu te permettre, Alynera Vaekaron, de venir soumettre à nos suffrages de pareilles dispositions.

Il haussa les épaules, faisant un signe nonchalant de la main.

- Je n’ai cependant pas d’autre choix que de le constater.

Il reprit.

-Je dois dire aussi devant notre auguste assemblée, qu’il ne faudrait pas que certains se laissent abuser par une petite musique très désagréable. Les Lumières, inactives et impuissantes ? Six mois de tyrannie ? Le « peuple » calmé par les dynastes et les Temples ?

Il secoua la tête.

-De toute évidence, un quinzième Dieu vient de s’ajouter à notre puissant panthéon, car j’en vois beaucoup célébrer un rêve dont j’ignorais jusqu’ici l’existence. Ce qui, d’ailleurs, en conduit certain à se contredire en racontant des événements auxquels ils n’ont pas participé avec l’assurance d’un témoin de première main. Et une fois encore, au lieu de devoir parler sérieusement de réformes utiles pour sortir par le haut de la crise que nous avons vécu, nous voilà englués dans des diversions et des enfumages.

Un peu plus sèchement, il enchaina.

-Voilà donc que certains nous expliquent, au prétexte que les dynastes auraient fait une apparition remarquée et saluée par une foule illégalement réunie il faudrait leur accorder un role institutionnel. Mais quel est donc ce langage mes chers collègues ? Quelle est donc cette logique qui conduit à vouloir donner en temps de crise les pouvoirs à des gens au prétexte qu’un jour, ils ont été là au bon endroit au bon moment ? La République n’est pas un fruit mur qu’on ramasse pour sustenter ses envies de pouvoir. À quel titre les familles dynastes se verraient confier de telles prérogatives ? Alynea Vaekaron nous explique que la foule a l’humeur changeante mais pas pour son admiration vis à vis des dynasties. En d’autres termes, la foule est une bête qui peut mordre la main qui la nourri, sauf si c’est la main d’Alynera Vaekaron. Pourquoi ? Ne vous le demandez pas, chers collègues, c’est comme ça. Donnez-lui le pouvoir, et vous verrez bien après !

Il porta son regard vers la Vaekaron.

-Et qu’on ne vienne pas m’expliquer qu’il ne s’agit pas d’une tentative de rétablir la Triarchie. C’est exactement ce dont il s’agit, seulement, au lieu de le faire honnêtement, en nous regardant dans les yeux, Alynera Vaekaron le fait en entourant ses discours de bondieuseries, de démagogie et en avançant dissimulée par le paravent d’un humilité feinte. Alors que derrière, ce sont bien des menaces qu’elle jette à la face de cette assemblée, ni plus, ni moins. Oui, collègues, je n’emploie pas le mot vainement, je dis bien des menaces. « Donnez-nous le pouvoir ou bien le peuple sera mécontent. » Voilà en substance ce qui nous a été dit. Voilà comment on essaie ici de faire peur aux sénateurs. Voilà comment une véritable supercherie est en train de se jouer ici, avec des dynastes qui passent leur temps à nous expliquer qu’ils ont sauvé la République, alors même qu’ils tiennent dans leurs mains le poignard avec lequel ils ont l’intention de la planter dans son cœur, le Sénat. Et cela, mes chers collègues, c’est inacceptable !

Il se tourna vers la faction populiste.

-Collègues, la proposition mise en avant par Alynera Vaekaron n’a rien à voir avec celle soutenue par le Capitaine Général par intérim. Bien sûr, il faut prendre des dispositions pour assurer qu’en temps de grave crise, nos institutions soient protégées. Ce principe, non seulement je le soutiens, mais je l’ai même promu lorsque je proposais sur ces marches, là, devant, face à la foule, de déposer une motion grandement similaire à celle déposée par notre collègue Bellarys, je proposais d’ailleurs à Daera Melgaris de la cosigner. Elle a préféré, dans le moment, faire confiance aux promesses vaines d’apaisement des dynastes. Je suis bien aise de constater à son discours qu’elle est revenue de ses illusions et quoique nos désaccords persistent dans de nombreux domaines, nous voyons bien que, d’un bord à l’autre, les défenseurs de la République ont tous les mêmes instincts. Je suis glacé lorsque j’entends déjà dans ces rangs certains dire « allons, ce n’est qu’en temps de crise, ce n’est pas bien grave ».

Il éleva le ton.

-Pas bien grave ?! Pas bien grave de savoir quels gens tiendront les charges de diriger les valyriens lorsque les calamités les frappent ? Par les Dieux, s’il y a bien un moment où nous devons faire attention à qui nous confions le redoutable fardeau du gouvernement, c’est bien lorsque les choses vont mal ! Lorsque nous devons faire attention à protéger l’intégrité de nos institutions, c’est bien lorsque la tranquillité s’éteint et que les feux des épreuves s’allument ! Il n’y a pas de temps ou la nécessité de protéger la liberté est plus impérieuse que lorsque les menaces s’accumulent !

Il porta son attention sur Daera et leva la main vers elle.

-Vois-tu, collègue, c’est bien parce que, oui, je crois que le temps des épreuves n’est pas fini pour notre civilisation, que je refuse que nous fassions preuve de faiblesse en déléguant à des familles qui ont été déchues de leur pouvoir absolu par nos ancêtres parce qu’elles ont transformé un don divin supposé nous libérer en instrument d’oppression. Il est temps de rappeler quelques évidences républicaines aux familles dynastes : votre règne est fini depuis huit siècles. Personne ne doute de votre noblesse, personne ne doute de votre place ici, au Sénat ni du rôle historique joué par vos ascendants et c’est pour cela que, lors des cérémonies religieuses dévolues à Arrax, nous honorons la place particulière qu’Arrax a donné aux fondateurs et si quelqu’un, par un esprit de vouloir faire table rase du passé, voulait le remettre en cause, je défendrai alors notre Histoire. Mais, dans l’ordre politique, les dynastes ne sont en rien différentes des autres familles, ni même des autres sénateurs présents dans ces murs ! Et vous n’avez aucun titre à prétendre à arbitrer quoi que ce soit au prétexte que quelques personnes ont prié avec vous. Faudrait-il alors que moi je sois exclu du Sénat parce que j’ai été conspué par cette même foule à qui j’ai dit ses vérités ? On voit bien que cette logique est profondément absurde. Je refuse d’être complice d’une proposition opportuniste et démagogique qui prend un besoin légitime pour concentrer peu à peu le pouvoir dans des mains duquel le sceptre a été pris il y a bien longtemps, pour notre plus grand bonheur, ajouteré-je.

Il termina.

-Résolument, je vote contre la proposition.

Spoiler:
Valaena Cellaeron
Valaena Cellaeron
Sénatrice

Résumé du vote:
Jaehaegaron Maerion
Jaehaegaron Maerion
Sénateur

Les Trois CoupsTroisième séance du Sénat

Drīvo Perzo – An 1068, mois 1

Le sénateur avait prononcé un discours plus virulent que pertinent. Il le savait. Mais face à la menace que constituait la proposition de Riahenor et surtout celle que l’on appelait « la Lumière du Peuple », Daera Melgaris, Jaehaegaron avait le devoir de prévenir ses collègues sénateurs des risques encourus en soutenant une telle proposition. Le score final l’avait ravi, autant que l’idée d’avoir pu grappiller des voix au dynaste Riahenor était en soi en satisfaction.

Lorsqu’il remonta à la tribune, sa soeur-épouse l’interrogea sur la virulence de ce discours. Jaehaegaron apercevait à nouveau dans son regard ce qu’il avait perçu lors de la visite de Maegon Tergaryon au Castel. Pour les Valyriens du Sud, une femme aussi ambitieuse était une chose au moins original lorsqu’elle n’était pas jugée regretable. Tout au contraire, son frère-époux était assez fière de l’attitude de sa sœur. Même si elle l’avait sérieusement embarrassé lors de son rendez-vous avec Maegon, Daenerys était une alliée de poids, qui plus est sa sœur et les Dieux savent combien le désormais patriarche Maerion tient à la valeur de la famille. Après quelques instants, Jaehaegaron finit par répondre à sa soeur-épouse. Il trouvait la remarque amusante mais non sans intérêt !

« Des mots moins tranchants auraient sûrement étaient aussi efficace. Peut-être sur le moment, dans l’heure. Le dynaste Riahenor n’est certainement pas un ami, comme ne peut pas l’être Daera Melgaris » Il prononça son nom avec un certain mépris. « Regarde tous ces sénateurs. Nous étions au bord d’une grave crise et les voilà qu’ils se mettent à aduler cette arriviste qui se veut Tribun du Peuple, comme si être Lumière ne lui suffisait pas. La République a un grand intérêt à voir des gens de la sorte être écarté du pouvoir. C’est ce qui m’a motivé à parler aussi férocement. Bien que je ne ressente pas de haine personnelle envers le Dynaste, Melgaris représente un vrai danger ... Qu’en penses-tu ? », finit-il en la regardant.

Bientôt le cours de la séance reprit et ce fut au tour de la dynaste Alynera Vaekaeron de s’exprimer devant le Sénat. Il faut dire que même à l’heure de cette séance, le sénateur Maerion était encore divisé intérieurement sur le vote qu’il allait attribuer ou non à la proposition. Alynera n’était clairement pas une étrangère pour la famille. Pour Jaehaegaron, elle l’était encore. Son père et elle avaient entretenu une très bonne relation. Beaucoup de choses le poussait à ne pas la laisser au bord du chemin et à conserver l’alliance que feu son paternel s’était évertuer à tisser. Ainsi, le sénateur s’était décidé à voter successivement en faveur des propositions de la dynaste et du capitaine-général par intérim, Bellarys.

Lorsque la parole lui fut enfin attribué, Jaehaegaron se sentait comme marchant sur un fil suspendu au dessus du vide. Il fallait être agile et ne pas en dire en trop.

« Estimées Lumières, Vénérable Polémarque, Mes frères. Dame Alynera Vaekaron, permets-moi de présenter à nouveau toute ma sincère préoccupation quant à l’état de ton époux. La famille Maerion prie les Quatorze pour que Rageanor trouve la force de surpasser cette épreuve », commença le sénateur en adressant un signe de tête bienvenue à la dynaste. Visiblement oui, il marchait au dessus du vide.

« Je veux dire mon étonnement aux membres du Sénat quant aux propos que j’ai entendu à l’adresse de cette proposition. Revenante à la charge, la désormais et seulement Lumière du Peuple, là, il en signifia physiquement l’ironie, s’est esclaffée pour déclamer à quel point cette proposition était un danger pour la République. Je suis conscient qu’un tel sujet crispe autant mes frères et sœurs et crée des inquiétudes. Pour autant, je ne pense pas que nous devrions aller en profusion de propos que, j’en suis sûr, nous regrettons devant nos Dieux. L’intérêt de cette séance, et c’est le coeur même de la fonction de sénateur à mon sens, est de pouvoir étudier le plus clairement possible tous les aspects de la question, ce qu’une assemblée remuée en long et en large par une agitatrice n’aidera pas. » Décidément … Daera Melgaris lui faisait l’effet d’une épine plantée dans le pied !

« Vénérable Polémarque, j’aimerai apporter à la réflexion de notre auguste organe quelques éléments de réflexion. », reprit-il en adressant un regard à l’officier sénatorial. « Je n’ai pas été sourd et aveugle lorsque la Foule s’est levée, embrasée par des propos regrettables, et a fait marche vers le Sénat. Nous avons collectivement vécu un grand trouble et je pense que nous avons été chanceux lorsque les dynastes ont eux aussi marché pour apporter le calme et la tempérance dont nous avions besoin. Mes chers collègues, loin de moi d’affirmer l’idée que l’autorité dynastique est le salut de la République. Je suis néanmoins obligé de constater que leur concours a été d’un grand secours. Et dans le même temps, je dois le dire. Beaucoup, nous avons encore à apprendre. » Jaehaegaron venait de le dire, ce qu’il avait redouté d’exprimer devant le Sénat. Il aurait été fier si les Rouges avaient pu mettre un terme définitif aux humeurs de la Foule. Les dynastes ne les avaient pas aidé pour cela. Cependant, ils avaient réussi à calmer le jeu.

« De cette action, qui est un fait, à en déduire que la République a un intérêt à consacrer par une proclamation du Sénat un régime exceptionnel en la faveur des Dynastes, le chemin fut long pour un homme comme moi. Ce régime, par ailleurs, n’est pas comme certains pourraient l’affirmer, une tentative de restauration de la Triarchie. Je crois Valyria assez mature pour se passer de la suzeraineté perpétuelle d’une oligarchie ». Voilà qu’il s’approchait peu à peu de sa conclusion, ou plutôt du coeur de son propos. Toutes ces précautions lu semblait nécessaire afin de tempérer sa position.

« Dame Alynera Vaekaron le dit elle-même, d’une certaine manière, en apportant au Sénat et à ceux qui craignent la proclamation de cette proposition, des garanties certaines concernant la pérennité de notre institution et de notre modèle civilisateur. Il n’est pas question de conférer le pouvoir à un triumvirat. Non. Ce dont il est question, s’est de nous reprendre appui, au besoin, sur nos fondements et d’en tirer la sagesse nécessaire à notre victoire sur les crises intérieures. Ne pas nous laisser nous empourprer dans des jeux d’alliance qui au final, nous conduirait à la ruine. Chacun d’entre nous, j’en suis sûr, a eu à cet égard des gestes, des paroles ou des pensées regrettables, lesquelles accumulées nous ont conduit à cet ébranlement. Faisons un pas vers nos Dieux en admettant cela afin de gagner en humilité et par là en sagesse. Gardons cette humilité-ci. », dit-il en espérant émouvoir les sénateurs pour lesquels les Dieux et leur Loi avaient une importante sacrée.

« Avec toute cette humilité, les choses deviennent plus claires et apportent des brins de sagesse dans nos esprits, parfois trop agités. Longtemps, les Dynastes se sont tus. Peut-être que le silence laisse le soin aux Dieux d’apporter la sagesse et les autres dons de l’esprit nécessaire à l’apaisement d’un peuple en tension. En tout cas, il est évident que l’action de nos Aînés a eu un effet plus que bénéfique pour une nation sur le bord de l’hémorragie intérieure. Je pense qu’à l’heure où nous sommes et à l’occassion de cette séance, nous devons avoir pour principale préoccupation la sauvegarde de l’unité de notre République. C’est d’ailleurs pourquoi je me suis fortement opposé à la proposition de la faction civiliste. ». Le sénateur jeta un bref regard vers l’endroit où celle-ci siégeait avant de revenir à l’assemblée entière.

« Et c’est aussi pourquoi je regarde la proposition de Dame Vaekaron avait un grand intérêt. Je pense qu’il s’agit d’une ressource pour la République et non d’un nouveau danger caché. Nos lois sont justes et bonnes. Elles éloignent le plus possible de nous l’écueil de la corruption et du pouvoir personnel. En m’appuyant sur les éléments que je viens vous présenter aujourd’hui, j’en suis venu à la conclusion que je devais apporter mon soutien à cette proposition. De part les éléments que la Dynaste nous a fourni pour la préparation de notre travail et qu’elle a rappelé aujourd’hui. Le Sénat est toujours le maître du temps et de ce qu’il se passe au sein de la République. Le Sénat est préservé. Le Sénat, et les familles qui le composent, ne sont pas piétiné par cette proposition. Nos lois sont respectées. », dit-il finalement, laissant un léger silence derrière lui afin de sonder l’attitude de ses pairs.  

« Avec toute l’honnêteté à laquelle j’essaie au mieux de m’accrocher en ma qualité de sénateur, je ne pourrais conclure ma déjà très longue prise de parole, sans omettre le cas de la proposition du Sénateur Bellarys. » Voici ce que l’effet de marcher sur un fil lui faisait. Peut-être que la peur de se compromettre auprès d’alliés éventuels était au final une qualité. Le sénateur Maerion voulait faire naître au sein de cette séance un avis tout à lui, le plus indépendant possible tout en étant le plus favorable à la République. Il savait bien que tous étudiaient scrupuleusement les moindres faits et gestes de leurs collègues, tentant de sonder ce qu’il pouvait bien se passer dans leurs esprits, et jaugeant les alliances éventuelles tout comme la qualité de celles que ces derniers avaient contracté. « Laquelle a été introduite comme relativement similaire à celle de Dame Vaekaron. Je suis relativement de cet avis et il est vrai qu’il me sera plus naturel d’apporter mon soutient à l’adoption du régime consistorial. Pour les similarités que ces deux propositions présentes et par le chemin que les Dieux m’ont fait prendre, je me montre solennellement en faveur de ces dernières car elles constituent à mon sens deux ressources dont nous devons prendre garde de ne pas nous en éloigner. Je remercie mes frères et sœurs pour leur écoute attentive. » finit-il enfin par conclure en saluant d’un signe de tête le polémarque du Sénat.




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